Radar météorologique - Définition

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Limitations et artéfacts

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L'interprétation des données radar dépend de plusieurs hypothèses qui ne sont pas toujours remplies:

  • Atmosphère standard
  • Obéissance à la loi de Rayleigh et relation directe entre le retour et le taux de précipitation
  • Le volume sondé par le faisceau est rempli de cibles (gouttes, flocons, etc.) météorologiques, toutes du même type et à une concentration uniforme
  • Aucune atténuation
  • Aucun phénomène d'amplification
  • Les lobes latéraux sont négligeables.
  • La forme du faisceau à mi-puissance peut être représentée de façon approximative par une courbe gaussienne.
  • Les ondes incidentes et rétrodiffusées sont polarisées linéairement.
  • La diffusion multiple est négligeable (pas de retour à multiples réflexions sur différentes cibles).

Le faisceau radar se propage dans l'atmosphère et rencontre bien des choses en plus de la pluie ou de la neige. Il faut donc savoir reconnaître la signature de ces artéfacts pour pouvoir interpréter correctement les données.

Propagation anormale (atmosphère non standard)

L'on prend comme hypothèse que le faisceau radar se déplacera dans une atmosphère standard où la température diminue selon une courbe normale avec l'altitude. Le calcul de la position des échos et leur altitude dépend de cette hypothèse.

Suréfraction

Il arrive souvent que des inversions de températures se produisent à bas niveau (ex. refroidissement nocturne par ciel clair) ce qui change la stratification de l'air. L'indice de réfraction de l'air, qui dépend de la température, de la pression et de l'humidité, change donc anormalement. Il augmente au lieu de diminuer dans la couche en inversion de température ce qui fait recourber le faisceau radar vers le sol. Cela a pour effet que le faisceau frappe le sol et retourne au radar. Comme ce dernier s'attend à un retour d'une certaine hauteur, il place erronément l'écho.

Ce type de faux échos est facilement repérable en regardant une séquence d'images s'il n'y a pas de précipitations. On y voit dans certains endroits des échos très forts qui varient d'intensité dans le temps sans changer de place. De plus, il y a une très grande variation d'intensité entre points voisins. Comme cela se produit en inversion nocturne, le tout commence après le coucher du soleil et disparait au matin.

Par contre, si l'inversion est due à une inversion pré-frontale (front chaud), il peut y avoir de la précipitation mêlée avec la propagation anormale ce qui rend la détection plus problématique.

L'extrême de ce phénomène se produit quand l'inversion est si prononcée et sur une mince couche que le faisceau radar devient piégé dans la couche en guide d'onde et rebondit plusieurs fois au sol avant de revenir au radar. Ceci crée des échos de propagation anormale en bandes concentriques multiples.

Infraréfraction

Si la température de l'air diminue plus rapidement que dans l'atmosphère standard, comme dans une situation d'air instable (convection), l'effet inverse se produit. Le faisceau radar est alors plus haut que l'on pense. Cette situation est difficile à repérer.

Des cibles hors de la loi de Rayleigh

Une des hypothèses de l'interprétation radar est que le retour des cibles est proportionnel au diamètre des cibles. Ceci se produit quand les gouttes sont de l'ordre de 10 fois inférieures à la longueur d'onde utilisée. Si les cibles sont trop petites, le dipôle des molécules d'eau contenues dans la cible (ex. gouttelettes de nuage de quelques microns de diamètre) sera trop petit pour être excité et le retour sera invisible pour le radar.

Par contre si la cible s'approche de la longueur d'onde (ex. grêle de 5 cm), le dipôle de la cible sera excité de façon non linéaire et le retour ne sera plus proportionnel. Cette zone est appelée la diffusion selon la théorie de Mie.

Donc un radar météorologique opérationnel (5 et 10 cm en général) ne peut percevoir la bruine ou les nuages. D'un autre côté, si la réflectivité dépasse 50 dBZ, il est très probable que nous ayons affaire à de la grêle mais on ne peut en préciser le taux de précipitation.

