Autour de cette époque les premières théories sur l'altitude du géoïde au-dessus (ou en dessous) de l'ellipsoïde commencencent à voir le jour, et c'est d'ailleurs lors de ces travaux que le géodésien allemand Johann Benedict Listing (1808–1882), qui travaille à Göttingen, forge le vocable géoïde. En dehors de Listing, ce sont Fischer et surtout Ernest Heinrich Bruns (1848–1919) qui se distinguent par leurs travaux dans ce sujet.
En 1888, l'astronome allemand Karl Friedrich Küstner (1856–1936) affirma, sur la foi d'observations de latitude effectuées par lui depuis 1884 par la méthode de Talcott, que la latitude d'un observatoire subit des variations périodiques. L'expérience fut reprise en 1891–92 dans les deux stations de Berlin et de Honolulu différant de 180º en longitude. Il constata que les variations de latitude y sont concomitantes, l'une diminuant lorsque l'autre augmente et réciproquement. Cela signifiait que l'axe de rotation terrestre n'est pas fixe par rapport à la Terre. En fait, ce phénomène avait été prévu par Euler, qui en avait calculé la période pour le cas d'un modèle de Terre rigide. Euler avait ainsi trouvé une période de 305 jours. Or, le mouvement observé par Küstner présente une périodicité complexe d'environ 425 ou 430 jours. Indépendamment de Küstner, l'Américain Seth Carlo Chandler avait analysé une longue série d'observations effectuées à l'observatoire de l'université Harvard à Boston, et avait lui aussi mis en évidence des variations de la latitude avec une périodicité de l'ordre de 430 jours. Peu après, le grand astronome américain Simon Newcomb montra que le mouvement de Chandler (c'est la dénomination le plus souvent utilisée de nos jours) correspond effectivement à la précession libre d'Euler, mais que la période se trouve fortement allongée par suite de la déformabilité de la Terre. Afin d'étudier ce phénomène très important tant pour les astronomes que pour les géophysiciens, on créa en 1899 le Service International des Latitudes (ou ILS pour International Latitude Service), auquel cinq stations d'observation réparties sur le 35º parallèle Nord étaient affectées en permanence.
En 1899 on reprenait les travaux de mesure d'un arc polaire et d'un arc équatorial. Les mesures de l'arc polaire sont effectuées au Spitzberg par la Suède et la Russie entre 1899 et 1902. Celles concernant l'arc équatorial sont faites en Équateur entre 1899 et 1906 par une équipe française dirigée par Robert Bourgeois.
En 1901 le grand géodésien allemand Friedrich Robert Helmert (1843–1917) obtient pour l'aplatissement de la Terre la valeur f = 1/298,3, très proche de la valeur déterminée actuellement par les méthodes de la géodésie spatiale. La valeur de Helmert fut tirée de quinze à seize cents mesures de la pesanteur. Pour ce faire, Helmert avait développé une méthode particulière pour réduire les données, appelée méthode de condensation. Remarquons que l'œuvre géodésique de Helmert, qu'il a résumée dans son ouvrage monumental « Die mathematischen und physikalischen Theorien der höheren Geodäsie » (Les théories mathématiques et physiques de la géodésie supérieure, 2 volumes, Teubner, Leipzig, 1880), représente une synthèse admirable des connaissances géodésiques à l'orée du XXe siècle.
De 1898 à 1904, Friedrich Kühnen et Philipp Furtwängler déterminèrent au moyen d'un pendule réversible une valeur de la pesanteur absolue à Potsdam. Celle-ci, de 9.81274 ms-2 sera adoptée comme la base du Système Gravimétrique de Potsdam utilisé au niveau mondial jusqu'en 1971, bien que depuis 1950 on sait que cette valeur de Potsdam est trop forte d'environ 14 milligals. Ensuite, en 1909, le géodésien américain John Fillmore Hayford (1868–1925) publie les résultats de ses travaux sur les dimensions de l'ellipsoïde terrestre, déduites du réseau géodésique des États-Unis par la méthode des aires. Réduisant les déviations de la verticale par la méthode isostatique selon l'hypothèse de Pratt, il trouve les valeurs suivantes a = 6 378 388 m, f–1 = 297,0. Ces dernières sont fournies dans son ouvrage « The figure of the Earth and isostasy from measurements in U.S.A. ». Les travaux de Hayford seront continués par son successeur William Bowie, et l'ellipsoïde de Hayford sera finalement adopté comme surface de référence générale, dite ellipsoïde international lors de l'Assemblée Générale de 1924 de l'Union géodésique et géophysique internationale fondée en 1919.
