Paracétamol - Définition

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Surdosage

Le paracétamol est un médicament utilisé couramment et disponible dans les pharmacies. Les cas de surdosage sont courants et ont des conséquences graves.

Dose toxique

La dose toxique du paracétamol est hautement variable selon les individus. En une prise unique, elle est de l'ordre de 10 g ou 125 mg/kg chez l'adulte et de 100 à 150 mg/kg chez l'enfant. Certains ne parlent d'intoxication aiguë que pour des doses élevées supérieures à 200 milligrammes par kilogramme, soit plus de 14 grammes pour un homme de 70 kilogrammes.

Cependant le paracétamol peut être toxique pour le foie, même à 4 g/24 h soit des doses thérapeutiques. Administrées sur de longues périodes, ces doses se rapprochent des doses toxiques pouvant entrainer des lésions hépatiques permanentes voire mortelles, surtout des patients à la fonction hépatique préalablement altérée. Comme les personnes âgées ou les patients présentant des maladies hépatiques l'alcoolisme chronique qui provoque une induction enzymatique et une diminution des réserves de glutathion. Par contre seuls quelques rapports font état d’une toxicité du paracétamol lors de situations diminuant les réserves de glutathion, comme une infection par le VIH, une hépatite chronique C ou une cirrhose hépatique par exemple.

Ainsi sur de longue durée, la différence entre une dose thérapeutique et une dose toxique serait faible. Depuis que le paracétamol est présent dans de nombreux médicaments, mélangé à d'autres molécules, le risque de surdosage involontaire est majoré. Les prises de paracétamol doivent toujours être espacées de 4 heures au minimum. Pour éviter le surdosage, il est utile de discuter avec un pharmacien pour connaître les médicaments contenant du paracétamol ou bien de regarder la composition des médicaments pour détecter la présence de paracétamol.

Risques et tableau clinique

Une des étapes de l'élimination du paracétamol produit une molécule toxique, la N-acétyl p-benzoquinone imine (ou NAPQI), via les cytochromes P450 (CYP2E1, CYP1A2, CYP3A4). Ce métabolite peut provoquer la mort des cellules hépatiques. Il est éliminé, dans le foie, par une réaction avec le glutathion (donneur de SH) qui capte les radicaux. Aux doses thérapeutiques recommandées, la NAPQI est éliminée par l'organisme et ne représente pas un danger. Par contre, lorsque la dose de paracétamol est trop importante, la NAPQI est produite en grande quantité, les réserves de glutathion s'épuisent et le foie n'arrive plus à l'éliminer ; il subira des dommages plus ou moins importants selon la quantité de paracétamol absorbée. Un risque accru de toxicité est provoqué par un manque de glutathion (malnutrition, anorexie, éventuellement maladies du foie) ou une formation accrue du métabolite toxique.

Le surdosage en paracétamol peut ainsi entraîner une hépatite avec de graves lésions du foie (cytolyse hépatique), conduisant à une nécrose dans les cas extrêmes. Les conséquences d'un surdosage sont graves, parfois mortelles. Les dommages causés au foie sont irréversibles, une greffe de foie devenant nécessaire lorsque les dommages sont très importants. La NAPQI entraîne la création d'adduits fixés aux protéines hépatiques, dégradation des lipides membranaires, perturbations de l'homéostasie calcique, provoquant une nécrose et une hépatite cytolytique. Le rein est touché par le même mécanisme.

La toxicité sur le foie est prédictible à l'aide de deux paramètres : la dose ingérée et le taux plasmatique du paracétamol (ou paracétamolémie). Les prises intentionnellement abusives de paracétamol peuvent être détectées rapidement et les dommages peuvent être limités par l’administration de N-acétylcystéine. Ce n’est pas le cas de surdosages non intentionnels et chroniques qui se détectent plus tardivement alors que des dommages importants ont déjà pu se produire.

De plus, il est possible de calculer la demi-vie d'élimination du paracétamol. Dans les cas d'intoxication, la nécrose hépatique empêche l'élimination et la demi-vie augmente. Une demi-vie supérieure à quatre heures témoigne d'une hépatite. Une demi-vie supérieure à douze heures indique une insuffisance hépato-cellulaire.

