Karabane - Définition

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Géographie

Situation

Localisation de l'île de Karabane

D'une superficie totale de 57 km2, Karabane est la principale et dernière île dans l'embouchure du fleuve Casamance, en rive gauche, face à la pointe de Diogué. Elle est située par 12° 32' de latitude Nord et par 16° 43' de longitude Ouest et se trouve – via Elinkine – à près de 60 km de Ziguinchor, le chef-lieu de la région du même nom, et à un peu plus de 500 km de Dakar, la capitale du pays.

Arrivée à Karabane en provenance d'Elinkine

« Il faut s'armer de patience pour rejoindre l'île de Karabane », dit-on encore aujourd'hui. C'était encore plus vrai au XIXe siècle lorsque, selon un témoignage, un voyage en bateau de 26 heures de Rufisque (près de Dakar) à Karabane était jugé assez rapide, dû à un vent favorable. Comme on le verra plus loin, dans la section consacrée aux transports, des itinéraires plus variés et plus rapides permettent désormais d'atteindre la Basse-Casamance par la route, par la mer ou par les airs, mais, faute de liaison maritime directe pour le moment, il ne s'agit que de la première étape du périple.

En effet, même si, à vol d'oiseau, plusieurs localités semblent très proches, on n'accède à Karabane qu'en pirogue à moteur, principalement depuis le village d'Elinkine – une traversée de moins de trente minutes qui nécessitait autrefois une heure et demie de canot. D'autres possibilités existent, telles que le trajet Ziguinchor-Karabane directement en pirogue en deux ou trois heures ou l'acheminement par la piste depuis Cap Skirring via Kachouane, mais, comme on peut le contater sur une carte détaillée de la région, un lacis de bras d'eau – des marigots, ou plutôt des bolongs, selon la terminologie en usage dans l'espace sénégambien – ne facilite pas les déplacements. Le débarcadère se trouvant sur une petite péninsule au nord-est de l'île, il faut en outre contourner celle-ci.

Géologie

Bancs de sable et bolongs

De formation géologique récente, Karabane est constituée d'un banc de sable et d'alluvions. Comme l'ont souligné les premiers observateurs français, les sols de la région sont généralement composés de sable fin et d'argile, selon différentes combinaisons et superpositions, en fonction des facteurs naturels et de l'action humaine. À Karabane en revanche « le sable paraît exister presque seul ». La pénurie d'argile explique que les cases sont plus souvent faites de paille sur une armature en bois, plutôt qu'en banco comme à Mlomp ou Séléki par exemple.

Pénurie d'argile : habitation de paille sur armature en bois

Sur un espace plat et marécageux, les branches et les racines des palétuviers forment une digue naturelle où s'accumulent des dépôts de coquilles d'huîtres qui se mêlent à la vase et aux détritus végétaux. Cet enchevêtrement contribue à retenir les sols et gagnerait sans doute du terrain si la puissance des courants n'exerçait des effets contraires.

L'élévation ne dépassant guère 2 m, le sud de l'île est partiellement inondé pendant la saison des pluies et une submersion totale n'est pas à exclure certaines années. À marée basse les vasières se découvrent, c'est pourquoi les embarcations à quille peuvent difficilement accoster. Pour y faire escale, le Joola devait donc mouiller à environ 500 m au nord du village, par 8 à 10 m d’eau.

Dès 1849 des signes d'érosion sont notés lorsqu'on constate que la maison du Résident – le représentant du Gouvernement sur l'île –, victime d'incendies à deux reprises, doit être reconstruite plus en retrait à chaque fois, alors que l'emplacement d'origine est désormais inondé, même à marée basse. Les phénomènes d'érosion côtière et de salinisation qui touchent l'ouest du Sénégal sont une source de préoccupations ici également.

Grâce aux puits, l'eau douce reste pour le moment disponible à une profondeur raisonnable pour l'arrosage ou les besoins domestiques, mais jusqu'à l'installation d'une pompe en 2006, l'eau potable devait être acheminée en pirogue depuis Elinkine.

