Immunologie - Définition

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Introduction

L'immunologie est la branche de la biologie qui s'occupe de l'étude du système immunitaire. Apparu très tôt dans l'échelle de l'évolution, ce système a évolué pour discriminer le soi du non-soi. Les réactions de défense de l'organisme face à un organisme pathogène - quelle que soit la nature de celui-ci, virus, bactérie, champignon ou protozoaires, les maladies auto-immunes, les allergies et le rejet des greffes forment l'aspect médical de cette science. Les mécanismes de synthèse et de maturation des anticorps, d'activation du système du complément, la mobilisation et la coordination des cellules de défense, forment l'aspect fondamental et mécanistique de cette science.

Le VIH est un virus responsable de la pandémie de SIDA dont le cycle de vie interfère avec le système immunitaire humain.

Histoire

"Préhistoire"

Edward Jenner, Fondateur de l’Immunologie

Les plus anciens témoignages connus d’observations d’ordre immunologique datent de 430 avant Jésus-Christ. À cette date, pendant l’épidémie de fièvre typhoïde qui sévit à Athènes durant la guerre du Péloponnèse, l’historien Thucydide nota que seules les personnes ayant déjà supporté et survécu à l’infection étaient aptes à s’occuper des malades.

Aux alentours de 6000 avant Jésus-Christ, il existe en Chine des pratiques de transmission volontaire de la variole en vue de prévention. Cette technique, appelée "variolisation", consiste à prélever du pus sur un malade peu atteint par la maladie pour l’inoculer avec une aiguille chez un sujet sain. Ce procédé se répandit à partir du quinzième siècle, surtout en Chine, en Inde et en Turquie. Par l’entremise de l’épouse de l’ambassadeur britannique à Constantinople, qui fit vacciner son fils de cette manière, la variolisation s’est fait connaître en Angleterre vers 1722, puis s’est propagée dans les années suivantes dans toute l’Europe.

À la même époque, le médecin de campagne Edward Jenner constatait que les fermières en contact régulier, lors de la traite, avec la variole de la vache (vaccine ou Cowpox), qui est inoffensive pour les humains, étaient épargnées par les épidémies de variole, alors fréquentes, ou ne montraient que de faibles symptômes. Après avoir intensivement étudié le phénomène, il préleva le 14 mai 1796 du pus sur une pustule d’une jeune fille contaminée par la vaccine, et l’injecta à un jeune garçon de huit ans. Après que le garçon eut guéri de la maladie bénigne induite par la vaccine, Jenner lui injecta de la variole véritable. Le garçon surmonta également cette infection sans symptômes sérieux. Par rapport à la variolisation, le procédé de Jenner offrait certains avantages majeurs : les personnes vaccinées par la vaccine ne présentaient pas les boutons et les cicatrices typiques induites par la variolisation ; il n’y avait aucun risque de mortalité contrairement à la variolisation ; et les personnes vaccinées ne représentaient aucun risque de contagion. Le virus de la vaccine est la l’origine des noms de "vaccin" et "vaccination", et Edward Jenner est considéré aujourd’hui comme le fondateur de l’immunologie.

Les tournants du dix-neuvième siècle

Une autre étape majeure dans le développement de l’immunologie est la conception d’un vaccin contre la rage par Louis Pasteur en 1885. Le 6 juillet 1885, il vaccine Joseph Meister, un garçon de neuf ans qui avait été mordu deux jours plus tôt par un chien enragé. Joseph Meister devint alors le premier être humain à survivre à la rage dans l’histoire de la médecine. En une année, le vaccin fut administré à 350 personnes contaminées, et aucune ne mourut de son infection rabique. Deux ans auparavant, Robert Koch avait découvert le responsable de la tuberculose, le bacille qui porte son nom, et peu de temps après, le test à la tuberculine, qui permet de prouver l’infection par la tuberculose, et qui se fonde sur la réponse immunitaire. Ces travaux servirent de base aux travaux de Calmette et Guérin, qui décrivirent le bacille qui porte leur nom (BCG pour bacille de Calmette et Guérin) et menant à la vaccination contre la tuberculose. Le vaccin permettant de lutter contre les maladies infectieuses se développa à partir de cette époque. Max Theiler reçu le prix Nobel de médecine en 1951 pour la mise au point d’un vaccin contre la fièvre jaune.

En 1888, Emile Roux et Alexandre Yersin ont découvert la toxine diphtérique. Deux ans plus tard, Emil Adolf von Behring et Shibasaburo Kitasato mettent en évidence une antitoxine dans le sérum des patients qui avaient survécu à la diphtérie. Emil von Behring fut le premier à utiliser ces anti-sérums pour la prise en charge des malades diphtériques. Pour ces travaux, il reçut en 1901 le prix Nobel de médecine. Le bactériologue belge Jules Bordet découvre en 1898 que chauffer le sérum au-dessus de 55°C bloque sa capacité de coller à certaines substances chimiques. La capacité du sérum à tuer les bactéries était également perdue. Il posa le postulat suivant : il existe dans le sérum une substance, sensible à la chaleur, nécessaire à l’action du sérum sur les bactéries, et il nomma ce composé "Alexin". Ehrlich étudia ce composé dans les années suivantes, et introduisit le concept de complément encore utilisé de nos jours.