Les individus qui ont pris trop de paracétamol n'ont généralement pas de symptômes pendant les vingt-quatre premières heures. Bien que des nausées ou des vomissements apparaissent en premier, ces symptômes disparaissent après quelques heures. Les sujets se sentent mieux et croient que le pire est passé. Si la dose absorbée est toxique, après cette période de bien-être, le sujet a une défaillance hépatique. Dans les cas extrêmes, le sujet tombe dans le coma avant d'avoir une défaillance du foie.

Les enfants supportent mieux le paracétamol, car ils possèdent un foie et des reins plus larges par rapport à la taille de leur corps, et ils sont plus tolérants à ce produit. La demi-vie sera plus importante chez l’enfant qui possède des capacités de glucuronoconjugaison inférieures à celles de l’adulte. Les preuves à l'heure actuelle sont insuffisantes pour conclure que l'utilisation régulière de paracétamol est associé à un risque accru d'insuffisance rénale chronique.

Prise en charge

Toute personne ayant ingéré une dose supérieure à la dose toxique théorique ou ayant ingérée une dose inconnue supposée supérieure, doit être immédiatement transférée dans un service d'urgences hospitalier.

L'absorption du paracétamol par voie gastro-intestinale est complète au bout de deux heures en conditions normales, donc une décontamination gastro-intestinale n'est utile que pendant ce laps de temps. L'absorption du paracétamol peut être retardée en cas d'ingestion de nourriture. L'absorption est plus rapide lorsque le paracétamol est sous forme soluble que sous la forme solide.

Le lavage gastrique n'est pas recommandé, tout comme les vomissements provoqués, par l'utilisation d'un vomitif. Le sirop d'ipéca doit notamment être considéré comme obsolète.

Le charbon activé, qui réduit l'absorption digestive du paracétamol et présente moins de risques que le lavage gastrique, est indiqué uniquement lorsque la quantité de paracétamol absorbée est potentiellement mortelle et que l'ingestion a eu lieu moins d'une heure avant. Dans ce cas, on recommande une dose unique de 1 à 2 g/kg d'une suspension aqueuse de charbon actif (Carbomix ou Toxicarb) administrée par voie orale. Auparavant, les médecins étaient réticents à administrer du charbon activé puisqu’en cas de surdosage, celui-ci peut absorber aussi l'antidote et donc diminuer son efficacité. Mais des études ont montré que l'adsorption d'une partie de la N-acétylcystéine orale par le charbon activé n'a pas de conséquences significatives, l'une d'entre elles a déterminé que seulement 39 % de la N-acétycystéine est absorbée lorsqu'elle est administrée en même temps que le charbon. Sinon, l'utilisation d'acétylcystéine par voie intraveineuse est efficace en combinaison avec du charbon activé. S'il est prévu de donner la N-acétylcystéine par voie orale, il est recommandé de différer le traitement de une à deux heures après l'administration de charbon activé.

En pratique clinique, la prise en charge est la suivante : recherche d'intoxications associées, prise des signes vitaux (pouls, pression artérielle, température, score de Glasgow, fréquence respiratoire) et prélèvement veineux (paracétamolémie, transaminases, taux de prothrombine, créatinine, ionogramme), pose d'une voie veineuse périphérique avec une solution polyionique type B26 : 2 l/24 h, charbon activé si la prise est inférieure à 2 heures. Puis l'administration de N-acétylcystéine dépend de la dose ingérée :

  • En cas de dose ingérée connue inférieure à la dose toxique minimale, il n'y a pas de traitement nécessaire car pas d'intoxication sérieuse.
  • Si la dose supposée ingérée est inférieure à 8 grammes, l’administration est guidée par la paracétamolémie et le délai écoulé depuis la prise de paracétamol. Le choix du traitement est déterminé selon les abaques de Prescott (ou nomogramme de Rumack-Matthew).
  • Si la dose supposée ingérée est supérieure à 8 grammes, l’administration de N-acétylcystéine est immédiate, « à l'aveugle », sans attendre les résultats du taux plasmatique de paracétamol. Quatre heures au minimum après l'ingestion, il faut déterminer la paracétamolémie et la rapporter aux abaques de Prescott. Si le taux se situe en dessous de la « ligne de traitement », on peut arrêter le traitement. Si le taux est au-dessus, il faut le continuer et l'appliquer entièrement. Chez les patients à risque (affection hépatique, alcoolisme chronique, induction du métabolisme hépatique, malnutrition), il convient d'appliquer le schéma complet même en cas de dose plus faible. Le nomogramme ne peut pas être utilisé si le moment de l'ingestion est inconnu, s'il y a eu plusieurs ingestions ou s'il y a des facteurs de risque.

