Les principaux phénomènes susceptibles de dévier un jet sont décrits ci-après ainsi que les conditions de cette déviation, mais la déviation d’un jet requiert tout d’abord l’énergie nécessaire à la production du jet.
Un jet de gaz dans l’atmosphère se propage en ligne droite à la pression ambiante en l’absence d’obstacle et en raison de sa viscosité il entraîne l’air ambiant au repos en formant des tourbillons : lors de cette propagation le débit masse D kg/sec augmente, la vitesse moyenne V m/sec diminue ainsi que la puissance DV² kwatts, et la quantité de mouvement DV newtons est pratiquement constante.
Une déviation peut se produire à la sortie d’un jet de gaz de pression totale supérieure à la pression atmosphérique, issu d’un orifice et détendu à la pression ambiante, dès lors que le jet peut engendrer une dépression sur une paroi environnante convexe ou plane divergente, qui l’attire alors et le dévie.
La plupart des applications envisagées, notamment dans le domaine de l’aéronautique, impliquent un nombre de Reynolds plutôt élevé, rapport entre les forces d’inertie prépondérantes dans le jet et les forces de viscosité développées le long des surfaces environnantes dans la zone dépressionnaire engendrée: l’écoulement est turbulent, et peu modifié quand le nombre de Reynolds varie.
En présence d’une paroi convexe voisine, le jet subit une déviation appelée effet Coandă, qui peut être obtenue de deux manières :
Une telle déviation peut survenir dans des conditions locales variées :
1.1 Si l’espace entourant l’orifice du jet est partiellement fermé par une paroi plane prolongeant l’orifice en formant un angle avec le jet, ou par une suite de facettes, le jet d’abord séparé se réattache plus loin sur la paroi, en emprisonnant une zone tourbillonnaire où un vide partiel causé par l’entraînement visqueux maintient une pression inférieure à la pression atmosphérique, suivie d’une surpression au point de réattachement. Si l’angle est inférieur à 25 degrés, la bulle emprisonnée est de dimension négligeable. Si l’angle est supérieur à 65 degrés, le jet ne se réattache pas et n’est pas “coandé” ,il se sépare parce que sa courbure serait trop grande pour être maintenue par le vide partiel. Le phénomène est analogue à celui du décrochage d'une aile d'avion quand l'incidence augmente.Si l’angle augmente ou diminue entre 30 et 60 degrés, le jet se réattache ou non avec un phénomène d’hystérésis.
1.2. Si l’orifice du jet est prolongé par une paroi courbe continue, le jet suivant cette paroi sans se décoller est coandé quand le rapport r/h entre le rayon de courbure et la largeur du jet est égal à 3 ou plus : cette condition est le pendant de la limitation de l’angle de déviation possible dans l’exemple précédent 1.1. On peut appliquer le théorème de Bernoulli à l’écoulement entre la couche limite qui demeure attachée le long de la paroi et une zone de mélange avec l’atmosphère; à la rigueur on peut en faire autant dans le cas où l’orifice est prolongé par une suite de parois planes progressivement divergentes formant des angles inférieurs à 25 degrés, en dehors de la zone de décollement négligeable suivie d’un recollement assimilée à une couche limite.
Le théorème de Bernoulli traduit alors une diminution longitudinale de pression en une augmentation de vitesse dans un même filet fluide: une dépression s’installe à la paroi et une différence de pression transversale avec la pression atmosphérique ambiante a lieu , qui n’est pas due à un vide partiel causé par un entraînement visqueux. La couche limite est astreinte à remonter jusqu'à l'angle où elle décolle une différence de pression longitudinale égale à cette différence de pression transversale. Nous avons affaire à un effet Coandă bernoullique. Encore faut-il que le théorème soit applicable à un écoulement conservatif de même pression totale partout.
1.3. Si un objet convexe est approché du bord du jet, comme dans l’expérience esquissée il y a deux siècles par Young et reproduite par Bouasse, sa paroi ne prolonge pas celle de l’orifice du jet, l’espace environnant est confiné mais non fermé : le jet est coandé à condition que le rayon de courbure du jet à la paroi égale au moins 3 fois la largeur du jet . Cette déviation est due au départ au vide partiel (effet venturi) causé par entrainement visqueux de l’air dans l’espace confiné.
Que se passerait-il en l’absence (théorique) de viscosité ? On a avancé l’argument qu’une solution mathématique sans viscosité de jet dévié existe dans le cas 1.2. ci-dessus d’un orifice prolongé par une paroi courbe continue, avec application du théorème de Bernoulli, mais n’existerait pas s’il y a un vide entre la paroi et l’orifice du jet, cas 1.3.. Or une telle solution existe : elle a été démontrée par L.C. Woods et représente bien l’écoulement entre la couche limite et la zone de mélange en fonction de r/h,rapport entre le rayon de courbure du jet et sa largeur, paramètre fondamental pour la description de l’effet Coanda.
1.4 Dans tous les cas le rapport critique r/h auquel le jet se sépare augmente fortement dans les applications où les nombre de Reynolds Re = Vh/viscosité cinématique est petit: jusqu’à r/h =7 si Re = 500, r/h=8 si Re=300, and r/h = 20 if Re=100,
Le rapport critique r/h augmente aussi quand la température de la paroi augmente: si Re = 300, r/h critique augmente de 8 à 12 quand la paroi est chauffée de 20 °C.
2. Des expériences de déviation de jet d’eau par une paroi convexe sont souvent rapportées et la déviation est qualifiée d’effet Coanda. Cependant ni Coandă, ni Metral , ni Bouasse, ni Young n’ont fait état d’expériences avec de l’eau, seulement avec de l’air. Il ne semble pas qu’un brevet de bec de théière perfectionné ait été proposé.
En l’absence d’obstacle, une masse d’eau qui débouche dans l’air, quelle que soit sa vitesse initiale, n’est soumise qu’à son propre poids et décrit la même trajectoire que le ferait une masse solide, c’est-à-dire une parabole de tir.
Par ailleurs la tension superficielle de l’eau empêche son mélange avec l’air ambiant, et crée une attraction du jet d’eau par la surface de l’obstacle sur laquelle il vient s’étaler si cela nécessite peu d’énergie (ou forme des gouttes si l’énergie est forte). Une pression inférieure à la pression atmosphérique s’installe alors à la paroi de l’obstacle dans des conditions très différentes de celles décrites dans le cas d’un gaz. Si la paroi est convexe, une force d’attraction mutuelle entre l’obstacle et le jet d’eau dévié se produit (théorème d’Euler) perpendiculaire à la paroi, provoquée par la tension superficielle et non par un entraînement visqueux dans un espace confiné. Si la paroi est concave, c’est une force de répulsion.
La déviation d’un jet de liquide par une paroi convexe est donc produite par des phénomènes très différents de ceux qui produisent la déviation d’un jet de gaz.