Ours dans la culture - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Cultes et traditions en Asie

Onikuma dans Ehon hyaku monogatari, un recueil de dessins japonais.

Les ours présents en Asie ont eux aussi donné naissance à diverses légendes ainsi qu'à des rites folkloriques. Il ne s'agit pas forcément des mêmes espèces qu'en Europe, puisqu'on trouve aux côtés de l'ours brun et de ses sous-espèces (ours bleu du Tibet, ours brun de Syrie et ours Isabelle) d'autres espèces telles que l'ours à collier, l'ours lippu et l'ours malais.

Aïnous

Dessin japonais vers 1870 montrant le sacrifice d'un ours par les Aïnous.

Les Aïnous établis au Nord du Japon et sur l'île de Sakhaline ont toujours gardé à l'ours une place prépondérante dans leur culture, l'animal étant non seulement ancêtre totémique mais aussi dieu suprême. Au centre des initiations, objet de tabous, l'ours est une divinité des plus révérées, tout particulièrement en décembre lors de la Kamui omante, ou « fête de l'ours ». L'animal y est réputé descendre sur terre et donner ses cadeaux aux humains qui l'accueillent, avant de retourner dans son univers divin.

L'ours est aussi au centre de chasses rituelles. Lorsqu'une femme aïnoue perd un enfant, il arrive qu'un ourson soit capturé bébé et nourri au sein. Il est ainsi élevé durant trois ou quatre ans où il devient un membre à part entière du clan, puis sacrifié, avant que sa chair ne soit consommée lors d'un banquet. Traditionnellement, les tribus aïnous s'approprient ainsi la force et toutes les qualités de l'animal, particulièrement en mangeant sa patte antérieure gauche, mais aussi sa langue, son museau, ses oreilles, son cœur ou son foie. Le crâne de l'ours est généralement conservé comme talisman. Les vertus médicinales attribuées à l'animal sont très nombreuses, et incluent le frottement du ventre des parturientes avec un morceau de matrice d'ours.

Chine

Jieyu combattant un ours, illustration réalisée au XVIIIe sous la dynastie Qing, et conservée à Pékin.

Bien que les Chinois ne semblent jamais avoir considéré l'ours comme une divinité ni pratiqué la chasse rituelle, leurs pratiques culinaires et médicales tout comme les légendes de l'ours attestent d'un respect tout particulier ; dès lors, il n'est pas interdit de penser que l'ours a pu être célébré à l'instar de ce qui s'observe en Sibérie, en Laponie et chez les Amérindiens. Dès l'Antiquité, l'ours a pu être associé au chamanisme puisqu'une inscription de l'époque Shang et une autre du début de la dynastie Zhou ont été vues comme représentant un chaman qui danse, revêtu d'un masque et d'une peau d'ours. Les chamans de la dynastie Shang se revêtaient probablement de la peau de cet animal, et des danses de l'ours sont attestées, mettant en scène un exorciste masqué (d'une figure d'ours à quatre yeux d'or, censée ainsi voir tout et partout) vêtu de rouge et de noir, qui « expulsait les pestilences de l'année morte ». L'ours fut également un symbole de protection des clans parmi les plus utilisés, avec le tigre.

Les Chinois ont plusieurs fois remarqué les qualités de l'ours, sa force, mais aussi et surtout son agilité et sa rapidité étonnantes pour une bête d'une telle masse. Imiter la respiration de l'ours pour obtenir la maîtrise du souffle est devenu un exercice taoïste, probablement lié à l'hivernation qui était vue comme une résurrection. Les mouvements de l'ours servent d'inspiration à un art martial. Les peaux d'ours avaient une fonction de tribut au Shaanxi. Les Chinois organisaient aussi des combats avec ces animaux.

