Après-coup - Définition

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Introduction

L’après-coup est un concept psychanalytique apparaissant chez Freud et que Lacan va mettre en exergue pour ce qui concerne la temporalité et la causalité psychique en psychanalyse. Freud emploie ce terme pour marquer le remaniement après coup par le psychisme d'événements passés, ce qui leur confère « un sens et même une efficacité ou un pouvoir pathogène ».

Sigmund Freud introduit le mot en 1896, pour désigner un processus de réorganisation ou de réinscription par lequel des événements traumatiques ne prennent une signification pour un sujet que dans un après-coup, c'est-à-dire dans un contexte historique et subjectif postérieur, qui leur donne une signification nouvelle. C'est en effet dans le contexte de ce que Jacques Lacan a nommé un « retour à Freud » que celui-ci introduit la traduction française de « l'après-coup » en donnant à ce terme en 1953, une extension dans le cadre de sa théorie du signifiant et d'une conception de la cure fondée sur le « temps pour comprendre ».

Les manières de traduire Freud

L'après-coup est une traduction dans le texte freudien de l'adjectif-adverbe nachträglich et du substantif féminin Nachträglichkeit : la base verbale du concept dans sa langue de départ en allemand est donc « tragen » qui signifie « porter » (comme dans l'Übertragung ou « transfert », lorsque la traduction française permet un recours en l'occurrence plus exact au verbe latin ferre). Le préfixe verbal « nach » veut dire « après »; mais l'origine de cet « après » est située « avant », comme l'exprimerait par exemple dans le registre affectif le sentiment de la « rancune » qui se traduit en allemand par le verbe nachtragen.

On peut donc l'interpréter simplement comme dans le langage courant, ce qui se fait "après coup" ou, comme un concept métapsychologique refaçonné par Lacan. Lacan en effet introduit une dimension de la temporalisation propre au « sujet », qui est celui de « l'inconscient »: dans l'acception lacanienne de ce mot - celui de « l'inconscient structuré comme un langage » - conception lacanienne structuraliste des années 1950, celles du « Symbolique » et du grand Autre. Dans les faits, Freud a parfois utilisé le terme dans le sens courant et parfois dans son sens élaboré. En France, avant l'intervention de Lacan, les psychanalystes utilisaient plutôt le terme dans son sens courant.

En anglais, la situation est plus compliquée et a parfois déterminé une vision très différente de la psychanalyse qui a aussi été l'objet des controverses entre la France et l'Outre-Manche, et plus avant entre kleiniens et freudiens. La traduction anglaise deferred (adj.), deferred action qui signifie tout simplement qu'une action est différée, est proche de l'acception commune contenue dans la dénomination française. Jean Laplanche a suggéré que cette première traduction anglaise pourrait ou devrait être avantageusement remplacée par le couple afterwards - afterwardsness « avec toute la théorie qu'il suppose » (Proposition de Jean Laplanche: il s'agit alors précisément de l'apport laplanchien au concept d'après-coup que suppose toute la théorie de la séduction généralisée).

L'apport de Jean Laplanche: « La Nachträglichkeit dans l'après-coup »

Pour Jean Laplanche, le concept d' après-coup est lié à la théorie de la séduction — négligée par Lacan : Laplanche re-situe la problématique freudienne du rapport de la réalité psychique à la factualité ou à la perception d'un fait dans le cadre désormais de la théorie de la séduction généralisée.
Dès lors, l'apport laplanchien de la théorie de la séduction généralisée et de son corrélat de la théorie de la traduction (à la suite de la lettre 52/112 de Freud à Wilhelm Fliess dans les débuts de la psychanalyse) s'avère essentiel: La traduction des messages énigmatiques compromis avec l'inconscient de l'autre (adulte: dans la sexualité infantile) élargit considérablement la notion d'après-coup à celle du message adressé par l'autre - alors que « l'après-coup  » lacanien comportait encore un sens interprétatif rétroactif de l'adresse à l'Autre, selon une conception de la « vérité » d'ailleurs assez influencée, à cette époque française de la psychanalyse, par l'idée de finitude, provenant de Heidegger. Cette « pensée du temps » qu'est, selon son auteur, la théorie de la séduction généralisée laisse entendre la « transcendance du transfert » où se croisent les deux grands concepts psychanalytiques de l' Übertragung pour le «transfert», et de la Nachträglichkeit pour « l'après-coup ».

« La théorie de la séduction est une pensée du temps. C'est une pensée, permettez-moi ce néologisme, "traductive" du temps. »

— J. Laplanche, Problématiques VI L'après-coup — La Nachträglichkeit dans l'après-coup (1990-1991)

  • « Notes sur l'après-coup » (1992). En relation directe avec les Problématiques VI publiées seulement en 2006, ces « Notes », basées sur une conversation de Jean Laplanche avec Martin Stanton, ont d'abord été publiées dans Jean Laplanche: Seduction, Translation and the Drives, London, ICA, Éd. John Fletcher & Martin Stanton, en 1992; elles furent ensuite augmentées et révisées par Jean Laplanche. On y trouve en conclusion une excellente définition de ce que Laplanche entend apporter, par la théorie de la séduction généralisée et la catégorie du message énigmatique, au concept de Freud de la « Nachträglichkeit dans l'après-coup », traduit en anglais par afterwardsness :
    « le concept de Freud d'après-coup contient à la fois une grande richesse et une certaine ambiguïté, en ce qu'il combine une direction rétrogressive et une direction progressive. Je veux rendre raison de ce problème des directions différentes, vers l'avant et vers l'arrière, en argumentant que, dès le début, il y a quelque chose qui va dans la direction du passé vers le futur, de l'autre à l'individu en question, de l'adulte vers le bébé, que j'appelle l'implantation du message énigmatique. Ce message est alors retraduit, en suivant une direction temporelle tour à tour rétrogressive et progressive (en accord avec mon modèle de traduction-détraduction-retraduction). »

    — J. Laplanche, Entre séduction et inspiration: l'homme, p. 66

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