Pont - Définition

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Conception

La conception d'un pont s’insère en général dans une démarche globale de projet routier ou ferroviaire prenant en compte à chaque niveau d’avancement des contraintes environnementales et fonctionnelles de plus en plus détaillées. Aux quatre grandes étapes d’un projet, à savoir, les études préliminaires, l’avant-projet, le projet et le chantier correspondent pour un pont les stades suivants : choix de familles de solutions et de prédimensionnement, puis avant-projet d’ouvrage d’art, projet et enfin réalisation. Selon l’environnement, le choix de l’ouvrage peut influencer le projet lui-même.

Implantation et caractéristiques de l'ouvrage

La localisation d'un ouvrage d'art est souvent imposée par le projet d'infrastructure, excepté dans le cas de franchissement de brèches aux caractéristiques particulières où le choix entre plusieurs solutions de tracé dépend essentiellement du choix de l’ouvrage. Si le tracé ne comprend pas d'ouvrage exceptionnel, le poids financier des ponts est, en principe, faible devant celui des terrassements. Dans le cas contraire, l'implantation de l'ouvrage, et le choix de son type, doivent être examinés avec soin afin d’optimiser toutes les contraintes environnementales, techniques et financières. Ainsi l’analyse des franchissements de la vallée du Tarn en Aveyron (France) ou celui de la vallée du Loing dans le Loiret pour l’autoroute A19, ont conduit à réaliser les ouvrages les plus longs dans leur catégorie au niveau national, viaduc multihaubané pour l’un et pont mixte acier-béton pour l’autre.

Les caractéristiques géométriques dépendent essentiellement de la nature de la voie portée, mais peuvent être légèrement modifiées, afin de simplifier le projet du pont, améliorer son fonctionnement mécanique ou offrir une plus grande liberté dans le choix d'un type d'ouvrage dont le mode d'exécution comporte des exigences. En règle générale, les grands ouvrages doivent, dans toute la mesure du possible, être projetés droits : un biais, même modéré, complique l'exécution et induit un fonctionnement mécanique qui peut s'écarter sensiblement des modèles de calcul de la résistance des matériaux usuelle, surtout lorsqu'il s'agit de grands ouvrages construits par phases.

Avec les progrès accomplis dans l'exécution des terrassements, la question de la longueur, voire du remplacement du pont par un remblai, en l'absence de contraintes majeures d'ordre esthétique ou hydraulique, peut se poser, surtout sur le plan économique. Cependant, un remblai neutralise une bande de terres d'autant plus importante que sa hauteur est grande, ce qui peut poser des problèmes si les terres en question ont une grande valeur agricole. Il est alors préférable de projeter un viaduc avec des travées de portées modérées.

Données environnementales

Topographie

L’établissement d'un relevé topographique le plus précis possible et la première étape. La zone relevée doit être suffisamment large pour d’une part envisager toutes les possibilités d’ouvrages, et d’autre part définir les possibilités d'accès, les aires disponibles pour les installations du chantier, les stockages ou toute autre installation annexe.

Hydraulique et environnement

Dans le cas du franchissement d'un cours d'eau, le régime hydraulique doit être parfaitement défini : fréquence et importance des crues, débit solide, charriage éventuel de corps flottants susceptibles de heurter les piles. Dans la démarche moderne de conception des ponts, une étude hydraulique est en général faite en amont. En France cette étude a pour objet d’évaluer les incidences de la réalisation de l'ouvrage sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, mais aussi d'appréhender l'impact du cours d'eau sur l’ouvrage, et de déterminer l'ensemble des données nécessaires à sa conception et à son dimensionnement et à celui des aménagements connexes. Elle doit également définir les mesures de protection des écosystèmes aquatiques et de la qualité de la ressource en eau.

Animation d'affouillement dû au courant sur une semelle d'une pile de pont immergée.

La présence d'un ouvrage en travers d'un cours d'eau introduit une perte de charge singulière, portant sur la hauteur d'eau et la vitesse d'écoulement. Le pendant de cette dissipation d'énergie est, pour l'ouvrage, une force de traînée qui, en cas de résistance insuffisante de l'ouvrage, peut entraîner sa ruine. Les ponts en maçonnerie avaient des piles très massives. Les vides (ouïes) qui étaient pratiqués dans le tympan permettaient un écoulement aisé de l'eau et réduisaient ainsi la charge hydraulique sur l'ouvrage.

