Piton de la Fournaise - Définition

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Géologie

Les dépôts argilisés des “cendres de Bellecombe”, particulièrement bien visibles au pied du Demi-Piton, un kilomètre environ avant le terminus de la route forestière du Volcan, sont caractéristiques d'un épisode phréatomagmatique violent

Le piton de la Fournaise forme la partie actuellement active d'un volcan bouclier plus large : le massif du Piton de la Fournaise dont les roches les plus anciennes connues ont été formées il y a environ 530 000 ans. Ce massif constitue avec le massif du Piton des Neiges, d'âge plus ancien, l'île de La Réunion telle qu'on la voit de nos jours.

Le piton de la Fournaise, comme on le connaît aujourd'hui, date d'environ 4 700 ans. Cet âge correspond à l'effondrement majeur qui a donné naissance à l'enclos Fouqué en s'accompagnant d'explosions cataclysmiques.

On trouve des traces de ces explosions sous la forme de dépôts dits des « cendres de Bellecombe » visibles dans un rayon de dix kilomètres. Le contour de l'effondrement reste très clairement visible dans le paysage, formant une falaise continue de 150 à 200 mètres de dénivelé. Les éruptions qui ont ensuite suivi régulièrement ont reconstitué au centre de la zone d'affaissement le cône central du piton de la Fournaise.

Géothermie

Le piton de la Fournaise pourrait, dans les prochaines années, être exploité pour produire de l'énergie électrique par géothermie, en utilisant de présumés gisements d'eau chaude qui seraient piégés à l'intérieur du volcan.

Des campagnes de mesures magnétotelluriques menées au début des années 2000 ont permis de localiser la position possible de tels gisements d'eau chaude. Cependant, selon les experts Il y a seulement 50 % de chance qu’elles correspondent à la signature d’un système géothermal à haute température. D'autre part, contrairement au massif du Piton des Neiges, il n’existe pas dans le massif du Piton de la Fournaise d’indice de surface de la présence d’un système géothermal (fumerolles, sources chaudes, etc).

Des micro forages exploratoires profonds étaient prévus en 2008pour vérifier la présence de ces réservoirs géothermiques naturels et pour évaluer leur exploitabilité. Ce projet de forages, qui était susceptible de compromettre l'aboutissement du dossier de candidature de l’île pour son inscription à la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO a été suspendu.

Accès au piton de la Fournaise

Premières explorations

Le piton de la Fournaise dessiné par Bory de Saint-Vincent après l'éruption de l'an X
Le piton de la Fourniase vu de l'espace le 16 janvier 2009.

La première ascension dont on a eu la relation écrite est réalisée par le chevalier Andoche Dolnet de Palmaroux, le 21 septembre 1751 La description des lieux est assez médiocre, mais selon le récit du sieur Dolnet, un seul cratère sommital existe alors.

Une autre expédition, menée en octobre 1768 conduit à la découverte du pas de Bellecombe, du nom du gouverneur de l'île de l'époque, qui participe à l'expédition mais qui personnellement rebrousse chemin avant que le passage ne soit trouvé. On connaît de cette équipée au moins deux récits, le premier, assez détaillé, écrit par l'un des protagonistes principaux, l'intendant du roi Honoré de Crémont et publié en 1770 et dont l'arrivée près du sommet est ainsi relatée :

«  À peine eûmes nous fait 50 pas que nous arrivâmes ſur une petite éminence d'où nous apperçumes bien à découvert la bouche du Volcan à une grande portée de fuſil ; je ne puis exprimer la joie que je reſſentis d'avoir rempli, même au-delà de mes eſpérances, l'objet de mon voyage : car je ne m'attendois pas de le voir ſitôt & de ſi près. Nous reſtâmes ſur cette petite hauteur pour contempler à loiſir cette fournaiſe. Il étoit environ dix heures & demie du matin quand nous y arrivâmes ; il faiſoit le plus beau temps du monde ; l'air étoit calme & le ciel ſerein. Le bruit qui frappoit nos oreilles reſſembloit à celui de 20 à 30 ſoufflets de groſſes forges... »

l'autre, plus sommaire et peu flatteur pour M. de Crémont, retranscrit par Bory de Saint-Vincent dans son mémoire de voyage :

