Alexandre Grothendieck - Définition

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Introduction

Alexandre Grothendieck en 1970.

Alexandre Grothendieck, né le 28 mars 1928 à Berlin, est un mathématicien apatride qui a passé la majorité de sa vie en France. Lauréat de la médaille Fields en 1966, refondateur de la géométrie algébrique, il est considéré comme l'un des plus grands mathématiciens du XXe siècle.

Biographie

Sacha Schapiro, son père, est un anarchiste militant né près de Bryansk, ville située en Ukraine peuplée de Juifs hassidim. Après avoir passé dix ans en prison pour sa participation à plusieurs soulèvements anti-tsaristes, il rejoint Berlin où il rencontre sa femme, Hanka Grothendieck, protestante hambourgeoise qui partage l'idéal anarchiste. Elle est alors mariée à Johannes Raddatz : le fils de Sacha et Hanka s'appelle tout d'abord Alexander Raddatz. Hanka divorce en 1929, Sacha reconnaît le petit Alexander mais n'épouse pas Hanka.

Hanka et Sacha fréquentent les cercles radicaux. En 1933, la montée du nazisme les contraint à quitter l'Allemagne pour l'Espagne où ils participent, en 1936, à la guerre civile au côté du Frente Popular. Alexandre est alors placé dans la famille de Wilhelm Heydorn, un pasteur protestant, maître d'école près de Hambourg. En 1939, les Heydorn, considérant qu’il est dangereux pour un enfant juif de rester en Allemagne, demandent à ses parents de le reprendre. Les retrouvailles sont de courte durée : Sacha est bientôt emprisonné au camp du Vernet dans l'Ariège. En 1942, il est déporté via Drancy à Auschwitz où il meurt la même année. En 1940, Hanka et Alexandre sont emmenés au camp de Rieucros, en Lozère ; le jeune Alexandre est autorisé à quitter le camp pour étudier à l’école de la ville voisine de Mende. De 1942 à 1944, Alexandre est caché au Chambon-sur-Lignon, à « la Guespy », une maison d'enfants du Secours suisse, où étaient également cachés beaucoup de jeunes Juifs. Il est alors élève au Collège Cévenol où il passe son baccalauréat à la fin de la guerre.

Étudiant

À la fin de la guerre, Alexandre et sa mère s'installent près de Montpellier, où ils vivent modestement grâce à la bourse d'études d'Alexandre. Inscrit en mathématiques, il fréquente très peu les amphithéâtres, préférant travailler seul à la définition du concept de volume (comme il l'explique dans Récoltes et semailles, ses premières recherches, en même temps qu'elles l'initieront à la solitude du chercheur, le mèneront à redéfinir l'intégrale de Lebesgue).

En 1948, il décide de poursuivre des études en mathématiques à Paris. Il frappe à la porte d'André Magnier, inspecteur général de mathématiques et membre de l'Entraide universitaire de France, qui lui accorde une bourse. Le professeur Henri Cartan l'admet dans ses séminaires à l'École normale supérieure (ENS) et le dirige vers Jean Dieudonné. Alexandre fait connaissance avec l'élite des mathématiciens français de l'époque. Il quitte l'atmosphère parisienne et se rend à Nancy pour préparer sa thèse auprès de Jean Dieudonné et Laurent Schwartz.

Mathématicien

Il est attaché de recherche du CNRS de 1950 à 1953. Des six articles qu'il rédige pendant cette période, il en choisit un, « Produits tensoriels topologiques et espaces nucléaires », pour soutenir sa thèse. Suite à la présentation, à Paris, par Laurent Schwartz, des travaux d'Alexandre, celui-ci intègre le groupe de Nicolas Bourbaki où il restera plusieurs années. Père d'un enfant, il peine à trouver un emploi. Sa situation d'apatride l'empêche d'accéder aux emplois de la fonction publique et la naturalisation ne peut être obtenue qu'après avoir accompli le service militaire : il refuse et doit donc trouver un moyen de gagner sa vie. Il quitte la France pour travailler, en tant que professeur invité, au Brésil de 1953 à 1954 (il est alors chargé de recherche du CNRS), puis à l’Université du Kansas en 1955 et à l’Université de Chicago. Aux États-Unis, il rencontre Justine, une étudiante en mathématiques avec qui il aura un fils. C'est au cours de cette période qu'il change de sujet d'étude.