Le pont est aujourd'hui conçu pour une crue dite crue de dimensionnement, puis le projet est vérifié pour une crue supérieure. Ainsi le pont doit limiter ses impacts hydrauliques à des valeurs admissibles pour la crue de référence du risque d'inondation, à savoir, les PHEC (Plus Hautes Eaux Connues) si la valeur du débit correspond à une période de retour au moins centennale. Il doit par ailleurs être vérifié qu'aucune aggravation du risque d'inondation n'est possible par la présence de l'ouvrage ou sa défaillance lors des crues exceptionnelles dépassant la crue de dimensionnement. Une valeur de débit correspondant à une période de retour comprise entre 200 et 500 ans est en général retenue pour cette vérification.

Mis à part les chocs, le plus grand danger réside pour les ponts modernes dans les affouillements, qui furent, par le passé, la cause la plus fréquente d'effondrement de ponts sur un cours d'eau, comme ce fut le cas pour le pont de Tours (France) en1978. Les techniques modernes de fondations permettent d'éviter ce type d'accident, mais la connaissance de la hauteur d'affouillement possible au voisinage des appuis est indispensable pour dimensionner celles-ci. Pour minimiser ces risques mais également pour diminuer les coûts, les concepteurs limitent en général le nombre des appuis en eau.

Géotechnique

La reconnaissance géotechnique est faite dans un premier temps à partir d'une carte géologique et permet de contribuer au premier choix du type d’ouvrage. Des sondages sont ensuite faits au droit des appuis potentiels. Ils comprennent des carottages avec prélèvements d’échantillons, des essais pressiométriques et des essais au pénétromètre. Ces éléments doivent permettre de fixer définitivement la conception de l’ouvrage. Une attention particulière doit être apportée sur la présence éventuelle de failles ou de karst dans le sous-sol, qui pourrait contribuer à fragiliser, voire à ruiner, l’ouvrage.

Données fonctionnelles

Les données fonctionnelles à collecter pour dimensionner correctement l’ouvrage sont : le tracé en plan de la voie, le profil en travers, tenant compte éventuellement d'élargissements ultérieurs, le profil en long, les charges d'exploitation (normales et exceptionnelles) ; les hauteurs libres et ouvertures à réserver (route, voie ferrée, voie navigable), la qualité architecturale, les sujétions de construction.

Charges d’exploitation

Le trafic routier induit sur les ponts-routes des charges verticales, des forces horizontales, des charges de fatigue, des actions accidentelles, des actions sur les garde-corps et des actions sur les remblais. Les piétons et deux-roues génèrent les mêmes effets, mais ils ne sont formellement pris en compte que dans le cadre d’ouvrages qui leurs sont dédiés (passerelles) ou parties d’ouvrages. Pour l’Europe, la norme européenne EN 1991-2, Eurocode 1,définit les modalités de prises en compte de ces charges d’exploitation. Le nombre et la largeur des voies de circulation étant définies, quatre modèles de charges dynamiques sont pris en compte : le système principal (modèle 1), les vérifications locales (modèle 2), les convois exceptionnels (modèle 3) et le chargement en foule (modèle 4). Concernant les ponts-rails, cinq modèles de chargement sont donnés dans la norme EN 1991-2.

Dimensionnement

Le dimensionnement du pont passe par le pré-dimensionnement des éléments principaux de l’ouvrage (fondations, appuis, éléments porteurs) par application des règles de la résistance des matériaux puis par la vérification de l’ouvrage et des parties de l’ouvrage aux états limites sous certaines conditions de charges normées.

Les fondations

En fonction de la portance du sol où sont localisés les appuis, le concepteur devra choisir entre fondations superficielles ou fondations profondes. Les fondations superficielles reposent sur le sol ou y sont faiblement encastrées. Elles travaillent grâce à la résistance du sol sur lequel elles s’appuient. Les fondations profondes traversent en général un sol médiocre et sont encastrées dans un sol consistant. Elles travaillent par frottement latéral du sol contre ses éléments. Des dispositions complémentaires peuvent être prises pour renforcer la portance du sol, comme par exemple l’injection de coulis de ciment dans le sol. La qualité et la précision des études géotechniques sont ainsi essentielles pour concevoir correctement les fondations d’un ouvrage.

