Saint-Kilda - Définition

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Mode de vie

Un homme mettant le « navire postal de Saint-Kilda » à l'eau, photographie de Cherry Kearton, fin XIXe siècle.
Mr Ferguson, à la chasse aux oiseaux sur Borrera, fin XIXe siècle.

L'archipel de Saint-Kilda était particulièrement isolé : la seule façon de s'y rendre lorsque Martin Martin le visita en 1697 était en chaloupe, et il fallait ainsi ramer plusieurs jours dans l'océan ce qui rendait le voyage quasiment impossible en automne et en hiver. Quelle que soit la saison, des vagues jusqu'à 12 m de haut s'abattaient sur la plage de Village Bay, et apponter des jours plus calmes sur les rochers glissants restait dangereux. Ainsi séparés par la distance et la météo, les habitants en savaient peu sur le reste du monde. Après la Bataille de Culloden en 1746, des rumeurs disaient que le prince Charles Édouard Stuart et certains de ses aides jacobites s'étaient échappés à Saint-Kilda. Une expédition fut ainsi lancée et les soldats britanniques débarquèrent sur Hirta : ils ne trouvèrent qu'un village désert, car les habitants craignant les pirates s'étaient réfugiés dans les grottes à l'ouest. Une fois les habitants persuadés de revenir, les soldats découvrirent qu'ils n'avaient en réalité aucune idée de qui était le prince, et n'avait jamais entendu parlé du roi George II non plus.

Même à la fin du XIXe siècle, la principale façon qu'avaient les insulaires de communiquer avec le reste du monde était en faisant un feu au sommet du Conachair, et espérer qu'un navire le verrait. L'autre façon était le « navire postal de Saint-Kilda », inventé par John Sands qui visita l'archipel en 1877. Lors de son séjour, un naufrage laissa neuf marins autrichiens abandonnés, et leur stock de vivres commençait à être bas en février. Sands attacha alors un message à une bouée de sauvetage sauvée du Peti Dubrovacki et la mit à la mer. Neuf jours plus tard, la bouée fut récupérée à Birsay, au nord-ouest de l'archipel des Orcades, et une expédition de sauvetage fut mise en place. Les insulaires reprirent l'idée en arrangeant un morceau de bois de façon à ce qu'il prenne la forme d'un bateau, l'attachant à une vessie flottante en peau de mouton, et y plaçant une petite bouteille ou boîte de conserve contenant un message. En lançant « l'embarcation » lorsque les vents venaient du nord-ouest, deux tiers des messages arrivaient à la côte ouest d'Écosse ou, ce qui était moins pratique, en Norvège.

Une autre particularité caractéristique de la vie sur l'archipel était l'alimentation. Les insulaires gardaient des moutons et quelques bovins, et avaient des cultures limitées d'orge et de pommes de terre sur les terres mieux irriguées de Village Bay. Samuel Johnson observa qu'au XVIIIe siècle, les insulaires faisaient de petits fromages à partir du lait des moutons. Ils évitaient la pêche en raison de mers fortes et d'une météo imprévisible. La principale source de nourriture venait des oiseaux, en particulier les fous de Bassan et les fulmars; on ramassait les œufs et les jeunes oiseaux et les consommait frais ou traités. Les macareux adultes étaient attrapés en utilisant des cannes à pêche. Cette particularité de l'île avait un prix : lorsque Henry Brougham visita l'archipel en 1799, il écrivit que « l'air était infecté par une puanteur presque insupportable -un mélange de poisson pourri, crasses de toutes sortes et d'oiseaux puants ».

Les fouilles de la Taigh an t-Sithiche (« maison des fées ») en 1877 par Sands mirent à jour les restes de fous de bassan, moutons, bovins et berniques parmi des outils en pierre. Ce bâtiment a entre 1 700 et 2 500 ans, ce qui suggère que le régime des insulaires a peu changé depuis. En effet, même les outils furent identifiés par les habitants, qui pouvaient les nommer par similitude à ceux qu'ils utilisaient toujours. La chasse des oiseaux nécessitait une aptitude considérable pour l'escalade, en particulier sur les stacks à pic. Une tradition importante dans l'île comportait la Mistress Stone (« pierre maitresse »), une ouverture en forme de porte dans les rochers au nord-ouest de Ruival surplombant un ravin. Les jeunes hommes de l'île devaient y passer lors d'un rituel visant à démontrer leurs aptitudes sur les rochers escarpés, prouvant ainsi qu'ils étaient dignes de prendre épouse. Martin Martin écrivit à ce sujet :

« Devant le rocher, au sud de la ville, se trouve cette fameuse pierre connue sous le nom de 'mistress-stone'; elle ressemble en tous points à une porte et se trouve sur le rocher, [...] que l'on distingue jusqu'à un mile de loin; chaque prétendant célibataire est, par une ancienne coutume, obligé sur son honneur à donner une preuve de son affection [en faisant une démonstration avec cette pierre] après quoi, [...] il a acquis une certaine réputation et est considéré comme méritant la meilleure épouse du monde. [...] Ceci étant la coutume de l'endroit, l'un des insulaires désirait avec le plus grand sérieux que [je m'y essaye] avant de qutiter l'île; je lui déclarai que cet exercice aurait un effet bien contraire sur moi, me privant à la fois de ma vie et de ma femme. »

Un des aspects majeurs de la vie à Saint-Kilda était le « parlement » journalier : tous les hommes adultes se rassemblaient chaque matin dans l'unique rue du village, après la prière, et décidaient des activités du jour. Cette réunion n'était dirigée par personne en particulier, et tous avaient droit à la parole. Selon Steel, « les discussions entraînaient souvent des désaccords, mais il n'a jamais été attesté dans l'histoire que les querelles aient été assez violentes pour amener une fracture permanente dans la communauté ». Cette notion de société libre influença la vision d'Enric Miralles, architecte qui conçut le bâtiment du Parlement écossais en partenariat avec son épouse Benedetta Tagliabue; il écrivit ainsi :

Les habitants dans la rue du village, fin XIXe siècle.


« Late XIX St Kilda Parliament
To Remember this is not an archaic activity
My generation (myself) has experienced that emotion
Consider how different movements exist in present times
Architecture should be able to talk about this. »


« Le parlement de Saint-Kilda à la fin du XIXe siècle
Se souvenir que ce n'est pas une activité archaïque
Ma génération (moi-même) a connu cette émotion
Considérer comment différents mouvements existe de nos jours
L'architecture devrait-être capable d'en parler. »

D'une certaine façon, malgré les privations, les habitants avaient la « chance » d'être isolés puisque cela leur épargnait les malheurs de la vie ailleurs. Par exemple, nous ne connaissons pas un habitant de St-Kilda qui se soit battu dans une guerre. Martin Martin écrivit également que les habitants avaient l'air « plus heureux que la plupart des hommes, étant presque les seuls dans le monde à sentir la douceur de la véritable liberté ». De plus, au XIXe siècle, leur santé et bien-être relatif offrait un contraste positif avec les conditions que l'on trouvait ailleurs dans les Hébrides. Cependant, il ne s'agissait pas pour autant d'une société utopienne : les insulaires avaient des serrures en bois sur leurs propriétés, et un délit entraînait une peine financière, même si aucun crime grave commis par un insulaire n'a été attesté.

Le mode de vie vu par Alexander Keith Johnson
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