Les Égyptiens de l'Antiquité craignaient autant les serpents qu'ils en admiraient la puissance, la grâce et les mystères.
Dans l'Antiquité, l'Égypte était peuplée d'une quarantaine d'espèces de serpents, dont trente-six subsistent encore sur son territoire. Elles appartiennent à six familles, mais seuls les représentants de celle des elapidae, comprenant les cobras, et de celle des boidae, avec le redoutable python de Séba, étaient sacrés.
L'uræus est en général identifiée au cobra égyptien (naja haje), mais il faudrait plutôt l'assimiler au naja nigricollis, au naja mossambica et au naja pallida. En effet, ces trois ont la faculté non seulement d'inoculer, mais aussi de cracher leur venin, ainsi que le rapportent les anciens textes concernant l'uræus.
unilitère [f] | ||
|
Beaucoup plus toxiques que les cobras sont les petites vipères d'Égypte qui vivent à la frange du désert, dans les grottes et les tombes (les archéologues en savent quelque chose). La plus célèbre est la vipère cornue, cerastes cerastes qui a prêté sa silhouette caractéristique à l'unilitère f, dentale sifflante comme son modèle ! Ses proches parents sont cerastes vipera et le terrible echis carinatus au venin foudroyant.
Le cobra était principalement consacré à des déesses (d'ailleurs, son nom est du féminin en ancien égyptien), à savoir :
Certains dieux pouvaient aussi prendre l'aspect d'un serpent autre que celui du cobra :
Le mode de vie des serpents, grouillant dans l'eau ou se glissant dans des grottes terrestres, ondulant sur le sable et le cailloutis désertique, correspond à l'idée que les Anciens se faisaient de l'existence des êtres primordiaux. Aussi, les femelles des quatre couples préexistants d'Hermopolis sont-elles des serpents.
Apophis, enfin, énorme serpent divin, incarnant les forces primitives et chaotiques, est à identifier au gigantesque python de Séba, qui peut atteindre une longueur de six mètres et qui est capable d'attaquer et d'ingurgiter un être humain. Il a disparu d'Égypte, mais peuple encore l'Afrique au sud du Sahara.
Les serpents, qui appartiennent à une des plus vieilles espèces encore vivantes, occupaient une place éminente dans la pensée religieuse des anciens Égyptiens.
Pour les anciens Égyptiens, les serpents étaient les animaux les plus terrifiants qui soit. Leur apparence unique (corps filiforme dépourvu de membres), leur discrétion (en plus d'un mimétisme avec leur milieu les vipères peuvent rester cachées des heures dans le sable), leur attaque foudroyante, leur venin mortel duquel même les dieux n'étaient pas protégés (Rê mordu par un serpent et sauvé par Isis ou encore Geb victime du venin craché par l'Uræus) et leur capacité à disparaître par la moindre anfractuosité, en font des tueurs redoutés.
Tous les petits ophidiens, dangereux ou inoffensifs colubridés (couleuvres et autres), étaient indistinctement considérés comme des « démons » malfaisants et leur image hiéroglyphique, depuis les textes des Pyramides, est souvent percée de couteaux symboliques afin de les neutraliser.
Il n'est pas étonnant que le mal suprême, le monstre qui essaye d'avaler le monde chaque nuit, n'est autre qu'un serpent, Apophis.
Pour protéger les défunts contre ces démons, des formules magiques – qui trouvent leurs apogées au Nouvel Empire – étaient inscrites sur les parois de l'entrée des tombeaux.
La mue des serpents était un événement fascinant aux yeux des anciens Égyptiens. En effet, lors de sa croissance, le serpent à l'étroit dans ses écailles qui ne grandissent pas, doit quitter sa couche externe à plusieurs reprises. Les Égyptiens, voyant un serpent affaibli (l'activité des serpents se réduit considérablement avant la mue) quitter sa vieille peau pour « renaître » à la jeunesse (après la mue, les écailles sont luisantes), ne pouvaient que l'assimiler aux symboles de renouveau, de renaissance (d'où l'importance de ces reptiles dans les textes funéraires).