Infection nosocomiale - Définition

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La lutte contre les infections nosocomiales

On estime que 30 % des infections nosocomiales pourraient être évitées : « Au total, compte tenu des origines multiples des infections nosocomiales, on estime à 70 % la proportion de celles qui ne pourraient pas être évitées par une meilleure prévention (mesures d'hygiène, locaux adaptés, etc.), notamment en raison de leur origine endogène. »

Mesures de préventions possibles

Les principales mesures pour combattre les infections nosocomiales relèvent de l'hygiène :

  • hygiène des mains des soignants, des patients et de leur entourage (Souvent par friction hydro-alcoolique en l'absence de cas de Clostridium ou de souillure sur les mains) ;
  • Dépistage à l'arrivée dans l'hôpital des patients considérés comme les plus à risques à riques ( tranches d'âge extrêmes, patients ayant déjà subi de nombreuses hospitalisations, immunodéprimés, etc, transferts venus d'autres hôpitaux ) en particulier pour les SARM, comme pratiqué aux Pays-BAs, Finlande et Danemark;
  • Isolement septique (en particulier dans une chambre individuelle) des malades susceptibles de propager l'infection ;
  • Isolement protecteur des sujets anormalement susceptibles aux infections ;
  • Surveillance de l'usage des antibiotiques dans l'hôpital ;
  • Surveillance de l'environnement par un technicien biohygiéniste (traitement d'air: au bloc opératoire, chambres de greffes; contrôle de l'eau: eau bactériologiquement maîtrisée, eau chaude sanitaire (Légionelles), eau pour soins standards, Contrôle de la désinfection des endoscopes, Contrôle de la qualité microbiologique des surfaces.
  • Actions préventives techniques: traitement des conduites transportant les fluides, notamment l'eau (choc thermique / choc chloré) des tours aéro-réfrigérantes et l'air (nettoyage des gaines, chauffage, climatisation);
  • Formation et contrôle médical périodique du personnel de l'hôpital : lavage des mains entre chaque patient (détersion avec du savon si nécessaire, et friction à la solution hydro-alcoolique), utilisation de gants stériles et de masques si nécessaire, désinfection du matériel (notamment à l'autoclave), obligation pour le personnel soignant de retirer tout bijou et ornement corporel transportant idéalement des germes même après détersion, destruction du matériel à usage unique…
  • Constitution d'un Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales chargé d'élaborer un programme pour le contrôle des infections nosocomiales en association à une Équipe Opérationnelle d'Hygiène (E.O.H, UHLIN ...).
  • Changement régulier (3 à quatre fois par an) des anti-bactériens de surface ( et d'une manière générale de tous les produits d'entretien) pour que les bactéries ne deviennent pas résistantes aux produits. ????

Les instances chargées de lutter contre les Infections Nosocomiales

En France

En France, c'est en 1998, que le CLIN (Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales) ainsi que ses cellules filles régionales, les C.CLIN (Centres de Coordination de la Lutte contre les Infections Nosocomiales) sont institués. Ces structures d'État ont pour mission :

  • d'auditer grâce aux équipes d'hygiène et aux CLIN la prévalence et l'incidence des infections nosocomiales des structures de soins publiques ou privées ;
  • de publier ces informations sous forme d'un communiqué au public, d'une bibliographie documentaire ou d'un rapport d'alerte à l'InVS ou l'Afssa ;
  • de favoriser par des moyens techniques ou bibliographiques les plans de lutte internes à chaque structure de soins (et ce notamment en éditant annuellement le « Guide de bonnes pratiques et de recommandations » à l'intention des professionnels de la santé à l'issue des conférences de consensus).

Depuis le 1er Juillet 1998, la loi de sécurité sanitaire du code de la santé publique prévoit que chaque établissement de santé se doit de se doter d'un plan de lutte contre les infections nosocomiales. Le renforcement de la prévention des risques sanitaires doublé par l'organisation de la lutte contre les infections nosocomiales par le CLIN, permettent à chaque établissement de santé de constituer une cellule de lutte contre les infections nosocomiales animée par l'Équipe Opérationnelle d’Hygiène (EOH).

En l'absence de réglementation les Équipes Opérationnelles se composent de façon assez différente d'un établissement à l'autre:

Elles peuvent être constituées de:

- un ou plusieurs médecins hygiènistes (ou praticiens hygiéniste s(+ DU d'hygiène)) - une ou plusieurs infirmières hygiènistes avec souvent un cadre infirmier hygiéniste (IDE + DU d'Hygiène) - un ou plusieurs techniciens biohygiéniste (Techniciens de Laboratoire titulaires d'un BAC+2 en biologie de laboratoire (BTS AB par exemple)et ayant effectué 1 an de spécialisation en hygiène à l'ENCPB à Paris ou depuis septembre 2007 de la licence professionnelle "Biohygiène" décernée par cette même école soutenue par l'Université Pierre et Marie Curie - Paris 6.