« Après deux jours de marche, on se trouva aussi peu avancé que si l'on n'eût rien fait. On était rendu au bord de l'Enclos, et l'Enclos paraissait une barrière insurmontable. Dégoûté par ce nouvel obstacle, M. de Belecombe renonça à un dessein à demi exécuté, et revint sur ses traces. M. de Crémon, plus déterminé, promit six pièces de toile bleue aux noirs qui trouveraient un pas dans le Rempart. Après bien des recherches un esclave vint annoncer qu'il avait trouvé le pas. M. de Montfleury, Guichard et l'esclave y descendirent seuls avec l'intendant ; ce n'est qu'en tâtonnant qu'on s'éleva sur les pentes du cône. C'était une bouche située à peu près à l'endroit où se voit le mamelon Central et qui donnait des matières fondues. On en approchait quand M. de Montfleury s'aperçut que M. de Crémon, excédé de fatigue et de soif, ayant, faute d'eau, bu tout le rhum qui restait dans son flacon, ne pouvait plus se soutenir ; le robuste Guichard le chargea sur ses larges épaules et aidé du noir, le ramena sur la plaine des Sables, au risque de tomber mille fois et de se tuer avec son fardeau. »

Les premières expéditions à caractère scientifique sont menées en 1771 et 1772 par Philibert Commerson (1727-1773) accompagné de Lislet Geoffroy(1755-1836), ce dernier alors âgé de moins de dix-sept ans.
L'intendant du roi, Honoré de Crémont fait à nouveau aussi partie de la première équipée d'une quinzaine de personnes qui part du Baril(dans l'actuelle commune de Saint-Philippe).
On n'a rapport cependant de ces explorations naturalistes que par des documents dispersés (notes, croquis, correspondances et collections) car Commerson meurt en 1773 sans avoir jamais rien publié. Il écrit cependant à son beau-frère, le curé Beau :

« avoir été à l'escalade du volcan enflammé jusqu'à la hauteur de sa butte, en avoir essuyé une bouffée , une flamme veloutée qui n'a fait que m'effleurer à la vérité, mais qui a atteint très vivement celui qui me suivait... »

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Lislet rapporte également cette description :

« L’Enclos est un rempart qui entoure le Volcan de trois côtés, il a à peu près la forme d’un fer à cheval, au sommet duquel serait la Montagne du Volcan, de la figure d’un cul de chapeau ; là, sa largeur est environ de cinq quarts de lieue, s’écartant irrégulièrement en descendant vers la mer par une pente rapide. »

En 1791, une explosion sommitale retentissante suivie de l'apparition d'un immense panache vertical de fumée noire et épaisse survient le 17 juillet et épouvante le pays. Une expédition menée par Alexis Bert à laquelle participent Jean-Joseph Patu de Rosemont (1767-1818) et Joseph Hubert (1747-1825) se rend au volcan. Bert parvient au sommet le 29 juillet et constate la formation d'un cratère d'effondrement à l'origine du Dolomieu, une nouvelle bouche qu'il trouve :

« ... obronde, de cent toises environ de diamètre, et de cent vingt pieds de profondeur ; ses parois étaient formées de couches horizontales distinctes, rouges et comme interrompues : entre plusieurs de ces couches, sortaient des vapeurs qui avaient l'odeur de l'acide vitriolique fumant. Le fond n'était qu'un amas de scories et de débris, d'où s'échappaient çà et là des fumées sulfureuses qui avaient coloré en jaune plusieurs parties de la fournaise. »

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Mais ce n'est qu'en 1801 qu'une véritable mission de reconnaissance générale est entreprise sous la direction de Jean-Baptiste Bory de Saint-Vincent (1778-1846), alors tout juste âgé de 23 ans. Le départ pour la première ascension se tient à Piton Sainte-Rose le 25 octobre. Bory, Jouvancourt et leurs compagnons passent par Bois-Blanc, longent le bas du Rempart de Bois-Blanc jusqu'au Trou Caron, rejoignent le pied du piton de Crac où est installé un bivouac, explorent la plaine des Osmondes. Bory atteint le 28 octobre 1801 à une heure de l'après-midi le "Mamelon central" qui, situé entre le cratère Bory et le Dolomieu, marque à l'époque le sommet du volcan et correspond à un cône éruptif apparu en 1766. Une éruption se déroule au moment même aux pieds des visiteurs dans le cratère Dolomieu :

