Tupolev Tu-144 - Définition

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Introduction

Tu-144
Tupolev Tu-144

Rôle Avion de ligne supersonique
Constructeur URSS Tupolev
Premier vol 31 décembre 1968
Mise en service 26 décembre 1975
Retrait 1er juin 1978
Premier client Aeroflot
Client principal Aeroflot
Production 1972 - 1985
Variantes Tu-244

Le Tupolev Tu-144 (nom de code OTAN : Charger) est un avion de ligne supersonique construit par le bureau d'études Tupolev. Les médias occidentaux l'ont surnommé « Concordski » (Konkordski) ou « Concordoff », un nom à consonance russe pour souligner sa ressemblance avec le Concorde, le Tu-144 ayant bénéficié dans son développement de l'espionnage industriel soviétique.

Le prototype vola le 31 décembre 1968 près de Moscou, deux mois avant le Concorde. Le Tu-144 passa le mur du son le 5 juin 1969 et atteignit Mach 2 le 26 mai 1970. Il devint ainsi le premier transport commercial à dépasser Mach 2 et l'avion commercial le plus rapide de l'histoire quelques mois avant le Concorde. Toutefois, en raison d'un manque de fiabilité, l'avion ne connut pas de réelle carrière commerciale.

Historique

Développement

Le prototype lors d'un vol d'essais dans les années 1970

La conception du Tu-144 doit beaucoup à l'espionnage industriel, les usines françaises de Sud-Aviation (Aérospatiale) ayant particulièrement été mises à contribution. Lorsque Sergei Pavlov (officiellement directeur du bureau parisien d'Aeroflot) fut finalement arrêté en 1965, il était en possession de plans détaillés des freins, du train d'atterrissage et de la cellule du Concorde. Un autre agent, Sergei Fabiew, qui avait réussi à obtenir des plans sur la nature des nervures de voilure usinées en Italie par Fiat, n'a été arrêté qu'en 1977.

Cet espionnage a sans doute permis aux Soviétiques de comparer plus précisément les deux conceptions, mais le prototype du Tu-144 en 1970 n'était pas une simple copie du Concorde, et sur la base de nombreux essais, des changements considérables furent apportés entre le prototype et le modèle de pré-production Tu-144S (no 77101).

L'accident du Bourget

Le programme de développement du Tupolev subit un sérieux revers le 3 juin 1973 au Salon du Bourget : ce jour-là, lors de sa seconde démonstration en vol, le premier modèle de production (no 77102) s'écrasa en flammes au-dessus de Goussainville, détruisant une quinzaine de maisons, une école — heureusement fermée ce jour-là — tuant les six membres d'équipage et huit personnes au sol.

Le dernier jour du salon, le Concorde et le Tupolev 144 étaient présentés devant un public de 350 000 personnes. Concorde fit une première démonstration, suivi par le Tupolev. À la fin de son ascension verticale à pleine puissance, aux environs de 1 200 m, au moment où les plans canards du fuselage avant furent rétractés, l'avion décrocha, bascula en piqué et lorsque le pilote tenta de le redresser, tout en redéployant les plans canards, l'important facteur de charge causa la rupture de l'aile gauche. Selon des témoins au sol, l'incendie aurait résulté de la rupture d'un plan canard avant gauche qui aurait perforé un réservoir ou se serait introduit dans un moteur et provoqué l'explosion, détruisant l'aile. Pendant la tentative de l'équipage pour redresser l'avion, une caméra d'une chaîne de télévision française, utilisée par un participant russe pour filmer le vol, tomba sur le sol de la cabine de pilotage et fit perdre un temps précieux aux pilotes.

Des informations d'archives, maintenant ouvertes au public, indiquent que la boîte noire fut ramenée en URSS et analysée. On pense maintenant que la cause de l'accident serait une modification réalisée au sol, par l'équipe d'ingénieurs, sur les capteurs du système de stabilisation automatique, la veille du second jour de démonstration en vol. Ces changements auraient eu pour but d'étendre le domaine de vol Tu-144 en démonstration, afin de réaliser une meilleure démonstration que le Concorde. À l'origine, pour des raisons de sécurité, le contrôle de la surface de déflexion était limité à 5°, avec les plans canards sortis. La modification effectuée consista à désactiver cette limitation, ce qui, après rétractation des plans canards, aurait entrainé une erreur du circuit électronique d'autostabilisation se traduisant par une commande de déflexion des élevons de 10° vers le bas et provoqué une perte de contrôle et la mise en piqué immédiate du Tupolev.

Une autre explication avancée à l'époque aurait été que le pilote avait voulu éviter un Mirage III en vol au-dessus de lui et dont il ignorait la présence.

En service

Tu-144S no 77106 préservé au Central Air Force Museum à Monino

Le Tu-144S entra en service le 26 décembre 1975, transportant du courrier et du fret entre Moscou et Alma-Ata en préparation d'une ouverture de la ligne au trafic passagers, qui intervint en novembre 1977. Il y eut une courte période d'exploitation en vol régulier mais le 23 mai 1978, le premier Tu-144D (no 77111) connut une panne en vol lors d'un vol de qualification et s'écrasa, à Iegorievsk, causant la mort de 2 des 8 membres de son équipage. En conséquence, le vol Aeroflot du 1er juin 1978 fut le cinquante-cinquième et dernier vol régulier.