Début du vingtième siècle

Au début du vingtième siècle, la recherche en immunologie prend deux directions distinctes. L’immunologie humorale, dont les principales figures étaient Paul Ehrlich et Emil Adolf von Behring, partait du principe que la base de la défense contre les infections devait se trouver dans une substance contenue dans le sérum, comme les antitoxines. Cette théorie prédomina vers les années 1900 et pendant plusieurs dizaines d’années. En parallèle, et à partir des années 1883/1884, se développa le point de vue de l’immunité cellulaire, qui se base sur les travaux de George Nuttall ainsi que Ilja Iljitsch Metschnikov. Metschnikov put prouver l’implication et l’importance de l’action des cellules du corps dans la lutte contre les pathogènes en étudiant l’action des globules blancs sur des bactéries. Ses travaux sur la phagocytose lui valurent le prix Nobel de médecine en 1908, conjointement avec Paul Ehrlich. Comme il sera montré plus tard, ces deux types de phénomènes sont les deux facettes de l’action du système immunitaire et de la réponse immunitaire. Il fallut cependant attendre les années 1940 pour que l’hypothèse de l’immunité cellulaire soit généralement reconnue, et que l’hypothèse selon laquelle les anticorps seraient les acteurs principaux de la réponse immunitaire soit abandonnée.

En 1901, Karl Landsteiner mit en évidence l’existence des groupes sanguins et par cette découverte permit de franchir une nouvelle étape importante dans la compréhension du système immunitaire. Il reçut en 1930 le prix Nobel de médecine. En 1906, Clemens Peter Freiherr von Pirquet observa que les patients à qui il administrait du sérum de cheval avaient une forte réaction à la deuxième injection. Il nomma cette réaction d’hypersensibilité "allergie". Le phénomène d’anaphylaxie fut découvert par Charles Robert Richet, qui reçut pour cela le prix Nobel de médecine en 1913. Emil von Dungern et Ludwik Hirszfeld publient en 1910 leurs recherches sur la transmission des groupes sanguins, et ainsi les premiers résultats sur la génétique d’une partie du système immunitaire. Dans ce travail, ils proposent la nomenclature « ABO », qui deviendra un standard international en 1928. En 1917, Karl Landsteiner décrit le concept d’haptènes, qui après s’être conjuguées à une protéine sont capables d’induire une réponse immunitaire avec production d’anticorps spécifiques. Lloyd Felton réussit en 1928 la purification des anticorps à partir du sérum. De 1934 à 1938, John Marrack développa la théorie de la reconnaissance spécifique d’un antigène par un anticorps.

Emil Adolf von Behring, inventeur de l’antitoxine et de l’immunité humorale

En étudiant le rejet de greffes, Peter Gorer découvrit l’antigène H-2 de la souris, et ainsi, sans le savoir, le premier antigène de ce qu’on appellera ensuite le complexe majeur d'histocompatibilité (MHC pour l’anglais major histocompatibility complex). Toujours par l’étude du rejet de greffe, Peter Medawar et Thomas Gibson découvrirent d’importantes fonctions des cellules immunitaires. C’est par ces travaux que l’acceptation générale de l’immunité cellulaire se fit. En 1948, Astrid Fagraeus découvrit que les anticorps sont produits dans le plasma sanguin par les lymphocytes B. L’année suivante, Frank Macfarlane Burnet et Frank Fenner publiaient leur hypothèse de la tolérance immunologique, qui fut validée quelques années plus tard par Jacques Miller, qui découvrit l’élimination des lymphocytes T auto-réactifs dans le thymus. Burnet et Fenner reçurent le prix Nobel de médecine en 1960 pour leurs travaux sur la tolérance. En 1957, Frank Macfarlane Burnet décrivit le principe fondamental de l’immunité adaptative comme étant la sélection clonale.

L’Anglais Alick Isaacs et le Suisse Jean Lindemann, en étudiant l’infection de cultures cellulaires par des virus, découvrirent en 1957 que les cellules, au cours de l’infection par un virus, étaient en grande partie résistantes à une autre infection par un deuxième virus. Ils isolèrent à partir des cellules infectées une protéine qu’ils nommèrent interféron. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, John David et Barry Bloom découvrirent le facteur d’inhibition de la migration des macrophages (MIF) ainsi que de nombreuses autres substances secrétées par les lymphocytes. Dudley Dumonde proposa pour ces substances le nom de "lymphokine". Stanley Cohen, qui reçut en 1986 le prix Nobel de médecine pour sa découverte des facteurs de croissances NGF et EGF, commença, au début des années 1970, à travailler avec Takeshi Yoshida sur les fonctions des lymphokines. Ils mirent en évidence que ces substances, produites de nombreux types différents de cellules, étaient capables d’action à distance, comme des hormones. Suite aux nombreuses découvertes dans ce domaine, Stanley Cohen proposa en 1974 le terme "cytokine" qui s’imposa rapidement. Entretemps, plus de cent cytokines différentes étaient identifiées, et leurs structures et activités étudiées en détail.

