Réseau électrique - Définition

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Généralités

Un réseau électrique est tout d'abord défini par le type de courant électrique qu'il utilise. Une fois fixé, ce choix engage l'avenir et est lourd de conséquences car les modifications sont a posteriori très délicates. Ensuite, lors de l'exploitation des réseaux, certaines grandeurs électriques doivent être surveillées régulièrement pour s'assurer que les conditions d'exploitation sont bien respectées.

Choix stratégiques de l'onde électrique

Les réseaux électriques actuels utilisent un courant alternatif triphasé sinusoïdal. Ce choix décisif découle d'un ensemble de raisons que nous présentons ici.

Nécessité de transporter l'électricité à une tension élevée

De la sortie de la centrale électrique au compteur de l'utilisateur final, l'électricité doit transiter sur un réseau électrique. Ces réseaux possèdent souvent la même structure d'un pays à l'autre, car le transport de fortes puissances sur de longues distances impose la minimisation de l'effet Joule.

Le transport d'électricité génère des pertes dues à l'effet Joule, qui dépendent de l'intensité I, de la tension U et de la résistance R de la ligne. Pour du courant triphasé on obtient :  P_{pertes Joule} = R I^2 \ = R\frac{P_{electrique}^2}{3U^2}\,

Pour une même puissance électrique transmise par la ligne, les pertes par effet Joule diminuent donc comme le carré de la tension : elles sont divisées par quatre quand la tension double, et par un million lorsque que la tension est multipliée par mille. Ainsi un mètre de câble à 400 V provoque autant de pertes que 1000 km du même câble à 400 kV. De même, une ligne d'une centaine de km avec une résistance de 3 Ω sur laquelle circule 400 MW générerait environ 4 MW de perte Joules si elle était exploitée à 200 kV, mais seulement 1 MW si elle était exploitée à 400 kV.

L'enjeu de ces pertes peut se mesurer aux montants d'énergie très importants que cela représente : pour la France, sur les 509 TWh produits en 2005, environ 25 TWh ont été perdus suite à ces phénomènes (pour cause d'effet Joule, d'effet couronne ou de pertes à vide), soit 5% de la production électrique française.

Les coûts de construction d'une ligne à 400 kV, 20 kV ou 220 V sont cependant très différents. Il faut donc trouver un optimum technico-économique entre les différents niveaux de tension, au vu du gain espéré (relatif à la diminution des pertes par effet Joule). On arrive ainsi à une structure multicouche des réseaux électriques, avec les réseaux transportant de grandes quantités d'énergie exploités à des tensions de plusieurs centaines de kilovolts, et la tension diminuant au fur et à mesure que les puissances transportées décroissent.

Courant alternatif ou continu ?

Le transport de puissances importantes sur de longues distances nécessite des tensions élevées. Il faut donc des transformateurs pour passer d'une tension à une autre ; or ils ne fonctionnent qu'avec du courant alternatif. Les changements de tension sur un système à courant continu n'est pas aussi efficace (plus de pertes) qu'en alternatif (transformateur). Le gain de l'élévation de tension serait contrebalancé par les pertes plus importantes lors des phases d'abaissement de la tension. De plus la coupure des courants dans les disjoncteurs est facilitée par le passage répétitif à zéro du courant alternatif. Ce dernier génère quand même des contraintes d'utilisation, notamment les 2 suivantes :

  • l'existence d'effets inductifs et capacitifs dans les lignes électriques qu'il faut compenser afin d'en limiter les effets sur la tension ;
  • la création d'un effet de peau qui concentre le courant à la périphérie des câbles électriques, augmentant ainsi les pertes Joules et nécessitant dans certains cas des dispositions particulières.

Bien que le courant alternatif se soit imposé universellement dans tous les réseaux, le courant continu reste utilisé pour certains projets particuliers où le recours à des stations de conversion onéreuses sont nécessaires (exemple des interconnexions sous-marines ou celles de très longues distance).

Pourquoi une tension sinusoïdale ?

La solution la plus commode pour produire de manière industrielle de l'énergie électrique est l'entraînement d'un alternateur par une turbine, le tout en rotation autour d'un axe. De manière naturelle ces installations produisent des tensions sinusoïdales.

