Le patrimoine est étymologiquement défini comme l'ensemble des biens hérités du père (de la famille, par extension). En effet, patrimonium signifie héritage du père en latin ; la notion est apparue au XIIe siècle.
En droit civil, le législateur l'entend comme l'ensemble des biens et des obligations d'une personne, envisagé comme une universalité de droit, c'est-à-dire comme une masse mouvante dont l'actif et le passif ne peuvent être dissociés.
D'un point de vue culturel, le "patrimoine" peut se définir comme l'ensemble des biens, matériels ou immatériel, ayant une importance artistique et/ou historique certaine, et qui appartiennent soit à une entité privé (personne, entreprise, association...) ou à une entité publique (commune, département, région, pays...) et qui est généralement préservé, restauré, sauvegardé et généralement montré au public, soit de façon exceptionnelle (exemple des "Journées européennes du patrimoine" qui ont lieu un weekend par an au mois de septembre), soit de façon régulière (château, musée, église...), gratuitement ou au contraire par l'intermédiaire d'un droit d'entrée et de visite payant.
Le patrimoine fait appel à l'idée d'un héritage légué par les générations qui nous ont précédées, et que nous devons transmettre intact ou augmenté aux générations futures, ainsi qu'à la nécessité de constituer un patrimoine pour demain. On dépasse donc largement la simple propriété personnelle (droit d'user et d'abuser selon le droit romain). Il relève du bien public et du bien commun.
« L'héritage ne se transmet pas, il se conquiert. »
— André Malraux (1935)
Dès le XVIIIe siècle, on commence à considérer le patrimoine. C'est la Révolution française qui lance la protection des biens culturels. Lors d'un de ses rapports à la Convention, l'Abbé Grégoire (1750-1831), juriste et homme politique révolutionnaire, affirme que le respect public entoure particulièrement les objets nationaux qui, n'étant à personne, sont la propriété de tous (…) Tous les monuments de sciences et d'arts sont recommandés à la surveillance de tous les bons citoyens.
Mais cette protection du patrimoine ne se fera que progressivement. Les premiers éléments intégrés dans cette appréciation sont les œuvres d'art (tableaux et sculptures) conservées et parfois exposées dans les premiers musées et les livres. Les livres et plus généralement les bibliothèques sont protégés au titre de l'instruction du peuple. Les œuvres architecturales, et notamment ecclésiastiques ou seigneuriales, ne bénéficient quant à elles lors de la Révolution française d'aucune protection et sont bien souvent vendues à des particuliers, libres de les démolir pour en revendre les matériaux de construction ou de les transformer en logements, usines, étables... En revanche, cette même Révolution s'attache à la protection des biens culturels confisqués aux émigrés, aux ordres religieux ainsi qu'aux institutions dissoutes : seuls parmi les biens nationaux, les objets d'art et le livres sont protégés de la vente et leur conservation est organisée : des dépôts révolutionnaires sont créés dans chaque département, des comités successifs sont chargés de s'assurer du traitement des livres qui font l'objet de circulaires et de conseils concernant leur conservation et leur catalogage. L'abbé Grégoire suit particulièrement la gestion et le traitement des collections de livres, regroupées dans des dépôts littéraires départementaux.
Claude Henri de Rouvroy de Saint-Simon fut l'un des principaux « promoteurs » de ce type d'entreprise.
En 1804, l'État confie les bibliothèques issues des dépôts révolutionnaires aux municipalités. Celles-ci, sous tutelle du ministère de l'Instruction publique, font l'objet d'une grande attention des ministres successifs, en particulier Guizot et Salvandy. De nombreuses circulaires s'attachent à éviter les ventes, conseiller les échanges, réclamer le catalogage, donner des instructions en matière de conservation, et par la voie des souscriptions le ministère enrichit de dons ces bibliothèques. C'est en 1830, sous l'impulsion de François Guizot, alors ministre de l'Intérieur de Louis-Philippe Ier, qu'est instaurée en France l'Inspection générale des monuments historiques, chargée notamment de procéder à un inventaire du patrimoine architectural du pays. S'y succèdent en tant que premier inspecteur Ludovic Vitet (1830-1834) puis Prosper Mérimée (1834-1870). Ce dernier structure cet outil de connaissance et de sauvegarde et organise des visites dans les régions afin d'établir des rapports sur l'état des destructions dues à la Révolution. Un poste d'Inspecteur des bibliothèques est créé à la même période et sa mission principale concerne les collections.
