Expérience d'Aspect - Définition

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Conclusion

Aujourd'hui, en 2010, la violation des inégalités de Bell par la physique quantique est clairement établie. On utilise d'ailleurs concrètement la violation des inégalités de Bell dans certains protocoles de cryptographie quantique, où la présence d'un espion est détectée par le fait que les inégalités de Bell ne sont plus violées.

On doit donc admettre la non-localité de la physique quantique et la réalité de l'état d'intrication.

La causalité relativiste est-elle remise en question par l'expérience d'Aspect ?

Cette question se pose du fait d'une présentation des faits courante, selon laquelle « un objet quantique présente un état qui dépend instantanément de l'état d'un autre objet avec lequel il a été intriqué ». Cette présentation en terme « d'influence non locale », est souvent utilisée dans les articles de vulgarisation, mais aussi (et volontairement) par certains scientifiques qui se réclament réalistes comme Alain Aspect lui-même, ou Bernard d'Espagnat.

Il y a alors au moins trois possibilités :

  • La première est que l'on doit se contenter d'appliquer des calculs qui donnent des résultats en accord avec l'expérience, sans se référer à une explication tirée de notre logique, « macroscopique » ou autre. Cette approche, dérivée de l'interprétation de Copenhague, est la plus communément admise parmi les physiciens. Elle est fondée sur le fait qu'aucune explication des phénomènes EPR ne donne lieu à des vérifications ou des prédictions mesurables. En conséquence, la majorité des physiciens considère que les explications de cette expérience tombent en dehors du champ de la science (voir le critère de réfutabilité de Karl Popper). En effet, la majorité des explications manquent de formalisation théorique, et pour celles qui en possèdent, ne proposent pas de vérifications mesurables. Il s'agit donc ici d'une approche empirique, visant à éviter toute dérive en dehors du champ de la science.
  • La deuxième est que l'intrication a « unifié » les deux objets qui ont été soumis à une interaction : ces deux objets restent « un » malgré leur éloignement spatial (« non-localité de Bernard d'Espagnat »). Cet éloignement peut, en fait, même être temporel : il est fondamentalement spatio-temporel. Aucune explication n'est, pour le moment, donnée à ce qui est considéré comme un résultat d'expérience et non pas une explication ou une interprétation de ce résultat. Cette approche qui veut en final expliquer les faits d'expérience est celle des rationalistes.
  • La troisième consiste à changer notre conception de la causalité et à accepter le principe d'une causalité rétrograde (un flux causal venant du futur et allant vers le passé), qu'on ne peut toutefois assimiler à la « cause finale », « téléologique », des philosophes classiques. Il n'y a personne pour orienter les événements en fonction d'un objectif : la backward causation est de nature identique à la causalité telle que nous la concevons (« causalité efficiente » des classiques), à ceci près qu'elle s'exerce à contre-courant par rapport à l'écoulement du temps, et qu'elle « s'additionne » éventuellement à la causalité « classique ». Cette interprétation exige d'admettre que l'irréversibilité du temps n'est vraie qu'à l'échelle macroscopique (seconde loi de la thermodynamique), ce que refusent d'admettre de nombreux physiciens tel le physicien et philosophe Étienne Klein qui souligne que la flèche du temps est, selon lui, inscrite dans les symétries de la physique des particules. Cette interprétation a un succès certain auprès de ceux qui développent des interprétations ésotériques de l'expérience, l'employant pour rendre « acceptables » des phénomènes parapsychologiques pour le moins controversés dans la communauté scientifique (notamment la précognition... Olivier Costa de Beauregard s'est illustré dans la défense de telles thèses.) Mais cette interprétation est surtout en contradiction flagrante avec les résultats même des expériences telles que celles-ci ont le plus souvent été réalisées : la ligne d'univers qui relie les événements « mesure P1 » et « mesure P2 » de l'espace-temps est une courbe de genre espace. Car, pour infirmer une interprétation alternative possible des corrélations observées au cours de ces expériences, les expérimentateurs se devaient absolument de montrer que la « causalité » relativiste ne pouvait pas expliquer, au moins en partie, ces mêmes résultats, y compris par des scénarios du genre : « photon ν1 informant, par quelque processus relativiste que ce soit, le photon ν2 de son état quantique après la première mesure... » Mais, il est parfaitement clair que les précautions prises par les auteurs de ces expériences pour éliminer toutes les explications de type « causale » relativiste éliminent en même temps toute explication de type « rétro-causale ». Finalement, ce type de conception ne se réfère pas vraiment aux expériences ayant réellement été réalisées, amène des interprétations à la limite de la science, relève même dans certains cas de la pseudo-science, mêlant la physique quantique à un débat qui n'est pas le sien.

Quoi qu'il en soit, aucun physicien ne pense que les résultats des expériences EPR en général, et de l'expérience d'Aspect en particulier, qui sont en parfait accord avec l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique, ne remettent en cause, de quelque façon que ce soit le principe de relativité selon lequel nulle forme d'énergie (matière ou force), et par conséquent, nulle information utilisable, ne peut se déplacer à une vitesse supérieure à celle de la lumière, ni, en conséquence, le principe de causalité relativiste qui en dérive. Il est en effet facile de montrer que l'intrication quantique ne peut être utilisée pour transmettre de façon instantanée quelque information que ce soit d'un point de l'espace-temps à un autre ! Les résultats de mesure relatifs à la première particule sont de type aléatoire ; les modifications de l'état de l'autre particule induites par ces mesures, pour instantanées qu'elles soient selon l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique et les résultats de l'expérience d'Aspect, conduisent à des résultats de mesure relatifs à la seconde particule qui sont, en apparence, tout aussi aléatoires : aucune information utilisable ne peut être séparément tirée de ces mesures sur le moment, et les corrélations resteront indétectables tant que les résultats de ces deux séries de mesures ne seront pas comparés. C'est donc la nécessité incontournable, parfaitement mise en évidence par ce type d'expériences, de disposer d'un signal « classique » au sens de la relativité pour transmettre l'information nécessaire à la détection de ces corrélations, signal sans lequel on ne peut rien transmettre et qui détermine la célérité de la transmission d'information, qui vient réaffirmer le principe fondamental de la relativité. Par suite, le principe de causalité relativiste est, lui aussi, parfaitement compatible avec les résultats des expériences EPR.

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