Appuis

Les piles travaillent principalement en compression, mais aussi en flexion sous l’action dynamique du vent sur le tablier et les autres éléments de superstructures du pont, particulièrement pour les ponts de grande hauteur. Après les piles de ponts en maçonnerie des ponts voûtés et les piles métalliques des ouvrages du XIXe siècle, les piles modernes sont en général en béton armé. Certaines d’entre elles peuvent être précontraintes verticalement sur une section ou sur la totalité de leur hauteur, précisément pour lutter contre ces efforts de flexion. Le dimensionnement consiste donc à définir, en fonction de charges appliquées, la section de la pile ainsi que la nature et les dispositions des armatures d’acier.

Éléments porteurs

Pour les ponts à poutres, la hauteur des poutres est un paramètre important. Plusieurs considérations sont à prendre en compte pour leur dimensionnement selon la nature des matériaux. Pour les poutres préfabriquées en béton précontraint, si leur hauteur est trop grande, elles risquent de manquer de stabilité, lorsqu'elles ne sont pas encore solidarisées, et de présenter une trop grande prise au vent. En revanche, la réduction de la hauteur conduit rapidement à une augmentation considérable des quantités d'acier de précontrainte, et même des sections de béton.

Pour les poutres de ponts métalliques, le nombre de poutres conditionne directement la hauteur de celles-ci. Depuis le début des années 1990, la tendance est à la diminution du nombre de poutres sous chaussée, mais l’adoption d’une structure à deux poutres n’est cependant pas systématique. De nombreux paramètres tels que le poids de l’acier, le transport ou le montage peuvent jouer en faveur d’une structure à plus de deux poutres.

Pour les ponts suspendus, à l’origine, l’étude du pont était celle du câble isolé, les plus gros efforts dans ce câble étant ceux de la charge totale et leur calcul était immédiat. Avec l’association câble - poutre de rigidité, l’étude était plus complexe. Dans ce cas, le câble est une funiculaire des charges qui lui sont transmises par les suspentes, et dont les côtés sont tangents à une parabole. Pour la poutre de rigidité (tablier), la section est en général constante et le maximum du moment fléchissant est situé à peu près au quart (25 %) de la portée.

Pour les ponts à haubans, le dimensionnement du tablier est dicté par les sollicitations de flexion transversale, par la reprise des efforts ponctuels dans la zone d’ancrage des haubans et, dans le cas des tabliers à suspension axiale, par la limitation de la déformation en torsion sous l’effet de charges d’exploitation excentrées.

Vérification aux états limites

Un ouvrage doit présenter durant toute sa durée d’exploitation des sécurités suffisantes pour d’une part à éviter sa ruine ou celle de l’un de ses éléments, et d’autre part empêcher un comportement en service pouvant affecter sa durabilité, son aspect ou le confort des usagers. La vérification des structures se fait ainsi par le calcul aux états limites. Les vérifications doivent être faites pour toutes les situations de projet et tous les cas de charges appropriés, pour deux types d’états limites : l’état limite de service (ELS) et l’état limite ultime (ELU).

Les États Limites de Service correspondent à des états de la structure lui causant des dommages limités ou à des conditions au-delà desquelles les exigences d’aptitude au service spécifiées pour la structure ou un élément de la structure ne sont plus satisfaites (fonctionnement de la structure ou des éléments structuraux, confort des personnes, aspect de la construction). Ils sont relatifs aux critères d’utilisation courants : déformations, vibrations, durabilité. Leur dépassement peut entraîner des dommages à la structure mais pas sa ruine. Ils concernent la limitation des contraintes, la maîtrise de la fissuration, la limitation des flèches.

Les États Limites Ultimes concernent la sécurité des personnes, de la structure et des biens. Ils incluent éventuellement les états précédant un effondrement ou une rupture de la structure. Ils correspondent au maximum de la capacité portante de l’ouvrage ou d’un de ses éléments par la perte d’équilibre statique, une rupture ou déformation plastique excessive, ou l’instabilité de forme (flambement…). Les vérifications aux états limites ultimes portent sur la flexion, l’effort tranchant, la torsion, le poinçonnement et la fatigue.

