En 1948, l'année même de la publication du premier Rapport Kinsey, une commission de l'American Statistical Association, comprenant des statisticiens tels que John Tukey, condamne la méthodologie de Kinsey, notamment quant à son choix des personnes interrogées. Tukey déclare : « Il aurait mieux valu trois personnes au hasard qu'un groupe de 300 personnes sélectionnées par M. Kinsey. » La critique porte principalement sur la surreprésentation de certains groupes : 25% de détenus ou anciens prisonniers, et 5% de prostitués masculins.
En même temps, un psychologue comme Abraham Maslow reproche à Kinsey de ne pas avoir pris en compte le « biais » dû au fait que les personnes interrogées sont exclusivement des volontaires. Autrement dit, les données émanent uniquement de personnes volontaires pour parler de leur vie sexuelle, à une époque où ce sujet est tabou pour la plupart des Américains. Avant même la publication des Rapports Kinsey, le Dr Maslow a examiné ces données. Sa conclusion est que l'échantillonnage de Kinsey n'est pas représentatif de l'ensemble de la population.
Au XXIe siècle, des activistes religieux, le docteur Reisman et S. Brinkmann, ont affirmé que Kinsey était l'auteur d'actions inexcusables et révoltantes, comme l'utilisation, dans ses recherches, de séquences filmées d'abus sexuels sur des enfants. Les allégations de Reisman ont été déboutées par la justice américaine. Les ouvrages de Brinkmann sont édités par un organe de publication « fidèle au magistère de l'Eglise universelle », qui lutte contre la libération sexuelle et se signale par son homophobie.
Cinquante ans après les publications des Rapports Kinsey, James H. Jones, professeur d'histoire à l'Université de l'Arkansas, publie en 1997 une biographie de Kinsey que le quotidien Le Monde du 15 mars 1998 qualifie d'iconoclaste et qui, selon l'auteur de l'article, remet en question et l'homme et ses découvertes :
« Alfred Kinsey devient le grand-prêtre de la sexologie. Aux Etats-Unis et en Grande- Bretagne, son rapport fera autorité pendant plus de quarante ans. Jusqu'à cette biographie iconoclaste de James Jones, publiée en novembre 1997, qui révèle le jardin secret du « bon » Alfred Kinsey. Car derrière le « Dr Jekyll » se cache un « Mr. Hyde »: un homosexuel sadomasochiste cohabite avec le scientifique respecté, travailleur infatigable, bon père, bon époux. »
— Laurent Zecchini
Le quotidien publie aussi le même jour une interview de Edward Laumann dans laquelle le sociologue dit entre autres :
« Kinsey présume qu’il y a une sorte de signification fondamentale de l’homosexualité dans le fait que quelqu’un qui est pour l’essentiel hétérosexuel, mais qui a eu une expérience homosexuelle, est en réalité homosexuel, ce qui me paraît très contestable… Il a sélectionné des gens qui étaient prêts à parler du sexe selon leurs propres attirances sexuelles. L’un des principaux résultats de son rapport a été de normaliser des attitudes sexuelles très variées. Ce faisant il a donné une sorte de permission générale faisant disparaître réticences et tabous… »
— Selon le professeur Edward Laumann, sociologue de l'université de Chicago, interviewé par Laurent Zecchini