En sens inverse et tout aussi naturellement, ces tensions sinusoïdales permettent l'entrainement régulier d'un moteur électrique.

Cette facilité d'utilisation à la production et à l'usage dans les machines tournantes constituent les deux grands atouts des la tension sinusoïdale .

Un système monophasé ou triphasé ?

Il est tout à fait possible de réaliser un réseau uniquement en courant monophasé. Les raisons qui ont conduit à adopter le réseau triphasé sont les avantages techniques et économiques importants qu'il présente :

  • Un alternateur de très forte puissance ne peut pas fonctionner en produisant un courant monophasé car la puissance fluctuante qui en résulte provoque une destruction de l'arbre de liaison entre l'alternateur et la source d'énergie mécanique qui le met en rotation. En effet, un système monophasé voit sa puissance instantanée passer par une valeur nulle à chaque oscillation de l'onde de tension (lorsque la tension ou l'intensité passe par zéro). La puissance instantanée est donc variable. Au contraire, les systèmes triphasés équilibrés assurent une puissance instantanée constante, c'est-à-dire "sans à coup", ce qui est important en électromécanique.
  • le transport d'une même puissance électrique en triphasé (sans neutre) nécessite une section de câbles conducteurs deux fois plus faible qu'en monophasé. L'économie qui en découle sur le coût de réalisation des lignes est notable.
  • Les courants triphasés peuvent générer des champs magnétiques tournants en répartissant d'une manière spécifique les bobinages sur un rotor. Or les machines électriques qui produisent et utilisent ces courants fonctionnent de manière optimale en régime triphasé.
  • Une distribution de l'électricité en courant triphasé avec fil de neutre permet de proposer pour un même réseau deux tensions d'utilisation différentes :
    • soit entre une phase et le neutre : par exemple 230 V en Europe
    • soit entre deux phases : par exemple 400 V en Europe

Fréquence des réseaux électriques

Choisir la fréquence d'un réseau est déterminant car on ne peut plus revenir en arrière une fois que le réseau a atteint une certaine taille.

Une fréquence élevée est particulièrement intéressante pour les transformateurs, permettant ainsi de réduire leur taille. Les ampoules électriques sont elles aussi mieux adaptées aux fréquences élevées (apparition de clignotements avec des fréquences faibles). D'autres applications, particulièrement celles faisant appel aux inductances (type moteur électrique, ou ligne de transport à grande distance), ont un meilleur rendement avec des fréquences faibles. C'est à la fin du XIXe siècle que cette question s'est posée, mais la faible dimension des réseaux permettait à cette époque d'ajuster la fréquence en fonction de l'utilisation que l'on devait en faire, et des fréquences de 16 Hz à 133 Hz coexistaient.

C'est Westinghouse, probablement avec les conseils de Tesla, qui imposa progressivement le 60 Hz aux États-Unis. En Europe, après que AEG eut choisi le 50 Hz, cette fréquence se diffusa petit à petit. On conserve aujourd'hui cet historique et les réseaux actuels sont exploités soit à 50 Hz, soit à 60 Hz.

Grandeurs électriques importantes

Les grands réseaux électriques nécessitent la surveillance constante de certains paramètres afin de maintenir le réseau, ainsi que les installations de production et de consommation qui y sont raccordées, dans les domaines d'utilisation prévus. Les principales grandeurs à surveiller sont la fréquence, la tension, l'intensité dans les ouvrages, et la puissance de court circuit.

Surveillance de la tension

Un grand réseau électrique possède de multiples niveaux de tension. Chaque niveau de tension est conçu pour une plage d'utilisation bien spécifique. Des tensions légèrement trop élevées conduisent à une usure prématurée du matériel, puis si elles sont franchement trop élevées à un « claquage » de l'isolant (cas des câbles souterrains, des câbles domestiques, ou des isolateurs des lignes électriques). Les surtensions très élevées (par exemple causées par la foudre) sur des conducteurs « nus » (c'est-à-dire sans isolant, ce qui est le cas des lignes électriques) peuvent conduire à des amorçages avec des objets proches, par exemple des arbres.

