Corps fini - Définition

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Introduction

Joseph Wedderburn démontre la dernière conjecture sur les corps finis en 1905

En mathématiques et plus précisément en algèbre, un corps fini est un corps (commutatif) qui est par ailleurs fini. À isomorphisme près, un corps fini est entièrement déterminé par son cardinal qui est toujours de la forme pn, une puissance d'un nombre premier. Ce nombre premier n'est autre que sa caractéristique et le corps se présente comme l'unique extension du corps premier Z/pZ de dimension n.

Les applications sont essentiellement la théorie algébrique des nombres où les corps finis apparaissent comme une structure essentielle à la géométrie arithmétique. Cette branche a permis, entre autres, de démontrer le grand théorème de Fermat. Les corps finis sont fréquemment utilisés en cryptographie ou en théorie des codes, par exemple, pour déterminer des codes correcteurs efficaces.

Remarque sur la terminologie : la convention la plus usitée en France, même si elle n'est pas générale, utilise le mot « corps » que la loi de multiplication soit commutative ou non, ce qui oblige à préciser si le corps est commutatif on non. C'est celle utilisée dans les quatre références de l'article. Elle diffère de la convention courante en anglais où « field » sous-entend déjà la commutativité. Dans le cas des corps finis, la convention est en fait de peu d'importance car, d'après le théorème de Wedderburn, tout corps fini est commutatif. Ce résultat peut se démontrer à l'aide des polynômes cyclotomiques.

Histoire

Théorie

Ferdinand Georg Frobenius

La théorie générale des corps apparaît initialement durant la seconde moitié du XIXe siècle. Richard Dedekind invente le terme allemand de Körper, terme encore utilisé aujourd'hui, dont la traduction française est corps. Une première définition est l'œuvre de Heinrich Weber . La définition axiomatique moderne est due à Ernst Steinitz et date de 1910.

Les travaux de Frobenius marquent le début d'une utilisation des corps finis non premiers. Ils apparaissent nécessaires pour la résolution de questions sur la théorie des représentations d'un groupe fini. L'endomorphisme de Frobenius permet d'appliquer la théorie de Galois à ces structures. La théorie se montre redoutablement efficace, dans le cas commutatif. L'existence, le cardinal et la structure des corps finis sont rapidement déterminés. Pour cette raison, deux termes deviennent synonymes, corps de Galois et corps fini.

L'étude systématique des corps finis commence au début du XXe siècle, avec les travaux de L. E. Dickson puis de Joseph Wedderburn . Dickson publie la première classification des corps finis commutatifs. La structure de l'anneau des polynômes associé y est explicitée. La question du cas non commutatif est alors l'objet d'une conjecture: il n'existe pas de corps fini non commutatif. Wedderburn, séjourne à l'Université de Chicago en 1904 et travaille en étroite collaboration avec Dickson. À son retour, l'année suivante, il démontre la conjecture qui devient un théorème, nommé en son honneur.

Depuis cette époque, la théorie proprement dite ne comporte plus de problème ouvert. En revanche, les applications, tant théoriques que pratiques, abondent durant tout le XXe siècle.

Applications théoriques

Les corps finis sont, en particulier, utilisés en arithmétique, au fondement par exemple de l'arithmétique modulaire. Elle a permis à Gauss de démontrer la loi de réciprocité quadratique. La structure de corps intervient notamment dans le résolution d'équations diophantiennes (voir section Applications). Le petit théorème de Fermat est un exemple archétypal.

Artin utilise le fait qu'un contexte naturel des lois de réciprocité est celui des corps finis. C'est l'un des outils qui lui permettent de résoudre le neuvième problème de Hilbert. Il initie l'analyse de l'équivalent de la fonction zêta de Riemann sur les corps finis. La géométrie arithmétique se généralise sur des structures finies. Cette approche est particulièrement active durant la seconde moitié du XXe siècle. André Weil généralise la démarche aux courbes algébriques et Pierre Deligne aux variétés algébriques. Les conjectures de Weil sur les variétés sur des corps finis, énoncées en 1940 par André Weil, font partie des problèmes importants de cette époque. Démontrées en 1974, elles ouvrent la voie au théorème de Taniyama-Shimura démontré par Andrew Wiles et ayant pour conséquence le grand théorème de Fermat, souvent cité dans les articles de vulgarisation.

Applications pratiques

Voyager 2 utilise le code Reed-Solomon fondé sur la théorie des corps finis pour communiquer.

Après la Seconde Guerre mondiale et pour les besoins de la société, Claude Shannon formalise la théorie de l'information comme une branche des mathématiques, posant les problématiques de la sécurité et de la fiabilité.

La cryptologie s'appuie sur la possibilité de générer rapidement de grands nombres premiers. La confidentialité d'un message est assurée par notre incapacité actuelle de casser des entiers, c'est-à-dire d'effectuer un algorithme permettant de décomposer un nombre en facteurs premiers en un temps raisonnable. Une recherche active cherche à créer de nouveaux algorithmes allant en ce sens. Ainsi, Michael Rabin publie un test de primalité se fondant sur les propriétés du groupe multiplicatif des corps premiers.

La fiabilité traite de la capacité à transmettre sans erreur un message malgré des altérations dans la communication, elle est traitée par la théorie des codes correcteurs. En 1950, Richard Hamming travaille pour les laboratoires Bell avec Shannon sur ce sujet. Il utilise des espaces vectoriels de dimension finie sur des corps finis pour formaliser un cadre opérationnel à la théorie et trouver les premiers exemples de codes correcteurs optimaux. Cette approche donne naissance à la théorie des codes linéaires.

En 1960, deux mathématiciens R. C. Bose, D. K. Ray-Chaudhuri montrent que des idéaux de l'anneau des polynômes sur les corps finis de caractéristique deux sont particulièrement adaptés. La théorie est généralisée par le mathématicien A. Hocquenghem et donne naissance à la famille de codes BCH. Deux autres fondateurs de la théorie, I. Reed et G. Solomon enrichissent la méthode et créent des codes à même de résister à de grosses altérations, les codes de Reed-Solomon. Les applications les plus connues sont probablement le système de communication de certaines sondes de la NASA comme Voyager ou les disques compacts. Durant les années 1970 les résultats d'arithmétique avancés sur les courbes elliptiques des corps finis, trouvent leur application avec, par exemple, les codes de Goppa.

La théorie des codes correcteurs est maintenant considérée comme une branche de celle des corps finis.

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