Histoire des universités françaises - Définition

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1793 - 1896 : les différents régimes écartent les universités

La Révolution

La Révolution, voulant réorganiser l’instruction publique, dut supprimer les universités. Le projet du Comité d'instruction publique de l’Assemblée législative (projet Condorcet) instituait, pour les remplacer, neuf « lycées » qui devaient « enseigner toutes les sciences dans toute leur étendue » ; l’enseignement devait y être partagé en quatre classes : sciences mathématiques et physiques ; sciences morales et politiques ; application des sciences aux arts ; littérature et beaux-arts. Le 15 septembre 1793, un décret ordonna qu’il serait établi dans la République, indépendamment des écoles primaires, trois degrés progressifs d’instruction, correspondant aux écoles secondaires, aux instituts et aux lycées du plan de Condorcet ; l’article 3 disait que les nouveaux établissements dont la Convention venait de décréter la création seraient mis en activité au 1er novembre suivant, et que, « en conséquence, les collèges de plein exercice et les facultés de théologie, de médecine, des arts et de droit étaient supprimés sur toute la surface de la République ». Mais ce décret fut suspendu le lendemain 16 septembre. Il est difficile de marquer d’une façon précise le moment où les facultés cessèrent d’exister. Celles de médecine furent officiellement remplacées par les écoles de santé, que créa le décret du 14 frimaire an III ; quant à celles de théologie et de droit, on ne les remplaça pas, non plus que celles des arts. Le décret du 7 ventôse an III, qui créa les écoles centrales, dit en son article 3 : « En conséquence de la présente loi, tous les anciens établissements consacrés à l’instruction publique sous le nom de collèges, et salariés par la nation, sont et demeurent supprimés dans toute l’étendue de la République ». La loi du 3 brumaire an IV créa, pour le haut enseignement, des « écoles spéciales » (astronomie ; géométrie et mécanique ; histoire naturelle: médecine ; art vétérinaire ; économie rurale ; antiquités ; sciences politiques ; peinture, sculpture et architecture ; musique). Dans le rapport qu’il présenta à l’appui de ce décret, le 23 vendémiaire an IV, Daunou s’était exprimé ainsi à l’égard des institutions de l’ancien régime : « Comme si le fléau de l’inégalité eût frappé inévitablement toutes les parties de l’édifice social ; comme si le despotisme eût voulu se venger de l’audace de la pensée et de la révolte des lumières, il s’étudiait sans cesse à les arrêter, à les entraver dans leur cours. Ce n’est pas que plusieurs universités, plusieurs collèges, ne fussent justement renommés pour l’habileté des maîtres et pour l’émulation des disciples ; mais le plan que les uns et les autres étaient condamnés à suivre égarait les talents et trompait leur activité. L’instruction publique était liée par trop de chaînes aux abus que vous avez renversés, pour qu’elle pût résister aux chocs de la Révolution. Les établissements inférieurs devaient céder bientôt aux progrès de la raison publique. Les institutions intermédiaires (collèges et universités), frappées des mêmes coups, ont disparu peu à peu avec les corporations qui les régissaient ; et, à l’égard des établissements supérieurs (académies, sociétés, théâtres), ils étaient entraînés aussi par leur propre corruption, par cette immoralité aristocratique dont ils renfermaient les funestes germes. » La loi du 11 floréal an X ajouta, aux écoles spéciales du décret du 3 brumaire an IV (dont quelques-unes seulement avaient été organisées), des écoles de droit.

Le Consulat et l’Empire

La place de la Sorbonne au début du XIXe siècle.

Le Consulat détruisit les écoles centrales mais conserva les écoles spéciales. La loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) met en place 30 lycées (qui s’ajoutent aux écoles secondaires pour l’enseignement secondaire) et 29 écoles spéciales (pour l’enseignement supérieur) dont six de droit et trois de médecine. On établit les grades, qui devinrent des garanties d’État et qui permirent de réglementer certaines professions, notamment celles de santé et du droit; ainsi les examens du doctorat en médecine sont fixés par la loi. Le baccalauréat n’existant pas, il n’y avait pas de conditions pour entrer en école spéciale. En pratique, il fallait connaître le latin puisque certains examens se passaient en latin.

Pendant le Premier Empire, Napoléon Ier crée l’« Université », qualifiée d’« impériale » par la suite, en 1806. Il ne s’agit pas d’une université mais de l’administration de l’ensemble de l’enseignement. Une véritable hiérarchie des enseignants est mise en place. Il s’agissait pour Napoléon de façonner les citoyens pour leur transmettre la morale de l’État. Par ailleurs celui-ci conçoit l’enseignement supérieur uniquement comme la préparation d’une profession.

