Vraquier - Définition

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Histoire

Les premiers navires de charge transportaient de nombreuses marchandises, mais peu étaient spécialisés. Le premier vapeur à être considéré comme un vraquier semble être le John Bowes de 1852 ; c'est surtout son utilisation combinée d'une coque métallique, d'une propulsion à la vapeur et d'un système de ballasts remplis d'eau de mer et non de sacs de sable qui a permis à ce navire de s'imposer sur le marché du charbon britannique. Le premier vraquier à propulsion Diesel serait apparu en 1911.

Avant la Seconde Guerre mondiale, la demande pour les produits ainsi transportés était faible, de l'ordre de 25 millions de tonnes pour les minerais métalliques, transportés le plus souvent en tramping, le long des côtes. Toutefois, deux caractéristiques des vraquiers modernes étaient déjà présentes : le double fond adopté en 1890, et la structure triangulaire pour le coin supérieur des cales introduit en 1905. On peut citer le quatre-mâts Pamir, célèbre transporteur de blé, de nitrate et d'orge durant la première moitié du XXe siècle.

Au début des années 1950, le commerce du vrac se développe et les nations industrielles (Europe de l'Ouest, États-Unis, Japon) créent des navires spécialisés. Leur taille augmente sensiblement au cours des années car, comme pour les pétroliers, les vraquiers procurent des économie d'échelle : l'augmentation de la quantité de marchandises transportées compense largement le surcoût de production et d'exploitation, d'autant plus que la vitesse n'est pas un facteur dominant.

Depuis les années 1960, leur allure générale n'a pas changé : simple coque à double fond, citernes en trémie, château et machines à l'arrière. La taille moyenne a continué d'augmenter, malgré la crise pétrolière des années 1970. La taille maximale semble s'être stabilisée autour de 250 000 tonnes, malgré quelques extrêmes à 330 000 tonnes. Le plus grand vraquier jamais construit, et naviguant toujours, est le Berge Stahl de 364 000 tonnes.

En 1980, le naufrage du MV Derbyshire donna lieu à une enquête qui dura près de vingt ans, ainsi qu'à une enquête portant sur les trop nombreux naufrages : environ quinze chaque année durant les années 1990. Ces rapports ont mené à de nombreux changements dans les normes de sécurité et d'inspection de ces navires. Depuis décembre 2005, la double coque est obligatoire sur les plus grands (voir aussi plus bas).

Architecture

Exemples de plans architecturaux de vraquiers
Cargos en vrac typiques,
du plus lourd au plus léger
Cargaison Remplissage
m³ / tonne
Masse volumique
tonne / m³
Minerai de fer 0,34 - 0,42 3 - 2,42
Bauxite 0,79 - 0,99 1,29 - 1,33
Phosphate 0,91 - 0,96 1,12 - 1,06
Charbon 1,2 - 1,36 0,85 - 0,75
Grains (lourds) 1,2 - 1,42 0,85 - 0,72
Grains (légers) 1,56 - 1,7 0,65 - 0,6
General 0,69 - 0,82 1,47 - 1,24

La conception d'un vraquier dépend largement de la cargaison qu'il est appelé à transporter, et en particulier de la masse volumique de celle-ci (voir tableau ci-contre) : le poids sera un facteur décisif pour un minéralier, qui devra aussi être renforcé, alors qu'un transporteur de charbon sera limité d'abord par le volume disponible.

Pour un tonnage donné, le second facteur influençant les dimensions est la taille des ports, qui limitent le tirant d'eau et la longueur. Les canaux (comme le canal de Panama) limitent avant tout la largeur. D'une manière générale, le ratio (longueur/largeur) se situe entre 5 et 7, pour une moyenne vers 6,2 ; le ratio longueur/creux sera compris entre entre 11 et 12.

Forme de coque et machinerie

Les vraquiers étant relativement lents, leur coque a souvent un grand coefficient de bloc, avec une coupe au maître de forme rectangulaire. Afin de faciliter la construction, la majeure partie de la coque n'a qu'une simple courbure. Un bulbe d'étrave, souvent ramassé, réduit la résistance de vague, mais les plus gros vraquiers ont généralement une simple étrave verticale. Le poids à vide se situe entre 20 % (Handymax) et 12 % (Capesize) du port en lourd.

