Transfusion sanguine chez les Témoins de Jéhovah - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Les différentes structures utilisées par les Témoins de Jéhovah

Plusieurs structures à vocation médicale ont été créées par les Témoins de Jéhovah. Au niveau international, la plus importante d'entre elle est le Comité de liaison hospitalier (CLH) fondé en 1979, avec pour but affiché de faire respecter leur refus de la transfusion sanguine en milieu hospitalier.

Si le sociologue Régis Dericquebourg estime que la création de ces CLH constitue une évolution des Témoins de Jéhovah en faveur d'une meilleure communication avec le monde qui les entoure, en revanche des familles ayant perdu un de leur membre pour refus de soin, des médecins et les organismes de lutte contre les sectes dénoncent le lobbying pratiqué par ces différentes structures. Dans une lettre du 27 janvier 2004, Nicolas Sarkozy, alors Ministre de l’Intérieur a signalé « les nombreuses infiltrations jéhovistes au sein du milieu médical qui ont été constatées depuis plusieurs années jusqu’à atteindre à ce jour un niveau inquiétant. »

Présentation de ces structures

CLH

Présentation

Selon la Société Watchtower, les CLH, composés de Témoins de Jéhovah spécialement formés pour rencontrer les autorités médicales, ont été créés pour soutenir les fidèles du mouvement religieux dans leur refus de toute transfusion sanguine, et de faciliter les relations patient-médecin. Ces comités cherchent des thérapeutiques de remplacement qu'ils indiquent au personnel de l’hôpital, et déterminent ensuite par sondage quels membres de l’équipe médicale sont disposés à coopérer avec les Témoins. Ces comités forment aussi des fidèles pour qu’ils parlent des traitements non sanguins aux personnels hospitaliers. Le CLH dispose d'un système de télécopie permettant d'envoyer la documentation appropriée aux médecins soignant un patient Témoin de Jéhovah. Ce comité peut recevoir des appels 24 heures sur 24 et depuis 1992, un contrat a été signé avec un assureur pour faciliter le transfert d'un fidèle dans un établissement acceptant de soigner sans utiliser de sang.

Selon la Mission interministériel de lutte contre les sectes (MILS), ces CLH reposent en fait sur quelques adeptes, qui se voient attribuer une zone d’intervention (sept zones et seize correspondants) selon un découpage géographique du territoire. Il y a un annuaire des médecins jéhovistes, et parfois un médecin praticien Témoin de Jéhovah peut se présenter et demander « à "participer" à une intervention chirurgicale, alors même qu'il ne connaît aucunement le malade Témoin de Jéhovah ».

Service d'information médicale

En janvier 1988, un Service d’information médicale a été mis en place au siège mondial de la Société Watchtower, à Brooklyn, avec comme objectif de rechercher de l'information médicale sur les traitements sans sang, d'établir des fichiers répertoriant les chirurgiens soignant sans transfusion sanguine, et de former des anciens (surveillants locaux) pour défendre les intérêts jéhovistes. Des représentants de ce service ont dirigé des séminaires dans certaines des filiales et ont formé des CLH destinés à promouvoir l’emploi de thérapeutiques non sanguines auprès des établissements hospitaliers.

Entre 1988 et 1991, aux États-Unis, 18 séminaires ont formé plus de 600 anciens pour qu’ils constituent un réseau d'une centaine de CLH répartis dans les grandes villes du pays. En février et en mars 1990, quatre séminaires concernant huit filiales ont eu lieu dans le Pacifique, puis quatre autres en Australie, au Japon, aux Philippines et à Hawaii, pour huit filiales, puis en novembre et en décembre 1990, dix autres en Europe, en Amérique latine et aux Antilles, et cinq en Europe (Angleterre, Suède, France, Allemagne et Espagne) pour 20 filiales, cinq autres touchant 32 filiales au Mexique, en Argentine, au Brésil, en Équateur et à Porto Rico, quatre dans l'ouest Pacifique touchant huit filiales (à Sydney pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande, à Manille pour les Philippines, Hong-Kong et Taïwan, à Ebina pour le Japon et la Corée, à Honolulu, pour Hawaii). Vingt CLH ont été établis au Japon, et sept en Corée.