Modélisation des ouvrages

Animation de tourbillons de Karman autour d’une pile de pont cyclindrique.

Les ponts sont soumis à des actions dynamiques caractérisées par des paramètres variant dans le temps. Les charges routières ou ferroviaires entrent en premier lieu dans cette catégorie : les contraintes qu’elles induisent dans les sections du tablier sont des fonctions du temps dépendant, entre autres, des caractéristiques vibratoires et d’amortissement des véhicules lourds ou des trains et du tablier. Les modèles appliqués sont calibrés pour envelopper les effets dynamiques du trafic réel.

Les effets du vent ou des séismes sont plus difficiles à appréhender, particulièrement pour les structures souples comme les ponts à câbles. Il est dès lors souvent nécessaire d’avoir recours à une modélisation numérique ou physique de l’ouvrage ou d’une des parties de l’ouvrage pour définir ces effets et préciser les dispositions constructives qui en découlent.

La première étape de l’analyse dynamique numérique d’une structure consiste à en créer un modèle représentatif. Ce modèle est généralement élaboré à l’aide de programmes généraux de calcul basés sur la méthode des éléments finis. Ainsi un tablier en forme de poutre-caisson, possédant une section transversale pouvant être considérée comme indéformable est souvent modélisé à l’aide de barres. Par contre les tabliers à faible inertie de torsion doivent faire l’objet d’une modélisation traduisant aussi fidèlement que possible les particularités du fonctionnement mécanique du tablier. Ensuite la structure est soumise à des sollicitations aléatoires.

Les modèles physiques permettent quant à eux une représentation visuelle des effets. Selon les domaines d’études, des outils différents sont utilisés. Ainsi, l’effet des séismes sur un ouvrage ou ses fondations est souvent étudié à l’aide d’une centrifugeuse dans lequel le modèle est positionné. Le facteur de réduction d'échelle du modèle réduit est égal à l'accélération centrifuge qui lui est appliquée, pouvant aller jusqu’à 200 g. Les massifs de sol doivent être de mêmes caractéristiques mécaniques que celles des fonds dans lesquels sera implanté l’ouvrage.

L’effet du vent est quant-à lui étudié en soufflerie, installation du même type que celles utilisées pour l’étude des modèles réduits d’avions. Le viaduc de Millau, exposé à des vents violents a en particulier été étudié dans la soufflerie climatique du CSTB à Nantes. L’effet du pont sur les courants sédimentologiques nécessite pour sa part l’utilisation d’un canal hydraulique dans lequel sont restitués les fonds marins des sections en amont et en aval de l’ouvrage. Comme pour les séismes, il est nécessaire que les granulats utilisés pour le modèle soient parfaitement similaires à ceux du terrain étudié.

Terminologie

Un pont comprend trois parties distinctes :

  • le tablier, structure sur laquelle se fait le déplacement à niveau ou avec une pente suffisamment faible pour être admissible par des piétons, des animaux ou des véhicules (automobiles, trains, avions, etc.) entre ses deux extrémités ;
  • les appuis qui supportent le tablier : culées aux deux extrémités et piles intermédiaires ou piles-culées si le tablier n'est pas continu ;
  • les fondations qui permettent la transmission des efforts de l'ouvrage au terrain.

Le tablier comprend une ou des travées qui sont des parties du pont comprises entre les piles ou entre une pile et une culée. Dans le cas des ponts suspendus et des ponts à haubans, le tablier est soutenu par des suspentes ou des haubans accrochés à des pylônes

Schéma d'un pont à poutres droites

Le schéma ci-contre représente un pont à poutre droite continue sur appui. Les définitions complémentaires suivantes peuvent être données :

  • l'ouverture est l'espace libre entre les piles ;
  • l'ouverture totale est la distance entre murs droits (piédroits) des culées ;
  • le tirant d'air est la hauteur libre sous l'ouvrage ;
  • le gabarit de navigation est l'espace libre nécessaire au passage sous ou sur l'ouvrage.
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