L'immunologie moderne

Schéma d'une IgM, un anticorps décavalent

Les années soixante sont en général considérées comme le début de l’époque moderne de l’immunologie. Rodney Porter et Gerald Edelman réussirent à élucider la structure des anticorps entre 1959 et 1961, et furent lauréats du prix Nobel de médecine en 1972. En même temps, Jean Dausset, Baruj Benacerraf et George Snell découvraient le complexe majeur d'histocompatibilité, également appelé système HLA (de l’anglais Human Leukocyt Antigen) chez l’être humain, découverte qui leur permit de recevoir le prix Nobel de médecine en 1980. En 1959, Joseph Murray réalise la première allogreffe en transplantant un rein. Avec Donnall Thomas, il étudie l’immunosuppression artificielle qui permet la tolérance des patients vis-à-vis leur greffe ; Ils reçurent le prix Nobel de médecine en 1990 pour ces études. Vers 1960 également, la communauté scientifique découvrait, grâce aux travaux de Jacques Miller, d’autres caractéristiques fondamentales des cellules immunitaires, en particulier la description des fonctions et de la différentiation des lymphocytes B et T. Après cette percée, la théorie selon laquelle l’immunité est divisée en une partie cellulaire et une autre humorale s’imposa, et les deux théories ne furent plus mises en concurrence. Dans les décennies suivantes, les différents sous-types (appelés isotypes) d’anticorps furent identifiés et leurs fonctions respectives étudiées. En 1975, Georges Köhler, Niels Kaj Jerne et César Milstein décrivent la méthode de production des anticorps monoclonaux. Cette découverte eut un impact majeur sur la recherche fondamentale, ainsi que pour le diagnostic et le traitement de maladies, et ils reçurent en 1984 le prix Nobel de médecine. D’autres découvertes majeures furent faites dans les années suivantes : En 1973, Ralph Steinman et Zanzil Cohn découvrent les cellules dendritiques ; En 1974, Rolf Zinkernagel et Peter Doherty découvrent la restriction de la présentation de l’antigène par les molécules du MHC, découverte qui lui valu le prix Nobel de médecine en 1996; En 1985, Susumu Tonegawa identifie les gènes des immunoglobulines, et reçoit pour cela en 1987 le prix Nobel ; la même année, Leroy Hood fait de même pour les gènes du récepteur des cellules T.

Un autre concept émerge en 1986: celui de l'orientation de la réponse immunitaire. Basé sur le rôle des lymphocytes T CD4+, ce concept, développé par Robert Coffman et Tim Mosmann, présente la dichotomie entre une "Th1", réponse orientée contre des cellules d'une part, qui produira des lymphocytes cytotoxiques spécifiques, comme dans le cas du cancer ou d'une infection intracellulaire; et une réponse "Th2" contre un agent soluble, qui produira des anticorps spécifiques, comme dans le cas d'une bactérie extracellulaire ou d'une toxine. La balance Th1/Th2 est toujours un intense champ de recherche.

La notion de tolérance induite par des lymphocytes fut pour la première fois évoquée en 1969 par Nishizuka et Sokakura. Ils présentaient leurs résultats concernant une sous-population de lymphocytes T suppresseurs capables d'empêcher une réaction de lymphocytes naïfs. Très controversés, ces résultats seront oubliés jusqu'à la redécouverte du phénomène par Sakaguchi en 1982 sous le nom de T régulateur, sujet activement étudié actuellement.

Depuis les années 1950, la théorie qui domine en immunologie est celle de la reconnaissance du "soi" et du "non-soi" par le système immunitaire adaptatif. Cependant, ce modèle ne permet pas d'expliquer de manière satisfaisante les phénomènes de tolérance, de rejet de greffe, ni la nécessité de la présentation de l'antigène, et en 1989, Charles Janeway propose un modèle selon lequel ce serait l'immunité innée qui serait la véritable gardienne des clefs du déclenchement d'une réponse immunitaire. La décision de réagir ou non face à un agent étranger reposerait sur la reconnaissance de motifs par des récepteurs putatifs qu'il nomme les PRR (pour l'anglais Pattern Recognition Receptor). Ce modèle est approfondi à partir de 1994 par Polly Matzinger, qui développe la théorie du danger. D'après Matzinger, le déclenchement de la réponse immunitaire se ferait sur la base de motifs moléculaires associés aux organismes pathogènes (PAMP, de l'anglais pathogen-associated molecular pattern) par les PRR. Ce modèle fut validé expérimentalement depuis par l'identification de récepteurs de signaux de dangers et de certains de leurs ligands.

De nos jours, la multiplication des cytokines, chimiokines, sous-types et marqueurs cellulaires rend difficile d'avoir une vue d'ensemble du domaine.

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