René Descartes - Définition

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Biographie

Enfance

Statue de René Descartes à La Haye-Descartes.

René Descartes est né le 31 mars 1596 à La Haye en Touraine (aujourd'hui rebaptisée "Descartes"), sa mère ayant quitté la ville de Rennes où s'était déclarée une épidémie de peste. Aussi il est le troisième enfant de Joachim Descartes, conseiller au parlement de Rennes et de Jeanne Brochard, fille du maire de Nantes ; sa mère meurt le 13 mai 1597, c’est-à-dire 13 mois et demi après la naissance du philosophe, et Descartes est élevé par sa grand-mère, son père et sa nourrice. Son père l'appelle son petit philosophe, car René ne cesse de poser des questions.

À onze ans, Descartes entre au Collège royal Henri-le-Grand de la Flèche, où enseignent les Jésuites dont le Père François Fournet, docteur en philosphie issus de l'Université de Douai et le père Jean François, qui l'initiera aux mathématiques pendant un an. Il y reste jusqu'en 1614. Il y a droit à un traitement de faveur, sans cours le matin en raison de sa santé fragile, et de ses dons intellectuels précoces. Il y apprend la physique et la philosophie scolastique et étudie avec intérêt les mathématiques ; il ne cesse de répéter, en particulier dans son Discours de la méthode combien ces études lui paraissent incohérentes et fort impropres à la bonne conduite de la raison. De cette période, nous ne conservons qu'une lettre d'authenticité douteuse (peut-être de l'un de ses frères), lettre que Descartes aurait écrite à sa grand-mère.

Jeunesse et études

En 1616, il obtient son baccalauréat et sa licence de droit à l'université de Poitiers. Après ses études, il part vivre à Paris. De cette époque date un probable traité d'escrime. Il finit par se retirer en solitaire dans un quartier de la ville pour se consacrer à l'étude pendant deux années de vie cachée : Heureux qui a vécu caché est alors sa devise, il aura coutume d'affirmer, rejetant les artefacts et les prétentions de la reconnaissance sociale ou de la célébrité, qu'il préfère en toute chose avancer masqué. Il a déjà entrepris d'étudier le grand livre du monde.

Souhaitant voir du pays pendant sa jeunesse, l'excité entraîné par un « coup de foie », comme il se décrit plus tard, s'engage en 1618 en Hollande à l'école de guerre de Maurice de Nassau, prince d'Orange. Il fait la même année la connaissance du physicien Beeckman. Ce savant apothicaire avait coutume de cerner des problèmes non résolus de mathématiques et de physique, avec son cercle d'amis, et d'afficher les questions en souffrance sous forme de concours en des lieux de passage, proposant une récompense à celui qui ajouterait une voie vers une solution valable. Alors que maintes questions n'avaient trouvé aucun penseur et encore moins de réponse, un jeune cavalier français inconnu planche sur les problèmes des affichettes et rafle les récompenses avec brio, les solutions simples fascinent le cercle flamand et ainsi naît une amitié scientifique. Le jeune Descartes sort de l'ombre et adresse les premières lettres que nous avons conservées, ainsi qu'un compendium érudit sur la musique baroque, l'Abrégé de musique, objet de sa fascination du moment, à son aîné Isaac Beeckman. Le physicien Beeckman, promu en véritable détecteur de talent, tient un journal de recherches, il y relate les idées sur les mathématiques, la physique, la logique, la chimie etc. que Descartes lui communique au gré de leurs discussions à bâton rompu ou de leurs échanges épistolaires ; Descartes consacre ses heures de loisir, mais aussi de veille imposée au corps de garde, à la lecture et à la réflexion, à l'étude des mathématiques et des phénomènes physiques.

En 1619, Descartes quitte la Hollande pour le Danemark, puis l'Allemagne, où la guerre de Trente Ans éclate, et assiste au couronnement de l'Empereur Ferdinand à Francfort. Il s'engage alors dans l'armée du duc Maximilien de Bavière.

