Donald Winnicott - Définition

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Introduction

Donald Woods Winnicott (7 avril 1896 à Plymouth - 28 janvier 1971) est un pédiatre, psychiatre et psychanalyste britannique. Il a été psychanalysé par James Strachey puis par Joan Riviere et Michael Balint. Il était psychanalyste didacticien de la British Psychoanalytical Society.

Son œuvre est devenue populaire parmi les spécialistes, psychiatres psychologues, pédiatres et éducateurs, mais certains de ses concepts ont également atteint le grand public. Si ses thèses peuvent paraître faciles au premier abord, elles se révèlent toutefois exigeantes, et ses notions d'« aire », d'« espace » et d'objet transitionnel ont souvent donné lieu à des simplifications dommageables.

Aujourd'hui Winnicott est souvent cité pour le meilleur et parfois pour le pire. On lui reproche aussi d'avoir réduit la femme à son rôle de mère (« suffisamment bonne ».) en y négligeant celui de la femme-« amante ».

Il n'en reste pas moins que Winnicott est considéré, un peu comme Bion, comme un des psychanalyste parmi les plus novateurs et originaux. Il est de ceux qui ont fait évoluer les cures d'enfants et d'adolescents, mais ses théories s'appliquent aussi aux adultes. Ses influences sont multiples, outre Freud on y trouve principalement Klein et Anna Freud. Il a surtout cherché à théoriser le développement de la psyché chez le nourrisson et le petit enfant. En France, c'est surtout André Green, et Joyce McDougall qui ont fait connaître Winnicott. Outre une double pratique clinique enthousiaste de son métier de pédiatre et de psychanalyste, dont il témoigne dans de nombreux ouvrages, on doit à Winnicott d'importantes découvertes telles que l'espace transitionnel, espace potentiel, paradoxal ni intérieur ni extérieur situé entre le bébé et sa mère. C'est là que se développerait l'aire de jeu et de créativité où l'enfant se voit offrir la possibilité de faire des expériences fondamentales pour sa maturation psychique.

Lorsque le développement de cette aire est précocement perturbé, voire empêché, l'adaptation de l'enfant à son environnement est compromise. Pour survivre, le self se dissocie en faux-self. Ce faux-self est dépendant des besoins et des difficultés psychiques inconscients de la mère. Cette question est éminemment problématique tout comme l'interprétation de la notion de « mère suffisamment bonne ».

Les perturbations psychiques induites par le faux-self demandent à être traitées dans des consultations thérapeutiques, car ces patients ont moins besoin de guérir de leur symptômes que de pouvoir se sentir exister vraiment. Ils connaissent surtout un sentiment de futilité. Winnicott se démarque de la position de ses collègues anglais, en particulier celle de Mélanie Klein et ses élèves qui accordent la prépondérance aux fantasmes du bébé, qu'ils voient à l'œuvre dès la naissance. Sans se rallier aux positions d'Anna Freud, il propose une prise en compte de la réalité vécue du bébé dans son lien à sa mère. Dans ses traitements, il aménage et adapte le cadre pour offrir les meilleures conditions afin de favoriser la symbolisation.

Biographie

Donald Wood Winnicott est né à Plymouth, dans le Devon, en 1896, dans une famille de la bourgeoisie britannique, « … avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale, à une époque où les gens croyaient profondément que les choses continueraient à progresser dans la mesure où les hommes deviendraient de plus en plus éclairés. »

Son père, Sir Fréderick Winnicott, est le maire de Plymouth. Il grandit dans un foyer stable et heureux, « ... adoré de ses parents et de ses deux sœurs aînées. »

Son choix de devenir médecin est très lié à son tempérament particulièrement indépendant. C'est notamment à la suite d'une fracture qui le rend dépendant d'autres personnes qu'il se décide définitivement pour cette profession :

« Je ne pouvais pas imaginer que, pendant tout le reste de ma vie, je serais obligé de dépendre des médecins, au cas où je me blesserais ou tomberais malade. Le meilleur moyen de m'en tirer, c'était de devenir médecin moi-même. »

Athlète remarquable (ce sont les bouleversements dus à la Première Guerre mondiale qui l'empêchent d'atteindre un niveau olympique), élève brillant, il fait donc des études de médecine. Pendant la guerre, il est chirurgien-stagiaire sur un destroyer. La physiologie, qu'il étudie, le déçoit; il la trouve froide et loin de la relation humaine. Il s'oriente ensuite vers la pédiatrie qui lui permet « … de traiter l'individu entier et de situer l'enfant dans le contexte familial et social. »

Nouvellement diplômé, il sent les limites et les impasses d'une approche médicale purement physique, et découvre l'œuvre de S. Freud qui seule lui semble permettre de les franchir. Il commence sa formation d'analyste en 1923, en même temps qu'il commence à tenir des consultations en pédiatrie. De nouveau des limites se présentent : à l'époque, la psychanalyse s'adresse à des adultes cultivés et non pas à des enfants.

Il s'agit d'un moment particulier dans l'histoire de la psychanalyse, notamment au Royaume-Uni, et la psychanalyse d'enfants est scindée entre deux courants, les kleiniens et les "annafreudiens". Sigmund Freud ne s'y est que peu consacré directement même si son œuvre y donne à l'enfant une place centrale. La seule psychanalyse qu'il a supervisée est celle du « petit Hans », qu'il n'a pas rencontré. Le « petit Hans » a été analysé par son père Max Graf psychanalyste, qui échangeait avec S. Freud. Le champ de la psychanalyse des enfants avait été en quelque sorte légué à sa fille Anna Freud, institutrice de formation. Elle publie en 1927 Le traitement psychanalytique des enfants et poursuit dans cette voie en Autriche. Lorsqu'elle est contrainte de fuir son pays avec son père en 1938, elle rejoint Londres où travaille depuis 1925 Melanie Klein.

