Idéal de l'anneau des entiers d'un corps quadratique - Définition

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Idéal

Idéal fractionnaire

Les éléments sont maintenant réunis pour énoncer le premier théorème clé de l'article. Soit Q[√d] un corps quadratique et Z[ω] l' anneau de ses entiers quadratiques.

  • Tout idéal non nul de Z[ω] se décompose de manière unique, à l'ordre près, en un produit d'idéaux premiers.

On remarque que les idéaux de Z[ω] forment un ensemble munis d'une multiplication. Cette multiplication contient un élément neutre Z[ω], est associative et commutative. Il ne manque que l'existence d'un inverse pour que cette structure soit un groupe multiplicatif. La définition suivante permet de pallier cette faiblesse et par là même de démontrer le théorème du paragraphe :

  • Un ensemble F de Q[√d] est dit idéal fractionnaire lorsqu'il forme un groupe additif, qu'il est stable par multiplication par un entier quadratique et qu'il existe un élément δ de Q[√d] tel que le produit de δ par un élément quelconque de F soit un entier quadratique.

Cette définition permet d'énoncer la propriété suivante :

  • L'ensemble des idéaux fractionnaires non nuls de Q[√d], munis de la multiplication, forme un groupe commutatif.

Norme

Réseau de l'idéal principal du point 2 + i dans l'anneau des entiers de Gauss.

Les résultats du paragraphe précédent ne peuvent être opérationnels que s'il existe un moyen de déterminer les différents idéaux premiers. Cette tâche est un peu plus délicate pour les idéaux non principaux, elle nécessite l'élaboration d'outils spécifiques. L'application norme étudiée dans l'article Entier quadratique s'applique initialement à un entier quadratique α = a + b.ω. Dans une logique linéaire, le nombre α peut aussi être vu comme un endomorphisme, qui à x associe α.x. Il possède dans la base (1, ω) l'une des deux matrices suivantes selon que d est congru ou non à 1 modulo 4 :

\text{Si}\quad d \equiv 1 \mod 4  \quad  M = \begin{pmatrix} a & \frac {d-1}4b \\ b & a+b \end{pmatrix}\quad\text{sinon}\quad  M = \begin{pmatrix} a & db \\ b & a \end{pmatrix}

On remarque que, dans les deux cas, le déterminant de l'endomorphisme associé à α est égal à sa norme. Une manière d'en comprendre la raison est d'observer que, si α n'est pas un rationnel, le polynôme minimal de α est aussi le polynôme minimal de l'endomorphisme associé à α. Le polynôme minimal de l'endomorphisme est ici le polynôme caractéristique d'après le théorème de Cayley-Hamilton et une considération de degré. Ce polynôme admet pour racine α et son conjugué, sa constante est égale au produit des deux racines ainsi qu'au déterminant de l'application linéaire associée à α. Cette remarque n'est pas sans conséquence géométrique. Si le module Z[ω] est représenté dans la base (1, ω), définie comme orthonormale, les points du module correspondent aux sommets d'un quadrillage de carrés de côté 1. La valeur absolue de la norme de α correspond à la surface du parallélogramme de sommets 0, α, α.ω et 1 + α.ω. Sur la figure de droite le point α est égal à 2 + i et ω est égal à i l'unité imaginaire correspondant à d = -1. La norme de α est, en valeur absolue, égale à la surface du carré rouge.

L'idéal M engendré par α est l'image de Z[ω] par l'application linéaire qui, à x associe α.x. Elle est composée par les points a.α + b.α.ω où a et b décrivent Z. Sur la figure, cette image est illustrée par les points verts et l'origine en rouge, une telle structure porte le nom de réseau. La surface du carré rouge est appelée volume fondamental du réseau. Une classe d'équivalence de Z[ω]/M correspond à un décalage du réseau, illustré par un exemple en bleu sur la figure. Les points bleus correspondent à la classe d'équivalence du nombre 1 + i. On remarque qu'il existe un représentant de chaque classe d'équivalence dans le carré rouge. Il existe donc autant de classes d'équivalence ou encore d'éléments de Z[ω]/M que de points de Z[ω] dans le carré rouge. L'espace est pavé par des carrés de côté 1 et de centre les points de Z[ω], on en conclut, aux effets de bord près, que la surface contenant le points rouges est à peu près égale au carré rouge. Une démonstration, analogue à celle du théorème de Minkowski, montre que la surface du carré rouge, égale à la valeur absolue du déterminant de l'application associée à α, est exactement égale au nombre de points de Z[ω] dans le carré rouge. De manière plus formelle, on remarque que (1, ω) est une base de l'espace vectoriel Q[ω]. Dans cet espace, on définit la surface Vα comme étant celle composée des points de coordonnées éléments de l'intervalle [0, 1[ dans la base (1, ω). Cette définition correspond au carré rouge.

  • La valeur absolue de la norme d'un entier quadratique α est égale au cardinal de l'anneau Z[ω] quotienté par l'idéal principal engendré par α.

Cette caractérisation de la norme possède un avantage. Quitte à perdre l'information sur le signe de la norme, elle peut être étendue à tout idéal :

  • La norme d'un idéal est le cardinal de l'anneau Z[ω] quotienté par cet idéal.

Ainsi, si l'idéal est principal, sa norme correspond à la valeur absolue de la norme d'un générateur. L'extension de la définition de la norme conserve la compatibilité avec la multiplication.

  • La norme du produit de deux idéaux est égale au produit des normes des idéaux.

Discriminant

Un deuxième outil s'avère nécessaire pour déterminer les idéaux premiers : le discriminant de l'anneau. Soit α un élément de Z[ω] l'anneau des entiers de Q[√d], sa norme est égale à la constante de son polynôme minimal. Il est naturel d'associer à α la trace de cet endomorphisme, qui correspond à l'opposé du deuxième coefficient du polynôme minimal, celui du monôme de degré 1. La trace d'un entier quadratique est un élément de Z car les coefficients de sa matrice sont des entiers relatifs ou encore car son polynôme minimal possède ses coefficients dans Z.

Cette application permet aussi de définir un indicateur associé à un idéal M de Z[ω]. Notons φα l'endomorphisme, qui à x associe α.x. L'application qui à x et y, deux éléments de M, associe la trace de φx.y est une forme bilinéaire à valeur dans Z, appelée forme trace. En règle générale, le déterminant de la matrice d'une forme bilinéaire dépend de la base choisie. Dans un module sur Z, la situation est un peu différente. La formule donnant l'inverse d'une matrice en fonction de la comatrice montre qu'une matrice à coefficients dans Z n'est inversible que si son déterminant l'est aussi, il ne peut donc qu'être égal à ±1. Si B est la matrice de la forme bilinaire dans une base et si P est la matrice de passage dans une autre base, la matrice de la forme bilinaire dans la nouvelle base est égale à tP.B.P. Comme le déterminant de P est égal à ±1, le déterminant de la matrice dans la nouvelle base est égal à celui obtenu dans l'ancienne, ce qui permet de définir le discriminant d'un idéal M comme le déterminant de la forme trace de M.

Dans l'anneau des entiers d'un corps quadratique, le discriminant prend les valeurs suivantes :

  • Le discriminant de Z[ω] est égal à d si d est congru à 1 modulo 4 et 4.d sinon :
\text{discr}(\mathbb Z[\omega]) = \begin{cases} d, & \text{si }d\equiv 1 \pmod 4\\ 4d, & \text{sinon} \end{cases}
  • Le discriminant d'un idéal M est égal à au carré de la norme de M que multiplie le discriminant de Z[ω] :
\text{discr}(\mathfrak M) = \mathcal N(\mathfrak M)^2\cdot\text{discr}(\mathbb Z[\omega])\;

Ces définitions et propositions sont générales à tout anneau de Dedekind.

Groupe des classes

Dans le groupe des idéaux fractionnaires, il existe des éléments plus simples à appréhender que d'autres : les idéaux principaux. Ils sont stables pour la multiplication, il ne manque que l'existence d'un inverse pour qu'ils disposent d'une structure de sous-groupe, ce qui justifie la définition suivante :

  • Un idéal fractionnaire F de l'anneau des entiers quadratiques Z[ω] est dit principal si, et seulement si, il existe un rationnel quadratique δ, tel que F est égal à δ.Z[ω].

On remarque immédiatement que si δ est un rationnel quadratique, δ.Z[ω] est nécessairement un idéal fractionnaire. Cet ensemble est en effet non vide, il forme un groupe pour l'addition, est stable pour la multiplication et, si α est un dénominateur de δ, considéré comme une fraction d'éléments de Z[ω], alors αδ.Z[ω] est bien inclus dans l'anneau des entiers quadratiques.

  • Les idéaux fractionnaires principaux de Z[ω] forment un sous-groupe du groupe des idéaux fractionnaires.

Les idéaux fractionnaires principaux forment un ensemble non vide car il contient l'anneau tout entier. Cet ensemble est stable pour la multiplication et si δ.Z[ω] est un idéal fractionnaire principal, alors δ-1.Z[ω] est son idéal fractionnaire principal inverse. Ici, δ désigne un rationnel quadratique.

Tout groupe commutatif se quotiente par n'importe lequel de ses sous-groupes. Dans ce cas particulier, le quotient est l'objet du deuxième théorème clé de l'article :

  • Le quotient du groupe des idéaux fractionnaires par le sous-groupe des idéaux fractionnaires principaux est d'ordre fini.

Ce quotient est appelé groupe des classes d'idéaux. Chaque classe ne peut contenir qu'un unique idéal premier car un idéal n'admet qu'une unique décomposition en idéal premier, il n'existe donc qu'un nombre fini d'idéaux premiers non principaux. Une remarque géométrique, un peu de même nature que celle utilisée pour l'étude de la norme montre de plus que :

  • La norme d'un idéal premier non principal est nécessairement inférieure à une constante m, définie par l'égalité suivante :
\text{Si}\quad d > 0 \quad m = \frac {\sqrt {\text{discr} \;(\mathbb Z[\omega])}}2\quad\text{et si}\quad d<0\quad m= \frac 2{\pi}\cdot \sqrt {|\text{discr} \;(\mathbb Z[\omega])|}
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