Cette année-là, Descartes s'intéresse à l'ordre légendaire de la Rose-Croix dont il ne trouvera jamais aucun membre. Son appartenance à cette fraternité, de même que l'existence même de cette fraternité à cette époque, est contestée. Toujours est-il que dans le contexte qui suivit la condamnation des écrits favorables à l'héliocentrisme (1616), en France et en Allemagne, on parlait beaucoup des idées de cette prétendue fraternité. Il nia y avoir appartenu. Il émet un projet, Le trésor mathématique de Polybe le Cosmopolite, dédié « aux érudits du monde entier, et spécialement aux F.R.C. [Frères Rose-Croix], très célèbres en G. [Germanie] »

C'est pendant ses quartiers d'hiver (1619 - 1620) à Neubourg que se révèle à lui une pensée décisive pour sa vie. Le 10 novembre 1619, il fait en effet trois songes exaltants qui l'éclairent sur sa vocation :

« Le 10 novembre 1619 lorsque rempli d'enthousiasme je trouvai le fondement d'une science admirable… » (Olympiques, fragment)

Baillet en a fait le récit, dont voici le début :

« La recherche qu'il voulut faire de ces moyens, jeta son esprit dans de violentes agitations, qui augmentèrent de plus en plus par une contention continuelle où il le tenait, sans souffrir que la promenade ni les compagnies y fissent diversion. Il le fatigua de telle sorte que le feu lui prît au cerveau, et qu'il tomba dans une espèce d'enthousiasme, qui disposa de telle manière son esprit déjà abattu, qu'il le mit en état de recevoir les impressions des songes et des visions.
Il nous apprend que le dixième de novembre mille six cent dix-neuf, s'étant couché tout rempli de son enthousiasme, et tout occupé de la pensée d'avoir trouvé ce jour-là les fondements de la science admirable, il eut trois songes consécutifs en une seule nuit, qu'il s'imagina ne pouvoir être venus que d'en haut. »

Il raconte alors comment il s'enferme dans son poêle et conçoit sa méthode. La légende raconte que, alité, il regarde le plafond au plâtre fissuré et imagine un système de coordonnées, permettant de décrire lignes, courbes et figures géométriques par des couples de nombres arithmétiques, dont il ne reste qu'à analyser les propriétés.

Il fait alors vœu d'un pèlerinage à Notre-Dame de Lorette à Loreto (accompli finalement en 1623), renonça à la vie militaire et, de 1620 à 1622, il voyage en Allemagne et en Hollande, puis revient en France. Ce qu'il a écrit pendant cette période se trouve dans un petit registre mentionné dans l'inventaire fait à Stockholm après sa mort, mais il est aujourd'hui perdu. Il nous est néanmoins connu par Baillet et par Leibniz qui en avait fait des copies. Ces copies furent retrouvées par Foucher de Careil et publiées en 1859 sous le titre Cogitationes Privatae. Mais il se trouve qu'elles ont depuis de nouveau disparu. De cette époque nous possédons également un De Solidorum elementis.

En 1622, Descartes estime sa fortune suffisante pour ne pas avoir à travailler ; il règle ses affaires de famille et recommence à voyager, visitant l'Italie. De l'été 1625 à l'automne 1627, Descartes est de nouveau en France. Il rencontre le père Marin Mersenne à Paris et commence à être connu pour ses inventions en mathématiques. Il fréquente le monde, cherche la compagnie des savants et se bat en duel. Mais, à l'automne 1627, chez le nonce du pape, le cardinal de Bérulle lui fait obligation de conscience d'étudier la philosophie. Il part alors à la campagne, en Bretagne, pendant l'hiver 1627 - 1628.

C'est de cette époque (1622 - 1629) que datent divers traités de mathématiques (sur l'algèbre, l'hyperbole, l'ellipse, la parabole) connus par le journal de Beeckman, et d'autres petits traités qui sont perdus. L'œuvre la plus importante de cette période s'intitule les Règles pour la direction de l'esprit.

Les Provinces-Unies

Buste René Descartes - sculpté par JS Brun - Château de Versailles

Cherchant la solitude, il décide de s'installer dans les Provinces-Unies ; il y fait d'abord un bref séjour à l'occasion duquel il va voir Beeckman, mais revient probablement à Paris pendant l'hiver 1628, puis s'installe définitivement en Hollande au printemps 1629. Sa vie est entièrement consacrée à l'étude. Il s'inscrit à l'Université de Franeker. Il continue pourtant de se déplacer (de 1629 à 1633 : Franecker, Amsterdam, Leyde, Deventer, Egmond). Souhaitant ne pas être dérangé, il n'indique jamais sur ses lettres le vrai lieu où il se trouve, mais donne le nom de quelques villes.

