Sable bitumineux - Définition

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Introduction

Un sable bitumineux (ou bitumeux) est un mélange de bitume brut, qui est une forme semi-solide de pétrole brut, de sable, d'argile minérale et d'eau. En d’autres mots, c’est un sable enrobé d’une couche d’eau sur laquelle se dépose la pellicule de bitume. Plus la pellicule de bitume est épaisse, meilleurs sont les sables bitumineux en termes de quantité de pétrole extractible. Après extraction et transformation des sables bitumineux, on obtient le bitume, qui est un mélange d’hydrocarbures sous forme solide, ou liquide dense, épais et visqueux. Les gisements de sable bitumineux représentent une importante source de pétrole brut de synthèse, ou non conventionnelle. Les principales réserves se situent en Alberta (Canada) et dans le bassin du fleuve de l'Orénoque, au Venezuela. De plus petits gisements de sables bitumineux existent dans d'autres endroits du monde.

Description

Ces formations à faible profondeur (parfois quasiment à l'affleurement) contiennent de 80 à 85 % de matières minérales (silice et argile), de 10 à 12 % de bitume naturel et 5 % d'eau. Ce bitume n'est pas à proprement parler du pétrole, car il est au moins cent fois plus visqueux et nettement plus dense.

Le pétrole conventionnel est constitué de composés légers, tels que le gaz, l’essence, et le kérosène ; il contient également des composés lourds, tels que les huiles de graissage, les fuels lourds et le bitume. Ces composés possèdent de 3 à 300 atomes de carbones et des points d’ébullition allant de -40 à 525℃.

L'origine du bitume est incertaine. Il est beaucoup trop visqueux pour avoir migré dans son état actuel. On pense donc qu'il s'agissait, à l'origine, de pétrole conventionnel qui, après avoir migré dans des réservoirs trop peu profonds pour l'isoler du monde extérieur, a été dégradé, perdant ainsi ses composés les plus légers par évaporation, par attaque bactérienne (biodégradation) et par « lavage » à l'eau. Cette explication ne fait cependant pas l'unanimité.

Le bitume ressemble quelque peu au fioul résiduel issu de la distillation du brut conventionnel : il ne contient quasiment pas d'alcanes courts mais beaucoup d'hydrocarbures complexes, polycycliques par exemple.

Techniques d'exploitation

Dès 1742, dans la région de Pechelbronn en Alsace, des tarières étaient destinées à localiser les filons de sable bitumineux. L'huile était séparée du sable par lessivage à l'eau bouillante, puis distillée pour obtenir des produits pharmaceutiques, de l'huile pour lampe, de la graisse et de la poix. C’est en 1778 que Peter Pond a localisé les premières sources de bitume dans la région d’Athabasca, mais c’est Robert Fitzsimmons, un entrepreneur, qui est le premier à avoir séparé le bitume du sable et qui l’a utilisé pour recouvrir les routes et les toitures. Si les Amérindiens ont depuis des siècles utilisé ce bitume pour calfater des embarcations, les sables bitumineux n'ont vraiment attiré l'attention de l'industrie pétrolière qu'après les chocs pétroliers.

Trois étapes sont importantes pour obtenir le bitume. La première étape consiste à l’exploitation des sables bitumineux. Cette étape peut se faire soit par extraction minière, soit par extraction in situ. La seconde étape consiste à l’extraction du bitume des sables bitumineux, qui se fait surtout par le procédé à l’eau chaude. Puisque le bitume n’est pas du pétrole conventionnel, il faut donc le transformer. La troisième étape est donc la transformation du bitume, qui se fait de différentes façons.

Extraction minière

Un grand problème est observé lors de l’exploitation minière des sables bitumineux. Puisque les sables bitumineux sont situés sous le sol, il faut tout d’abord raser toute la forêt boréale pour enlever le terreau de surface et le mettre de côté. Par la suite, on creuse le mort terrain, qui est à une profondeur de 50 mètres environ. Le mort terrain est enlevé, jusqu’à atteinte des sables bitumineux qu’on extrait de mines à ciel ouvert. Tout ce procédé est effectué à l’aide de camions de 365 tonnes et des grues colossales, dont les pelletées font 100 tonnes.

Comme pour l'exploitation des autres ressources minérales à ciel ouvert, l'opérateur doit remettre en état les terrains après l'exploitation.

Le sable est par la suite transporté aux différentes usines d’extraction du bitume. L’extraction du bitume se fait par le procédé à l’eau chaude, mis au point par Karl Clark en 1929. Ce procédé consiste à placer le sable bitumineux dans d’énormes tambours rotatifs et à le mélanger avec de l’eau chaude et de la vapeur. Le bitume se sépare du sable et se lie aux bulles d’air. Le tout est tamisé et déposé dans des contenants de formes coniques permettant la séparation. Le bitume lié à l’air est récolté sous forme de mousse, contenant 65% de pétrole, 25% d’eau et 10% de solides. Après avoir séparé le tout à l’aide de grosses centrifugeuses, trois couches sont observées. Les grosses particules de sables se déposent au fond, qui sont pompés vers une décharge et utilisés dans la construction des digues. La couche intermédiaire est constituée d’un mélange d’eau, de petites particules de bitumes et quelques minéraux, qu’on appelle mixtes. Cette eau intermédiaire est retirée et pompée afin de les réutiliser dans le processus d’extraction. Enfin, le bitume flotte à la surface, ce qui permet de le récupérer avec un pourcentage de 88 à 95%.

