Le statut de Wikipédia comme la première référence sur le web et la première source de connaissance dans le monde est un sujet de critiques et de controverse. L’audience grandissante de Wikipédia a conduit un grand nombre de personnes à formuler des avis critiques sur la fiabilité des informations présentées dans cette encyclopédie.
Parmi les nombreuses critiques adressées à Wikipédia, qui peuvent donner prétextes à controverses, les plus notoires sont les suivantes :
L'anonymat de la majorité des contributeurs est une des principales critiques adressées au principe de fonctionnement de Wikipédia. Ainsi, Guillaume Lecointre, professeur au Muséum national d'histoire naturelle à Paris, écrit à propos de Wikipédia : « L'identification du signataire fait partie de l'information scientifique, puisqu'elle permet de retourner aux sources pour toute vérification et recoupement », et « Il vaut mieux un mauvais texte signé, plutôt qu'un texte moyen non signé. Les ultralibéraux et les « anarchistes » autoproclamés des encyclopédies libres récusent que des intellectuels puissent avoir pour tâche de délivrer gratuitement de la connaissance. Connaissance pour laquelle ils ont un haut degré d'expertise. Cela s'appelle les chercheurs payés par l'État. »
Le manque apparent de responsabilité des auteurs et de références bibliographiques comparés à d’autres encyclopédies, paraît favorisé par l'anonymat de la majorité des contributeurs. À la suite de la découverte sur Wikipédia de l'article le concernant, le journaliste Daniel Schneidermann exprime ainsi sa réaction : « D’abord, ça fait drôle. Ensuite, ça glace un peu. Ça glace, parce que ce texte est anonyme. Je ne sais pas qui a écrit ça. Je ne sais pas qui a choisi, dans les mille actes publics qui composent ma carrière, cette poignée de faits et de mots, plutôt qu’une autre » et « Mais chacune de vos phrases, monsieur (ou madame) le (la) biographe anonyme, en apparence purement informative, est pourtant un éditorial masqué. Chacun de vos choix (longueur, brièveté, ou absence de tel ou tel épisode) est… un choix, justement. Raconter, c’est choisir un récit, parmi mille possibles. »
L'absence de filtrage des éditeurs en fonction de leurs compétences, et plus généralement de comité de validation garantissant la qualité des articles, est considérée comme portant atteinte à la fiabilité des informations présentées dans Wikipédia, car ces informations ne sont pas soumises à une démarche de validation scientifique, mais à une régulation collective. Cette critique est résumée par la formule de l'écrivain Pierre Assouline : « Wikipédia est la seule encyclopédie au monde où n'importe qui peut écrire n'importe quoi ».
Par exemple, pendant près de dix mois, un article sur une mystérieuse île nommée Porchesia attira la curiosité de nombreux lecteurs, jusqu'au jour où un administrateur découvrit que l'île en question n'avait jamais existé, et supprima par conséquent ce texte. L'article est toutefois lisible sur le site Answers.com.
