Moteur Wankel - Définition

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Introduction

Des pistons du moteur Wankel : ils ne sont pas cylindriques.

Le moteur Wankel (/[vɑ̃kɛl]/) est un moteur à piston rotatif décrivant un cycle quatre temps, dans lequel un piston « triangulaire » convertit l'énergie issue de la combustion du carburant en une énergie mécanique de rotation transmise au vilebrequin. Le moteur Wankel est, à tort, couramment désigné par le terme « moteur rotatif », bien que les fonctionnements des deux types de moteurs soient radicalement différents.

Le principe du moteur Wankel est basé sur celui de la pompe à palettes, qui remonte à la deuxième moitié du XVIe siècle. Mais c'est seulement dans les années 1950 que le moteur est développé sous sa forme actuelle par celui qui lui a laissé son nom, l'ingénieur allemand Felix Wankel. NSU sera le premier constructeur à en obtenir la licence, équipant ses motos du moteur, avant de la céder à d'autres constructeurs.

Contrairement au moteur à piston au mouvement linéaire dans un cylindre, le moteur Wankel n'utilise pas le principe du système bielle-manivelle. Il n'engendre aucun mouvement alternatif, ce qui réduit les transformations de mouvement, les frottements, les vibrations et le bruit. L'ensemble comporte également un nombre de pièces réduit. Ces avantages en font une solution technique séduisante ; il trouve une large gamme d'applications dans tous les domaines des transports (automobiles, motos, aéronefs). Son utilisation dans des véhicules de série reste néanmoins minoritaire, principalement en raison de sa consommation importante et de problèmes d'étanchéité inhérents à son principe même. En 2010, dans le secteur automobile, le constructeur Mazda intègre encore ce moteur à ses véhicules tandis qu'Audi présente au salon de l'automobile de Genève son A1 e-Tron, un concept car hybride électrique-thermique.

Historique

Machines à piston rotatif

Photographie d'une pompe à palettes dont le fonctionnement est proche du moteur Wankel.

Le principe du moteur Wankel remonte à celui des machines à piston rotatif et plus particulièrement à celui de la pompe à palettes, pompe encore couramment employée de nos jours, développée par Agostino Ramelli durant la deuxième moitié du XVIe siècle. Il s'agit d'une pompe rotative dont le rotor est muni de plusieurs palettes coulissant radialement et assurant le transfert du fluide pompé. Graf Pappenheimgasse invente quant à lui, en 1636, la pompe à engrenages permettant de récupérer l'eau d'une fontaine. La pompe à engrenage sert aujourd'hui régulièrement de pompe à huile dans la plupart des moteurs automobiles.

L'américain Cooley dépose un brevet, en 1901, pour une machine à piston rotatif, décrivant une épicycloïde intérieure. La particularité de cette machine à vapeur est d'utiliser un engrènement à denture pour mettre en rotation le piston. En 1908, l'anglais Umpleby reprend le système développé par Cooley et l'adapte afin d'obtenir une machine à combustion interne. Néanmoins, Umpleby ne parvient pas résoudre l'ensemble des problèmes liés à l'étanchéité et à la cinématique du piston.

Les Suédois Wallinder et Skoog sont les premiers à déposer le brevet d'un moteur à combustion interne basé sur le principe d'un piston rotatif avec engrènement à denture, dont le piston en étoile à cinq branches suit une courbe hypocycloïde. Ce moteur, dont le rapport de rotation est de 5/6, est adapté aux combustions deux ou quatre temps. Un moteur similaire sera mis au point dans les années 1930 par le Français Dimitri Sensaud de Lavaud, financé par les constructeurs automobiles Citroën et Renault ainsi que du ministère de l'Air, utilisant un triangle de Reuleaux comme piston, à l'image du moteur Wankel actuel. La puissance est alors transmise par l’intermédiaire d’un rotor extérieur. Néanmoins, ce moteur n'atteindra jamais une puissance suffisante en raison de divers problèmes d'étanchéité, de lubrification et de refroidissement, si bien que les travaux seront stoppés au bout de trois ans.

