Le siège de Sainte-Suzanne fut laborieux pour les Normands, qui n'arrivèrent finalement pas à prendre la forteresse. Le chroniqueur Orderic Vital, né vers 1075, nous livre dans son Histoire de Normandie l'une des raisons de cet échec : les vignobles qui poussent alors sur les pentes de Sainte-Suzanne empêchent les cavaliers normands d'atteindre le château. Ainsi décrit-il la situation : "Le roi (...) ne put investir le château de Sainte-Suzanne, rendu inaccessible par les rochers et par l'épaisseur des vignes qui l'entouraient, ni tenir l'ennemi suffisamment enfermé parce que ce dernier contre-attaquait hardiment et disposait de nombreuses issues".
L'affaire se termina par une négociation et Hubert de Beaumont rentra dans les bonnes grâces du duc de Normandie.
Entre l'automne 2000 et le printemps 2007, le donjon de Sainte-Suzanne a été l'objet d'études archéologiques, de travaux de restauration et d'aménagements qui permettent aujourd'hui au public de le découvrir dans ses moindres détails. Une intervention sur cet élément très fragilisé du patrimoine mayennais était en effet jugée urgente par le Conseil général de la Mayenne, propriétaire du monument depuis fin 1998, et le service régional des Monuments historiques.
Les études réalisées sur le monument nous permettent aujourd'hui de mieux le comprendre. Cette construction quadrangulaire (19,45 m. x 15,50 m., pour une hauteur de 15 m.) a été élevée par bandes de 4 à 5 assises. Le grès provient certainement de Sainte-Suzanne même. En revanche, les matériaux utilisés pour les contreforts plats ou les encadrements des ouvertures n'ont pas été extraits sur place. Il s'agit notamment de granit et de grès roussard (grès très ferrugineux).
Les trois niveaux identifiés correspondent aux fonctions déjà évoquées d'un donjon roman. La brèche par laquelle on pénètre aujourd'hui à l'intérieur du monument a été pratiquée par les archéologues au XIXe siècle. L'accès primitif se faisait à l'origine par le premier étage (escalier / pont-levis de bois). La base du bâtiment était recouverte sur plusieurs mètres par un contrefort de terre destiné à empêcher les ennemis de saper l'assise des murs. Il est possible aussi que le bâtiment ait été entouré de fossés
Plusieurs latrines, deux cheminées, deux "lavabos" et des pièces (garde-robes ?) aménagées dans l'épaisseur des murs (3 mètres) traduisent le niveau élevé d'équipement et de confort de ce monument du milieu ou de la première moitié du XIe siècle, même si certains de ces aménagements n'ont que peu, voire pas du tout, servi. Entre autres mystères on se demande pourquoi la grande cheminée du niveau supérieur n'a aucune trace de suie ni de chauffe. De même, près de la porte d’entrée de la salle de réception (deuxième niveau), au-dessus du cellier, au premier niveau, un évier est posé à terre sans plus d'indicaation quant à son usage. Enfin, des latrines installées dans l’épaisseur des murs ont été murées avant même que d’être mises en service..
L'une des curiosités du donjon de Sainte-Suzanne est la salle dite du trésor, découverte dans l'épaisseur du mur nord. Ce couloir voûté, invisible de l'intérieur du donjon, accessible seulement par un boyau vertical à partir d'une ouverture au deuxième étage, doté d'un placard, devait abriter les chartes de possession et autres documents précieux du seigneur de Beaumont. Ce type de réduit est très rare dans un donjon de cette période.