Paracétamol - Définition

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Historique

Les antipyrétiques existent depuis longtemps. Depuis l’Antiquité, les décoctions de feuilles de saule sont réputées pour leurs vertus contre la fièvre et les douleurs, notamment chez les Égyptiens. Plus tard, vers 400 avant J.-C., Hippocrate, le père fondateur de la médecine et selon qui « la nature est le médecin des malades », recommandait une tisane de feuilles de saule pour soulager les douleurs de l’accouchement et faire baisser la fièvre. Les Romains connaissaient aussi ses propriétés (le nom latin du saule est salix). Cette utilisation s’est poursuivie de manière empirique jusqu’au XVIIIe siècle.

Les antipyrétiques utilisés à cette époque étaient des préparations à partir de composés naturels d'écorces de cinchona dont dérive la quinine, ou à partir de salicylate contenu dans l'écorce de saule. L'écorce de cinchona devint rare et chère et le besoin de trouver des substituts apparut. Harmon Northrop Morse synthétisa dès 1878 une substance baptisée acétylaminophénol, mais c'est seulement cinquante ans plus tard qu'elle fut commercialisée comme médicament sous le nom de paracétamol. À cette époque, d'autres produits sont utilisés comme remède contre la douleur et la fièvre : en 1897, l'aspirine est synthétisée par Felix Hoffmann et connaît un grand succès. L'acétanilide (1886) et la phénacétine (1887) sont aussi utilisés jusqu'à se révéler être des produits dotés d'effets secondaires graves et que les inconvénients de l'aspirine commencent à être connus. Le paracétamol réapparaît alors et les premières études sur les propriétés antipyrétique et antalgique du paracétamol sont conduites à la fin du XIXe siècle.

En 1886, le professeur Adolf Kussmaul de l'université de Strasbourg étudie l'effet antiparasitaire du naphtalène. Ses deux jeunes assistants Arnold Cahn et Paul Hepp, à court de produit pour les expériences, décident de se ravitailler auprès d'un pharmacien de Strasbourg qui leur donne par erreur de l'acétanilide à la place du naphtalène. En reprenant leur étude, ils sont intrigués par les effets antipyrétiques obtenus par ce nouveau produit. C'est donc grâce à une erreur providentielle que les propriétés de l'acétanilide contre la fièvre sont découvertes ; ses propriétés antalgiques seront découvertes un peu plus tard, l'acétanilide est l'ancêtre du paracétamol et de la phénacétine. Le docteur Hepp a un frère qui travaille pour une petite compagnie (Kalle Co) qui fabrique l’acétanilide. Il lui propose d'utiliser sa découverte et de lancer sur le marché l’acétanilide comme antipyrétique et ainsi concurrencer l'antipyrine et l'acide salicylique. L’acétanilide devient un médicament commercialisé sous le nom d’antifébrine.

À la fin des années 1880, l'industrie des colorants avait un déchet, le paranitrophénol, avec une structure chimique assez similaire à l'acétanilide et disponible à bas prix. Carl Duisberg, responsable de la recherche et des brevets chez Bayer AG (Friedrich Bayer & Co), demanda à son équipe de trouver une exploitation intéressante pour le paranitrophénol. Oscar Hinsberg eut l'idée de le transformer en acétophénitidine. La démarche de création de cette substance fut purement commerciale et par chance, des tests montrent qu’elle semble plus puissante que l’antifébrine et provoque moins d’effets indésirables. Duisberg décide de mettre la nouvelle molécule en production et l’appelle « phénacétine ».

Julius Axelrod démontre en 1948 que l'acétanilide est dégradé dans l'organisme en N-acétyl p-aminophénol (ou paracétamol), métabolite possédant une activité antalgique et mieux toléré que ce que l'on croyait jusqu'alors.

Cependant, l’acétanilide est très toxique et de nombreuses recherches se consacrent sur l’élaboration de dérivés mieux tolérés. Le paracétamol fut trouvé dans les urines des personnes ayant consommé de la phénacétine. En 1889, le scientifique allemand Karl Morner découvre qu'un fragment de la phénacétine, l'acétaminophène, est un produit efficace contre la douleur et la fièvre. Une étude métabolique de ce médicament montre qu'il s'agit d'un métabolite déséthylé de la phénacétine. Cette hypothèse fut formulée dès 1894 mais il fallut attendre les travaux de Lester et Greenberg de l'université Yale et ceux de Flinn et Brodie de l'université de New York pour obtenir la confirmation de cette hypothèse. En 1893, un médecin allemand, J. von Mering, compare les propriétés antalgiques et antipyrétiques du paracétamol et de la phénacétine ainsi que leurs toxicités respectives. Cependant, il tire de cette étude la conclusion que le paracétamol est plus néphrotoxique que la phénacétine. Le paracétamol est alors délaissé pendant un demi-siècle à la suite de cette erreur. La toxicité de la phénacétine pour le rein sera démontrée par la suite, entraînant son retrait du marché.

En 1946, l’Institute for the Study of Analgesic and Sedative Drugs propose une bourse au New York City Department of Health afin d'étudier les problèmes associés aux agents analgésiques. Bernard Brodie et Julius Axelrod sont désignés pour étudier le lien présumé entre les agents non dérivés de l'aspirine et le développement de la méthémoglobinémie. En 1948, ils publient leur étude qui démontre que l'acétanilide est dégradé dans l'organisme en N-acétyl p-aminophénol, et que seul ce métabolite est actif contre la douleur. Ils démontrent également que l'administration d'acétanilide est responsable de la formation de méthémoglobine, mais ils ajoutent que l'agent responsable est peut-être la phénylhydroxylamine, et non pas le paracétamol comme on le croyait auparavant. Ils suggèrent donc aux industriels de remplacer l'acétanilide, responsable de la méthémoglobinémie, par l'acétaminophène. Il y a alors un regain d'intérêt pour le paracétamol, du fait de ses propriétés antalgiques et antipyrétiques, et de son apparente bonne tolérance.

La Food and Drug Administration accorde en 1955 l'autorisation de vente du paracétamol aux États-Unis. Il est commercialisé pour la première fois la même année par McNeil Laboratories sous le nom de Tylenol Children's Elixir ; c'est un sirop pour enfant contre la fièvre et la douleur, présenté dans une boîte rouge en forme de camion de pompier. Cette petite entreprise de Pennsylvanie s'est intéressée à ce produit car il ne provoque pas de douleurs à l'estomac. Le produit est ensuite devenu populaire chez les adultes pour la même raison. En 1956, le paracétamol est vendu au Royaume-Uni sous le nom de Panadol en dose de 500 mg, produites par Frederick Stearns & Co, une filiale de Sterling Drug Inc. En 1958, apparaît Panadol Elixir, une version destinée à l'usage des enfants. Le suffixe -dol à la fin du nom du médicament provient du latin dolor, qui signifie « douleur ». En France, le paracétamol apparaît en 1957 au sein d'un médicament à usage pédiatrique, l'Algotropyl, commercialisé par les Laboratoires Théraplix. Puis la même firme pharmaceutique met sur le marché le Doliprane dès 1961. De nos jours, de nombreux médicaments contenant du paracétamol ont été développés et commercialisés dans beaucoup de pays.

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