C'est en 1910, quatre années avant le début de la Première Guerre mondiale, que l'Observatoire de Paris commence l'émission de signaux horaires. C'est en partie à cause de cette circonstance que tout de suite après la guerre, en 1919, il fut créé à Paris le Bureau International de l'Heure (BIH). L'après-guerre est caractérisé par une reprise de l'activité géodésique à grande échelle. Ainsi, en 1924, l'U.R.S.S. lance un programme de géodésie sur toute l'étendue de son énorme territoire, mettant en œuvre la triangulation, la gravimétrie, le nivellement et toutes les autres techniques géodésiques de l'époque. Ce programme est conçu et mis en œuvre par F.N. Krassowsky et ses assistants. Il sera appliqué systématiquement pendant les années suivantes. Il couvre le territoire de l'Union soviétique d'un réseau de premier ordre dense et précis, lequel permet de faire des études scientifiques exhaustives. Ces travaux aboutissent à l'adoption, en 1942, de l'ellipsoïde de Krassowsky par l'U.R.S.S. Cet ellipsoïde, dont les paramètres fondamentaux sont a = 6 378 245 m, f–1 = 298,3, résulte de l'étude géométrique et gravimétrique de l'ensemble des réseaux connus, laquelle est surtout le travail du géodésien soviétique Isotov.
En 1926, on procède à la première opération mondiale des longitudes et, en 1933, on passe à la seconde. En 1928, le géodésien hollandais F.A. Vening Meinesz donne des formules théoriques trouvant leur origine dans la méthode de Stokes citée plus haut ; elles permettent d'exprimer les déviations de la verticale au moyen d'une intégrale portant sur les anomalies (observées) de la pesanteur. Ensuite, en 1929, il publie une note intitulée Theory and practice of pendulum observations qui décrit comment on peut mesurer la pesanteur en mer à l'aide d'un appareil composé de trois pendules.
Ensuite, l'année suivante, les géodésiens italiens G. Cassinis et C. Somigliana complètent la définition de l'ellipsoïde international adopté en 1924 en lui adjoignant la formule internationale de la pesanteur, entérinée lors de l'Assemblée Générale de l'UGGI à Stockholm cette même année 1930 :
γ = 978,0490 (1 + 0,005 288 4 sin²φ – 0,000 005 9 sin²2φ)
où φ désigne la latitude et où l'accélération de la pesanteur normale γ est exprimée en gal (1 gal = 1 cm/s² = 0,01 m/s²). Le premier terme de cette formule, qui représente la pesanteur normale à l'équateur, fut calculé par le géodésien finlandais W.A. Heiskanen sur la base de mesures de la pesanteur en plusieurs milliers de stations, en effectuant une réduction isostatique. Le coefficient de sin²2φ, très petit puisqu'il vaut seulement –5,9 x 10–6, fut déduit théoriquement par Somigliana et Cassinis. Trois années plus tard, en 1933, P. Pizzetti, un autre géodésien italien, s'est illustré en publiant son célèbre ouvrage intitulé Etudes fondamentales de la forme des planètes. L'année 1935 voit la découverte par l'astronome français N. Stoyko des variations saisonnières de la vitesse de rotation terrestre. Cette découverte fut faite lorsque Stoyko comparait les temps fournis par les garde-temps de plusieurs observatoires fondamentaux au temps sidéral en ces mêmes observatoires.
Pendant toute cette période, Heiskanen calculait inlassablement des aplatissements d'ellipsoïdes à deux ou trois axes et préparait des cartes d'anomalies isostatiques selon la méthode de compensation d'Airy dont il se fit le champion. Ensuite il se servait de ces anomalies dans la formule de Stokes. Ses calculs fournissaient pour l'aplatissement des valeurs systématiquement comprises entre 1/297 et 1/298. D'autre part, il aboutissait à des conclusions importantes concernant la triaxialité de la Terre.