« À nos pieds du fond d'un abîme elliptique, immense, qui s'enfonce comme un entonnoir, et dont les parois formées de laves brûlées qu'entrecoupent des brisures fumantes, menacent d'une ruine prochaine, jaillissent deux gerbes contiguës de matières ignées, dont les vagues tumultueuses, lancées à plus de vingt toises d'élévation, s'entrechoquent et brillent d'une lumière sanglante, malgré l'éclat du soleil que ne tempérait aucun nuage. »

Bory gravit à nouveau le sommet de la Fournaise (toujours en éruption dans le cratère Dolomieu) le 20 novembre 1801 après être passé cette fois par la Plaine des Cafres et la Plaine des Sables.

De cette fréquentation du volcan finalement assez brève (2 ascensions en moins d'un mois), Bory laisse cependant des descriptions topographiques précises, une synthèse des observations antérieures, quelques planches dessinées devenues célèbres et des propositions d'explications sur les phénomènes volcaniques dont beaucoup se sont révélées justes. En naturaliste savant, il décrit de nombreux végétaux et minéraux et en collecte des échantillons. On lui doit éminemment d'avoir donné à la plupart des lieux les noms qu'ils conservent encore aujourd'hui.

Par ses travaux et son récit, Bory ouvre la voie à la fois à une connaissance volcanologique moderne et à une appropriation populaire par les Réunionnais d'un volcan autrefois entouré d'une aura maléfique.

Le temps des guides

Jusque dans les années 1960, l'ascension du piton de la Fournaise, qui est devenue une excursion prisée, demeure cependant réservée à des visiteurs aisés ou passionnés car en l'absence de route d'approche, il faut monter une véritable expédition et requérir les services de guides et de porteurs.

L'accompagnement des visiteurs au volcan devient ainsi, comme activité d'appoint, une spécialité de certains habitants de la Plaine des Cafres, particulièrement de ceux du Vingt-septième kilomètre, devenu aujourd'hui Bourg-Murat.

L'histoire de cette longue époque a notamment retenu le nom du guide Josémont Lauret, mort de froid et de fatigue dans la nuit du 6 octobre 1887, dont la stèle commémorative s'élève au bord du sentier de grande randonnée.

Au XXe siècle les rendez-vous de départ se font à l'Auberge du volcan, près de l'actuelle Maison du Volcan. Les excursionnistes sont des Réunionnais, ou des touristes métropolitains, très rarement des touristes étrangers. En période d'éruption, piqués par la curiosité, ils sont évidemment plus nombreux. Quant au nombre de guides et de porteurs, il dépend surtout de la fortune des clients et de la durée prévue de l'expédition.

En général, la sortie au volcan se déroule sur trois jours. Les guides et les porteurs n'ont aux pieds que des chaussons de toile de jute, des souliers goni et ils portent leurs charges sur le dos dans des bertels ou sur la tête. La première journée permet de rallier le bord de l'Enclos, la seconde comprend l'ascension à proprement parler du piton de la Fournaise et la découverte des cratères sommitaux, la troisième journée est consacrée au retour.

Jusque dans les années 1930, les randonneurs passent la nuit dans des cavernes, souvent la caverne des Lataniers ou dans des camps de gaube, abris hémisphériques de branchages recouverts de plaques de pelouse naturelle. Puis un gîte est édifié près du pas de Bellecombe pour le repos nocturne des marcheurs. Ce gîte, au départ une simple cabane, devient au fil des ans, après diverses transformations, extensions et reconstructions, l'actuel gîte du volcan et son restaurant.

Découvrir la Fournaise aujourd'hui

Le parking du pas de Bellecombe
L'itinéraire pédestre balisé d'accès au sommet

La route forestière n° 5 dite « route du Volcan » (route carrossable revêtue jusqu'à la Plaine des Sables puis ensuite empierrée) mène sans difficulté depuis le village de Bourg-Murat jusqu'au bord de la dernière caldeira au lieu-dit du « pas de Bellecombe ». Au terminus, le site qui surplombe ainsi l'enclos Fouqué dispose d'un parking et d'une aire panoramique aménagée permettant par beau temps de découvrir le cône terminal. À proximité se trouve le « gîte du Volcan » où il est possible de passer la nuit.