Extraction in situ

La nouvelle technologie in situ est utilisée pour exploiter les dépôts enfouis plus profondément (>75 mètres) et dont l'extraction minière de surface ne serait pas économiquement rentable. L’extraction in situ permet la séparation du bitume et du sable dans le même réservoir. Cette dernière consiste en des puits qui sont creusés dans le sol et qui permettent d’injecter de la vapeur d’eau chaude (~ 300 °C) à haute pression (11 000 kilopascals). Suite à cette injection, la température du bitume augmente, entraînant une diminution de sa viscosité. Ainsi, le bitume est fluidifié et peut être facilement pompé. L’extraction in situ peut se faire selon deux procédés différents, soit par Cyclic Steam Simulation (CSS) ou par Steam Assisted Gravity Drainage (SAGD).

La première solution fut le procédé CSS (Cyclic Steam Simulation). Il consiste à utiliser un même puits alternativement en injection de vapeur et extraction de bitume. La vapeur liquéfie le bitume et rend le pompage possible. L'extraction est effectuée par cycles injection-attente-production, dont la durée complète varie entre six et dix-huit mois. Lorsque le taux de production devient trop faible, un nouveau cycle est entamé. Cette technique offre un taux de récupération de 20-25%. Par rapport à l'extraction minière, on ne dérange qu'une toute petite surface au sol, et les nuisances générales (bruit par exemple) sont bien moindres. Cependant la consommation d'énergie pour produire la vapeur est énorme.

La technique SAGD (Steam Assisted Gravity Drainage), qui n'a pas encore atteint sa phase de maturité, utilise des puits horizontaux associés deux à deux. Le puits du dessus injecte en permanence de la vapeur tandis que celui du dessous recueille eau et bitume. Contrairement au procédé CSS, la quantité de vapeur à injecter pour une production de bitume donnée est moindre, ce qui améliore le bilan énergétique, mais cette solution ne peut pas s'appliquer partout : il faut une bonne homogénéité verticale du réservoir pour que l'écoulement s'établisse.

L’extraction in situ se fait de plus en plus depuis l’an 2000. Le bitume récupéré in situ en 2000 représentait 40 000 m³, tandis qu’en 2006, le bitume récupéré par cette technique atteignait les 75 000 m³. Aujourd’hui, un peu plus de 12% du bitume est récupéré par l’extraction in situ et d’années en années, cette proportion augmentera. Le grand désavantage relié à cette méthode d’extraction repose sur le fait qu’elle est très coûteuse mais aucun impact environnemental n’est connu pour l’instant.

Transformation commerciale

Qu'il provienne d'extraction minière ou in situ, le bitume n'est pas directement commercialisable sur le marché pétrolier, notamment parce qu'il est trop visqueux pour être transporté par canalisation. Deux méthodes sont possibles pour rendre le bitume vendable. La plus simple est de le mélanger avec environ 30% d'hydrocarbures légers (condensats de gaz naturel ou naphta), qui viennent en quelque sorte remplacer les hydrocarbures courts qu'il manque à cette forme de pétrole. Cette pratique bute néanmoins sur le coût du diluant, et le Canada serait rapidement en pénurie de condensats s'il voulait utiliser des millions de barils/jour de bitume de cette façon.

La seconde méthode, qui est plus complexe, consiste à convertir le bitume en syncrude, une marque de pétrole commercialisé. Comparativement au pétrole brut conventionnel, le bitume est composé de beaucoup trop de carbone, mais pas assez d’hydrogène. Il faut donc transformer chimiquement le bitume, pour obtenir un mélange d'hydrocarbures proche d'un pétrole brut de bonne qualité. Les techniques s'apparentent à celles employées pour améliorer les fiouls résiduels des raffineries. Ceci implique donc trois étapes. Tout d’abord, la cokéfaction consiste à extraire le carbone par procédé thermique. À l’aide de grosses fournaises, appelées coqueurs, le bitume est chauffé à 468-498 °C, ce qui entraîne le craquage des fractions lourdes, produisant ainsi des fractions plus légères telles que l’essence, les gaz combustibles et le coke de pétrole. Cette étape peut aussi se faire à l’aide d’un solvant (désasphaltage) ou autres produits chimiques. Le désasphaltage repose sur le principe de la déstabilisation du bitume en présence de solvants, tel que le propane ou d’autres hydrocarbures légers. Les composés lourds et les composés légers se séparent selon leur différence de solubilité vis-à-vis le solvant utilisé, sans que leur structure chimique soit dégradée.

La deuxième étape de la transformation, l’hydrocraquage, consiste à ajouter de l’hydrogène, afin d’obtenir des distillats de meilleure qualité. L’hydrocraquage permet d’augmenter la production des liquides et de réduire les niveaux d’émission de dioxyde de soufre. Le principal inconvénient de l’hydrocraquage repose sur le fait que l’hydrogène doit nécessairement provenir du gaz naturel, ce qui va augmenter les émissions de gaz à effet de serre. De plus, cette étape nécessite beaucoup d’énergie.

Enfin, la dernière étape, qui est l’hydrotraitement, repose sur le retrait de molécules de soufre, d’azote et d’oxygène, permettant l’amélioration des caractéristiques moléculaires des hydrocarbures. Le résultat est un syncrude léger et pauvre en soufre, qui, à l'inverse d'un mélange naphta-bitume, peut être utilisé par n'importe quelle raffinerie. L’hydrotraitement nécessite des installations d’usines qui sont très coûteuses, permettant la fabrication d’hydrogène, le lavage de gaz sulfureux et la récupération du soufre.

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