Le sens des mots n'étant pas intangible, on ne sera pas étonné de savoir que dans le parler de l'ancien Comté de Foix, cortal désignait non pas une bergerie mais un enclos pour le bétail.
De même, le terme orri s'appliquait, dans les montagnes d'estive du haut Vicdessos dans l'Ariège, au site d’exploitation pastorale. Sens que l'on retrouvait d'ailleurs dans les estives du Conflent : ainsi la communauté de Cattla à Taurinya avait depuis le XVIe siècle une concession sur la montagne de Queraix « tant pour y placer son orry que pour y élever des barraques pour l'asile de ses bestiaux et des bergers ».
Il faut savoir que cortal, pris dans le sens de bergerie, était employé également dans les parlers occitans de l'Aude et de l'Hérault.
A Ginestas, près de Narbonne, un acte de louage des services d'un majoral (ou chef des bergers) de 1555 fait obligation à ce dernier de fournir l'huile pour l'éclairage du cortal tant que les troupeaux demeureront dans ce local, cette obligation devant cesser quand les bêtes seront à la jasse (c'est-à-dire au bercail).
Dans les Corbières audoises, d'anciens cortals, délestés de leur toiture de tuiles, dressent au ciel leur squelette de pierre, leur toiture retirée ou effondrée laissant voir deux ou trois rangées d'arcs maçonnés en plein cintre.
« Les cortals des alpages sont tombés en ruines », nous dit Jean Rigoli dans Histoire de Mentet. Chronique d'un village du Conflent. Bientôt, si l'on n'y prend garde, même les cortals de pierre encore debout (car les mieux construits et les plus récents), s'effaceront faute de mesures conservatoires.
Les grands cortals de pierre du Conflent, vestiges d'un des derniers stades du pastoralisme régional au XIXe siècle, méritent non seulement qu'on leur conserve leur nom catalan authentique mais aussi qu'on reconnaisse leur remarquable originalité architecturale et l'étonnant savoir-faire des artisans anonymes qui les ont édifiés.