Renormalisation - Définition

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Attitudes et interprétation

Les premiers bâtisseurs de la QED et d'autres théories quantiques des champs étaient en général mécontents de la situation. Il paraissait illégitime de faire quelque chose qui ressemblait à soustraire des infinités d'autres infinités en vue d'obtenir des résultats finis.

La critique de Dirac a été la plus durable. Encore en 1975, il écrivait (, p. 184) :

« La plupart des physiciens se satisfont parfaitement de cette situation. Ils disent «la QED est une bonne théorie, et nous n'avons pas à nous en soucier plus que cela. » Je dois dire que je suis très mécontent de cette situation, parce ce qu'ils appellent une « bonne théorie » implique de négliger des infinités qui apparaissent dans ses équations, ce qui introduit une part d'arbitraire. Cela ne ressemble pas du tout à des mathématiques sensées. Les mathématiques sensées impliquent de négliger des quantités quand elles sont petites – pas de les négliger parce qu'elles sont infinies et que vous n'en voulez pas ! »

Un autre critique important était Feynman. Malgré son rôle crucial dans la mise au point de la QED, il écrit ceci, encore en 1985, (, p. 128) :

« L'escroquerie que nous pratiquons ... est appelée techniquement renormalisation. Mais quelque subtil que soit le mot, c'est toujours ce que j'appellerais un processus dingue ! Le fait d'avoir à recourir à ce genre de prestidigitation nous a empêché de démontrer que la QED était logiquement cohérente mathématiquement. C'est surprenant que l'on n'ait pas encore réussi à montrer d'une manière ou d'une autre que la théorie est logiquement cohérente ; je soupçonne que la renormalisation n'est pas légitime mathématiquement.  »

Alors que les critiques de Dirac s'adressent à la procédure de renormalisation elle-même, celles de Feynman sont très différentes. Il est attaché à ce que toutes les théories des champs connues dans les années 1960 aient la propriété que les interactions deviennent infinies à des échelles de distance suffisamment petites. Cette propriété, connue sous le nom de pôle de Landau, suggère que toutes les théories quantiques des champs sont incohérentes. En 1974, Gross, Politzer et Wilczek montrent qu'une autre théorie quantique des champs, la chromodynamique quantique (QCD), ne présente pas de pôle de Landau. Feynman, avec la plupart des autres, reconnurent que la QCD pouvait être une théorie complètement cohérente.

Le malaise général se faisait sentir de façon pratiquement universelle dans les textes jusqu'aux années 1970 et 1980. Cependant, inspirés par le travail sur le groupe de renormalisation et la théorie effective des champs, et malgré le fait que Dirac et divers autres – tous de la vieille génération – ne retiraient pas leurs critiques, les attitudes ont commencé à changer, en particulier chez les jeunes théoriciens.

Kenneth Wilson et autres démontrèrent que le groupe de renormalisation est utile en théorie des champs statistique appliquée à la physique de la matière condensée, où il donne une compréhension importante des transitions de phase. En physique de la matière condensée, il existe un régulateur à courte distance réel : la matière cesse d'être continue à l'échelle des atomes. Les divergences à courte distance ne présentent pas de problème philosophique pour la physique de la matière condensée, puisque la théorie des champs n'est de toute manière qu'une représentation effective, lissée, du comportement de la matière. Il n'y a pas d'infinités parce que le cut-off est en réalité toujours fini, et c'est tout à fait logique que les grandeurs nues dépendent du cut-off.

Si la théorie quantique des champs est vraie tout au long, jusqu'au delà de la longueur de Planck (où il faut peut-être la raccorder à la théorie des cordes, à la La langue de cette portion d’article est : en causal set theory  ⇔  théorie causale des ensembles ou à quelque chose de ce genre), alors il n'y a peut-être aucun problème réel avec les divergences à courte distance de la physique des particules : toutes les théories des champs sont peut-être des théories des champs effectives. Dans un certain sens, cette position répond à l'ancienne attitude de ce que les divergences des théories quantiques des champs reflètent l'ignorance des hommes sur le fonctionnement intime de la nature, mais reconnaît en même temps que cette ignorance peut être maîtrisée, et que les théories effectives qui en résultent restent utiles.

En théorie quantique des champs, la valeur d'une constante physique dépend en général de l'échelle choisie pour effectuer la renormalisation, et il devient très intéressant d'examiner le comportement de ces constantes par le groupe de renormalisation, sous l'effet d'un changement d'échelle de renormalisation. Les constantes de couplage du modèle standard de la physique des particules varient de façon différente en fonction de l'échelle : les couplages de la chromodynamique quantique et du couplage d'isospin faible de la force électrofaible tendent à diminuer, tandis que le couplage de l'hypercharge faible de la théorie électrofaible tend à diminuer quand l'échelle de renormalisation augmente. À l'échelle colossale de 1015 GeV (bien au-delà des possibilités envisageables pour des accélérateurs de particules), elles deviennent toutes du même ordre de grandeur. Ceci est une motivation majeure pour les spéculations sur la théorie de grande unification. Au lieu d'être un problème insatisfaisant, la renormalisation est devenue un outil important pour étudier le comportement des théories des champs sous différents régimes.

Si une théorie comprenant une renormalisation (par ex. la QED) ne peut être raisonnablement interprétée que comme une théorie des champs effective, c'est-à-dire que comme une approximation reflétant notre ignorance sur le fonctionnement intime de la nature, alors il reste à trouver une théorie plus précise qui ne présente pas ces problèmes. Comme l'exprime Lewis Ryder, « En théorie quantique, ces divergences (classiques) ne disparaissent pas ; au contraire elles apparaissent pires. Et malgré le succès relatif de la théorie de la renormalisation, il reste un sentiment qu'il devrait y avoir une manière plus satisfaisante de gérer le problème » (, p. 390).

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