D. Winnicott entamera sa formation de psychanalyste avec James Strachey, freudien, la poursuivra avec Joan Riviere, kleinienne (elle a co-écrit avec M. Klein le livre L'amour et la haine). M. Klein elle-même participera à la formation de D. Winnicott en tant que superviseur. Ce dernier en garda un souvenir admiratif, M. Klein parvenant à mieux connaître ses patients que lui-même. D. Winnicott n'a pas été proprement kleinien. Au choix du parti et à l'affrontement, il a préféré une troisième voie, personnelle.

S'il est devenu la figure la plus prestigieuse du Middle Group, D. Winnicott n'en n'est jamais devenu l'idéologue ou le leader. Même si son influence a été et reste considérable, il n'y pas fait école (au contraire de Sigmund Freud, de Mélanie Klein.

D. Winnicott va très rapidement suivre sa propre voie, en présentant ses avancées comme complémentaires de celles de S. Freud et de M. Klein et il « … ne tarda pas à apparaître aux analystes comme un collègue créatif, parfois révolutionnaire et embarrassant, ce qu'avaient déjà pensé les pédiatres »

La source des préoccupations théoriques de Winnicott se trouve déjà chez Freud à propos du jeu et de la créativité, S. Freud écrit en 1908 : « Chaque enfant qui joue se conduit comme un écrivain, dans la mesure où il crée un monde à son idée, ou plutôt arrange ce monde d'une façon qui lui plaît… Il joue sérieusement. Ce qui s'oppose au jeu n'est pas le sérieux, mais la réalité. ».

Quant à la prise en compte de l'environnement et alors que la psychanalyse pense avant tout en termes de conflit intrapsychique, J.-B. Pontalis suggère que D. Winnicott s'appuie sur une note de S. Freud (où ce dernier évoque de prendre en compte la mère) pour développer toute sa théorie de l'environnement.
Freud s'y fait l'objection qu'une organisation totalement régie par le principe de plaisir et ignorant ainsi de la réalité extérieure ne pourrait subsister pour un laps de temps, si court soit-il. Mais il ajoute: « Le recours à une fiction de cet ordre se justifie néanmoins si l'on considère que le petit enfant — pour peu qu'on tienne compte aussi des soins de sa mère — réalise, presque, en fait, un système mental de ce type. » On pourrait dire que c'est sur ce passage entre tirets que D. Winnicott s'appuie pour développer sa théorie de la relation, du couplage mère-nourrisson. « Cette chose qu'on appelle un nourrisson n'existe pas », a-t-il pu écrire, J.-B. Pontalis, « Naissance et reconnaissance du “soi” ».

J.-B. Pontalis convient que la théorie du développement de D. Winnicott peut trouver sa « légitimité freudienne », sa continuité d'avec l'œuvre de Freud dans la note à laquelle il fait référence, mais il est peu probable que D. Winnicott ait ressenti besoin d'une « caution freudienne » pour oser avancer ses propres élaborations.

Cependant, D. Winnicott cite lui-même cette note qui pour lui indique que « Freud rendait ainsi pleinement hommage au rôle joué par les soins maternels, et on peut supposer que s'il n'a pas abordé ce sujet, c'est qu'il ne se sentait pas prêt à analyser ses implications. » Ce n'est pas pour trouver une légitimité quelconque puisque ce texte a été écrit en 1960, vers la fin de sa vie. Cela illustre simplement ce qu'il a toujours dit : son travail est en complémentarité de celui de Sigmund Freud.

À propos de M. Klein qui l'a précédée dans le travail auprès de jeunes enfants mais qui n'a pas pris en compte la mère, D. Winnicott déclare que ce n'est parce qu'elle n'en était pas capable, « par tempérament ».

Sa théorie, qu'il a élaborée progressivement et qui est devenue de plus en plus complexe, est directement issue de son travail clinique. Dans un entretien avec A. Clancier, J.-B. Pontalis remarque qu'en France, bien souvent, un analyste crée un concept qu'il tente ensuite d'utiliser dans sa pratique. Rien n'est plus étranger à cette démarche que celle de D. Winnicott pour qui « … les faits, c'était la réalité ; les théories, le balbutiement humain dans son effort pour saisir les faits. ». En effet, D. Winnicott, comme l'ensemble des analyste du Groupe des indépendants », s'inscrit dans la tradition philosophique de l'empirisme britannique, avec parmi ses caractéristiques le rejet de l'esprit de système.

S'il a commencé comme pédiatre et même s'il a conservé cette activité jusque très tard, D. Winnicott est également devenu analyste d'adultes, il a suivi des psychotiques et s'est également occupé de jeunes placés en foyer, qui avaient été évacués de Londres pendant la Seconde Guerre mondiale. De par son immense expérience de pédiatre, qui dura près de quarante années, il put retrouver des patients, à l'âge adulte, qu'il avait reçus en tant que nourrissons, permettant une confrontation de ses intuitions et élaborations avec la réalité d'une vie vécue.

Toute sa vie, il a communiqué ses idées, à ses confrères pédiatres, psychanalystes, mais aussi aux parents, aux éducateurs, aux infirmiers, aussi bien qu'à des hommes de loi. Un de ses derniers textes est un hommage à un éducateur avec lequel il travailla pendant la Seconde Guerre mondiale.

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