À Amsterdam, Descartes vit au centre de la ville, dans la Kalverstraat, le quartier des bouchers, ce qui lui permet de faire de nombreuses dissections. Il rencontre des savants : Reneri, Hortensius, Plempius, Schooten, etc. Ses rencontres, comme sa volonté de vivre solitaire, sont ainsi toujours subordonnées à sa passion de la recherche. Il commence en 1629 un Traité de métaphysique (aujourd'hui perdu), mais il ne semble pas que ses pensées se soient encore dirigées vers les thèses des Méditations métaphysiques. S'il formule néanmoins le 15 avril 1630 sa théorie de la création des vérités éternelles, c'est qu'il s'interroge sur la place de la science ; sa métaphysique se développe ainsi d'après ses réflexions de physique, et il ne tire pas encore au clair tous les fondements qui seront exprimés dans ses ouvrages ultérieurs.

Mais Descartes s'occupe également de mathématiques : il en réforme le système de notation, introduisant à la suite de Viète et d'Harriot, l'usage des lettres de l'alphabet latin pour désigner des grandeurs mesurables. C'est en 1631, quand Gollius lui proposa le problème de Pappus, qu'il découvre les principes de la géométrie analytique. Il commence les Météores à l'occasion de l'observation des parhélies (observations faites à Rome, en 1629). Il étudie l'optique, redécouvre les lois de la réfraction, et achève la rédaction de la Dioptrique. Enfin, Descartes veut expliquer tous les phénomènes de la nature : il étudie les êtres vivants et fait de nombreuses dissections à Amsterdam pendant l'hiver 1631 - 1632. De là viendront le Monde et le Traité de l'homme. Les observations anatomiques de Descartes nous sont connues par les copies de Leibniz et des fragments (Excerpta anatomica, Primae cogitaniones circa generationem animalium, Partes similares et excrementa et morbi, ce dernier daté de 1631). Mais les dates de certains textes sont incertaines (pour certains jusqu'à 1648 peut-être).

Les lettres de cette période le montrent tout occupé de science ; on trouve néanmoins quelques remarques d'esthétique sur la musique. Elles nous renseignent également sur son caractère susceptible et dur, méprisant l'irrésolution. Dans sa lettre à Mersenne du 4 novembre 1630, Descartes dit songer à faire un traité de morale. L'infatigable père Mersenne se trouve au centre d'un réseau de mathématiciens et de scientifiques de nombreux pays. La biographie du religieux Mersenne montre qu'il est l'animateur incontournable de la vie scientifique à Paris et un des premiers vigoureux partisans de la pensée de Descartes en France, alors que ce dernier voyageur n'a publié aucun ouvrage phare.

Condamnation de Galilée

En novembre 1633, Descartes apprend que Galilée a été condamné. Il renonce par prudence à publier le Traité du monde et de la lumière qui ne paraîtra qu'en 1664.

Le Saint-Office, le 24 février 1616, avait condamné les propositions : Sol est centrum mundi et omnino immobilis motu ; en 1620, un décret de la Congrégation des cardinaux avait autorisé de supposer le mouvement de la Terre par hypothèse. Mais l'ouvrage de Galilée, Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo (le dialogue sur les deux grands systèmes du monde), fut condamné le 22 juin 1633. L'hypothèse du mouvement de la Terre selon le modèle copernicien (héliocentrisme) ne pouvait être prise en compte que s'il était clair que l’analyse était effectuée dans une perspective purement mathématique.

Descartes reçoit de Beeckman l'année suivante (1634) le livre de Galilée qui lui valut cette condamnation. Il décide alors de donner une autre orientation à son œuvre : ce sera le Discours de la méthode (en 1637) et les essais qui le suivent, en particulier les Méditations métaphysiques (1641) et les Principes de la philosophie (1644).

À la fin de 1633, Descartes quitte Deventer pour Amsterdam ; en 1635, il est à Utrecht. Il passe ensuite à Leyde (où il avait déjà été en 1630) et s'arrête à Santpoort en 1637.

Descartes et la reine Christine.