Le Service d’information hospitalier a produit un ouvrage à trois index contenant des articles médicaux pour les pédiatres et les néonatalogistes soignant des enfants de Témoins de Jéhovah. Il a également produit un ouvrage de 260 pages intitulé Soins familiaux et gestion des dossiers médicaux des Témoins de Jéhovah, manuel à feuilles volantes destiné principalement aux juges, aux assistantes sociales et aux hôpitaux pour enfants.

Chiffres avancés par les Témoins de Jéhovah

En 1993, selon ce que les Témoins de Jéhovah déclarent dans leurs publications, il y avait 850 CLH dans 65 pays ; plus de 4 500 anciens étaient formés pour promouvoir auprès des médecins les techniques évitant la transfusion sanguine. Ils avancent le chiffre de 5 000 médecins prêts à collaborer avec eux en 1988, puis 30 000 dans 65 pays en 1993, et 50 000 en 1995 dont 18 000 aux États-Unis.

Toutefois, il n'est pas possible de vérifier concrètement la véracité de ce chiffre qui est est certainement inférieur en réalité. Ainsi, en 2000, le Bureau d'information des Témoins de Jéhovah de Louviers a lancé une vaste campagne sur le thème "Médecine et chirurgie sans transfusion" : 20 millions de brochures prônant le refus systématique de toute transfusion sanguine ont été distribuées en quelques semaines et 21 conférences "scientifiques" ont été organisées en France. Des médecins y ont participé. Le périodique Réveillez-vous ! a alors affirmé : « Plus de 90 000 médecins dans le monde ont fait savoir qu'ils étaient disposés à soigner les Témoins de Jéhovah sans avoir recours au sang ». Certains médecins ont déclaré dans les médias qu'ils avaient été « manipulés » par l'organisation jéhoviste et avaient souhaité ne plus participer à leur colloques.

AMS et ANDP

L’Association médico-scientifique d’information et d’assistance au malade (AMS) est composée de médecins et de juristes Témoins de Jéhovah (Alain Garay, Philippe Goni, Armine Najand). Cette association « organise notamment des colloques qui diffusent la doctrine relative au refus de transfusion sanguine et tentent de la valider aux plans scientifique et juridique ».

L’Association nationale des droits du patient (ANDP) a été créée en septembre 2000 par Alain Garay, avocat des Témoins de Jéhovah, et Olivier Serfati, médecin.

Critiques de ces structures

CLH

Des critiques du mouvement, des médecins ainsi que des familles ayant perdu un de leurs membres suite à un refus de transfusions dénoncent les pressions que ces CLH exerceraient dans les milieux hospitaliers, notamment en envoyant des anciens (surveillants locaux) au chevet des patients Témoins de Jéhovah afin que ceux-ci s'abstiennent bien de toute transfusion sanguine, y compris dans des situations critiques.

Dans son rapport de 2001, la Mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires (MILS) estime à propos des CLH qu' « en tout état de cause, [ceux-ci] adressent des injonctions au malade et à son entourage, exercent leur vigilance sur les services hospitaliers, "recommandent" parfois des produits de substitution coûteux. Ceci peut aboutir à des situations qui, indépendamment des pressions exercées sur le malade et son entourage dans une situation de détresse, érigent les comités de liaison hospitaliers en instances de contrôle illégales et illégitimes. Ces agissements peuvent compromettre le fonctionnement des établissements de soins et porter atteinte au service public hospitalier ».

Un néphrologue de la région lyonnaise, dont le patient Témoin de Jéhovah est décédé pour avoir refusé une transfusion sanguine, après une transplantation rénale en 2002, a témoigné : « Au pied du lit, aux côtés de l'épouse et des enfants, également adeptes de la secte, "une espèce de gourou" bombarde l'équipe soignante de directives médicales (...) pour respecter l'interdit divin, nous avons épuisé toutes les thérapeutiques substitutives imaginables et avons été obligés de maintenir des techniques invraisemblablement coûteuses et totalement inutiles. C'est comme si on avait essayé d'éteindre un incendie avec tout, sauf de l'eau. » Selon un ancien adepte, cet homme était un responsable local du Comité de liaison hospitalier : « Les CHL sont des équipes spécialement formées en communication sur la question du sang et chargées de faire du lobbying auprès des professionnels de la santé. Campagnes, conférences, périodiques... L'organisation est dirigée depuis New York, par une dizaine de gérontes. Sous couvert d'un pseudo‑habillage scientifique, où ils invoquent les risques liés aux transfusions sanguines, ils infiltrent le milieu médical et rendent les médecins, à leur corps défendant, complices d'un conditionnement mortel ».