Gastronomie

La viande de l'ours – en particulier de ses pattes – a très longtemps été considérée comme un mets raffiné, ainsi, les récits mythiques chinois attestent de ce statut dès le VIIe siècle av. J.-C., où le duc Ling de Jin tua son cuisinier à coups de cuiller pour n'avoir pas su faire cuire des paumes d'ours correctement. Ce mets semble mentionné et apprécié durant toute l'Antiquité chinoise, où il faisait partie des « huit plats succulents », jusqu'au XIXe siècle à l'époque Qing, où les seigneurs réclamaient encore vingt paires de pattes d'ours aux paysans. Le commerce de ces pattes demeura florissant au moins jusqu'au début du XXe siècle.

Mythes et légendes

À l'instar des Sibériens et des Amérindiens, les Chinois évoquent des ours anthropomorphes : le Lunheng de Wang Chong mentionne deux ours transformés en hommes et au IVe siècle, le Baopuzi dit que l'ours vit cinq cents ans, après quoi il se métamorphose en homme. L'ours chinois semble avoir eu pour fonction d'annoncer la naissance des garçons, et rêver d'un ours était considéré comme de bon augure, l'animal acquérant un statut de génie ou d'être spirituel envoyé du ciel par les puissances célestes. Il annonçait alors une naissance prochaine. Yu le Grand prenait parfois la forme d'un ours pour organiser le monde, mais l'animal est tout particulièrement associé à son père Gun, qui se transforma en ours jaune (couleur de la terre dans la symbolique chinoise) afin de pénétrer le « gouffre des plumes » et d'en devenir le génie.

Médecine chinoise

L'ours est réputé pour ses vertus médicinales durant toute l'histoire chinoise, et le Bencao gangmu livre une liste impressionnante de remèdes à base de ses sécrétions et de diverses parties de son corps, ainsi, la graisse fait pousser les cheveux et guérit de la teigne, la chair protège des rhumatismes et les pattes antérieures revigorent. La bile de l'ours est réputée depuis des millénaires et servait à soigner la dysenterie ; toujours utilisée traditionnellement de nos jours, elle est prélevée dans des fermes qui élèvent des ours à collier dans des conditions misérables.

Sibérie

Grognement de l'ours.

Les rites liés à l'ours sont fréquents au nord-est du fleuve Amour, et particulièrement vivaces chez de nombreux peuples tels que les Nivkhes, Evenks, Tchouktches, Koriaks et Khantis, étudiés par les ethnologues au début du XXe siècle. Les Iakoutes et les Samoyèdes se livrent à des pratiques impliquant des danses où ils imitent les mouvements de l'ours, et à des chasses ritualisées. Chez les Iakoutes, l'ours est de plus réputé tout entendre, tout savoir et ne jamais rien oublier. Les Téléoutes croient que l'esprit de la porte est revêtu d'une peau d'ours et les Evenks, qui pensent que l'ours a une âme, jurent en mordant la fourrure de cette bête et en disant « Que l'ours me dévore si je suis coupable. » Ils voient ces animaux comme détenteurs de la sagesse terrestre et des connaissances de la médecine. Les chamans yukaghir imitent les grognements de l'ours pour soigner et les Kets lancent une patte d'ours en l'air pour la divination. Bon nombre de ces ethnies pensent qu'un homme tué par un ours se transforme lui-même en ours, et écartent les femmes de leurs rites, par exemple en leur interdisant la consommation de chair d'ours.

La chasse à l'ours s'entoure d'un profond respect pour l'animal dont la mise à mort est censée être consentie ; de même, ces communautés accordent une importance extrême au dépeçage, dont ils tirent des produits réputés pour leurs vertus, mais surtout pour permettre à l'esprit de l'ours de quitter sa demeure de chair et de ressusciter. Ainsi, l'initié vogoule qui dépouille l'ours abattu reconnait en lui un frère cadet, et le couteau utilisé pour décapiter la bête ne peut ensuite plus être utilisé. Les chasses rituelles s'accompagnent de pratiques chamaniques animistes où, comme chez les Indiens d'Amérique, l'ours est considéré comme un ancêtre du clan et invité dans les villages au terme de son hivernation, paré et honoré, glorifié et vénéré, il est fêté et ressuscite chaque année. Ces traditions semblent avoir perduré jusqu'à nos jours dans quelques régions de Russie, et comprennent des ports de peau d'ours, des danses et des possessions visant à atteindre le domaine des esprits. Des cimetières d'ours ont été retrouvés.

