Vague scélérate - Définition

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Théories explicatives

Il convient d’abord de distinguer les grandes vagues des vagues scélérates. Les plus grandes vagues observées sont généralement présentes dans un état de mer déjà fort, soit dans de fortes tempêtes, soit dans des zones de courants contraires, comme dans la zone du courant des Aiguilles, le long de la côte est de l’Afrique du Sud. Dans ce cas, il s’agit d’un simple phénomène de réfraction qui augmente la hauteur significative H, sans que nécessairement cela donne des vagues de hauteur H supérieure à 2,1 H.

Les observations indiquent que ce seuil de 2,1 H est atteint beaucoup plus souvent que ce que prévoit la théorie linéaire de la propagation des vagues. Pour des vagues en canal à houle, se propageant dans une seule dimension il peut y avoir 100 fois plus de vagues scélérates que ce que prévoit la théorie linéaire. La fréquence d’apparition des vagues scélérates est donc nécessairement liée au caractère non-linéaire des vagues, connu depuis le XIXe siècle, mais avec des conséquences qui sont encore incomprises. Ainsi, dans un train de houle, la vague scélérate apparaît en empruntant l’énergie contenue dans ses voisines, avant de la leur rendre en disparaissant ou de la perdre en déferlant. On parle de modulation d’amplitude.
Ces vagues sont prévues comme solutions particulières d’équations non linéaires, telles que l’équation de l’onde de Boussinesq ou l’équation de Korteweg et de Vries par exemple. Mathématiquement, elles correspondent au soliton, c’est-à-dire des vagues à forme singulière qui se propagent sans que leur forme ne change. Cette évolution non-linéaire est bien vérifiée dans un canal à houle pour des vagues se propageant dans une seule direction. Mais la complexité de telles équations rend difficile la résolution dans le cas à deux dimensions.

Dans le cas de propagation de vagues dans des directions différentes, il semblerait que certaines circonstances encore mal définies puissent provoquer non pas la diminution, mais l’accumulation des ondes de houle, provoquant une vague scélérate.

Conséquences sur la structure des navires

La réalité des vagues scélérates est maintenant parfaitement démontrée et documentée, et peut avoir des conséquences sur la sécurité maritime et la conception des grands navires marchands, notamment les minéraliers et les vraquiers qui ne sont pas conçus pour résister à des impacts hauts au-dessus de la ligne de flottaison, et qui coulent en quelques minutes.

Si un tanker (ou tout bateau long) rencontre une telle vague de face (ou par l’arrière), cela pose deux problèmes :

  • La masse de l’eau en mouvement représente une énergie au moins double par rapport aux vagues habituelles, qui va percuter le bateau par sa proue (par exemple). Il n’est pas rare qu’une vague scélérate ait une hauteur au moins égale à celle du château.
  • L’effet cumulé de la hauteur exceptionnelle des vagues et de la longueur d’onde peut littéralement soulever le bateau par les deux extrémités. La partie centrale du bateau se retrouve alors dans le vide, ou tout au moins se retrouve moins portée par l’eau, et est donc soumise à des contraintes énormes (surtout si les soutes sont pleines) qui peuvent casser le bateau en deux.

Si la vague frappe le bateau par le côté, elle peut le faire chavirer.

Accidents notables

Plusieurs observations et accidents l'attestent :

  • 1828 : L'Astrolabe, navire conduit par Jules Dumont d’Urville, rencontre des vagues qualifiées de monstrueuses près des côtes de la Nouvelle-Zélande et de la Nouvelle-Guinée.
  • Avril 1916 : le journal de bord et récit d’Ernest Shackleton de l’expédition Endurance qui revint de l’Île de l'Éléphant à bord du James Caird, un canot de sauvetage, évoquent une vague scélérate.
  • 1943 : au large du Groenland, le pont avant du Queen Elisabeth est enfoncé de 15 cm et les vitres de la passerelle, situées à 27 m au dessus de la ligne de flottaison enfoncées.
  • 1974 : la proue du cargo norvégien Wilstar est enfoncée par une vague.
  • 1er janvier 1995 : la plate-forme pétrolière de Draupner, reçoit une vague de 25,6 m de haut alors que la hauteur significative n’atteignait que 10,8 m, mesurée en mer du Nord.
Les falaises de Douvres
  • février 1995 : le Queen Elizabeth 2 affronte une vague de 30 m dans l’Atlantique Nord. Son commandant, le capitaine Warwick, vit arriver :« ...un mur d'eau solide de 30 mètres de haut ! J'ai eu le sentiment de faire route droit sur les falaises de Douvres ».
  • février 2001 : le Bremen et le Caledonian Star, reçoivent trois vagues de 30 m dans le Pacifique Sud.
  • avril 2005 : l’Aube Norvegian rencontre une vague de 21 m au large de la Caroline du Sud.
  • 24 mai 2006 : le Pont-Aven, rencontre une vague d’une hauteur d’environ 20 m au large d’Ouessant.
  • 3 mars 2010 : le MV Louis Majesty, au large de la Catalogne, subit trois vagues de grande hauteur (plus de 8 m) : les vitres du salon passagers explosent, il y a deux morts et un blessé grave.

Entre 1973 et 1994, on estime que vingt-deux cargos ont coulé suite à leur rencontre avec des vagues scélérates.

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