Climat

En Basse-Casamance le climat est de type tropical. Il se caractérise par une saison sèche – ici au sens de non pluvieuse, mais néanmoins humide – et une saison humide, aussi appelée hivernage, qui commence habituellement en juin et se termine en octobre. En raison de la proximité de l'océan, le degré hygrométrique de l'air reste toujours supérieur à 40% et contribue à la luxuriance de la végétation. Grâce aux alizés maritimes, issus de l'anticyclone des Açores, l'île bénéficie d'un climat agréable toute l'année. De direction nord à nord-est, ces vents sont frais, toujours humides, et leur amplitude thermique diurne est faible. Leur présence est appréciée par les amateurs de kitesurf. Les activités agricoles, et notamment la riziculture, dépendent entièrement de la pluviosité. « Wah uŋejutumu, emitai elaatut » (Si un projet ne se réalise pas, c'est que la pluie ne sera pas tombée), dit un proverbe floup. L'invocation des fétiches lorsqu'il ne pleut pas fait partie des rites animistes traditionnels. De fait, au cours des dernières décennies, on a pu observer une baisse générale de la pluviométrie, qui menace la productivité dans les rizières, accroît la salinité des sols qui ne sont plus suffisamment lessivés et concourt à la dégradation de la mangrove. En mai et juin la température de l'air est de l'ordre de 28°. En janvier et février – les mois les plus froids – elle avoisine 24°. Des températures inférieures à 18° sont tout à fait exceptionnelles. Au mois de septembre, la température de l'eau de mer constatée en surface est de 26°.

Flore

Autrefois, certains jugeaient l'île aride, dotée d'une maigre végétation, « où les cocotiers seuls sont susceptibles d'une belle venue » et « où l'on a grand'peine à faire venir quelques légumes ». Sous ce climat de type tropical, la végétation est pourtant plus abondante que dans le nord du pays, surtout pendant l'hivernage, c'est-à-dire la saison des pluies. Soucieux d'attirer l'attention de l'administration coloniale qu'il juge insuffisamment impliquée dans le développement de la Casamance, le traitant Emmanuel Bertrand-Bocandé lui avait remis un rapport argumenté, Carabane et Sedhiou. Des ressources que présentent dans leur état actuel les comptoirs français établis sur les bords de la Casamance, dans lequel il recensait de manière très détaillée les espèces végétales présentes alors sur l'île – des observations qui restent précieuses aujourd'hui.

Omniprésence de la mangrove à palétuviers

La plus grande partie de Karabane est couverte de mangroves à palétuviers formant un inextricable maquis que l'on ne peut franchir en dehors de passages aménagés. Les palétuviers font partie des quelques espèces capables de s'adapter à ce milieu contraignant, caractérisé par une salinité élevée, une faible oxygénation des sols due à la vase, un sol instable ou l'immersion des racines. La dégradation de la mangrove et la transformation des sols en tannes, constatée de longue date dans la région, touche également Karabane. Ce phénomène s'explique par des causes tant naturelles qu'anthropiques, telles que l'exploitation anarchique du bois ou des crustacés. Des actions sont menées pour la sauvegarde de la mangrove et l'on cherche aussi à sensibiliser les plus jeunes.

Pirogue taillée dans le tronc d'un fromager

Le visiteur s'aventure peu au cœur de la mangrove, sans doute plus sensible aux palmiers – de type cocotiers – qui bordent la plage et donnent à Karabane son aspect caractéristique de paysage de carte postale. Les noix de coco occupent une place privilégiée parmi les ressources de l'île.

Pas nécessairement aussi spectaculaires que dans d'autres localités de Basse-Casamance – comme à Mlomp –, les fromagers sont néanmoins présents et leur bois grisé, très léger, facile à travailler, trouve de multiples usages, de la construction de portes à la fabrication d'embarcations monoxyles. En effet les pirogues des Diolas, longues de 6 à 8 mètres, ont pour caractéristique d'être taillées d'une seule pièce – contrairement à la pirogue sénégalaise traditionnelle. Elles sont façonnées à l'herminette dans le tronc d'un grand fromager.

Parmi les arbres fruitiers, les manguiers et les orangers sont les plus représentés. Au milieu de la verdure, figuiers de Barbarie, flamboyants et bougainvillées aux couleurs vives contribuent à mettre en valeur les hôtels et les campements. Les divers travaux d'aménagements ont parfois eu leur part de responsabilité dans la déforestation constatée dans l'île.

Faune

Guêpier nain dans les palétuviers

La présence de nombreux oiseaux avait déjà été remarquée par les premiers explorateurs. Aujourd'hui, alors que le Parc national de la Basse-Casamance et la Réserve ornithologique de Kalissaye n'ont pas rouvert leurs portes depuis les années de conflit, Karabane constitue un territoire très propice à leur observation. Une étude ornithologique de 1998 a permis de constater l'existence sur l'île des espèces suivantes : anhinga (Anhinga africana), héron goliath (Garza goliath), vautour palmiste (Gypohierax angolensis), barge à queue noire (Limosa limosa), courlis corlieu (Numenius phaeopus), courlis cendré (Numenius arquata), sterne caspienne (Sterna caspia), émerauldine à bec rouge (Turtur afer), tourterelle à collier (Streptopelia semitorquata), martinet cafre (Apus caffer), martin-pêcheur du Sénégal (Halcyon senegalensis), camaroptère à dos gris (Camaroptera brachyura), moucherolle à ventre roux (Terpsiphone rufiventer), corbeau pie (Corvus albus), bec-de-corail cendré (Estrilda troglodytres) et serin du Mozambique (Serinus mozambicus).

Les eaux sont poissonneuses et les principales espèces rencontrées sont les carangues (Carangidae), les capitaines (Polydactylus quadrifilis), les barracudas (Sphyraena barracuda) ou les Carpes rouges. Les palétuviers abritent de nombreux crustacés, tels que les crevettes (Farfantepenaeus notialis) ou les crabes violonistes (Uca pugilator), ainsi que des mollusques, principalement des huîtres (Crassostrea gasar), qui s'accrochent aux racines découvertes à marée basse. L'exploitation de ces ressources halieutiques est commentée un peu plus loin dans la section consacrée à l'économie de l'île. Quant aux reptiles, l'étude ornithologique déjà évoquée mentionne en outre le gros lézard nommé Agama agama. D'autres observateurs évoquent la présence de varans.

Dauphins dans le fleuve

Le banc de sable qu'est Karabane abrite relativement peu de mammifères – si l'on excepte les animaux domestiques –, mais dès 1835 les premiers Français avaient remarqué les singes. D'autres colons signalèrent en 1870, non sans effroi, que les indigènes mangeaient « assez souvent du singe et même des chiens ». Aujourd'hui de grands dauphins (Tursiops truncates) sont couramment aperçus au large de l'île. En revanche l'existence de lamantins (Trichechus) n'est attestée que par les sites promotionnels. Néanmoins, par un juste retour des choses, la désaffection touristique observée en Basse-Casamance en raison des troubles, puis du naufrage du Joola aurait plutôt profité à la biodiversité. C'est ainsi que dans le parc national voisin, fermé au public depuis des années, on a pu constater un retour remarquable de crocodiles, de lamantins et d'oiseaux nicheurs.

Sur une île baptisée Ilha dos Mosquitos par les Portugais, les Karabanais et leurs visiteurs continuent de se protéger à la saison des pluies par le moustiquaire ou l'huile de karité. Il doivent aussi affronter parfois des insectes plus petits, mais non moins redoutables, les moutmouts – une appellation locale qui désigne les simulies (Simulium).

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