Résolution, volume sondé non rempli et gradients de réflectivité

Vue par un profileur à grande résolution en haut et par un radar météorologique typique en bas.
Un orage tornadique vu par deux radars très près l'un de l'autre. En haut, l'image du haut est d'un Radar météorologique d'aéroport TDWR et celle du bas d’un NEXRAD.

Le faisceau radar a une certaine largeur et on prend des données avec un nombre défini d'impulsions sur chaque angle de visée ainsi qu'à des angles d'élévation discrets. Il en résulte que nous avons des données qui moyennent les valeurs de réflectivité, de vitesse et de polarisation sur des volumes de cibles. Plus on est loin, comme on l'a vu plus haut, plus ce volume est grand.

Dans la figure de gauche, on voit en haut une coupe verticale effectuée lorsqu'un orage est passé au-dessus d'un profileur de vents. Ce dernier a une résolution de 150 m selon la verticale et de 30 m selon l'horizontale ce qui fait qu'on peut voir énormément de détails. On peut entre autres voir que la réflectivité change rapidement à certains endroits (gradient).

Comparons cette image à celle du bas, simulée à partir des caractéristiques d'un faisceau radar météorologique de 1 degré de largeur, à une distance de 60 km. On voit très clairement la dégradation qui est particulièrement importante dans les zones où le gradient est fort. Ceci montre comment les données des radars peuvent facilement déroger de l'hypothèse que le volume sondé est rempli de cibles uniformément disposées. De plus, le faisceau radar moyennant sur une plus grande surface, il incorpore des régions qui n'ont pas de cibles avec d'autres en ayant ce qui agrandit l'image des précipitations au-delà de la réalité. Ces effets de lissage et d'étalement des zones augmentent avec la distance ce qui peut laisser croire à un utilisateur que les zones de précipitations qui s'éloignent du radar deviennent moins intenses.

L'image de droite montre les données provenant d'un orage violent. L'image du haut, provenant d'un radar TDWR, a une résolution double de celle du NEXRAD. Nous pouvons beaucoup mieux voir les détails qui aideront le météorologiste à reconnaître la configuration dangereuse d'un écho en crochet annonciatrice d'un tornade. La diminution de la largeur du faisceau, en augmentant le diamètre de l'antenne ou en diminuant la longueur d'onde de sondage, est donc un facteur important pour mieux se conformer à l'hypothèse d'un volume rempli uniformément mais ne fait rien pour la dégradation avec la distance.

Cibles non météorologiques

Migration des oiseaux vu par radar.

En plus de la pluie, de la neige, du verglas et autres précipitations, le radar météorologique peut recevoir des échos provenant d'autres sources. Les principaux polluants des données sont :

  • Les oiseaux, surtout en temps de migration
  • Les insectes à très basse altitude
  • Les leurres électroniques que peuvent laisser tomber des avions militaires (voir Paillette)
  • Les obstacles solides comme les montagnes, les édifices, les avions
  • La réflexion venant de plans d'eau à angle rasant.

Chacun de ces artéfacts a des caractéristiques propres qui permettent de les reconnaître de la vraie précipitation pour un œil averti. Nous verrons plus bas qu'il est possible en combinant la réflectivité, les vitesses Doppler et la polarisation de les filtrer.

Éoliennes

Réflectivité (gauche) et vitesse radiale (droite) au sud-est d'un radar. Les zones encerclées proviennent d'un parc d'éoliennes

Les parcs d'éoliennes constituent une nouvelle source de faux retours. En effet, les pales de ces appareils sont faites de métal et peuvent donc retourner un signal assez intense vers le radar quand elles sont situées à une hauteur suffisante pour être dans la ligne de visée du faisceau. Bien que l’écho provenant d’une seule éolienne loin du radar peut être négligeable dans le volume sondé, un parc d'éoliennes situé près du radar donnera un retour total non négligeable. De plus, les pales étant en rotation, les données de vitesse radiale seront non nulles.