Un vol régulier mais seulement avec du fret fut rétabli le 23 juin 1979, utilisant le nouveau modèle Tu-144D, y compris sur de plus longs itinéraires comme Moscou ⇄ Khabarovsk grâce à l'autonomie supplémentaire liée à l'emploi de moteurs plus économes (RD-36-51).

En comptant les 55 vols passagers, il n'y eut que 102 vols réguliers, tous opérés par Aeroflot, avant la fin définitive du service commercial.

Après la fin des vols réguliers

Bien que les vols réguliers aient été arrêtés en 1978, on pense qu'Aeroflot a continué à utiliser le Tu-144D, avec quelques vols occasionnels dans les années 1980. Un rapport fait état d'un vol de Crimée à Kiev en 1987. De même, la production du Tu-144 ne s'est arrêtée qu'en 1984, et le Tu-144D no 77116, partiellement assemblé, ne fut jamais terminé.

Dans les années 1980, les deux derniers modèles de production en état de vol ont été utilisés pour des essais, notamment pour la recherche sur la couche d'ozone à haute altitude. Durant ces essais, ils ne furent pas autorisés à dépasser Mach 1. Ces deux avions, no 77114 et no 77115, sont conservés aujourd'hui à l'usine Tupolev de Joukovski. Ces essais se poursuivirent jusqu'en 1990.

High Speed Commercial Research

Le Tu-144LL est préservé à la base aérienne de Zhukovsky depuis 1999

En 1990, Tupolev se mit en relation avec la NASA et proposa d'utiliser un Tu-144 comme banc d'essai pour le programme High Speed Commercial Research, dont le but était de concevoir un avion de ligne supersonique de deuxième génération. En 1995, le Tu-144D numéro 77114 (assemblé en 1981 mais n'ayant que 82 heures et 40 minutes de vol au compteur) fut sorti de son stockage. D'importantes modifications, pour un montant de 350 millions de dollars, ont eu lieu, incluant la remotorisation. Les anciens réacteurs furent remplacés par ceux équipant le bombardier Tu-160. Cette nouvelle version fut baptisée Tu-144LL, LL signifiant Letayuschaya Laboratoriya, soit Laboratoire Volant. Il réalisa 27 vols en 1996 et 1997. En 1999, le projet fut abandonné.

Depuis l'arrêt des vols

En 2000, le musée automobile et technologique de Sinsheim racheta le no 77112 qui se trouvait à Zhukovsky. L'appareil a été démonté puis transporté par voie fluviale et terrestre jusqu'au musée. Il y est exposé avec un ancien Concorde d'Air France.

La cellule du no 77113 a été ferraillée à l'usine de Zhukovsky en 2001. L'entreposage à l'extérieur pendant plus de 20 ans avait endommagé l'appareil et il était considéré comme dangereux.

Il semble que le Tu-144LL ait été vendu aux enchères en juin 2001 pour 11 millions de dollars mais l'avion ne fut finalement pas vendu - Tejavia écrivit en septembre 2003 que le contrat n'avait pas été signé. Les réacteurs Kuznetsov NK-321 utilisés sur le Tu-144LL sont en effet considérés comme du matériel militaire puisqu'ils assurent aussi la propulsion du Tu-160. Le gouvernement russe refusa donc la licence d'exportation.

Chronologie

Le no 77115 est le dernier Tupolev 144 à avoir été produit
Le musée de Sinsheim expose un ancien Concorde d'Air France et le seul Tupolev Tu-144 préservé hors de Russie
  • 31 décembre 1968 : premier vol du prototype avec Edward V. Elyan aux commandes.
  • 5 juin 1969 : le prototype passe le mur du son.
  • 26 mai 1970 : Mach 2 est atteint.
  • 3 juin 1973 : crash du premier appareil de production (no 77102) à Goussainville pendant le salon du Bourget.
  • 26 décembre 1975 : le Tu-144S entre en service, transportant seulement du fret.
  • Novembre 1977 : ouverture de la route Moscou ⇄ Alma-Ata au transport de passagers.
  • 23 mai 1978 : accident à l'atterrissage du premier Tu-144D (no 77111) à Iegorievsk lors de son 5e vol.
  • 1er juin 1978 : dernier vol régulier et arrêt du service commercial suite à l'accident du 23 mai.
  • 23 juin 1979 : rétablissement d'un vol régulier, mais uniquement avec du fret.
  • 1985 : arrêt de la production du Tu-144. Le dernier, no 77116 reste inachevé.
  • 1987 : fin des vols du Tu-144 avec Aeroflot.
  • 27 février 1990 : tout dernier vol d'un Tu-144D.
  • 29 novembre 1996 : premier vol d'essai du Tu-144LL, version militarisée du Tupolev 144.
  • 14 avril 1999 : tout dernier vol d'un Tupolev Tu-144 avec le no 77114.
  • Octobre 2000 : un des 4 Tu-144 présevés à Zhukovsy (le no 77112) est partiellement démonté pour être transporté au musée automobile et technologique de Sinsheim.
  • 6 avril 2009 : décès d'Edward V. Elyan, pilote du tout premier vol d'essai du Tu-144, à l'âge de 82 ans.
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