On note cependant que la non-reconnaissance des spécialités d'hygiéniste et l'absence de législation stricte pour les praticiens, techniciens et infirmières freine largement la création de ces postes considérés comme couteux aux yeux des établissements actuellement. La création des pôles sur les objectifs de la rentabilité met à mal ces équipes qui pourtant travaillent dans l'objectif de minimiser le surcoût incontournable qu'engendre l'hygiène. L'hygiène est un investissement sur le long terme et ne produit pas une activité palpable à court terme. Mais le coût d'une infection nosocomiale reste in fine important, à la fois pour le patient, l'établissement de soin et pour l'institution nationale de sécurité sociale.

« L'InVS a mis au point un système d'alerte efficace. Ce système met en relation les établissements qui alertent l'InVS quand une épidémie ou une infection résistante surviennent ; RAISIN (Réseau d'Alerte, d'Investigation et de surveillance des Infections Nosocomiales) produit alors des recommandations s'il y a lieu. Deux exemples récents peuvent être cités :

  • entérocoque résistant à la vancomycine (alerte en juillet 2005)
  • acinetobacter baumannii multi-résistant aux antibiotiques, signalé dans 54 établissements répartis dans 15 départements (recommandations juin 2004) » ...

« Des résultats encourageants corroborent ceux enregistrés par exemple à l'AP-HP où le pourcentage de SARM a diminué de ¼ en court séjour et de moitié en réanimation entre 1993 et 2002 (passant de 55 % à 24 %). Une tendance à la baisse du pourcentage de SARM en réanimation durant les 4 dernières années a été aussi enregistrée dans les CCLIN Paris-Nord et Sud-Ouest.

Ces résultats qui vont dans le bon sens semblent être le fruit d'une mise en place d'un programme spécifique de prévention de la transmission croisée des bactéries multi-résistantes, et d'un meilleur usage des antibiotiques.

Mais la vigilance demeure de mise et des progrès restent à faire, particulièrement en France. Par exemple, la proportion des souches EBLSE a diminué depuis 1993 (diminution régulière dans le temps) mais, en revanche, la résistance de ces bactéries a gagné l'espèce E. coli, espèce commensale majeure, ce qui fait craindre une diffusion dans la communauté. Elle a gagné aussi l'espèce E. aerogenes. »

Le ministère de la santé a mis en place un indicateur composite des activités de lutte contre les infections nosocomiales "ICALIN", dont l'objectif est d'inciter tous les établissements de santé à mesurer leurs actions et leurs résultats dans le domaine de la lutte contre les infections nosocomiales.

En mai 2010, un nouvel acteur dans la lutte contre les maladies nosocomiales a vu le jour : la SF2H, issue du regroupement de la Société française d'hygiène hospitalière (SFHH) et de la Société des infirmiers et infirmières en hygiène hospitalière (SIIHHF). L'ensemble des professionnels de la gestion des risques infectieux et de l'hygiène hospitalière, notamment pharmaciens, médecins, infirmiers et biologistes, y sont réunis. Leurs missions principales sont l'organisation de réunions scientifiques et la publication de documents de prévention et de recommandations; l'étude de problématique d'hygiène hospitalière; et la mise en place d'actions de formation, d'information, d'enseignement et de recherche.

Dans les pays scandinaves

Un travail a été fait pour comparer des protocoles d'éviction des staphylocoques dorés résistants à la méticilline (SARM) dans les pays scandinaves. Car "dans les Pays-Bas et les pays scandinaves, le taux de SARM est inférieur à 1 % alors qu'il est en France de 28 % selon l'EARSS 2004, et se situe aussi à des taux importants au Royaume Uni, en Allemagne, en Belgique et aux États-Unis (50 % selon le National Nosocomial Infections Surveillance System8(*)".

Les pays scandinaves et les Pays-Bas, pour obtenir un taux si faible de SARM, ont développé le protocole appelé Search and Destroy (S & D). Les impacts des mesures de ce programme S & D ont été étudiés en utilisant des modèles mathématiques en considérant soit un faible taux de SARM (<1 %), soit un fort taux de SARM (>10 %).