La salle des machines est habituellement située à l'arrière, sous le château, et au-dessus des réservoirs de fuel pour limiter la longueur des tuyauteries. Les grands vraquiers (à partir de la taille Handymax) possèdent un moteur Diesel deux temps entraînant directement une hélice unique. Un alternateur est couplé directement à l'arbre d'hélice, et un générateur auxiliaire est utilisé au port. Sur les plus petits navires, un ou deux Diesel quatre temps sont utilisés, couplés à l'arbre d'hélice par une boîte de vitesses ; ils incluent aussi un propulseur d'étrave, quasiment inutile sur les plus gros navires. La vitesse moyenne des Panamax et Capesize est de l'ordre de 14,5 nœuds, et la vitesse de rotation de l'hélice est peu élevée, vers 90 tours par minute.

Vers la fin des années 1970 et le début des années 1980, la propulsion au charbon a été considérée comme une alternative viable dans une période de hausse de prix du pétrole. La compagnie Australian New Lines avait ainsi fait construire le River Boyne de 74 700 tonnes, d'une puissance de 19 000 chevaux, propulsé à la vapeur et utilisant le charbon comme combustible. L'avantage financier est clair pour les transporteurs de bauxite et produits similaires ; cependant, le faible rendement de ces moteurs, les difficultés de maintenance dues à l'encrassement important et les coûts d'installation élevés condamnèrent cette innovation.

Panneaux de cale

Vue des panneaux de cale coulissants du Zaira

Les panneaux de cale doivent être aussi grands que possible pour permettre un déchargement aisé de la cargaison ; en revanche, de grandes ouvertures dans le pont induisent des contraintes supplémentaires en flexion, et nécessitent des renforts, donc un surpoids. En général, les écoutilles font entre 45 % et 60 % de la largeur du pont et 57 % à 67 % de la longueur des cales. La plupart des cales s'ouvrent simplement en basculant vers l'avant et l'arrière, ou en glissant latéralement. Leur étanchéité est un point de première importance, car il suffit d'une inondation dans la cale avant suite à un panneau défectueux pour que l'ensemble du navire sombre. Le principal fabricant de panneaux est MacGregor.

Depuis le rapport ayant suivi l'accident du MV Derbyshire, la réglementation concernant les panneaux de cale a évolué : la conférence Load Lines 66 imposait une charge de 1,74 t/m² due à l'eau de mer et un échantillonnage minimal de 6 mm pour le dessus des panneaux. L'IACS introduisit ensuite l’Unified Requirement S21 (URS21) en 1998, où la pression due à l'eau de mer est une fonction entre autres du franc-bord et de la vitesse, spécialement pour les panneaux situés sur le quart avant du navire.

Structure de la coque

Le Ziemia Gornoslaska disposant de panneaux basculants

La coupe au maître d'un vraquier est typique : des ballasts sont arrangés dans le double fond et dans les coins inférieurs et supérieurs des cales, ces coins étant renforcés. Leur angle est fonction du type de cargo : il sert à empêcher la cargaison de se déplacer sur le côté sous l'effet des mouvements en mer. Un tel mouvement peut sérieusement compromettre la stabilité du navire. La hauteur du double fond doit être suffisante pour laisser passer les tuyauteries et les câbles, ainsi que le passage des marins pour la maintenance et l'inspection.

La coque est en acier, habituellement en acier doux bien que certains constructeurs aient privilégié l'acier à haute résistance récemment afin de réduire le poids à vide. En revanche, l'utilisation intense d'acier à haute résistance pour les renforts longitudinaux et transversaux peut réduire la rigidité de la coque et la marge de sécurité par rapport à la corrosion. L'acier forgé est utilisé pour les pièces telles que la mèche de gouvernail ou le support d'arbre d'hélice. Les cloisons transversales sont en tôles ondulées, renforcées à leur pied et aux différentes liaisons.

