Bombe à neutrons - Définition

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Aspect technique

La bombe à neutrons est un petit engin thermonucléaire fusion fission à radiations augmentées de type Teller-Ulam, dans lequel le flux de neutrons émis par la réaction de fusion nucléaire est volontairement libéré, au lieu d’être absorbé. Les miroirs à rayons X ainsi que l’enveloppe de la bombe sont faits de nickel ou de chrome, de telle manière que les neutrons puissent s’échapper. La conception est donc différente de celle des bombes au cobalt.

Le principal mécanisme provoquant les destructions est l’émission massive de neutrons. Contrairement à une idée répandue, la bombe à neutrons ne laisse pas forcément les infrastructures intactes, notamment les infrastructures civiles. En réalité, l’effet de l’émission de neutrons a un rayon d’action supérieur à celui de l’effet de souffle, contrairement à un engin thermonucléaire classique. L’essentiel des dégâts causés par une bombe N provenant de la radiation ionisante, et non de la chaleur ou du souffle, la puissance de la bombe exprimée en kilotonnes est donc peu représentative de son potentiel dévastateur. En effet, la puissance d’une bombe à neutrons avoisine généralement le kilotonne, soit approximativement 1/10e de la puissance de Little Boy, larguée sur Hiroshima le 6 août 1945, et 100 fois plus que la plus puissante bombe conventionnelle.

Une bombe à neutrons a besoin d’une quantité considérable de tritium, isotope radioactif de l’hydrogène ayant une demi-vie de 12,3 ans. Ceci rend impossible le stockage de ces armes sur de longues durées. Les bombes à neutrons utilisées par l’armée américaine par le passé étaient des variantes des engins nucléaires tactiques de type W70 et W79.

Utilisation

Lutte anti-électronique

Un missile anti-missiles Sprint

Les bombes N pourraient être utilisées comme armes anti-missiles stratégiques, en exploitant les propriétés du flux de neutrons pour endommager les composants électroniques des têtes nucléaires, ou comme armes tactiques employées contre des blindés, en exploitant les effets délétères du flux de neutrons sur les tissus organiques. L’armée américaine n’a déployé ces engins que pendant une courte période précédant la signature du traité ABM, au sein de ses missiles anti-missiles Sprint, en 1975.

Lutte anti-char

Les bombes à neutrons tactiques ont été conçues principalement pour tuer les soldats et personnels ennemis, dans un cadre de lutte anti-chars. Les blindés sont en effet relativement résistants à la chaleur et à l’effet de souffle produits par des armes nucléaires classiques, et des protections spéciales contre les armes NBC permettent de garder les systèmes protégés opérationnels, même dans les zones de retombées radioactives. En émettant de grandes quantités de radiations pénétrant facilement les blindages, la bombe N présente une efficacité améliorée contre les cibles blindées comparativement aux armes nucléaires classiques à fission.

Le flux de neutrons peut créer une importante radioactivité ayant une durée de vie brève dans l’environnement immédiat de l’explosion qui a été soumis à un flux neutronique intense. Les alliages utilisés dans les blindages peuvent développer des taux de radioactivité dangereux pendant 24 à 48 h. Si un char frappé à une distance de 690 m était immédiatement occupé par un nouvel équipage, celui-ci recevrait une dose de radiations létale en 24 h.

Un des principaux inconvénients de l'utilisation de la bombe à neutrons dans ce cadre est que seule une fraction des troupes irradiées est mise immédiatement hors de combat. Après de brèves périodes où ils seront atteints de nausées, les sujets ayant subi une exposition entre 5 et 50 Sv connaîtront un rétablissement temporaire d'une durée comprise entre quelques jours et quelques semaines (la « Walking Ghost Phase »), au terme duquel la mort survient de manière inéluctable. Or ces troupes, se sachant condamnées, pourraient se mettre à combattre de manière fanatique, sans égard pour leur vie.

Lutte anti-personnel

Un des problèmes de la lutte anti-personnel liée à l’utilisation de radiations est que pour rendre rapidement la cible inopérante, il faut utiliser des quantités de radiations largement supérieures à la dose létale. Ainsi, une dose de 6 Gy est traditionnellement considérée comme létale, elle tuera au moins 50 % des humains y ayant été exposés, mais les premiers effets mettront plusieurs heures à se faire sentir. Les bombes à neutrons sont conçues pour délivrer des doses de l’ordre de 80 Gy, ce qui permet d’avoir un effet neutralisant immédiat, en provoquant un coma, suivi de la mort en quelques heures. Une bombe N d’1 kt peut délivrer cette dose à l’équipage d’un char de type T-72 à une distance de 690 m, alors qu’un engin nucléaire classique aura une portée efficace réduite à 360 m. Pour une dose de 6 Gy sur la même cible, les portées respectives seront de 1 100 m et 700 m. Pour administrer la même dose à des soldats non protégés par un blindage, les portées seront respectivement de 1 350 m et 900 m. Le rayon d’action du flux de neutrons est alors supérieur à celui de l’effet de souffle et de l’effet thermique, et ce, même sur des cibles non protégées.

L’effet « propre » de la bombe à neutrons ne tuant que les soldats et laissant les infrastructures intactes, est également sujet à caution, étant donné que pour une bombe de 1 kt, à la portée efficace de 690 m, bien peu de structures civiles pourraient résister à l’effet de souffle. De plus, étant donné la faible portée efficace des radiations, il faudrait littéralement tapisser une zone sous les bombes pour stopper une attaque ennemie.

Utilisation pendant la guerre en Irak

À l’occasion du quatrième anniversaire de la troisième Guerre du Golfe, la chaîne de télévision Al-Jazeera a programmé une longue émission commémorative au cours de laquelle l’ancien général de la Garde Républicaine irakienne, Sayf ad-Din Rawi, fait mention du largage d’une bombe à neutrons par l'armée americaine sur l’aéroport international de Bagdad pendant l’invasion de l’Irak en avril 2003. Selon sa description, un matériel de nature inconnue avait en effet brûlé plusieurs soldats de la Garde Républicaine, tout en laissant intactes les infrastructures environnantes.

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