Le transfert en unité de réanimation est indiqué en cas de troubles hémodynamiques, neurologiques, respiratoires, de co-intoxication avec une substance exigeant une prise en charge en réanimation, d'hépatite cytolytique grave, et a fortiori, d'insuffisance hépatique. En fin de traitement il faut contrôler le taux de prothrombine, les transaminases, la créatinine et la glycémie. La sortie est possible si la paracétamolémie arrive dans les zones non toxiques, en l'absence de toxiques associés et après accord du psychiatre (en cas d'intoxication volontaire).

La N-acétylcystéine

La N-acétylcystéine utilisée principalement comme mucolytique en vente en pharmacie, est aussi utilisé comme antidote dans les intoxications au paracétamol.

En cas de surdose de paracétamol, pendant quelques 8 à 10 heures qui suivent l'absorption, le glutathion ne va être consommé que progressivement et sa disparition peut être palliée par l'administration de diverses molécules comportant un groupe SH telles la méthionine ou la cystéamine ou la N-acétylcystéine. De fait, ces produits ont maintenant clairement démontré qu'ils permettent de prévenir la nécrose hépatique par le paracétamol.

Dans les surdosages, la N-acétylcystéine est utilisée pour renforcer les défenses de l'organisme vis-à-vis des métabolites toxiques et est un précurseur du glutathion. La N-acétylcystéine est un produit qui réduit la toxicité du paracétamol en substituant du glutathion comme réducteur des radicaux ; le groupement thiol permet de réduire le métabolite toxique et réagit pour détoxifier le paracétamol, c'est-à-dire éliminer le métabolite toxique. Elle permet de pallier l'insuffisance du glutathion et de réduire le risque de toxicité sur le foie si elle est absorbée moins de 8 heures après l'ingestion du paracétamol". Après 8 heures, une série d'évènements toxiques dans le foie commence et le risque de nécrose hépatique et de décès augmente de façon critique. Bien que la N-Acétylcysteine soit plus efficace lorsqu'elle est administrée tôt, le produit a cependant des effets bénéfiques jusqu'à 48 heures après l'ingestion. Elle n'endommage pas les cellules et peut être excrétée sans danger.

La N-acétylcystéine s'administre comme antidote soit par voie buccale (Fluimucil granulé ou Mucomyst soluté, disponibles en pharmacie), soit en perfusion intraveineuse (Fluimucil 20 % (Inpharzam), amp. à 25 mL, 1 g = 5 mL). Aux États-Unis, l'administration orale est la méthode de référence alors qu'en Europe, l'administration par voie intraveineuse est préférée. L'acétylcystéine par voie orale peut entraîner à cause de son goût et de son odeur soufrée, des vomissements et des nausées. Par voie intraveineuse, surtout en cas de perfusion trop rapide, elle peut entraîner des réactions anaphylactoïdes. Le choix de la voie d’administration, orale ou intraveineuse, dépend avant tout de l’existence ou non de vomissements.

Il existe trois schémas thérapeutiques différents, un par voie orale, deux par voie veineuse, d'efficacité équivalente tant qu'ils sont instaurés dans les 10 heures suivant l'ingestion :

  1. Schéma de Prescott (voie veineuse) : dose initiale de charge de 150 mg/kg (dans 200 ml de glucose 5 % sur 15 minutes), puis 50 mg/kg (dans 500 mL de glucose 5 % sur 4 h), puis 100 mg/kg (dans 1 000 mL de glucose 5 % sur 16 h). Dose totale de 300 mg/kg sur une durée totale de 20 h.
  2. Schéma de Smilkstein (voie veineuse) : dose initiale de charge de 140 mg/kg (dans 200 ml de glucose 5 % sur 15 minutes), puis 70 mg/kg (dans 100 ml de glucose 5 % sur 15 minutes) toutes les 4 h, à répéter 12 fois. Dose totale de 980 mg/kg sur une durée totale de 48 h.
  3. Schéma de Rumack (voie orale) : dose initiale de charge de 140 mg/kg, puis 70 mg/kg toutes les 4 h, à répéter 17 fois. Dose totale de 1 330 mg/kg sur une durée totale de 68 h.

Si le traitement est commencé plus de 10 heures après l'ingestion, le schéma d'administration orale de Rumack et le schéma d'administration intraveineuse de Smilkstein donnent de meilleurs résultats que le schéma de Prescott.

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