Mathias Ringmann était un humaniste aux multiples talents, à la fois helléniste, géographe, poète, pédagogue et correcteur d’imprimerie.
Né à Eichhoffen en Alsace en 1482 et mort à Sélestat en 1511, il a fait partie des érudits du Gymnase Vosgien créé par Vautrin Lud.
Il commence ses études à Sélestat, probablement à l’école latine fondée par Ludwig Dringenberg, le père de l’humanisme en Alsace. C’est ensuite à l’Université de Heidelberg qu’il étudie la théologie et les mathématiques. Il fait aussi quelques rencontres significatives, tels que cet autre humaniste alsacien, le prêtre Jakob Wimpheling, ou encore le chartreux Gregor Reisch qui travaille alors à son encyclopédie Margarita Philosophica.
A Paris il apprend le grec et suit également les cours de Faustus Andrelinus, « poète du roi » et fin connaisseur d’Erasme. Il se forme aussi à la cosmographie, à la philosophie et aux mathématiques auprès du théologien érudit Jacques Lefèvre d'Étaples.
Vautrin Lud songeait depuis longtemps à une réédition de la Geographia de Ptolémée qui prendrait en compte les récentes découvertes. Il a su trouver les arguments pour que Ringmann – qui se fera désormais appeler Philesius Vogesigena – rejoigne le Gymnase Vosgien, un petit groupe d’érudits qu’il est en train de créer à Saint-Dié, et qui compte parmi ses membres son propre neveu Nicolas Lud, le cartographe Martin Waldseemüller et le latiniste Jean Basin.
Le 1507 le groupe édite la Cosmographiae Introductio, un petit ouvrage qui complète une grande carte du monde Universalis Cosmographia dessinée par Waldseemüller. A cette occasion le nom America apparaît pour la première fois, à la fois sur la mappemonde et dans l’opuscule où ce choix est dûment expliqué.
La question de savoir auquel des cinq doctes membres du cénacle on doit réellement cette appellation nouvelle préoccupait déjà le Dr. Franz Laufenberger en 1959 (« Ringmann oder Waldseemüller ? »). Albert Ronsin, grand spécialiste déodatien du baptême de l’Amérique, s’est également interrogé à ce sujet : « Qui est l’auteur de la Cosmographiae Introductio ? ». De nombreuses sources attribuent cette paternité à Waldseemüller, d’autres à Ringmann, et les arguments des uns et des autres ne manquent pas de pertinence. Ronsin plaide en faveur d’une conception réellement collective (le Gymnase Vosgien), tout en concédant – comme Laufenberger d’ailleurs – un léger avantage à Mathias Ringmann.
En 1503 il quitte Paris pour l’Alsace où il retrouve Wimpheling, lui-aussi revenu au pays. Féru de pédagogie il aimerait fonder à son tour une école novatrice sur le modèle de celle de Sélestat. Mais il échoue à deux reprises.
A cette période Strasbourg est devenu – avec Bâle – l’un des grands centres de l’imprimerie en Europe. Mathias Ringmann y fréquente les milieux de l’édition et travaille lui-même comme correcteur dans une imprimerie lorsque sa vie va prendre un tournant. Au retour de son troisième voyage (1501-1502) Amerigo Vespucci vient d’envoyer le récit de son expédition à Lorenzo di Pier Francesco di Medici. Cette lettre de quelques pages est connue sous le nom de Mundus Novus et fait aussitôt l’objet de plusieurs éditions et traductions. En 1505 Mathias Ringmann publie lui-aussi une version en latin chez Mathias Hupfuff à Strasbourg sous le titre De Ora Antarctica et fait précéder le texte de Vespucci d’un petit poème géographique et humoristique de vingt-deux vers dont il est l’auteur. Séduit, le chanoine de Saint-Dié Vautrin Lud en transcrira par la suite une partie dans sa Speculi Orbis… Declaratio. Déjà il persuade Ringmann de l’accompagner dans les Vosges.
Avant de partir celui-ci achève le travail en cours pour Jean Grüninger, une traduction en allemand des œuvres de Jules César, sous le titre Julius der erst römisch Keiser von seinem Leben und Krieg, erstmals uss dem Latein in Tütsch gebracht vnd mit andrer Ordnung der Capittel und uil zusetz nüw getruckt. Peu après il arrive à Saint-Dié où le cartographe Martin Waldseemüller s’est déjà établi depuis un certain temps.