La société de classification Det Norske Veritas a proposé d'utiliser un sandwich béton / acier, en utilisant un béton léger de 900 kg/m³ renforcé avec du verre recyclé. L'avantage est d'avoir le bénéfice d'une double coque mais avec une épaisseur réduite et une plus grande résistance à la compression et la quasi-élimination de la corrosion, grand problème sur les vraquiers. En revanche, les flancs ne sont plus disponibles pour les ballasts, ce qui peut ralentir les opérations portuaires. Aucun navire n'a été construit de cette façon puisque l'OMI impose pour l'instant des épaisseurs minimales de double coque.

Échantillonnages

Illustration des conditions difficiles auxquelles peut être soumis le navire

Les échantillonnages sont calculés d'après les conditions extrêmes que subira le navire dans sa vie :

  • voyage sur ballast ;
  • voyage à pleine charge, cargaison homogène ;
  • chargement de minerai, ou chargement alterné (une cale vide alternant avec une cale pleine) ;
  • chargement et déchargement au port, et cas où les cales ne sont chargées qu'à l'avant ou l'arrière du navire ;
  • cas de surenfoncement temporaire, par exemple pour passer sous un pont.

Le principal facteur gouvernant la structure est la résistance longitudinale, mise à mal par la grande longueur. Récemment, les calculs de structure informatisés se sont répandus, en utilisant notamment des méthodes par éléments finis.

Les principaux endroits où les vraquiers subissent des contraintes, et donc où la structure doit être spécialement étudiée, sont :

  • le fond des cales, à l'impact (lors de la chute du début du chargement) comme à la pression (à la fin du chargement) ;
  • les panneaux de cales et le pont principal en général, travaillant aussi bien en extension qu'en compression ;
  • le pied et le sommet des cloisons entre les cales, ainsi que les cloisons elles-mêmes lorsqu'une seule cale est chargée ;
  • le pied des citernes, en particulier les angles.

Pour les longs vraquiers des Grands Lacs s'ajoute le problème de résonance entre la coque et les vagues (springing), qui entraîne des fractures de fatigue.

Depuis le 1er avril 2006, les Common Structral Rules de l'IACS (International Association of Classification Societies) sont entrées en vigueur. Elles s'appliquent aux vraquiers de plus de 90 m, et imposent un échantillonnage net (après corrosion), la prise en compte des conditions de l'Atlantique Nord et les contraintes dynamiques du chargement. Elles imposent aussi des marges pour la corrosion allant de 0,5 à 0,9 mm

Double coque

La double coque s'est répandue rapidement dans les dix dernières années, sans pour autant devenir le standard (à l'opposé des pétroliers où elle est imposée depuis plus longtemps). Elle consiste essentiellement à ajouter une épaisseur au bordé, puisque le fond est déjà double sur tous les navires. Un avantage de la double coque est de permettre de placer tous les éléments structurels à l'intérieur des flancs et non pas dans les cales directement, ce qui permet d'augmenter l'espace de stockage et de réduire le temps de nettoyage (l'amélioration est estimée à 10 % pour le charbon). L'accès aux cales est aussi facilité et la capacité de ballastage est agrandie, ce qui est utile pour le transport de marchandises légères.

Une conception hybride est appelée Hy-Con, où seules les cales avant et arrière sont à double coque, le reste n'ayant qu'une simple coque (mais toujours un double fond). La masse de coque reste ainsi minimale tout en assurant une solidité optimale aux endroits sensibles. Cette technique a été appliquée notamment par le chantier japonais Oshima sur des Handymax.

L'utilité de la double coque est toutefois remise en cause, notamment car la décision de promouvoir les doubles coques serait essentiellement mue par des motivations commerciales et non architecturales ; dans certains cas, les parois intérieures pourraient bénéficier d'un échantillonnage moindre, augmentant potentiellement les problèmes de corrosion. L'inspection, par exemple pour surveiller la corrosion, est aussi moins facile. Malgré ces oppositions, l'obligation d'avoir une double coque est entrée en vigueur fin 2005 pour les Panamax et les Capesize.

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