Travaux de Felix Wankel

Felix Wankel, ingénieur allemand passionné par le dessin industriel et le fonctionnement des machines, s'installe en 1924 dans son propre atelier à Heidelberg où il dessine les premières ébauches d'un moteur à piston rotatif. Il s'attelle tout particulièrement à résoudre les problèmes d'étanchéité, subventionné massivement par le ministère de l'Air et de la Kriegsmarine sous le troisième Reich. Fort de « son expérience d'usineur, de son souci de la précision et ses nombreuses recherches dans le domaine de la segmentation et des joints », Wankel est capable de présenter aux industriels allemands, désireux de mettre au point une nouvelle motorisation efficace et peu onéreuse — étant donné que le bilan de la Seconde Guerre mondiale est désastreux pour l'appareil industriel allemand — une technologie déjà poussée.

C'est en 1951 que Wankel établit ses premiers contacts avec différentes entreprises et notamment NSU avec qui il signe le 20 décembre 1951 un contrat d'association portant sur le moteur à piston rotatif. Cependant, ce n'est pas en tant que moteur que NSU exploite la machine de Felix Wankel. En effet, NSU l'installe sur certaines de ses motos en tant que compresseur afin d'augmenter le taux de compression, donc la puissance, de leur moteur thermique classique. Le « compresseur Wankel » est très prometteur puisque les motos NSU établiront un nouveau record de vitesse aux États-Unis, à 192,5 km/h. Ce n'est qu'en 1959 que NSU annonce officiellement « la réussite du moteur à piston rotatif » (« The Rotary engine achieves success ») et la commercialisation prochaine d'une automobile motorisée par un moteur à piston rotatif.

Conception

La NSU Spider, première automobile à être équipée d'un moteur Wankel.

NSU, en coopération avec Felix Wankel et d'autres partenaires commerciaux, entame de 1954 à 1957 la conception d'un prototype automobile expérimental mû par un moteur Wankel. Le 1er février 1957, le prototype dénommé DKM 54 est testé sur banc moteur et affiche des performances prometteuses. Le moteur, d'une cylindrée de 125 cm3 dont le diamètre est limité à 26 cm, parvient à développer 29 ch à 17 000 tr/mn. Seulement quatre DKM 54 sont alors construits.

La version DKM du moteur Wankel, qui transmet la puissance par l’intermédiaire d’un rotor extérieur, ne peut selon NSU supporter une production en série en raison de sa mise en œuvre complexe. Dès 1957, NSU abandonne le principe de rotor extérieur au profit d'un système planétaire (KKM) où le rotor extérieur est désormais stationnaire, tandis que le piston tourne sur un arbre excentré. L'inconvénient de ce nouveau système est qu'il ne permet plus d'atteindre des régimes moteur élevés.

En 1960, NSU réalise un prototype expérimental KKM 250 qu'elle installe sur une Prinz modifiée pour des essais routiers. Le prototype d'une cylindrée de 250 cm3 développe une puissance de 30 ch à 5 000 tr/mn, performances bien inférieures au précédent prototype. En 1963, NSU décide tout de même de commercialiser un modèle équipé d'un KKM 500 de 500 cm3. La NSU Spider devient ainsi la première automobile commercialisée avec un moteur Wankel. Avec un moteur placé en porte-à-faux arrière et alimenté par un carburateur Solex, la Spider développe 50 ch à 6 000 tr/mn et peut atteindre les 150 km/h.

Développement

Malheureusement, la consommation excessive et la fiabilité limitée de la Spider, due au principe même du moteur Wankel, auront raison d'elle : la production sera arrêtée en juillet 1967 après 2 375 exemplaires vendus. Malgré une production bien inférieure aux prévisions, Tsuneji Matsuda, président du groupe Toyo Kogyo (aujourd'hui Mazda), est très tôt intéressé par cette nouvelle motorisation et entame personnellement des négociations avec NSU. Elles aboutiront en juillet 1961 à un contrat de coopération avec l'approbation du gouvernement japonais.

Rapidement, Mazda fait face comme NSU à des problèmes de fiabilité, en raison de phénomènes de vibrations frictionnelles des segments d'arête ayant lieu dans la chambre de combustion et engendrant des « chatter marks » ou marques de cognement caractéristiques. Dans ce cas, le segment d'arête s'use rapidement et n'assure plus l'étanchéité. La longévité du moteur en est grandement réduite.

La Mazda Cosmo Sports 110S est la première automobile de série à être équipée d'un moteur à piston rotatif.