D’une façon plus générale, l’ouverture à tous du contenu de Wikipédia présente des risques liés à la véracité de ce contenu qui n'est pas systématiquement vérifié, de la distinction classique entre producteurs et consommateurs d'informations, et à l'absence de médiateur entre les deux. Ainsi, le journaliste Daniel Schneidermann questionne à propos des articles de Wikipédia : « Qui donc travaille dans l'ombre à la rédaction des versions définitives ? Quelle autorité supérieure arbitrera ? Mystères. Dans l'impossible rôle d'organe de référence, le successeur du Monde s'appellera peut-être Wikipédia. Mais il n'est pas certain que la démocratie gagne au change. »
L’absence de filtrage a priori et le filtrage non garanti a posteriori induit également le risque de voir des sectes ou des extrémistes utiliser Wikipédia pour faire de la propagande, ou bien des génies autoproclamés diffuser des informations farfelues. Daniel Schneidermann s'inquiète à ce sujet : « Mais cette séduction ne dissipe pas les inquiétudes que suscite l’émergence possible d’un nouvel organe de référence parfaitement anonyme, et donc vulnérable à toutes les manipulations. Qui aura le temps et l’énergie nécessaires pour actualiser, jour après jour, Wikipédia ? Les plus impliqués, les plus militants, les mieux organisés. »
Concernant le risque de voir se propager des informations erronées ou tendancieuses, cette interrogation se pose notamment à l'égard des élèves et des étudiants à la recherche de connaissances sur le Web. Le site Le Café pédagogique, consacré à l'actualité pédagogique sur Internet, déconseille aux enseignants l'utilisation de Wikipédia après la lecture de l'article consacré au maréchal Pétain (dans sa version de l'époque). Les termes employés sont les suivants : « Les outils de type Wiki peuvent permettre le travail collaboratif et supporter des démarches pédagogiques de qualité. Il n'en est pas de même pour le Wikipédia français qui sert trop souvent des intérêts éthiquement inconciliables avec l'École de la République », et « Le problème, c'est que Wikipédia n'est malheureusement plus un outil recommandable pour les enseignants. Le projet, fort sympathique au départ, sert des intérêts qui suscitent des interrogations. […] Tant que la clarté ne sera pas faite sur le fonctionnement de Wikipédia et le ménage dans ses articles, nous déconseillons aux enseignants de l'utiliser avec les élèves ».
La neutralité de point de vue (« décrire le débat plutôt que d’y participer ») peut être considérée comme une illusion ou un préjugé politique ou culturel. Mais son application incomplète est aussi critiquée. Ainsi, un biais systémique observé de façon récurrente est le caractère trop franco-centré de la Wikipédia en français.
Pour les sujets polémiques, le principe de neutralité de point de vue conduit à rechercher le consensus des éditeurs après un débat raisonné, plutôt que de l’éviter en employant des arguments d'autorité. Cette démarche risque de viser à atteindre le consensus social plutôt que la vérité, et de favoriser le relativisme, quitte à tolérer des discours infondés sur des sujets relevant de la science, ou du prosélytisme pour des sectes par exemple.
Une erreur est de croire que la neutralité est un critère incontournable ou premier de Wikipédia, puisque c'est la pertinence qui est décrite comme telle dans les pages Wikipédia :
Ainsi la pertinence est-elle première par rapport à la neutralité (qui peut même apparaître marginale), c'est-à-dire le savoir des experts, par opposition aux points de vue divers des non-experts :
Sébastien Blondeel remarque dans son livre consacré à l'encyclopédie : « Wikipédia présente tous les points de vue pertinents sur un sujet, sans en favoriser aucun, sans opter pour un compromis, sans verser dans le relativisme ni se soumettre à la dictature de la majorité ». Un autre commentateur écrit au contraire que les contributeurs se contrôlant mutuellement, Wikipédia favorise les points de vue dominants ou promus par des minorités actives, ce qui a pour effet l'absence de points de vue critiques dans des articles sur la religion.
Le vandalisme est pratiqué par un grand nombre de personnes qui exploitent la nature ouverte de Wikipédia pour en dégrader le contenu, le plus souvent de façon anonyme. Les actes de vandalisme semblent perçus comme un jeu par une partie de leurs auteurs. Plus rarement des modifications intempestives sont utilisées pour tester la réactivité des contributeurs, ainsi par exemple, le 17 octobre 2005, lors de l'émission en direct Le Grand Journal sur Canal+, la journaliste Ariane Massenet insérait des erreurs dans l'article consacré à Elvis Presley. Ou comme en juillet 2007 où des étudiants de Science-Po Paris mettent Wikipédia à l'épreuve.
Pour Boris Beaude cependant « les exemples à charge de Wikipédia » sont très peu variés, ce qui tendrait à démontrer que le vandalisme est très bien géré par la communauté des contributeurs.