La Commission supérieure des monuments historiques, créée en 1837, est chargée de dresser la liste des édifices méritant une protection et dont les travaux bénéficieront de subventions ministérielles. Une première liste paraît en 1840, suivie en 1841 de la première loi de protection des monuments historiques par le classement des bâtiments menacés.
C'est le philosophe Henri Bergson qui eut l'idée d'étendre la notion de patrimoine culturel en participant en 1921 à la naissance de la Commission internationale de la coopération intellectuelle, ancêtre de l'Unesco.
En 1945, l'Unesco, telle que nous la connaissons aujourd'hui, est créée, et a son siège international à Paris.
Au départ, l'expression patrimoine culturel désignait principalement le patrimoine matériel (sites, monuments historiques, œuvres d'art,...). L'Unesco a établi en 1972 une liste du patrimoine mondial, composée de plusieurs centaines de sites dans le monde.
En France, le décret du 10 février 1976 a officialisé la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel adoptée par la 17e conférence de l’Unesco le 16 novembre 1972.
Les politiques de « conservation intégrée » ont, elles, été définies le 3 octobre 1985 : la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l’Europe dite « Convention de Grenade » conclue à cette occasion est entrée en vigueur le premier décembre 1987 et a fait l’objet du décret n° 88-206 du 29 février 1988 (JO du 4). Elle établit les structures de la coopération européenne pour la protection du patrimoine architectural.
À l'occasion de la constitution du Réseau européen du patrimoine le thésaurus a fourni une large définition du Patrimoine architectural Cette conception du patrimoine culturel a évolué depuis une quinzaine d'années. On lui a d'abord adjoint une liste Mémoire du monde (1992), qui recense les collections documentaires d'intérêt universel (déclaration des droits de l'homme et du citoyen, instauration du système métrique, mémoire du canal de Suez,...).
En 1997, la notion de patrimoine oral et immatériel de l'humanité a été définie par l'Unesco.
L’article 1er de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe, définit l'expression «patrimoine architectural» en affirmant qu’elle intègre les biens immeubles ci-après :
On s'oriente donc progressivement vers une conception du patrimoine qui inclut à la fois un patrimoine matériel, mais aussi un patrimoine culturel immatériel (PCI). Les traditions vivantes (carnaval de Binche par exemple) et documentaires sont reconnues au même titre que les monuments et œuvres d'art du passé.
La Convention de Faro sur la valeur du patrimoine culturel pour la société, du 27 octobre 2005 (Conseil de l'Europe) définit le patrimoine culturel comme « un ensemble de ressources héritées du passé que des personnes considèrent, par-delà le régime de propriété des biens, comme un reflet et une expression de leurs valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution. Cela inclut tous les aspects de l’environnement résultant de l’interaction dans le temps entre les personnes et les lieux ».
C’est un programme réalisé sous l’égide du Conseil de l’Europe avec le soutien de l’Union européenne et d’un consortium de partenaires publics et privés.
Origine du programme : La 4e conférence européenne des ministres responsables du patrimoine culturel organisée à Helsinki par le Conseil de l’Europe en mai 1996 a recommandé : « …d’étudier la mise en place d’un système permanent d’information (Réseau européen d’information sur le patrimoine) à la disposition des administrations, des professionnels, des chercheurs et des spécialistes de la formation pour connaître l’évolution du patrimoine dans les divers pays, en utilisant l’acquis du rapport sur les politiques du patrimoine architectural en Europe précédemment établi par le Conseil de l’Europe… ».
Les thèmes présentés : Les systèmes de protection en vigueur ; Les inventaires établis ou en cours d’établissement ; La protection proprement dite ; Le financement public/privé ; Les modalités de réalisation des travaux de restauration ; Les savoir-faire impliqués ; Les politiques menées en matière d’information et de communication vis-à-vis du public ; Diverses remarques sur la mise en œuvre de la politique de « conservation intégrée », couvrant son application pratique comme ses perspectives.