Conjecture de géométrisation - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Introduction

En mathématiques, et plus précisément en géométrie, la conjecture de géométrisation de Thurston affirme que les variétés compactes de dimension 3 peuvent être décomposées en sous-variétés admettant l'une des huit structures géométriques appelées géométries de Thurston. Formulée par William Thurston en 1976, cette conjecture fut démontrée par Grigori Perelman en 2003.

La conjecture

On dit qu'une variété est fermée si elle est compacte et sans bord, et qu'elle est indécomposable si elle n'est pas somme connexe de variétés qui ne sont pas des sphères. D'après le théorème de décomposition de Milnor, toute variété fermée orientable de dimension 3 possède une décomposition unique en somme connexe de variétés indécomposables (cette décomposition existe encore, mais n'est plus toujours unique dans le cas de variétés non-orientables). Ceci ramène essentiellement l'étude des variétés de dimension 3 aux variétés irréductibles.

Les surfaces (ou plus précisément les variétés riemanniennes de dimension 2, c'est-à-dire les variétés de dimension 2 possédant une structure métrique) qui sont compactes et connexes peuvent être uniformisées, c'est-à-dire mises en bijection conforme avec l'une des trois surfaces, correspondant aux trois "géométries de référence", que sont la sphère (pour la géométrie sphérique), le plan (pour la géométrie euclidienne) et la pseudo-sphère correspondant à la géométrie hyperbolique : c'est le théorème d'uniformisation de Poincaré (qu'on énonce souvent pour le cas équivalent des surfaces de Riemann). La conjecture de géométrisation, formulée par William Thurston en 1976, et démontrée par Grigori Perelman en 2003, affirme que, de manière analogue :

Conjecture de géométrisation — Toute variété fermée orientable irréductible de dimension 3 peut être découpée selon des tores, de telle sorte que l'intérieur de chaque sous-variété ainsi obtenue soit géométrisable, avec un volume fini.

On remarque que l'énoncé de la conjecture est plus complexe que son analogue 2-dimensionnel, car dans ce dernier cas, il est possible de "géométriser" globalement la surface. La signification technique de l'adjectif géométrisable, ainsi que la liste des huit géométries possibles, seront détaillées dans la section suivante.

Un énoncé analogue peut être donné dans le cas de variétés non orientables, mais le recollement doit alors se faire selon d'autres surfaces (le plan projectif et la bouteille de Klein), et des difficultés techniques supplémentaires apparaissent, aussi on préfère généralement passer par le revêtement à deux feuillets de la variété, lequel est toujours orientable.

Cette conjecture en implique plusieurs autres, la plus célèbre étant la conjecture de Poincaré ; celles-ci sont donc désormais démontrées.

Unicité

Une variété peut avoir de nombreuses structures géométriques du même type, mais distinctes, par exemple une surface de genre 2 au moins possède un continuum de métriques hyperboliques toutes différentes. Cependant, une variété fermée de dimension 3 ne peut avoir au maximum qu'un des 8 types précédents de structure géométrique (mais des variétés non compactes de volume fini peuvent parfois avoir des structures géométriques de plusieurs types différents). Plus précisément, si M est une variété ayant une structure géométrique de volume fini, alors le type de cette structure géométrique est presque déterminé par son groupe fondamental π1(M) selon les règles suivantes :

  • Si π1(M) est fini, la structure géométrique sur M est sphérique, et M est compacte.
  • Si π1(M) est virtuellement cyclique, mais non fini, la structure géométrique sur M est S2×R, et M est compacte.
  • Si π1(M) est virtuellement abélien, mais non virtuellement cyclique, la structure géométrique sur M est euclidienne, et M est compacte.
  • Si π1(M) est virtuellement nilpotent, mais non virtuellement abélien, la structure géométrique sur M est la géométrie Nil, et M est compacte.
  • Si π1(M) est virtuellement résoluble, mais non virtuellement nilpotent, la structure géométrique sur M est la géométrie Sol, et M est compacte.
  • Si π1(M) possède un sous-groupe normal infini cyclique, mais n'est pas virtuellement résoluble, la structure géométrique sur M est soit H2×R, soit le revêtement universel de SL2(R). M peut être compacte ou non compacte. Si M est compacte, les deux cas peuvent être distingués selon que π1(M) possède ou non un sous-groupe d'indice fini qui se décompose comme un produit semi-direct du sous groupe cyclique normal et d'un autre sous-groupe. Si la variété n'est pas compacte, le groupe fondamental ne permet pas de distinguer les deux géométries, et il y a des exemples (tels que le complémentaire du nœud de trèfle) de variétés admettant une structure géométrique de volume fini des deux types.
  • Si π1(M) ne possède pas de sous-groupe normal infini cyclique et n'est pas virtuellement résoluble, la structure géométrique sur M est hyperbolique, et M peut être compacte ou non compacte.

Des variétés de volume infini peuvent posséder de nombreuses structures géométriques : ainsi, R3 peut être muni de six des huit structures géométriques précédentes. De plus, il existe une infinité d'autres structures géométriques n'ayant pas de modèles compacts ; c'est par exemple le cas de la géométrie de presque tous les groupes de Lie tridimensionnels non unimodulaires.

Par ailleurs, il peut exister plusieurs décomposition de la même variété fermée en morceaux géométrisables, même en éliminant les sommes connexes "triviales" obtenues en ajoutant une 3-sphère. Ainsi :

  • La somme connexe de deux espaces projectifs de dimension 3 a une géométrie de type S2×R, et est aussi la somme connexe de deux variétés de géométrie sphérique.
  • Le produit d'une surface de courbure négative et d'un cercle est géométrisable, mais peut aussi être coupée le long de tores en morceaux plus petits , eux aussi géométrisables ; il y a beaucoup d'exemples analogues parmi les fibrés de Seifert.

Bien qu'il soit possible de définir pour toute variété une décomposition "canonique" en morceaux géométrisables, par exemple en la décomposant d'abord en somme de variétés indécomposables, puis en découpant ces dernières en utilisant le nombre minimum de tores, cette décomposition n'est pas nécessairement celle qui serait produite par le flot de Ricci ; en fait, on peut obtenir ainsi de nombreux découpages non équivalents, en fonction du choix initial de la métrique.

Page générée en 0.045 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales | Partenaire: HD-Numérique
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise