On estime que 30 % des infections nosocomiales pourraient être évitées : « Au total, compte tenu des origines multiples des infections nosocomiales, on estime à 70 % la proportion de celles qui ne pourraient pas être évitées par une meilleure prévention (mesures d'hygiène, locaux adaptés, etc.), notamment en raison de leur origine endogène. »
Les principales mesures pour combattre les infections nosocomiales relèvent de l'hygiène :
En France, c'est en 1998, que le CLIN (Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales) ainsi que ses cellules filles régionales, les C.CLIN (Centres de Coordination de la Lutte contre les Infections Nosocomiales) sont institués. Ces structures d'État ont pour mission :
Depuis le 1er Juillet 1998, la loi de sécurité sanitaire du code de la santé publique prévoit que chaque établissement de santé se doit de se doter d'un plan de lutte contre les infections nosocomiales. Le renforcement de la prévention des risques sanitaires doublé par l'organisation de la lutte contre les infections nosocomiales par le CLIN, permettent à chaque établissement de santé de constituer une cellule de lutte contre les infections nosocomiales animée par l'Équipe Opérationnelle d’Hygiène (EOH).
En l'absence de réglementation les Équipes Opérationnelles se composent de façon assez différente d'un établissement à l'autre:
Elles peuvent être constituées de:
- un ou plusieurs médecins hygiènistes (ou praticiens hygiéniste s(+ DU d'hygiène)) - une ou plusieurs infirmières hygiènistes avec souvent un cadre infirmier hygiéniste (IDE + DU d'Hygiène) - un ou plusieurs techniciens biohygiéniste (Techniciens de Laboratoire titulaires d'un BAC+2 en biologie de laboratoire (BTS AB par exemple)et ayant effectué 1 an de spécialisation en hygiène à l'ENCPB à Paris ou depuis septembre 2007 de la licence professionnelle "Biohygiène" décernée par cette même école soutenue par l'Université Pierre et Marie Curie - Paris 6.
On note cependant que la non-reconnaissance des spécialités d'hygiéniste et l'absence de législation stricte pour les praticiens, techniciens et infirmières freine largement la création de ces postes considérés comme couteux aux yeux des établissements actuellement. La création des pôles sur les objectifs de la rentabilité met à mal ces équipes qui pourtant travaillent dans l'objectif de minimiser le surcoût incontournable qu'engendre l'hygiène. L'hygiène est un investissement sur le long terme et ne produit pas une activité palpable à court terme. Mais le coût d'une infection nosocomiale reste in fine important, à la fois pour le patient, l'établissement de soin et pour l'institution nationale de sécurité sociale.
« L'InVS a mis au point un système d'alerte efficace. Ce système met en relation les établissements qui alertent l'InVS quand une épidémie ou une infection résistante surviennent ; RAISIN (Réseau d'Alerte, d'Investigation et de surveillance des Infections Nosocomiales) produit alors des recommandations s'il y a lieu. Deux exemples récents peuvent être cités :
« Des résultats encourageants corroborent ceux enregistrés par exemple à l'AP-HP où le pourcentage de SARM a diminué de ¼ en court séjour et de moitié en réanimation entre 1993 et 2002 (passant de 55 % à 24 %). Une tendance à la baisse du pourcentage de SARM en réanimation durant les 4 dernières années a été aussi enregistrée dans les CCLIN Paris-Nord et Sud-Ouest.
Ces résultats qui vont dans le bon sens semblent être le fruit d'une mise en place d'un programme spécifique de prévention de la transmission croisée des bactéries multi-résistantes, et d'un meilleur usage des antibiotiques.
Mais la vigilance demeure de mise et des progrès restent à faire, particulièrement en France. Par exemple, la proportion des souches EBLSE a diminué depuis 1993 (diminution régulière dans le temps) mais, en revanche, la résistance de ces bactéries a gagné l'espèce E. coli, espèce commensale majeure, ce qui fait craindre une diffusion dans la communauté. Elle a gagné aussi l'espèce E. aerogenes. »
Le ministère de la santé a mis en place un indicateur composite des activités de lutte contre les infections nosocomiales "ICALIN", dont l'objectif est d'inciter tous les établissements de santé à mesurer leurs actions et leurs résultats dans le domaine de la lutte contre les infections nosocomiales.
En mai 2010, un nouvel acteur dans la lutte contre les maladies nosocomiales a vu le jour : la SF2H, issue du regroupement de la Société française d'hygiène hospitalière (SFHH) et de la Société des infirmiers et infirmières en hygiène hospitalière (SIIHHF). L'ensemble des professionnels de la gestion des risques infectieux et de l'hygiène hospitalière, notamment pharmaciens, médecins, infirmiers et biologistes, y sont réunis. Leurs missions principales sont l'organisation de réunions scientifiques et la publication de documents de prévention et de recommandations; l'étude de problématique d'hygiène hospitalière; et la mise en place d'actions de formation, d'information, d'enseignement et de recherche.
Un travail a été fait pour comparer des protocoles d'éviction des staphylocoques dorés résistants à la méticilline (SARM) dans les pays scandinaves. Car "dans les Pays-Bas et les pays scandinaves, le taux de SARM est inférieur à 1 % alors qu'il est en France de 28 % selon l'EARSS 2004, et se situe aussi à des taux importants au Royaume Uni, en Allemagne, en Belgique et aux États-Unis (50 % selon le National Nosocomial Infections Surveillance System8(*)".
Les pays scandinaves et les Pays-Bas, pour obtenir un taux si faible de SARM, ont développé le protocole appelé Search and Destroy (S & D). Les impacts des mesures de ce programme S & D ont été étudiés en utilisant des modèles mathématiques en considérant soit un faible taux de SARM (<1 %), soit un fort taux de SARM (>10 %).
Les 6 mesures préventives étudiées étaient :
Les simples mesures d'hygiène des mains sont sous-entendues dans le comportement du personnel de santé et ne sont donc pas mentionnées en tant que telles bien qu'elles soient indispensables et nécessairement respectées.
Comment s'inspirer de ce protocole Search and Destroy ? Les pays ayant un fort taux de SARM pourraient s'inspirer de ce programme S & D et de ses 6 mesures.
À noter que ces mesures, pour être efficaces, doivent être respectées de façon exhaustive : par exemple, une efficacité d'isolement des patients de seulement 50 % ne pourrait conduire à une diminution du taux de SARM. Des limites s'imposent immédiatement pour appliquer un tel programme en France :
Mais ce modèle est à garder à l'esprit. On remarquera à ce propos que les pays ayant de bons résultats en matière de résistance aux antibiotiques ne sont pas toujours ceux qui ont de bons résultats en matière d'IN. Les mesures à prendre pour ces deux objectifs, pourtant très liés, sont distinctes.
Dans le canton de Genève, l'étude "Clean Care is Safer Care" menée par les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), en partenariat avec l'OMS, a pu mettre en évidence qu'en fournissant un flacon de poche de solution hydro-alcoolique (SHA) à chaque professionnel de santé, la prévalence des infections nosocomiales d'origine manuportée était réduite de moitié. Une des principales explications mises en avant par l'audit est qu'un lavage des mains à l'eau et au savon est plus contraignant que de pratiquer une hygiène des mains à l'aide d'une friction de SHA.
À la suite de cette étude révélant qu'en levant certaines contraintes (temps d'un lavage, intolérance cutanée au papier d'essuyage, facilité d'emploi de la SHA et disponibilité sur l'instant du produit), la cellule VigiGerme des HUG recommande qu'à opportunité égale, il vaut mieux privilégier une friction de SHA à un lavage classique.