Jusqu'à l'époque moderne, les pattes de l'ours sont associées à diverses vertus, aussi bien chez les Toungouses que chez les Tatars où, clouées près de l'entrée de la maison ou de la tente, elles éloignent les mauvais esprits. Les Nivkhes en consomment et font rôtir les morceaux d'ours destinés aux hommes au feu de bois, tandis que ceux réservés aux femmes sont bouillis dans un chaudron. Les griffes sont réputées soigner la diarrhée du bétail et protéger des maux de tête et chez les Kazakhs, on suspendait une griffe d'ours au berceau des garçons nouveau-nés.

Il existe un très grand nombre de mythes sibériens qui mentionnent le mariage d'un chasseur et d'une ourse, ou d'un ours et d'une femme, avec pour constante l'union d'un humain et d'un être surnaturel. Ainsi, un mythe yakoute raconte qu'un ours recueillit une femme dans la forêt et lui donna à manger, et selon ce même peuple, la lune est périodiquement dévorée par l'ours pour la punir du rapt d'une jeune fille, ce qui explique ses phases.

Culture russe et soviétique

L'image de l'ours est très utilisée pour représenter symboliquement la Russie et par extension l'Union soviétique, au moins depuis le XIXe siècle et pourtant, ni l'Union soviétique, ni les différents États russes anciens n'ont jamais adopté cet animal comme symbole avant les années 1950. Pendant la guerre froide, les Soviétiques étaient souvent dessinés sous la forme d'un ours portant une casquette avec une étoile, et la mascotte des Jeux olympiques d'été de 1980 à Moscou était l'ours Misha.

Information icon.svg

La Russie serait devenue le pays que l'on associe le plus souvent à l'ours. Dans le conte populaire russe intitulé Morozko, un chasseur arrogant veut tuer une ourse et ses petits puis est puni en se faisant affubler d'une tête d'ours, entraînant par là son rejet de la société.

Il existe aussi un conte où un fermier s'installe en bordure d'un bois, et plante des carottes. Survient un ours qui lui demande de partir, le fermier propose alors à la bête de l'aider à jardiner, arguant que l'ours pourra garder pour lui tout ce qui dépassera du sol, lui-même se contentant des racines. L'ours aide ponctuellement le fermier et au moment de la récolte, il est ravi mais découvre de retour chez lui que les feuilles de carotte sont immangeables. Il exige de goûter la racine, qu'il trouve délicieuse. Comprenant que le fermier l'a trahi, il le menace de représailles s'il s'aventure dans les bois. Depuis ce jour, tous les fermiers et les ours sont ennemis.

Corée et Indochine

En Corée, un mythe fondateur évoque un ours et un tigre dans une grotte, qui souhaitèrent tous deux devenir des hommes. Le dieu Hwanung (환웅) leur promit de les réincarner s’ils tenaient cent jours enfermés dans leur caverne avec comme seule nourriture vingt gousses d’ail. Au 37e jour, le tigre s’enfuit ; l’ours resta, et il fut transformé en femme, nommée Ungnyeo (웅녀). En raison de son passé, elle n’arriva pas à trouver un mari ; mais Hwanung, ému, prit l’apparence d’un humain et lui donna un fils, Tangun (단군), le patriarche du peuple coréen.

En Indochine, les Mnong croyaient que l'ours envoie la maladie à quiconque marche sur ses traces.

Page générée en 0.175 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise