Logiciel libre - Définition

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Origines et évolution des logiciels libres

Les opérateurs des premiers ordinateurs produits en série prirent l'habitude de former des groupes d'utilisateurs pour partager leurs expériences: SHARE et COMMON pour IBM, DECUS pour Digital Equipment Corporation, etc. En effet, il n'y avait alors pas de ressource pour se former, en dehors des formations dispensées par les fabricants. Ces groupes étaient soutenus par les fabricants eux-mêmes et des modifications de logiciels étaient échangées. À cette époque, c'était le matériel informatique qui était censé constituer la source de revenus, le logiciel n'étant qu'un moyen d'en faciliter la vente. L'accès au code source était normal, car nul n'achetait un ordinateur sans disposer d'une équipe de programmeurs. Bien avant même la création d'Unix, les milieux professionnels et universitaires s'échangeaient volontiers logiciels et codes sources, et les constructeurs cédaient le leur pour rien jusqu'à ce que les lois antitrust le leur interdisent afin de permettre l'exercice d'une concurrence dans ce domaine. En outre, jusqu'aux années 1970, il n'était pas encore tout à fait clair que le droit d'auteur s'applique aux logiciels.

Par décisions de justice, les constructeurs sont contraints de facturer séparément leurs logiciels au début des années 1970 ; en quinze ans, l'avènement de la micro-informatique va généraliser ce modèle et donner un essor aux éditeurs de logiciels qui s'orientent vers la vente de licences d'utilisation. Un exemple souvent cité pour illustrer ce tournant est une lettre ouverte de Bill Gates aux hobbyistes, leur enjoignant de cesser de copier illicitement les logiciels. Ce même Bill Gates, en obtenant qu'IBM lui laisse les droits du DOS — puis de Windows — et ne commercialise qu'une licence d'usage, deviendra deux décennies plus tard l'homme le plus riche du monde, où il se vend un ordinateur personnel toutes les dix secondes, plus de neuf sur dix étant prééquipés d'un système d'exploitation de Microsoft.

Les constructeurs ont parallèlement restreint l'accès au code source des programmes, car les modifications souvent effectuées par les équipes des clients, rendent problématique le soutien technique à distance (stratégie OCO, object-code only, d'IBM à partir du début des années 1980). Il devient impossible, et dans certains cas interdit, d'étudier, de corriger ou d'améliorer les logiciels acquis. Non seulement l'utilisateur ne peut plus adapter le logiciel à ses souhaits, mais en cas de bug, il se retrouve dépendant du bon vouloir de l'éditeur du logiciel. Enfin, la copie, une opération naturelle pour un ordinateur, devient en règle générale interdite (par défaut,le droit d'auteur interdit la copie non explicitement autorisée).

Les logiciels disponibles uniquement sous ces conditions restrictives deviennent alors la règle, et les logiciels jusqu'alors librement échangés se retrouvent souvent intégrés dans des produits commerciaux figés et non partageables.

Richard Stallman

Richard Stallman, alors chercheur au laboratoire d'intelligence artificielle du Massachusetts Institute of Technology, ressent profondément ce changement lorsque les collègues, avec qui il travaillait et échangeait des logiciels jusqu'ici, sont engagés à leur tour pour produire des logiciels qu'ils ne pourront plus partager. En 1983 il crée donc le projet GNU, qui a pour objectif de construire un système d'exploitation compatible avec Unix, et dont la totalité des logiciels est librement partageable. Parallèlement aux travaux de développement engagés, Richard Stallman fonde la Free Software Foundation. Afin de donner une assise solide à son projet, Richard Stallman définit précisément la notion de logiciel libre. Et il rédige la licence publique générale GNU (GPL) qui utilise le droit d'auteur pour garantir la pérennité du droit au partage (et donc interdire la possibilité qu'une évolution ne soit plus partageable). La version 3 de cette licence a été réalisée avec l'aide d'Eben Moglen. C'est ainsi qu'il fixe un cadre juridique et encourage le développement du logiciel libre. Le but des logiciels libres est de permettre le partage complet de l'information, d'où la référence à la liberté.

Si Richard Stallman considère bien sûr que les logiciels jusqu'alors librement partageables sont libres, il inclut également les logiciels sous copyleft dans les logiciels libres. L'invention du copyleft (que l'on peut traduire par "gauche d'auteur", par opposition au "droit d'auteur", jeu de mots, en fait, car il est surtout question d'abandonner, de renoncer aux droits, alors que le copyright voulait, après l'avènement de l'imprimerie, réserver à l'auteur original d'une œuvre tout droit de recopie), mis en œuvre par la licence publique générale GNU, permet de résoudre deux exigences apparemment paradoxales: permettre le libre partage d'un logiciel, tout en empêchant son intégration dans des produits non partageables. Les logiciels libres sous copyleft sont donc disponibles sous une licence qui inclut un nombre important de clauses visant à empêcher toute possibilité de rendre le logiciel moins libre en le redistribuant. Ainsi, la GPL exige entre autres que toute redistribution se fasse exactement sous les conditions de la GPL, tant pour le logiciel original que pour les modifications qui auraient été faites, en garantissant l'accès au code source complet pendant plusieurs années.

Les développeurs et utilisateurs de logiciels libres sont indépendants, sans tendance politique particulière, et leurs motivations sont diverses. Ils réalisent ou utilisent des outils fondés sur un mode de production reposant sur la collaboration, l'entraide, le partage, la mutualisation. À ce titre, Bill Gates a comparé les communautés du libre à des "communistes d'un nouveau genre".

Richard Stallman considère que le droit d'auteur, en interdisant d'aider ses amis par une simple copie, en privilégiant l'auteur aux dépens du monde entier, est nuisible pour la société. Pour illustrer le principe du logiciel libre face aux autres logiciels, il compare volontiers cela à la recette de cuisine d'un gâteau :

  • selon le principe du libre : vous avez obtenu légalement cette recette par différentes sources (des revues, le bouche à oreille...). Vous avez le droit de redistribuer cette recette à qui vous voulez et vous pouvez la modifier puis la redistribuer comme il vous plaît.
  • selon le principe du logiciel non libre : vous n'avez pas accès à la recette, mais uniquement au gâteau déjà fait. Vous ne pouvez manger le gâteau que dans une seule cuisine et personne d'autre que vous ne peut en manger. Quand bien même la recette serait fournie avec le gâteau, toute copie ou modification serait interdite.

À l'inverse, le créateur du noyau Linux, Linus Torvalds, ne s'exprime pas sur la portée politique du principe des logiciels libres et met plutôt en avant l'efficacité de la coopération technique que le libre rend possible. Il compare volontiers la coopération entre développeurs de logiciels libres avec la coopération scientifique : chacun publie ouvertement ses résultats qui permettent aux autres de bâtir de nouvelles solutions.

L'engouement pour le logiciel libre dépasse aujourd'hui largement le cadre de la petite communauté des techniciens par qui le concept a été primitivement créé et développé. On ne compte plus les prises de position dans la société en faveur du tout nouveau modèle de développement et de distribution du logiciel. Un grand nombre de gens totalement étrangers à la culture informatique s'entichent du concept, sans qu'il soit toutefois bien certain qu'ils distinguent les subtilités de l'« open source », de la « gratuité » des logiciels ou tout simplement de la "liberté" réellement en jeu.

Le logiciel libre n'est plus seulement une solution juridique protégeant le droit d'auteur choisissant de travailler de façon ouverte et collaborative, cela devient un véritable phénomène de société. Il passionne de jeunes gens qui se découvrent des vocations de promoteurs de cette nouvelle philosophie, avec un élan qui touche parfois au romantisme. Le logiciel propriétaire (peut-être comprendrez-vous commercial et industriel), dont le « libre » est une alternative affichée devient aux yeux de certains un ennemi objectif. La simple concurrence du marché ne peut suffire à expliquer leur engouement. Ils parlent de choix de société et trouvent parfois un écho favorable chez certains responsables politiques nationaux, qui ajoutent le thème dans leurs programmes.

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