Djerba - Définition

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Économie

L'économie de Djerba est traditionnellement « mixte, fondée sur la complémentarité des ressources du sol, de la mer et de l'artisanat [...] l'agriculteur peut être pêcheur ou artisan une partie de l'année » voire de la journée tout en étant commerçant. Toutefois, le Djerbien est avant tout un commerçant prêt à quitter son île natale pour mener son activité commerciale. En effet, dès les années 1940, les commerçants djerbiens installés sur l'île ne représentent que 4 % de l'ensemble des négociants djerbiens. René Stablo indique que parmi les « 6444 musulmans se livrant au commerce, 6198, soit 96 % tiennent boutique dans le bassin méditerranéen depuis le littoral atlantique jusqu'aux rives du Bosphore [...] Ils sont épiciers, merciers, marchands de tissus, de couvertures, de chéchias, de poteries, cafetiers, coiffeurs, etc. ». En 1961, on a estimé à 1 067 412 dinars tunisiens l'apport des Djerbiens vivant hors de l'île, soit 42 % de l'ensemble de la valeur des productions et services djerbiens, l'agriculture en représentant 17 %. En 1998, on estime l'apport des Djerbiens vivant à l'étranger à entre 20 et 25 millions de dinars par an alors que les ressources dérivées de l'agriculture ne représentent plus qu'entre 2 et 4 % des ressources globales de l'île comparées aux ressources des activités touristiques qui se montent à 20 fois plus.

Tourisme

Plage d'un hôtel djerbien
Hôtel djerbien

Djerba dispose d'une vingtaine de kilomètres de plages sablonneuses, situées surtout à l'extrémité orientale de l'île, qui ont poussé Gustave Flaubert à surnommer Djerba « l'île aux Sables d'Or ». Les plus belles plages se trouvent au nord-est (Sidi Hacchani, Sidi Mahrez et Sidi Bakkour), à l'est (entre Sidi Garrous et Aghir), au sud (près de Guellala) et à l'ouest (Sidi Jmour). Jusqu'au début des années 1950, celles-ci ne sont fréquentées que durant les visites (ziara) que les habitants rendent aux marabouts. Toutefois, avec l'arrivée du Club Méditerranée en 1954 et le développement du tourisme dès les années 1960 (construction du premier hôtel important en 1961), ces plages sont de plus en plus fréquentées. L'État tunisien est alors l'acteur principal par ses investissements comme par les avantages fiscaux et financiers consentis aux établissements touristiques qui sont pour la plupart construits sur la côte orientale de l'île.

Vers 1975, l'activité touristique prend des proportions insoupçonnables à l'origine et, dans les années 1980, le tourisme prend véritablement son essor pour devenir la principale activité économique de l'île. Les espaces permettent la construction de grandes unités hôtelières dont le taux d'occupation moyen atteint 68 % en 1999, ce taux situant Djerba en seconde position parmi les sites touristiques tunisiens.

Le nombre d'hôtels atteint 135 en 2009 (contre 48 en 1987) et celui de lits 49 147 pour neuf millions de nuitées (8 300 lits en 1975, 14 409 en 1987 et 39 000 en 2002) ; le taux de fidélité des clients (ceux qui y séjournent à plusieurs reprises) avoisine 45 %. Le secteur emploie quelques 76 000 personnes, soit trois fois plus qu'en 1987, même si le nombre d'emplois directs ne correspond qu'à quelques 15 000 postes de travail souvent précaires car saisonniers.

En 2005, la zone touristique s'étend sur plus de vingt kilomètres entre Aghir au sud et Houmt Souk au nord. Néanmoins, un grand nombre de lits n'est utilisé que durant l'été et le parc hôtelier vieillit, entraînant un tassement de la clientèle, notamment en raison des prix trop bas induits par la concurrence. Pour maintenir et développer l'activité, les acteurs locaux sont favorables à un enrichissement de l'offre par la création d'activités nouvelles (terrain de golf, casino, musée, thalassothérapie ou encore parc d'attractions). Plusieurs terrains destinés au tennis et à d'autres sports sont disponibles tout comme plusieurs stations nautiques qui offrent ski nautique, motomarine, parachute ou simple pédalo. Un bowling a ouvert ses portes non loin du terrain de golf. Par ailleurs, une marina est en cours de construction et permettra aux bateaux de plaisance d'y stationner sans difficulté.

La présence de l'aéroport international de Djerba-Zarzis et d'infrastructures routières contribue à en faire un centre touristique important et un générateur de croissance économique pour la région.

Agriculture

L'économie de l'île repose également sur l'agriculture et son climat permet la culture de nombreux oliviers, dont les familles d'agriculteurs récoltent les fruits en automne, de grenadiers, de palmiers-dattiers, de figuiers, de pommiers, d'amandiers, de figuiers de Barbarie aux fruits épineux qui bordent les routes (souvent plantés sur les haies appelées tabias à titre de protection), de la vigne et de légumes et de certaines céréales. Les revenus des palmiers et oliviers représentant à eux seuls 64 % du total des productions agricoles. On recense en 1963, 497 000 oliviers, alors qu'il n'y en avait que 394 500 en 1929, mais aussi 52 000 oliviers sauvages ou zabbous qui, devenus à la mode, commencent à être arrachés pour être transplantés hors de l'île ; on trouve cependant encore des oliviers millénaires à Djerba.