Ainsi des échos provenant d'un parc d'éoliennes peuvent être prise par erreur pour des précipitations ou se mêler à celles-ci. Dans ce dernier cas, si l'orientation des pales est correcte, on peut même noter un doublet de vitesses s'éloignant et se rapprochant du radar qui ressemblent à un mésocyclone et qui sera détecté erronnément par le programme de traitement des données. Ceci est arrivé par exemple en 2009 à Dodge City (Kansas), États-Unis, et a déclenché une alerte à la tornade inutile quand une signature tornadique de rotation a été analysé dans les données du radar NEXRAD local.

Finalement, les éoliennes sont un obstacle physique qui coupe partiellement le faisceau radar et donc amène des problèmes de zones d'ombres totales ou partielles. Comme les autres blocages, ceci diminue le retour provenant des précipitations en aval du parc d'éoliennes ce qui amènera à leur sous-estimation.

Atténuation

Exemple de forte atténuation par une ligne d'orages passant au-dessus d'un radar de 5 cm de longueur d'onde (flèche rouge). Source: Environnement Canada.

Toute onde électromagnétique peut être absorbée en passant dans un milieu quelconque car elle excite les molécules qui le composent. Cela peut donc enlever une partie des photons pour faire changer le niveau énergétique du milieu. L'air est très peu absorbant mais la molécule d'eau l'est. Plus la longueur d'onde porteuse du faisceau radar se rapproche de celle des gouttes d'eau (0,1 à 7 millimètres), plus le dipôle de ces molécules sera excité et plus l'onde sera atténuée par la précipitation rencontrée.

En conséquence, les radars météorologiques utilisent généralement une longueur d'onde de 5 cm ou plus. À 5 centimètres, lors de pluies intenses, on note une perte de signal en aval de celles-ci sur l'image radar (voir image). L'atténuation est cependant de nulle à acceptable dans des précipitations faibles à modérées et dans la neige. C'est pourquoi la plupart des pays des régions tempérées (Canada et une bonne partie de l'Europe) utilisent cette longueur d'onde. Elle nécessite une technologie moins coûteuse (magnétron et de plus petite antenne). Les nations ayant une prédominance d'orages violents utilisent une longueur d'onde de 10 centimètres qui est atténuée de façon négligeable dans toutes les conditions mais est plus coûteuse (klystron). C'est le cas des États-Unis, de Taïwan et d'autres.

Les longueurs d'onde de moins de 5 cm sont fortement atténuées, même par pluie modérée, mais peuvent avoir une certaine utilité à courte portée, là où la résolution est plus fine. Certaines stations de télévision américaines utilisent des radars de 3 centimètres pour couvrir leur auditoire en plus du NEXRAD local.

Bandes brillantes

En haut, CAPPI de 1,5km d'altitude fortement contaminé par la bande brillante (échos en jaune). La coupe verticale du bas montre qu'entre 1,5 et 2,5 km les échos radar sont plus intenses. C'est la bande brillante qui est causée par la fonte de flocons de neige (Source: Environnement Canada).

Comme nous l'avons vu antérieurement, le retour de réflectivité est proportionnel au diamètre, au nombre et à la constante diélectrique de la cible. Entre un flocon de neige et une goutte de pluie de même masse, il y a une différence importante de ces trois variables. Ainsi le diamètre d'un flocon est beaucoup plus grand que celui de la goutte mais la constante diélectrique est beaucoup plus petite. Les flocons tombant plus lentement, ils ont une plus grande concentration que les gouttes mais celles-ci se combinent souvent par collisions pour donner de plus grosses cibles. Lorsque l'on tient compte de tous ces facteurs et que l'on calcule la réflectivité de chacune de ces deux cibles, on se rend compte que la différence est d'environ 1,5 dBZ en faveur de la goutte.

