Considérons l'intensité de la pesanteur g(P) en un point P situé à une distance r du centre de masse de la Terre, ainsi que l'intensité de la pesanteur g(Q) en un autre point Q situé à une distance r' de ce même centre de masse. Notons par h la différence d'altitude entre Q et P, de sorte que h > 0 si Q est à une altitude plus élevée que P, et h < 0 dans le cas contraire.
Bouguer a montré que pour des mesures effectuées à la surface terrestre, on a sensiblement
g(Q) ≅ g(P) [ 1 – 2h/R + 3ρ'h/(2ρR)],
R étant le rayon moyen de la Terre. C'est la célèbre formule de Bouguer. Le deuxième terme, qui commence avec le signe moins, représente la variation de l'intensité de la pesanteur produite par une variation d'altitude, sans tenir compte de la contribution des couches situées entre l'altitude de P et l'altitude de Q. On appelle cet effet la correction à l'air libre, ou la correction de Faye, pour honorer l'astronome Hervé Faye (1814–1902) qui en a fait grand usage. Le troisième terme correspond à l'attraction d'un plateau de densité uniforme ρ' et de dimensions horizontales très grandes (idéalement infinies). Il est censé tenir compte de l'attraction des masses situées entre l'altitude de P et l'altitude de Q lorsqu'on effectue des mesures en Q et qu'on les réduit à l'altitude de P. On l'appelle la correction de plateau. Écrite autrement, cette formule de Bouguer devient
ρ ≅ 3h ρ' / [ 2R g(Q)/g(P) + 4h – 2R ].
On voit ainsi que la densité moyenne ρ (et donc la masse) de la Terre s'exprime en fonction de quantités connues ou mesurables, à condition de pouvoir estimer correctement ρ'. Pierre Bouguer et ses successeurs mesuraient les quantités g(P) et g(Q) au moyen de pendules. Maintenant, on utilise des gravimètres qui résultent d'une évolution des pendules pour s'adapter de mieux en mieux aux contraintes en précision de la gravimétrie et de la géodynamique. En particulier, Bouguer et ses collaborateurs ont appliqué la relation précédente pour déterminer la densité moyenne de la Terre en Équateur, au cours des années 1737–1740. À cette fin, ils mesuraient les longueurs respectives d'un pendule battant la seconde en trois endroits d'altitudes fort différentes : (1) sur l'Ile de l'Inca dans la rivière Émeraude, à une altitude comprise entre 30 et 40 toises, située à une distance d'environ 60 kilomètres au sud-ouest de Quito ; leurs mesures y fournissaient une longueur du pendule de 439,21 lignes ; (2) à Quito-même, à une altitude de 1466 toises et une latitude de 0°,25 S, où la longueur du pendule était de 438,88 lignes ; (3) enfin au sommet du Pichincha, proche de Quito, à une altitude de 2434 toises, où la longueur du pendule était de 438,69 lignes.
Sachant que pour une période fixée, en l'occurrence une seconde, l'intensité locale de la pesanteur est proportionnelle à la longueur du pendule, et en admettant que la situation géographique de Quito corresponde à celle d'un haut-plateau, la relation empirique trouvée par Bouguer fut ρ ≅ 4,5 ρ'. On sait actuellement que cette valeur 4,5 du rapport ρ/ρ' conduit à une estimation 2 à 3 fois trop grande pour la masse de la Terre. Néanmoins, cette détermination historique prouvait que la Terre n'était pas creuse ou remplie d'eau en son intérieur, comme certains le soutenaient à l'époque.
Beaucoup plus tard, en 1821, F. Carlini trouva, au moyen de mesures pendulaires effectuées dans la région de Milan, la valeur ρ = 4,39 g/cm³. Cette valeur fut portée en 1827 par Sabine à 4,77 g/cm³, puis en 1841 par C.I. Giulio à 4,95 g/cm³.
D'autre part, G.B. Airy tenta de déterminer ρ en mesurant la différence de période fournie par un pendule à la surface et au fond d'une mine. Les premiers essais eurent lieu en Cornouailles en 1826 et 1828. Ils furent des échecs à cause d'un incendie et d'une inondation. Finalement, en 1854, Airy aboutit à la valeur 6,6 g/cm³ lors de mesures faites dans une mine de charbon à Harton dans le Sunderland. La méthode employée par Airy présuppose que la Terre possède une stratification sphérique. En outre, Airy admet des valeurs particulières pour la densité en profondeur. Plus tard, en 1883, des expériences effectuées par Robert von Sterneck (1839–1910) à différents niveaux dans des mines de Saxe et de Bohême conduisaient à des valeurs de la densité moyenne ρ comprises entre 5,0 et 6,3 g/cm³. Celles-ci mettaient en évidence le peu de crédit qu'on pouvait accorder aux hypothèses faites par Airy. En fait, en 1855 Pratt et Airy lui-même avaient suggéré indépendamment qu'il devait exister une compensation des densités en profondeur. C'est ainsi que fut forgé le concept d' isostasie qui limite la possibilité de mesurer ρ avec précision, tant au moyen d'un fil à plomb que d'un pendule. Malgré ces possibilités réduites d'arriver à une estimation précise de la densité moyenne de la Terre de cette manière, T.C. Mendenhall réalisa en 1880 une expérience gravimétrique à Tokyo et au sommet du Fujiyama. Son résultat est ρ = 5,77 g/cm³.