L’organisation de l’Université fut décrétée en 1808. Au sommet, le Grand-Maître, nommé et révocable par l’Empereur, assisté du Conseil de l’Université. Il est créé autant d’académies que de circonscriptions de Cours d’Appel, administrées chacune par un recteur assisté d’un conseil académique. Dans chaque académie, des établissements publics et privés sont incorporés ou rattachés à l’Université; les établissements publics sont de trois sortes : collèges communaux, lycées et facultés. Ainsi l’enseignement supérieur comptait 4 facultés de théologie, 6 facultés de médecine, 12 facultés de droit et 27 facultés de sciences et de lettres. Les facultés de droit et de médecine remplaçaient les écoles spéciales, mais gardaient leurs finalités professionnelles. Les facultés des lettres et des sciences étaient des entités nouvelles dont le but premier était la formation des professeurs et qui furent essentiellement consacrées à la collation des grades, sans véritable enseignement. Dans le cas des sciences, l’enseignement se faisait au Collège de France, au Muséum ou à l’École polytechnique. En 1814, l’Empire, agrandit par les conquêtes militaires, n’avait pas créé toutes les facultés prévues. Il fut fait, entre 1809 et 1814, 3 100 licenciés en droit et 73 docteurs; 1 456 docteurs en médecine; 52 docteurs en chirurgie; 153 licenciés en lettres et 56 docteurs; 40 licenciés en sciences.

La Restauration et la Monarchie de Juillet

À Rennes, qui comptait des facultés de droit et de lettres, Cousin voulait constituer une université bretonne en 1840. La Chambre vota pour la fondation de la faculté des Sciences mais contre celle de Médecine. (Photo de la faculté des Sciences prise en 1905)

La Restauration condamna l’Université et voulait fournir un nouveau modèle d’éducation. Le 17 février 1815, l’Université reçoit un arrêt de démembrement visant à la remplacer par dix-sept universités régionales; mais cet arrêt ne fut pas appliqué en raison du retour de Napoléon Ier quelques jours plus tard.

Après les Cent-Jours, le Gouvernement décide d’accorder un sursis à l’Université, qui fut néanmoins modifiée : plus de Grand-Maître, plus de Conseil de l’Université mais une commission de cinq membres sous l’autorité du ministre de l’Intérieur. On supprima ensuite dix-sept facultés des lettres et trois facultés des sciences; des professeurs trop bonapartistes furent suspendus; les programmes furent modifiés, et on envisagea d’enlever les facultés de médecine de l’Université; malgré tout le fonctionnement de l’Université continua sous la même forme.

Durant la Monarchie de Juillet, François Guizot et Victor Cousin soutenaient l’idée d’une décentralisation pour voir la création de quatre universités complètes en Province plutôt que des facultés dispersées. D’autres ministres comme Abel-François Villemain rejetaient cette idée, et augmentaient le nombre de facultés de Lettres et de Sciences. En effet 1844, un projet de loi prévoyait que les petits séminaires (soustraits de l’Université depuis 1814) pouvaient présenter leurs élèves au baccalauréat en France. Le projet ne fut pas voté mais dans les villes sans facultés, des jurys du baccalauréat indépendants des facultés s’étaient développés. L’État qui ne voulait pas renoncer au monopole des grades fut donc contraint d’augmenter le nombre de facultés.

La Deuxième République et Le Second Empire

La Deuxième République fut marquée par la Loi Falloux en 1850 qui instaura une nouvelle organisation de l’éducation, le terme « Université » disparaît, et l’enseignement secondaire n’est plus le monopole de l’État. Rien ne fut modifié dans l’enseignement supérieur.

Pendant le Second Empire, les programmes des études étaient fixés de manière très précise par l’État; un décret paru en 1852 mit l’éducation sous l’autorité des ministres et de l’Empereur. La loi de 1854 revient en partie sur la loi Falloux, les grandes académies sont reconstituées, les recteurs voyaient leur autorité renforcée. Dans l’enseignement supérieur, de nouvelles facultés furent crées. Victor Duruy crée l’École pratique des hautes études, où un enseignement non programmé par l’État est donné.

Le début de la Troisième République

La Troisième République poursuivit les réformes de la deuxième, la loi Wallon du 12 juillet 1875 promulguée le 26 juillet 1875 a mis fin au monopole d'état dans l'enseignement supérieur et son article 5 a permis aux établissements d'enseignement supérieur dont cette nouvelle loi permettait l'existence de prendre le nom d'« universités libres » si ils réunissent trois facultés. Quatre établissements universitaires privés furent ainsi créés à Paris, Lille, Lyon et Angers.

Mais la loi du 18 mars 1880 promulguée le 19 mars 1880 relative à la liberté de l’enseignement supérieur sans remettre en cause l'existence d'établissements privés d'enseignement supérieur interdit de se nommer « université ». Cette interdiction figure actuellement dans l'article L731-14 du code de l'éducation. On précise qu’à nouveau, « la collation des grades appartient à l’État », que ses diplômes ne peuvent s’appeler « baccalauréat », « licence » ou « doctorat » que ses professeurs soient docteurs et que ses élèves doivent se présenter devant des professeurs de l’État.

On pensa par la suite à recréer les universités. Un projet de William Henry Waddington de 1876 prévoyait la création de sept universités qui étaient en fait des groupements régionaux. Celui-ci n’a pas vu le jour. Dans le même temps de nouveaux bâtiments sont construits partout en France pour accueillir les facultés. À la fin du XIXe siècle, on compte 24 000 étudiants dans les facultés (dont 9 000 en facultés libres). En 1885, les facultés obtiennent la personnalité morale; elles ont eu ensuite leur propre budget en 1890. En 1885, le ministre René Goblet créât le « conseil des facultés » dans chaque académie. En 1890, un nouveau projet présenté par Léon Bourgeois devait recréer les universités; la discussion fut interrompue mais on institua les « corps de facultés ».

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