Depuis le début du XIXe siècle, période où l'espérance de vie des Français était au plus bas avec une moyenne de 33 ans (François de Closets, 1970, p. 201), celle-ci n'a cessé d'augmenter. De 1900 à 2000, l’espérance de vie en France (moyenne hommes et femmes) est passée de 48 à 79 ans soit une hausse de 65% en un siècle seulement. Cette avancée a été le résultat de nombreux progrès :
Les causes individuelles ont également joué un rôle dans l’augmentation de l'espérance de vie. La prise de conscience de l’importance de la prévention a modelé les comportements : diminution de la consommation d’alcool, hygiène, asepsie, prise de conscience de l’importance de l’activité physique et de l’équilibre alimentaire pour la santé.
Aujourd'hui, la prévention des risques de santé par l'individu constitue le moyen le plus efficace pour permettre la poursuite de l'augmentation de l'espérance de vie dans les pays développés. Or, il semble qu'une compression de la morbidité se produise effectivement : c'est-à-dire que les individus vivent de plus en plus longtemps sans présenter d'incapacités ou de dépendances.
Cependant, comme le fait remarquer la philosophe Hannah Arendt, l'espérance de vie n'augmente en Occident que par rapport à la période des débuts de l'industrialisation, particulièrement nocive pour la vie humaine. En revanche si l'on considère une durée plus longue, les données que nous possédons sur les anciens à Rome et en Grèce montrent que ces derniers vivaient communément jusqu'à 70 ou 80 ans, sans considérer la mortalité des moins de dix ans et des esclaves (en les comptant, l'espérance de vie chute à environ 12 ans, ce qui est beaucoup moins qu'à l'ère industrielle). De même, de nombreux groupes humains traditionnels ont une espérance de vie similaire aux sociétés occidentales sans que cela puisse être attribué à la médecine moderne, comme en Kabylie ou en Arménie (Hannah Arendt, 1953, La Condition de l'homme moderne, p. 183 ; toutefois, il n'y a aucune preuve que ces gens disent leur âge véritable et, de toutes manières, il s'agit d'une moyenne des âges, pas d'une mesure de l'espérance de vie, et cette dernière était malgré tout meilleure en 1900 qu'en 1750. ). En outre, de nombreuses études suggèrent que chez les groupes humains adoptant des modes de vie « civilisés », la fréquence des infections augmente plutôt qu'elle ne diminue (Edouart Goldsmith, 1994, Le Défi du XXe siècle, p. 261). Ces auteurs supposent donc que les progrès scientifiques et techniques résolvent des problèmes par la médecine qu'ils ont eux-mêmes créés par la modernisation des modes de vie (Serge Latouche, 1995, La Mégamachine, raison techno scientifique, raison économique et mythe du progrès, p. 89).