A contrario, des tensions trop basses par rapport à la plage spécifiée conduisent à un mauvais fonctionnement de beaucoup d'installations, que ce soit chez les consommateurs (par exemple les moteurs), ou sur le réseau en lui-même (mauvais fonctionnement des protections). De plus, des tensions basses sur les réseaux de transport d'électricité ont été la cause de grands incidents qui ont été responsables de la coupure de plusieurs millions de foyers (ex. du blackout grec le 12 juillet 2004 ou du 12 janvier 1987 en France).

Bien que les plages d'utilisation des matériels spécifient une marge de 5 à 10 % par rapport à la tension nominale, les grands opérateurs de réseaux privilégient actuellement une exploitation plutôt en tension haute.

Problématique de l'intensité ; IMAP

L'intensité est un paramètre particulièrement important à surveiller car elle peut entraîner la destruction de matériel coûteux (les transformateurs et les câbles), ou bien mettre en danger la sécurité des biens et des personnes (cas des lignes aériennes). L'IMAP (Intensité Maximale Admissible en Permanence) est l'intensité maximale à laquelle un ouvrage peut être exploité sans limitation de durée. Afin de faciliter l'exploitation des réseaux électriques, certains ouvrages peuvent être exploités à une intensité supérieure à l'IMAP mais pendant une durée limitée. De plus, certains ouvrages sont munis de protections particulières qui les mettent en sécurité si l'intensité dépasse une certaine valeur pendant une durée définie.

Le problème créé par une intensité trop élevée (c'est-à-dire une puissance transmise élevée) est un échauffement par effet Joule important. La conséquence de cet échauffement se manifeste de différente manière selon les ouvrages considérés :

  • pour les câbles électriques (présence d'une gaine isolante) : la chaleur produite par le câble doit être évacuée par l'intermédiaire de l'isolant électrique, qui est souvent mauvais conducteur de chaleur. De plus, les câbles étant souvent souterrains, cette chaleur s'évacue d'autant plus mal : en cas d'intensité trop élevée, le risque est la destruction physique du câble par surchauffe.
  • pour les transformateurs : les enroulements des transformateurs sont en général immergés dans un bain d'huile qui joue le rôle d'isolant électrique mais également de fluide caloporteur aéroréfrigérants. En cas d'intensité trop élevée, l'huile ne peut plus évacuer assez de chaleur et les enroulements risquent de se détériorer par surchauffe.
  • pour les lignes électriques aériennes (absence de gaine isolante) : les conducteurs s'echauffant par effet Joule, ils vont aussi s'allonger par le phénomène de dilatation thermique ; la ligne électrique étant maintenue à chaque extrémité par un pylone, cet allongement va se matérialiser par une réduction de la hauteur entre la ligne et le sol, ce qui conduit à un amorçage (arc électrique créant un court circuit) au vu des tensions importantes utilisées dans les ces réseaux.

Intensité de court circuit

L'intensité de court circuit (abrégée Icc) est une grandeur théorique qui correspond au courant que l'on pourrait mesurer en un point du réseau si ce point était relié directement à la terre. Elle est égale au courant circulant dans un ouvrage lors d'un défaut triphasé franc à la terre (c'est-à-dire qui relie directement les 3 phases à la terre). L'Icc est fournie principalement par les groupes de production. Elle est élevée dans les nœuds du réseau que sont les postes électriques (sur le réseau 400 kV européen, les valeurs sont de l'ordre de 30 à 50 kA). L'Icc devient de plus en plus faible au fur et à mesure que les niveaux de tension décroissent et que l'on s'éloigne des postes électriques.

Les matériels utilisés dans les postes électriques sont conçus pour résister à une valeur maximale d'Icc : au-delà, il y a un risque de casse de matériel en cas de court-circuit (causé par la foudre, le givre, une rupture de matériel...) Les bris de cette nature sont notamment causés par des phénomènes électrodynamiques puissants qui ont lieu lorsque des conducteurs sont soumis à des courants exceptionnellement forts.

Un réseau électrique a cependant tout intérêt à avoir une Icc élevée. En effet, cela permet l'amortissement des perturbations émises par les grandes industries (problème des flickers), ainsi qu'une réduction des chutes de tension lors des courts circuits sur le réseau. Pour le consommateur, l'Icc correspond à l'intensité maximum que peut founir le réseau : une Icc suffisante est donc indispensable au démarrage des gros moteurs électriques. De manière générale, une Icc élevée maintient une bonne qualité de l'onde électrique fournie aux clients.

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