Après des travaux remarquables en analyse fonctionnelle, il se tourne vers la géométrie algébrique. Il révolutionne ce domaine en établissant de nouvelles fondations et introduit la notion de schéma, en collaboration avec Jean-Pierre Serre. Les deux chercheurs correspondent énormément et leurs styles, bien que très différents, se complètent et portent leurs fruits.

Il revient à Paris en 1956 en tant que maître de recherche du CNRS, et se penche sur la topologie et la géométrie algébrique. Il produit alors une nouvelle version du théorème de Riemann-Roch et met en évidence le lien caché entre les propriétés analytiques et topologiques d'une variété.

En 1957, le décès de sa mère le plonge plusieurs mois dans un état dépressif. L'année suivante, il décide de terminer ses travaux inachevés et réalise quelques percées spectaculaires. Il rencontre également sa future femme, Mireille, avec qui il aura trois enfants.

Il est accueilli dans le tout nouvel Institut des hautes études scientifiques (IHES), consacré à la recherche en physique théorique et en mathématiques. Il y est rejoint par Jean Dieudonné, René Thom, Louis Michel et David Ruelle, et entreprend de construire une théorie de la géométrie algébrique.

Entre 1960 et 1967, il rédige les quatre premiers chapitres (divisés en huit volumes) des Éléments de géométrie algébrique, en collaboration avec Jean Dieudonné.

Lauréat de la médaille Fields en 1966, il refuse de se rendre en URSS pour la recevoir.

Écologiste radical

Un voyage au Viêt Nam en 1967, le printemps de Prague et Mai 68 le poussent vers les milieux contestataires jusqu'à ce qu'il démissionne de l'IHES en 1970, protestant contre le financement partiel de l'institut par le ministère de la Défense.

Suite à sa démission, il fonde avec Pierre Samuel et Claude Chevalley le groupe écologiste et politique Survivre et vivre dans le but de propager ses idées antimilitaristes et écologistes.

Grothendieck obtient un poste d'attaché de recherche au Collège de France où, plutôt que d’enseigner les mathématiques, ce qu’on attend de lui, il fait un cours intitulé « Faut-il continuer la recherche scientifique ? », question fondamentale, mais qui dérange. Son affectation n’est pas renouvelée : « une majorité de professeurs du Collège de France a voté contre, une première dans l'histoire de la vénérable institution. ».

Il divorce et fonde avec Justine Bumby, une thésarde rencontrée aux États-Unis, une communauté près de Paris. En 1973, Grothendieck obtient un poste de professeur à l’université de Montpellier, poste qu'il occupe jusqu'à sa retraite en 1988. Le couple déménage dans un village de l'Hérault et expérimente la contreculture. Justine Bumby donne naissance à un enfant et le quitte peu de temps après. Il écrit quatre livres de 1980 à 1995 : La longue marche à travers la théorie de Galois, Esquisse d'un programme, À la poursuite des champs et Les Dérivateurs. Le plus célèbre de ses ouvrages est Récoltes et semailles, une autobiographie d'un millier de pages, écrite vers 1985, qui ne trouve pas d'éditeur. Il écrit que sa vie a été traversée par trois passions : les femmes, les mathématiques et la méditation.

Il refuse, en 1988, le Prix Crafoord qu'il devait partager avec Pierre Deligne, invoquant que :

  • [son] salaire de professeur […], est beaucoup plus que suffisant pour [ses] besoins matériels ;
  • les chercheurs de haut niveau auxquels s'adresse un prix prestigieux comme le prix Crafoord sont tous d'un statut social tel qu'ils ont déjà en abondance et le bien-être matériel et le prestige scientifique, ainsi que tous les pouvoirs et prérogatives qui vont avec ;
  • il s’est éloigné du milieu scientifique depuis 1970 et la récompense porte sur des travaux vieux de vingt-cinq ans.

Il rejette également une Festschrift, un livre rédigé en son hommage à l'occasion de son soixantième anniversaire, persuadé que son œuvre a été mal comprise.

En 1990, il lègue l'ensemble de ses travaux mathématiques et s'installe dans les Pyrénées. Depuis, il y mène une vie de quasi-ermite.

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