Après l'éruption d'avril 2007 au cours de laquelle le fond du cratère Dolomieu s'est effondré sur une profondeur supérieure à 300 m, l'ascension du sommet a été officiellement interdite au public jusqu'en décembre 2009. Les bords des cratères sommitaux fissurés et déstabilisés continuent en effet à se détacher fréquemment et subitement.

Depuis le 24 décembre 2009, un accès a été réouvert jusqu'à un point unique d'observation stable situé sur le bord est du cratère Dolomieu. Le tour des cratères demeure quant à lui interdit en raison de la persistance du danger d'effondrement.

En conditions normales d'ouverture, il faut, avant de gravir le sommet de la Fournaise, au préalable descendre dans l'Enclos par le sentier du rempart de Bellecombe. Au pied de la paroi débute un chemin balisé pour prévenir l’égarement des randonneurs dans le brouillard, très fréquent autour du volcan. Ce chemin est matérialisé par de grosses taches de peinture blanches.

Le sentier passe au bout de quelques centaines de mètres près d’un petit cône de scories appelé le « Formica Leo ». Il conduit ensuite, quasiment en terrain plat, à un petit édifice creux haut d’une dizaine de mètres de hauteur, la « Chapelle de Rosemont », un hornito à l’intérieur vitrifié.

L'itinéraire actuel file ensuite sur la gauche pour s'élever progressivement sur le flanc nord du piton en le contournant d'un demi-tour.

L'ancien itinéraire permettait quant à lui de partir vers la droite pour une ascension directe jusqu'au cratère Bory, de poursuivre par un tour des cratères Bory et Dolomieu puis éventuellement de revenir par le flanc nord. L’accès à l’intérieur du cratère Dolomieu était quant à lui interdit de manière permanente depuis l'arrêté préfectoral du 11 septembre 1992, le fond et les parois du cratère ayant été de tous temps instables et susceptibles d'effondrements subits.

Sur le rebord nord du cratère Dolomieu se trouvait la « Soufrière », un gouffre dégageant du soufre apparu en 1964. Ce gouffre a été emporté avec l'effondrement du cratère en avril 2007.

Règlementation de l'accès

Randonneurs sur le piton de la Fournaise

Tant que l'absence de route impose une longue marche d'approche, l'accès au piton de la Fournaise reste entièrement libre, même en période éruptive, sous la seule responsabilité des guides et des visiteurs qui forment une élite passionnée ou fortunée.

Avec la démocratisation de l'automobile, le volcan devient rapidement un site naturel très fréquenté, notamment lors d'éruptions facilement visibles. Le premier embouteillage mémorable se déroule ainsi dans le Grand Brûlé en 1961. Mais c'est en 1972 lors de la première éruption qui suit l'ouverture complète de la route forestière du Volcan (celle-ci ayant été achevée jusqu'au pas de Bellecombe en 1968) que le préfet de La Réunion, inquiet d'une éventuelle affluence massive des curieux, prend un arrêté d'interdiction d'accès à l'Enclos le 9 août 1972. La contestation populaire est vive et la Préfecture autorise finalement l'accès à de petits groupes encadrés par des guides. Mais le temps est exécrable, l'expédition tourne à la déroute, trois personnes meurent de froid, une dizaine sont hospitalisées.

Entre 1972 et 1998, l'accès au volcan demeure généralement libre, même pendant les éruptions.

Lors de l’éruption de 1998, qui se trouve être visible depuis le Pas de Bellecommbe, l’affluence du public provoque des embouteillages de plusieurs heures. L’accès est fermé aux véhicules et un système de navette payante est mis en place provisoirement.

À la suite de cette expérience, une étude de faisabilité est entreprise sur l’opportunité de remplacer durablement la libre circulation par un système pérenne de navettes, étude demeurée jusqu'à présent sans suite.

Mais depuis lors, l'État met en œuvre à l'occasion de chaque éruption un dispositif de réglementation et d'organisation de l'accès aux sites d'éruption, en essayant de trouver les formules qui concilient au mieux sécurité publique et visibilité du spectacle de la nature. À la lumière des enseignements propres à chaque éruption, le dispositif-type évolue au cours des ans. Son application ne cesse cependant jamais de susciter des débats polémiques relatifs à la sécurité ou à la liberté de circuler. Un portail est mis en place à l'entrée du sentier pour matérialiser les fermetures préfectorales de l'Enclos lors des éruptions.

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