Au sein du menzel, la famille a en général un ou deux chiens de garde, un ou plusieurs chats qui se chargent de protéger le grenier contre les souris, quelques poules pour les œufs et la viande et quelques chèvres et moutons pour le lait, le petit-lait (l'ban), le lait caillé (raieb), le fromage (rigouta et jebna), la viande, la laine ou les peaux. Elle a aussi un âne ou un mulet et éventuellement une charrette ainsi qu'un chameau pour le travail de la terre (labour et irrigation) et le transport des biens et marchandises ainsi que celui des humains. S'il en a les moyens, le Djerbien possède une sénia, verger d'arbres fruitiers irrigué et clôturé mais ne comportant pas en général d'habitation. Mais le plus souvent, il possède un jnan, verger non irrigué, un potager et un champ pour produire ses propres céréales (blé dans les zones d'eau douce, orge, sorgho et lentilles sur le reste de l'île). La frawa est un autre type d'exploitation agricole plantée d'oliviers. Avant les années 1960, le Djerbien vivait souvent en autarcie presque totale et n'achetait au marché que le minimum nécessaire : sel, sucre, thé et café, certaines épices et quelques autres articles.

Puits actionné par un dromadaire

Pour l'irrigation traditionnelle, c'est la canalisation dite seguia qui est utilisée : l'eau est déversée dans un grand bassin par un delou (outre en cuir) qui plonge dans le puits au moyen d'une corde tirée le plus souvent par un chameau, la course en pente de l'animal correspondant à la profondeur du puits ; le champ est divisé en petits carrés (jadouel) délimités par des talus de sable ; de petites ouvertures y sont pratiquées pour laisser passer l'eau ruisselant de la seguia. Une fois le jadouel plein d'eau, l'ouverture est refermée et l'eau dirigée vers le jadouel suivant.

L'eau souterraine est le plus souvent saumâtre et ne permet que certaines cultures (orge, sorgho et lentilles) et la fertilité des champs dépend aussi bien de l'ardeur au travail du propriétaire et de sa famille que de la qualité (niveau de salinité) des eaux d'irrigation. Les champs sont le plus souvent délimités à l'extérieur par de hautes levées de terre appelées (tabia) surmontées de cactus ou de figuier de Barbarie voire d'agave ou d'aloès. Elles servent certes à abriter les menzels des regards mais surtout à protéger les enclos contre l'érosion éolienne.

Vers 1940, on comptait à Djerba 520 000 palmiers, 375 000 oliviers, 160 000 arbres fruitiers divers (pommiers, poiriers, figuiers, pêchers, orangers, citronniers, abricotiers, grenadiers, amandiers, etc.) et 650 000 pieds de vigne. Il n'existait pas de vrai pâturage et l'élevage était assez réduit. En 1938, 31 % de la population adulte vivait des activités agricoles, cette proportion tombant à 25 % en 1956 puis 17 % en 1962. Ce taux est encore plus bas de nos jours.

La culture sous serres en plastique et l'arrosage au goutte-à-goutte ont fait leur apparition de même que l'élevage de vaches laitières (près de 500 en 1998).

Pêche

Djerba compte plusieurs petits ports de pêche dont ceux de Houmt Souk, Ajim (autrefois célèbre pour sa pêche d'éponges) — des pêcheurs grecs d'éponges étaient arrivés vers 1890 en provenance de l'île grecque de KalymnosAghir, Lella Hadhria et El Kantara. La pêche djerbienne — sautades de mulets et pêche à la gargoulette (amphore) de poulpes — profite d'eaux parmi les plus poissonneuses de la mer Méditerranée.

Contrairement à celles des îles Kerkennah, les femmes djerbiennes ne participent pas à l'activité de pêche et ce même en l'absence du mari, la pêche étant pratiquée en majorité par les habitants ibadites de l'île, d'Ajim à Sedouikech. Une méthode de pêche assez particulière, la zriba ou charfia (pêcherie fixe), est très pratiquée sur l'île et il est commun de voir dans la mer, au nord et à l'ouest de l'île, des haies ou des cloisons de palmes enfoncées dans la vase des hauts fonds servant à arrêter le poisson et à le diriger vers les nasses. En 1938, 1 300 hommes (environ 10 % de la population mâle adulte) vivaient de la pêche en utilisant près de 600 barques (des loudes pour la plupart) et 130 pêcheries fixes. En 1964, le nombre de barques était descendu à environ 507 unités et celui des pêcheries fixes à 85, le nombre de pêcheurs étant de 1 274 personnes alors qu'en 1998, le nombre de pêcheurs atteint près de 2 470 personnes alors qu'il ne reste plus qu'une quinzaine de pêcheries fixes d'où une baisse considérable si l'on considère l'accroissement démographique durant cette période. Si environ 4 378 tonnes de poisson ont été commercialisées en 1981, cette vente est tombée à environ 3 000 tonnes en 1993.