De nombreuses études sont réalisées dans le but d'améliorer l'efficacité de l'étanchéité et de diminuer les vibrations du moteur. Une première étude porte sur l'optimisation des matériaux utilisés pour le carter et les segments. En effet, il est avéré que le carbone et la fonte d'acier utilisée pour les segments sont incompatibles, d'autant plus lorsqu'un placage en chrome est appliqué sur le carter. Afin d'éviter de remplacer l'ensemble des matériaux, les constructeurs allemands Daimler et Mercedes-Benz développent et proposent un traitement dénommé « Nikasil », alliant au nickel des particules de carbure de silice. Ce traitement présente l'avantage de mieux fixer l'huile et donc d'améliorer la lubrification. Néanmoins, il ne suffit pas à résoudre le problème d'usure des segments. Bien que Mazda trouve une solution dans la fabrication de segments creux aux canaux entrecroisés, en raison d'une fabrication trop onéreuse, le constructeur se rabat sur des segments en carbone auto-lubrifiant imprégné d'aluminium.

Production en série

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Vidéo d'un moteur Wankel bi-rotor sur son vilebrequin.

Dans les années 1960, Mazda met au point des motorisations non plus munies d'un seul rotor mais de deux, trois, voire quatre rotors. La combinaison de plusieurs rotors permet de diminuer les fluctuations de couple dues à la succession de « ratés d'allumage » et de combustions normales. Le premier moteur bi-rotor, d'une cylindrée de 2 x 399 cm3, équipe une Mazda Type L8A, prototype sportif. La Mazda Cosmo Sports 110S, lancée en 1967, devient la première voiture de série au monde à être équipée d'un moteur Wankel. Équipée d'un bi-rotor de 2 x 491 cm3, la Cosmo Sport développe 110 ch. La production s'arrêtera en 1972 avec 1 519 exemplaires vendus.

Peu de modèles d'automobiles seront équipées d'un moteur à piston rotatif, bien que Citroën et de NSU construisent ensemble, dans le cadre de leur filiale commune Comotor (Compagnie Européenne de Construction de Moteurs Automobiles), une usine dans la Sarre pour fabriquer le moteur Wankel Birotor. En France, seul Citroën commercialise une voiture à moteur Wankel bi-rotor. Dévoilée la première fois sous la forme d'un prototype expérimental dénommé M35, la Citroën GS Birotor, produite à partir de 1972, ne trouve pas le succès escompté. Bien que novatrice d'un point de vue ensemble moteur/châssis, sa consommation excessive et sa fiabilité laissent perplexes les potentiels acheteurs — la crise pétrolière des années 1970 renchérissant le prix de l'essence.

Néanmoins, la luxueuse NSU Ro80, dernier modèle de la marque, aura bien plus de succès que la Citroën, puisque 37 389 exemplaires seront vendus. « Ambitieuse technologiquement comme du point de vue esthétique, elle incarne un audacieux parti pris d’innovation ». Son ambition est d'ailleurs clairement affichée, puisque le nom « Ro80 » fait référence à sa technique censée représenter celle des années 80. Elle désire imposer le moteur Wankel comme motorisation automobile et ainsi supplanter les moteurs « alternatifs ».

Déclin d'intérêt

Moteur Wankel de la Mazda RX-8.

Le moteur Wankel, arrivé sur le marché à un mauvais moment puisque le premier choc pétrolier frappe le monde en 1973, n'a pu combler son manque d'expérience face à celle des moteurs classiques bien que son concept soit séduisant. Bien que silencieux et exempt de vibrations, sa consommation excessive demeure un frein à son développement. Il aurait fallu pouvoir lui adjoindre un turbocompresseur permettant de récupérer une partie de l'énergie dissipée à l'échappement. Le bureau d'étude de Citroën continue à travailler sur le moteur à piston rotatif jusqu'au début des années 1980. Mais suite au rachat de Citroën par Peugeot, les recherches trop coûteuses sont définitivement abandonnées.

Mazda, qui a commencé la production d'automobiles propulsées par un moteur à piston rotatif en même temps que Citroën, est en 2009 le seul constructeur à proposer des modèles automobiles équipés du moteur Wankel, dont l'une des plus célèbres à l'heure actuelle est la Mazda RX-8. Ce dernier constructeur a même réussi à remporter les 24 heures du Mans en 1991 avec la Mazda 787B, un prototype mû par un quadrirotor Wankel atmosphérique de 700 ch. Cette victoire est néanmoins éphémère puisqu'elle entraîne l'interdiction de ce type de motorisation par la fédération sportive de la discipline, sous la pression des autres constructeurs automobiles.

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