De 1945, fin de la Deuxième Guerre mondiale, datent les premières publications concernant les travaux essentiels du grand géodésien théoricien soviétique M.S. Molodensky. Celui-ci fournit aux théories de la géodésie physique une base mathématique rigoureuse qui leur faisait défaut auparavant.
En 1948, le Finnois L. Tanni publie une première carte mondiale du géoïde. Celle-ci se base sur la formule de Stokes. Malheureusement, à cause d'une base de données par trop insuffisante, cette carte ne possède qu'un intérêt historique. C'est de cette époque — la fin des années 1940 — que datent par ailleurs les premières expériences suivies pour utiliser le radar aéroporté dans la mesure géodésique de distances de plusieurs centaines de kilomètres. Ces essais eurent lieu surtout au Canada et aux États-Unis. Ils permettaient de mesurer des côtés de triangles de triangulation de l'ordre de 300 kilomètres avec une précision de 10–5. Tout le réseau du Grand Nord canadien est mesuré de la sorte. Encore à cette époque, on commence d'utiliser des ordinateurs électroniques en géodésie. Le développement rapide de l'informatique permettra bien vite d'entreprendre des calculs géodésiques de plus en plus complexes, qui n'auraient pas pu être envisagés auparavant. En fait, la période de l'après-guerre témoigne d'une très intense activité géodésique à laquelle participent des géodésiens de toutes les nations.
Parmi les sujets à l'ordre du jour, on peut citer :
Le 4 octobre 1957, pour célébrer le quarantième anniversaire de la Révolution bolchévique, le premier satellite terrestre artificiel est lancé. Avec ce lancement de Spoutnik I s'ouvre une nouvelle ère au géodésien, celle de la géodésie spatiale. En effet, les perturbations des orbites des satellites artificiels vont lui permettre d'étudier les termes successifs des harmoniques du potentiel extérieur de la gravité, et ainsi connaître ce potentiel de manière de plus en plus détaillée et de plus en plus précise, fournissant finalement une vue globale précise du géoïde. D'autre part, la photographie de satellites sur le fond des étoiles à partir de plusieurs stations synchronisées a permis d'effectuer des triangulations à trois dimensions avec des mailles très grandes. On est ainsi arrivé à créer un réseau global de stations, dont on connaît les positions relatives et absolues avec une très grande précision.
La mécanique céleste, jadis une branche très mathématisée de l'astronomie fondamentale, est devenue une science auxiliaire indispensable au géodésien. Ses méthodes ont permis de déterminer l'aplatissement avec une précision inconcevable auparavant. Dès 1965, l'Union astronomique internationale (UAI ; en anglais : International Astronomical Union, IAU) proposait d'adopter comme surface de référence l'ellipsoïde normal caractérisé par les constantes a = 6 378 160 m, f–1 = 298,247 ± 0,02, la valeur de f–1 étant précisément fournie par les études de mécanique céleste sur les orbites de satellites artificiels « géodésiques ». Cet ellipsoïde fut effectivement adopté en 1967 par l'Association Internationale de Géodésie (AIG ; en anglais : International Association of Geodesy, IAG), mais la quantité f fut considérée comme une constante de définition dérivée, connue sans erreur (f = 1/298,247). A vrai dire, on s'était trop hâté pour adopter cet ellipsoïde normal, car peu de temps après — la géodésie spatiale avançant à grands pas — on dut se rendre à l'évidence que l'ellipsoïde de 1967 ne représentait pas un choix optimum. Pour cette raison, l'AIG adoptait en 1980 un nouveau système de référence géodésique, qui est toujours en vigueur mais a connu quelques légers amendements en 1984. C'est le Geodetic Reference System 1980, ou GRS80. Comme le précédent, ce système de référence se base sur un ellipsoïde équipotentiel géocentrique, défini au moyen des constantes conventionnelles suivantes :
Le développement de la géodésie d'après 1960 se confond essentiellement avec les progrès de la géodésie spatiale. Les progrès enregistrés au cours des quatre ou cinq dernières décennies ont été tellement nombreux et tellement spectaculaires qu'il est sans doute difficile de les résumer, sans beaucoup de recul, dans le cadre d'un texte consacré à l'histoire de la géodésie.