Phare de Taguermess

Les loudes à la blanche voilure grecque sont utilisées pour la pêche du poisson et les kamakis à voile latine de couleur rouge tirant sur l'orangé, la vergue fixée obliquement en son milieu à l'extrémité du mât unique et court, sont utilisées par les pêcheurs d'éponge. Toutefois, des chalutiers ont fait leur apparition dans les hauts-fonds.

En fait, compte tenu des ressources limitées de l'île, les hommes, et en particulier ceux de souche berbère, s'expatriaient pour faire du commerce en dehors de l'île, aussi bien en Tunisie qu'à l'étranger (surtout en France et en Algérie et en particulier à Constantine) alors que les femmes restaient sur l'île avec les enfants et les hommes âgés. Elles pratiquaient l'agriculture et l'artisanat mais jamais la pêche, activité réservée aux hommes et limitée à certains villages.

Afin d'assurer la sécurité des navires, plusieurs phares existent le long des côtes de l'île, dont le plus haut de l'île (mais aussi d'Afrique du Nord) grâce à sa tour de 54 mètres construite sur une formation rocheuse haute de 20 mètres. Situé à Taguermess, sur la côte nord-est de l'île, il est construit sur une formation rocheuse côtière surplombant une sebkha alimentée en eau de mer lors de la marée haute. Ce phare date du XIXe siècle (vers 1885), son sémaphore est d'une portée de 32 miles marins.

Un deuxième phare, le premier installé sur l'île, est celui de Borj Jilij, à la pointe nord-ouest de l'île, non loin de l'aéroport ; il est inauguré vers la fin du XVIe siècle à l'emplacement de l'ancien fortin dénommé par les Espagnols sous le nom de Tour de Valgarnera. Un troisième phare se trouve à Aghir sur la côte sud-est. Il en existe plusieurs autres, dont ceux des ports d'Ajim et de Houmt Souk.

Artisanat

L'artisanat, en particulier le travail de la laine, du lavage au cardage, en passant par le filage et le tissage, a depuis des générations joué un rôle primordial dans la vie économique et sociale de l'île et constitué une source de revenus importante pour les Djerbiens (hommes ou femmes). L'architecture des ateliers de tissage est typique sur l'île : ils sont semi-enterrés afin de préserver l'humidité ainsi qu'une certaine température et possèdent un fronton triangulaire. On comptait 428 ateliers et 2 524 tisserands en 1873, le nombre de tisserands tombant à environ 1 600 en 1955 et 1299 en 1963. À cela s'ajoute les laveuses, cardeuses et fileuses de laine (en principe toujours des femmes) ainsi que les teinturiers, l'activité de teinture remontant à l'époque punique.

La couverture djerbienne appelée farracha ou farrachia était célèbre et recherchée. L'activité de tissage des houlis en coton, laine ou soie naturelle ainsi que le tissage des kadrouns, k'baia, kachabia, wazras et burnous (habits en laine pour homme) joue également un rôle important. La poterie de Guellala remonte quant à elle au moins à l'époque romaine, ses produits étant principalement utilitaires mais pouvant aussi être décoratifs. Il est à noter que les potiers de Djerba n'ont plus le droit de vernir leur poterie à leur gré, une décision administrative centrale les obligeant à les garder brute. Parlant des potiers de Djerba, Georges Duhamel avait écrit dans les années 1920 :

« J'ai cherché des poètes. J'ai trouvé des potiers. Nul métier ne fait mieux penser à Dieu, à Dieu qui forma l'homme du limon de la terre [...] Sur tous les chemins de Djerba, entre les remblais sablonneux, crêtés de petits agaves pourpres, circulent des chameaux, portant un faix énorme et vain : la grosse grappe de jarres sonores... »

La bijoutierie (or et argent) reste aussi une activité lucrative importante. Les bijoutiers de Houmt Souk excellent ainsi dans l'ornement des bijoux en argent émaillé et dans la fabrication de bijoux comportant de l'or en filigrane. La vannerie — le produit de base étant les jeunes feuilles de palmiers — était également une source de revenue importante, en particulier pour les personnes âgées. Aujourd'hui, les sacs, couffins (koffa) et chapeaux (appelés m'dhalla ou dhallala selon les villages) restent des articles vendus aussi bien aux habitants de l'île qu'aux touristes. Les artisans confectionnent également des cordages et des nasses de pêcheurs. La natterie (tissage du jonc) est également une activité pratiquée sur l'île, surtout dans la localité de Fatou, non loin de Houmt Souk. La broderie, pratiquée presque exclusivement par des femmes, et en particulier celle des habits traditionnels, fait vivre encore de nos jours un nombre important de familles.

Il est à noter que l'artisanat a pris des formes diverses et a connu un essor considérable avec le développement du tourisme et en particulier la fabrication de tapis.

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