De 1637 à 1641, Descartes vit principalement à Santpoort. Période heureuse, il publie en français le Discours de la méthode et polémique avec ses contradicteurs, Jean de Beaugrand, Pierre de Fermat, Gilles Personne de Roberval, Plempius et Jan Stampioen ; il fait venir auprès de lui Hélène Jans, une simple servante devenue compagne et amie. En août 1635, il a et reconnaît avec Hélène une fille baptisée, Francine. Mais la fillette Francine meurt en septembre 1640, laissant un Descartes épleuré, montrant sans fausse pudeur des larmes à ses amis. Un mois plus tard, Descartes perd son père, âgé de soixante-dix-huit ans et doyen du Parlement de Bretagne. Ces deux disparitions rapprochées seront la période du « plus grand regret qu'il eût jamais senti de sa vie ». Le 31 mars 1641, l'auteur reconnu s'installe dans le petit château d'Endegeest, agrémenté d'un beau jardin, de vergers et de prairies. C'est là qu'il reçoit l'abbé Picot, l'abbé de Touchelaye, le conseiller Jacques Vallée Desbarreaux et de nombreux amis. Vers 1640, d'après le De metallorum transmutatione de Daniel Morhof (1673), il fait quelques expériences d'alchimie (ou chimie) avec son ami Cornelis Van Hogelande, mais il rejette la théorie des trois Substances (Soufre, Sel, Mercure) de Paracelse

En 1641, il répond aux objections de Hobbes contre ses Méditations métaphysiques, publiées en latin, et doit subir les premiers feux d'une longue controverse, dite querelle d'Utrecht, lancée par le prédicateur Voetius. Les partisans de Voetius, en particulier son élève et prête-nom Schoock, accusent publiquement Descartes et son correspondant d'Utrecht, Henricus Regius de soutenir Copernic, de nommer l'âme un "accident". Ils l'accusent également d'athéisme et n'hésitent pas à pourfendre en chaire le philosophe, à réclamer qu'il subisse le sort réservé à Toulouse en 1619 à Giulio Cesare Vanini. Descartes fait alors intervenir l’université de Groningue et l’ambassadeur de France afin que cessent ces menaces.

Suède et fin de vie

Il rencontre Élisabeth de Bohême, fille de l'électeur Palatin détrôné en exil en Hollande, en 1643, et commence une abondante correspondance avec la jeune femme, traitant notamment d'éthique.

En 1646, alors que se poursuit la querelle d'Utrecht, il se fâche avec son correspondant, Henricus Regius, qui offre une alternative matérialiste à la métaphysique et à l'épistémologie cartésienne. Il charge un de ses élèves, Tobias Andreœ, de développer ses arguments contre Regius. Deux ans plus tard, il publie contre Regius Notes sur un Certain Manifeste.

L'intérêt et les incessantes interrogations pertinentes de la princesse Elizabeth stimulent le penseur qui s'attèle à la rédaction du Traité des Passions (1649). Faisant trois séjours en France (1644, 1647 et 1648), il rencontre au cours du second Pascal, et prétendra lui avoir inspiré ses expériences du Puy-de-Dôme sur le vide.

En 1650, il accepte l'invitation de la reine Christine à Stockholm, résidant chez l'ambassadeur de France, Pierre Chanut. La rigueur du climat et l'horaire matinal de ses entretiens avec la reine avant 5 heures du matin sont inhabituels au penseur et auraient eu raison, selon la version officielle, de sa santé. Il n'a hâte que de partir au retour du printemps, mais serait mort d'une pneumonie le 11 février 1650.

L'hypothèse d'un empoisonnement à l'arsenic a toutefois été développée par Eike Pies dans son livre Der Mordfall Descartes (« L'Affaire Descartes »), paru en 1996 puis dans La Mort mystérieuse de René Descartes (« Der rätselhafte Tod des René Descartes », non traduit en français) de Theodor Ebert. Selon cette version, il aurait été empoisonné par l'aumônier François Viogué, qui aurait craint que l'influence cartésienne ne dissuade la reine Christine de se convertir au catholicisme. Pour le philosophe catholique Jean-Luc Marion, cette question « n'a aucun intérêt ».

En 1667, les restes de Descartes furent rapatriés en France. Depuis 1819, sa tombe est à l'église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Bien que la Convention nationale, en 1792, ait projeté de transférer ses cendres au Panthéon de Paris avec les honneurs dus aux grands hommes, ses restes sont, deux siècles plus tard, toujours « coincés » entre deux autres pierres tombales - celles de Jean Mabillon et de Bernard de Montfaucon - dans une chapelle abbatiale de l'église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. L'arrêté de la Convention n'a toujours pas été appliqué.

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