Le terme type trophique (du verbe grec θροφη, « action de nourrir ») spécifie la manière dont un organisme vivant constitue sa propre matière organique.
Le type trophique analyse la question selon trois axes :
Les critères 2 et 3 permettent de composer le nom du type trophique. Il y a quatre combinaisons. Toutes existent. Le critère 1 permet de classer les organismes en autotrophes et hétérotrophes (voir plus bas).
Un même organisme peut souvent utiliser plusieurs de ces mécanismes chimiques, parfois simultanément, parfois selon les circonstances.
Selon la source de carbone :
Selon la source d'énergie :
Selon la source de pouvoir réducteur :
Le croisement de ces 3 axes produit huit mécanismes, qui sont tous utilisés.
Source d'énergie | Source de pouvoir réducteur | Source de carbone | Type trophique | Exemples |
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Lumière Photo- | Composé organique -organo- | Organique -hétérotrophe | Photoorganohétérotrophe | Certaines bactéries (Cyanobactéries...) |
Minérale (dioxyde de carbone) -autotrophe | Photoorganoautotrophe | Certaines bactéries (Athiorhodacées...) | ||
Inorganique -litho- | Organique -hétérotrophe | Photolithohétérotrophe | Certaines bactéries (Thiobaca...) | |
Minérale (dioxyde de carbone) -autotrophe | Photolithoautotrophe | Végétaux chlorophylliens, certaines bactéries (la plupart des Cyanobactéries, Thiorhodacées, Chlorobactéries...) | ||
Composé chimique organique ou non Chimio- | Composé organique -organo- | Organique -hétérotrophe | Chimioorganohétérotrophe | Animaux, Mycètes (champignons), végétaux non chlorophylliens (parasites comme l'orobranche), certaines bactéries. |
Minérale (dioxyde de carbone) -autotrophe | Chimioorganoautotrophe | |||
Inorganique -litho- | Organique -hétérotrophe | Chimiolithohétérotrophe | Certaines bactéries (Bosea, Albibacter...) | |
Minérale (dioxyde de carbone) -autotrophe | Chimiolithoautotrophe | Certaines bactéries dites chimiosynthétiques, terrestres (nitrifiantes, dénitrifiantes, méthanogènes...), ou marines (écosystèmes hydrothermaux). La source d'énergie est inorganique. |
Les types trophiques ne sont pas exclusifs les uns des autres.
Ils peuvent coexister, comme chez les végétaux chlorophylliens, qui sont à la fois des photolithoautotrophes - lorsqu'ils réalisent la photosynthèse - et des chimioorganotrophes - lorsqu'ils respirent en oxydant leur propre production organique.
Il peuvent aussi se succéder : de nombreuses bactéries peuvent ainsi changer de type trophique en fonction des conditions environnementales dont elles disposent (par exemple présence ou absence de lumière, présence ou absence d'oxygène). Certains métabolismes sont dits obligatoires, d'autres facultatifs. Par exemple, certains organismes comme les Euglènes peuvent être phototrophes dans des conditions adéquates, puis perdre leurs chloroplastes de façon irréversible et devenir ainsi exclusivement chimiotrophes.
Au début d'une chaîne alimentaire (= chaîne trophique, du grec trophein = manger), il y a toujours un organisme autotrophe, capable de produire les molécules organiques de structure et de fonction qui le constituent en effectuant la réduction du CO2 (carbone inorganique) en carbone organique.
On distingue les photoorganotrophes et les chimioorganotrophes, qui utilisent respectivement la lumière et l'énergie des liaisons chimiques comme source d'énergie.
Remarque : Les végétaux chlorophylliens consomment de la matière organique qu'ils ont eux-mêmes produite : ils respirent aussi et consomment de l'oxygène, en présence comme en l'absence de lumière. Ce sont donc à la fois des chimioorganotrophes et des photolithotrophes. Ces catégories ne sont pas nécessairement exclusives les unes des autres. Un même organisme peut appartenir simultanément ou successivement à plusieurs de ces catégories. Toutefois, on préfère souligner la source primaire d'énergie : on qualifiera donc les végétaux chlorophylliens de photolithotrophes, car ils ne sauraient être que chimioorganotrophes.
La colonne de Winogradsky permet de réunir dans une biocénose bactérienne tous ces types trophiques à la fois. Le biologiste russe Sergueï Winogradsky (1856-1953) est à l'origine de la découverte de la chimiolithotrophie des bactéries sulfureuses dans les années 1885-1888 (Laboratoire de botanique, Université de Strasbourg).
Il serait raisonnable de parler de chimiosynthèse par opposition à photosynthèse, c'est-à-dire dès que la source d'énergie est d'origine chimique au lieu de lumineuse. Peu d'autres le font. Beaucoup réservent le terme de chimiosynthèse aux métabolismes chimiolithotrophes oxydant des composés minéraux. Ainsi, les autres chimiolithotrophes, oxydant des composés organiques, et les chimioorganotrophes que nous sommes sont exclus de ce vocable. Mais il est juste de dire qu'un être humain a un métabolisme chimiosynthétique.
Dans la pratique, le terme de chimiosynthèse est souvent employé pour désigner le métabolisme des autotrophes découverts par les bathyscaphes américain ALVIN et français CYANA dans les années 1977-1979 lors de plongées sur des dorsales océaniques dans le Pacifique oriental par environ 2500 mètres de fond (Première observation de "fumeurs noirs" sur la dorsale des Galapagos en 1977 par l'ALVIN par 2630 mètres de fond).
A cette profondeur, tout le rayonnement solaire utilisable est absorbé (l'obscurité est totale). Un paradigme de la biologie avant cette époque consistait à penser que le soleil était absolument nécessaire à toute chaîne trophique, comme source d'énergie pour les producteurs primaires. Certes, on connaissait des chimiolithotrophes minéraux depuis le XIXe siècle, mais la biomasse de départ ne pouvait être fournie de façon suffisante que par des végétaux. D'autres métabolismes autotrophes allaient être découverts.