La preuve proposée ici fait appel à un bagage mathématique minimal, elle suit le canevas de celle de Cauchy. On considère une fonction polynôme définie dans C par P(z) = a0 + a1z+...+ anzn tel que n est strictement positif et an non nul. On suppose de plus que a0 est non nul, car sinon le polynôme P admet 0 pour racine évidente et le théorème est trivialement vérifié.
Dans un premier temps, l'existence d'un minimum z0 pour la fonction qui à z associe le module de P(z) est établie. Pour cela, on remarque que si le module de z est suffisamment grand, le module de P(z) l'est aussi et la zone des valeurs minimales pour P(z) est nécessairement bornée. Ensuite, on utilise le fait qu'un fermé borné de C est un compact et qu'une fonction continue d'un compact dans R atteint toujours son minimum.
Enfin, on raisonne par l'absurde, on suppose que l'image de z0 par P est non nulle. On trouve une direction c (un nombre complexe non nul) telle que si t désigne un réel, la fonction de R dans R qui à t associe le module de P(z0 + t.c) est strictement décroissante. On en déduit l'existence d'une valeur t0 telle que le module de P(z0 + t0.c) est strictement plus petit que celui de P(z0). Cette contradiction permet de conclure.
Montrons tout d'abord un lemme, qui correspond à un cas particulier d'équation polynomiale.
Étudions maintenant le cas général.
Pour une question de simplicité de rédaction, on note Q(z) le polynôme qui à z, associe la valeur P(z0 + z). C'est un polynôme de même degré que P, et dont le module prend au point 0 sa valeur minimum, laquelle vaut m. On utilise les notations :
Ici, k désigne le plus petit indice strictement positif tel que le coefficient bk soit non nul. Cet indice existe, car le polynôme est non constant.
Le lemme permet d'établir la proposition suivante, qui aboutit à une conclusion de la démonstration.
Si m n'est pas nul, ce n'est pas le minimum de la fonction |P(z)|, ce qui est absurde car c'est sa définition. Autrement dit, m est nécessairement nul et P admet au moins une racine z0.
Une preuve très concise repose sur le théorème de Liouville en analyse complexe. À cet effet, on considère un polynôme P à coefficients complexes, de degré au moins égal à 1. On suppose qu'il n'a aucune racine : dès lors, la fonction rationnelle 1 / P est entière et bornée (car elle tend vers 0 à l'infini, d'après la démonstration précédente) ; du théorème de Liouville, on déduit qu'elle est constante, ce qui contredit l'hypothèse sur le degré, et prouve ainsi par l'absurde l'existence d'au moins une racine de P.
Une autre preuve concise s'appuie sur le théorème de Rouché en analyse complexe. On considère le polynôme p à valeurs dans
en supposant que le coefficient an est non nul. Il suffit ensuite de comparer ce polynôme à anzn sur un cercle suffisamment grand pour en déduire, en appliquant le théorème de Rouché, que p possède autant de zéros que anzn c'est-à-dire n.
Une homotopie entre deux lacets est une déformation continue permettant de passer du premier lacet au deuxième. L'article détaillé montre que si p est un polynôme de degré n et si ρ est un nombre réel suffisamment grand, le lacet α défini sur le cercle unité par :
fait n fois le tour du cercle. Si le polynôme p n'avait pas de racine, il serait homotope à un point. Cette contradiction est la base de la démonstration proposée dans l'article détaillé.
Il existe une preuve presque purement algébrique du théorème fondamental de l'algèbre, réécriture moderne de celle conçue par Lagrange. Elle n'utilise l'analyse que pour prouver, par l'élémentaire théorème des valeurs intermédiaires, que tout polynôme réel de degré impair admet une racine (et le fait que tout réel positif est un carré).
Une fois obtenu ce résultat facile, on s'attaque à des polynômes réels de degré peut-être pair (on ne pourra dans ce cas espérer trouver qu'une racine complexe). Une ingénieuse combinatoire qui fait jouer les relations entre coefficients et racines permet de ramener l'étude d'un polynôme de degré disons 6 à une famille de polynômes réels de degré 15 - plus généralement si le polynôme qui nous intéresse est de degré 2nq où q est impair on se ramène à une famille de polynômes réels d'un même degré non divisible par 2n. Ceci laisse entrevoir une récurrence sur la valuation 2-adique du degré du polynôme, qui se révèle effectivement possible.
Traiter les polynômes à coefficients complexes non nécessairement réels n'est plus alors qu'une formalité.
Cette démonstration se généralise au cas des corps réels clos (c'est même ce qui motive leur définition) : si K est un corps réel clos, l'extension L = K(i) est un corps algébriquement clos (i est ici un symbole formel tel que i2+1=0, ce qui revient à définir L comme le quotient de K[X] par le polynôme X2 + 1) ; ce théorème est "attribué" par Nicolas Bourbaki à Euler et Lagrange
On en a fini avec l'analyse et on passe au cœur de la preuve, en prouvant que :
On a bien trouvé une racine complexe pour F (et même deux) .