Lorsque de la neige, en altitude, descend vers le sol et rencontre de l'air au-dessus du point de congélation, elle se transforme en pluie. Donc on s'attend à ce que la réflectivité augmente d'environ 1,5 dBZ entre une donnée radar prise dans la neige et une autre prise dans la pluie. À l'altitude où la neige commence à fondre, il y a cependant un rehaussement des réflectivités jusqu'à 6,5 dBZ. Qu'arrive-t-il?

À ce niveau, nous avons affaire à des flocons mouillés. Ils ont encore un diamètre important, se rapprochant de celui des flocons de neige, mais leur constante diélectrique s'approche de celle de la pluie et ils tombent lentement. Nous avons alors les trois facteurs favorisant une plus grande réflectivité. Il en résulte une zone qu'on appelle la bande brillante. Dans les données radar, sur PPI ou CAPPI, qui croisent ce niveau, l'on verra alors un rehaussement des intensités des précipitations qui n'est pas réel.

Utiliser les taux de précipitations contaminés par la bande brillante conduira donc à une surestimation des quantités de pluie au sol. Plusieurs techniques ont été développées pour filtrer cet artéfact par plusieurs services météorologiques. Le principe général est de repérer le niveau de la bande brillante et d'essayer d'utiliser les données dans la pluie sous celle-ci, si possible, ou sinon dans la neige au-dessus, mais avec correction.

Géométrie du faisceau

Le faisceau émis n'est pas un pinceau comme un faisceau laser mais il a plutôt la forme d'un patron de diffraction par une fente puisque l'onde émise sort par la fente d'un tube guide d'onde au point focal d'une antenne parabolique. Le pic central (le faisceau radar) est plus ou moins une courbe gaussienne mais il y a des pics secondaires qui peuvent également illuminer les cibles hors de l'axe principal. Tout est fait pour minimiser l'énergie des pics secondaires à une faible fraction du pic central mais ils ne sont jamais nuls.

Lorsque le faisceau radar passe sur un écho particulièrement fort, le retour de l'énergie du pic central est dans l'axe de visée. Les retours des pics secondaires (voir lobe secondaire) arrivent, quant à eux, au même temps où le pic central illumine un autre angle de visée. Comme le récepteur note l'angle de visée du pic central, les retours des pics secondaires sont donc notés à un mauvais azimuth ce qui crée un faible faux retour de chaque côté de notre vrai écho.

Patron idéalisé de la distribution d'énergie d'un faisceau radar(Pic central à 0 et pics secondaires à différents angles de chaque côté de celui-ci)
Diffraction par un trou circulaire simulant le patron d'émission vu par les cibles
Les forts échos retournés par des collines par temps dégagé (pixels rouges et jaunes) et les retours mal placés venant des lobes secondaires (bleus et verts)

Réflexions multiples

Réflexion du faisceau radar par la grêle.

Le faisceau radar est réfléchi par la cible dans toutes les directions. En général, le retour venant de réflexions multiples dans le nuage est négligeable. Dans certaines conditions où le cœur de précipitation est intense (comme la grêle), une partie importante de l'énergie du faisceau radar sera réfléchie vers le sol. Comme ce dernier est très réflectif, il en retournera une bonne partie vers le nuage. La zone de précipitation intense en retourna finalement une partie vers le radar. On aura alors une réflexion à trois corps.

Comme cet écho supplémentaire arrive plus tard que l'écho initial du nuage, à cause du plus long trajet, il sera placé erronément à l'arrière des vrais échos de précipitations. Sur un PPI ou un CAPPI, il prendra l'aspect d'un cône ou d'une zone allongée de faible intensité derrière le cœur le plus intense des précipitations. Dans une coupe verticale, on verra que ce cône ne touchera pas le sol. Il s'étendra selon une direction radiale le long d'un angle d'élévation par rapport au radar et passant pas le cœur.

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