En 2005, le journal France Soir signale que les Comités de liaison hospitaliers des Témoins multiplient les ambassades auprès des chefs de services les plus concernés par les problèmes de transfusion : anesthésie-réanimation, orthopédie, chirurgie... En quatre ans, dix mille exemplaires d'une vidéo, produite par le service d'information hospitalier de Brooklyn ont été diffusés dans tous les hôpitaux de France. Intitulé "Les alternatives à la transfusion" ce DVD est censé faire le point sur toutes les techniques existant pour limiter ou éviter le recours à la transfusion . En 2006, ce DVD a été analysé à la demande de la Commission parlementaire sur les sectes par l’Académie nationale de médecine et la Haute autorité de santé qui ont dénoncé l’une « des banalités, des approximations, et surtout des oublis tout à fait nuisibles à la sécurité transfusionnelle », l'autre des méthodes « pseudo-scientifiques» (cf. supra l').

Jonathan Lavoie, ex-Témoin de Jéhovah militant pour le rejet des refus de soins pour causes religieuses, a déclaré lors de l'entrevue d'une télévision canadienne que la France allait prendre des mesures pour interdire l'accès aux hôpitaux des CLH.

Générale

L'Association de défense de la famille et de l'individu (ADFI) juge que les démarches de ces organisations émanant des Témoins de Jéhovah constituent « une véritable offensive menée par la secte qui laisse croire que, dans tous les cas, la transfusion peut-être remplacée par autre chose, ce qui est faux et fait de plus en plus pression pour être reconnue comme une religion ».

Un professeur, au départ prévu parmi les intervenants d' un colloque organisé par l'AMS, a ensuite renoncé à sa participation. Toutefois, alors qu'il avait prévenu par courrier six mois à l'avance qu'il ne participerait finalement pas à ce colloque, son nom figurait toujours sur la liste du comité d'organisation et circulait sur Internet. Il s'en est indigné : « C'est malhonnête, j'ai été manipulé ».

Auditionné par la commission parlementaire sur les sectes de 2006, le sociologue Bertrand Sachs a déclaré à propos de l'ANDP que « cette association fait partie de ces associations lobbyistes qui existent dans le milieu sectaire, et qui font tout pour égarer le public, notamment à travers leurs intitulés, qui, d’une part, ressemblent toujours à des intitulés officiels, et d’autre part, font toujours référence à la défense de la personne et de l’être humain ». Quant à Jean-Pierre Brard, député membre des commissions parlementaires sur les sectes, il s'est exprimé à propos de cette association dans les termes suivants (JO du 15/12/2003) : « Les Témoins de Jéhovah avancent masqués. Il a fallu toute la vigilance du président du Sénat pour empêcher que se tienne, dans l'enceinte du Palais du Luxembourg, un colloque organisé par une des nombreuses associations qui servent de faux-nez aux Témoins de Jéhovah. »

Débat public sur les droits des malades

Après avoir décrit le rôle des CLH et de l'AMS, la Mission interministérielle de lutte contre les sectes (MILS) a signalé dans son rapport de 2001 : « Sachant l'aptitude des mouvements sectaires à pratiquer la désinformation, leur habileté à s'introduire dans les instances et publications officielles, il n'est pas infondé de craindre que certains aspects du débat public sur les droits des malades ne se soient développés sur la base de notions tronquées. » A cet égard, elle signale l'ouvrage "Consentement éclairé et transfusion sanguine" publié en 1996 par les éditions de l'École Nationale de la santé publique, sous la direction de Sophie Gromb et Alain Garay, Témoin de Jéhovah lui-même et avocat des Témoins de Jéhovah.

Page générée en 0.024 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales | Partenaire: HD-Numérique
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise