Le principe d'un réacteur nucléaire est de maintenir une réaction en chaîne de fissions qui est contrôlée : en fonctionnement normal, chaque fission ne doit engendrer qu'une seule fission. C'est ce qu'exprime la condition sur le facteur de multiplication effectif keff : keff=1.
Ce facteur peut être être écrit selon deux contributions : une correspondant à l'apparition de neutrons via le processus de neutrons retardés (proportion β), le reste provenant directement des fissions (proportion 1-β) :
où kr et kp désignent les facteurs de multiplication des contributions des neutrons respectivement retardés et prompts. Du fait de l'ordre de grandeur du temps mis par un neutron pour induire une nouvelle fission pour ces deux types de neutrons (de l'ordre de la seconde pour les neutrons retardés, et de l'ordre de la microseconde pour les neutrons prompts), on comprend bien qu'un milieu pour lequel on n'a que des neutrons prompts est incontrôlable. Pour pouvoir contrôler le réacteur, on veut donc que le facteur de multiplication effectif des neutrons prompts soit inférieur à l'unité. On écrit donc (1 − β)keff < 1 ou encore
Le raisonnement ci-dessus explique pourquoi on compare la réactivité à la proportion de neutrons retardés. Dans les calculs rigoureux de cinétique, on doit en fait tenir compte de la différence de nature entre les neutrons retardés et les neutrons prompts. Outre leur durée de vie, ces neutrons se différencient par leur spectre : le spectre des neutrons de fission est plus dur (centré sur 2 MeV) que celui des neutrons retardés (centré sur 400 keV environ), ce qui a un impact sur l'efficacité de ces derniers pour induire une fission.
La seule grandeur à laquelle on peut alors comparer la réactivité est la proportion de neutrons retardés effective, notée βeff, qui correspond à β multiplié par un facteur de correction :
avec les notations suivantes :
Remarquons que si les spectres Unr et Unp sont égaux, le facteur correctif est alors unitaire : cela signifie bien que la seule raison pour laquelle on doit considérer βeff plutôt que β dans les études est la différence de spectres entre ces neutrons. Rappelons que les neutrons retardés sont émis avec une énergie inférieure à celle des neutrons prompts. Ils ont donc moins de risque d'être absorbés pendant la thermalisation (qui est plus courte) et sont donc plus efficaces ; par contre, ils ne peuvent pas induire de fission rapide et sont donc moins efficaces. Le facteur correctif est en fait de l'ordre de l'unité. Il dépend du type de réacteur, de la géométrie, de l'enrichissement, autrement dit, de tout ce qui détermine l'importance neutronique.