Les 6 mesures préventives étudiées étaient :

  • Mesure I : la prise en charge des porteurs de SARM en chambre seule
  • Mesure II : la recherche d'une colonisation et l'isolement des patients à risque, c'est-à-dire les patients déjà identifiés comme porteurs de SARM ou provenant de services à risque
  • Mesure III : la recherche systématique de SARM chez tous les patients après la détection d'une IN dans un service
  • Mesure IV : mesure III associée à la recherche systématique d'une colonisation par le SARM dans le personnel soignant d'un service infecté, et arrêt de travail jusqu'à décontamination des membres du personnel infectés
  • Mesure V : interdiction de nouvelles admissions dans les services présentant une transmission avérée entre les patients, cette mesure étant prolongée jusqu'à isolement en chambre seule de tous les porteurs de SARM
  • Mesure VI : la colonisation du SARM est éradiquée à la fin de l'hospitalisation.

Les simples mesures d'hygiène des mains sont sous-entendues dans le comportement du personnel de santé et ne sont donc pas mentionnées en tant que telles bien qu'elles soient indispensables et nécessairement respectées.

  • Première constatation : dans les modèles à faible taux de SARM (<1 %), l'absence de toute mesure de contrôle s'accompagne en 10 ans d'une augmentation du taux atteignant plus de 15 %. L'application de la mesure I seule n'est pas suffisante pour maintenir le taux d'IN à SARM à moins de 1 % mais l'augmentation est très lente (1,5 % en 30 ans). L'association de la mesure I avec la mesure II ou avec la mesure III permet de maintenir un taux de SARM à moins de 1 %. L'association des mesures I, II et III donne les meilleurs résultats. Les mesures IV, V, et VI offrent chacune un bénéfice supplémentaire minime.
  • Deuxième constatation : dans les modèles à fort taux de SARM (>10 %), l'application de l'ensemble des mesures du programme S & D réduit le taux de SARM à 1 % en 6 à 12 ans. L'application de la mesure I seule le réduit à 5 % en 15 ans. Et les applications, par étape ou globalement, de la mesure I avec la mesure II ou avec la mesure III ou avec les mesures II et III aboutissent à une diminution du taux de SARM allant de moins de 2 % à moins de 1 % sur 20 à 30 ans selon le modèle. Le nombre total de jours requis en isolement par hôpital sur 30 ans est d'une centaine de milliers de jours.

Comment s'inspirer de ce protocole Search and Destroy ? Les pays ayant un fort taux de SARM pourraient s'inspirer de ce programme S & D et de ses 6 mesures.

À noter que ces mesures, pour être efficaces, doivent être respectées de façon exhaustive : par exemple, une efficacité d'isolement des patients de seulement 50 % ne pourrait conduire à une diminution du taux de SARM. Des limites s'imposent immédiatement pour appliquer un tel programme en France :

  • Un problème architectural existe qui fait que souvent dans les services de réanimation, les réanimateurs ne disposent pas de chambre d'isolement ou n'en disposent pas en nombre suffisant (chambres en réanimation à 3 lits, heureusement de moins en moins fréquentes...)
  • L'élément démographique. Les pays scandinaves sont petits: la Suède compte 9 016 596 habitants, (soit un peu moins que la population globale d' Ile-De-France en 2010, le Danemark , 5 534 738, la Finlande près de 6 000 000, contre 65 447 374 en France, 50 753 000 au Royaume-Uni, soit respectivement 7 et 6 fois moins peuplés), la gestion humaine et politique de ces problématiques s'y avère donc nettement plus maniable, compte tenu également d'une politique sociale développée, de la prédominance d'un état-providence très centralisateur et d'une lecture unilatérale et consensuelle des lois qui s'établissent à son profit.
  • Un problème culturel comportemental existe également qui entrave les plus simples mesures d'hygiène (une sous-estimation du risque, une plus grande capacité de réaction à la conséquence pathologique que d'anticipation et de prévention des risques liés), appliquées depuis longtemps dans les pays scandinaves.

Mais ce modèle est à garder à l'esprit. On remarquera à ce propos que les pays ayant de bons résultats en matière de résistance aux antibiotiques ne sont pas toujours ceux qui ont de bons résultats en matière d'IN. Les mesures à prendre pour ces deux objectifs, pourtant très liés, sont distinctes.

En Suisse

Dans le canton de Genève, l'étude "Clean Care is Safer Care" menée par les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), en partenariat avec l'OMS, a pu mettre en évidence qu'en fournissant un flacon de poche de solution hydro-alcoolique (SHA) à chaque professionnel de santé, la prévalence des infections nosocomiales d'origine manuportée était réduite de moitié. Une des principales explications mises en avant par l'audit est qu'un lavage des mains à l'eau et au savon est plus contraignant que de pratiquer une hygiène des mains à l'aide d'une friction de SHA.

À la suite de cette étude révélant qu'en levant certaines contraintes (temps d'un lavage, intolérance cutanée au papier d'essuyage, facilité d'emploi de la SHA et disponibilité sur l'instant du produit), la cellule VigiGerme des HUG recommande qu'à opportunité égale, il vaut mieux privilégier une friction de SHA à un lavage classique.

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