Gratte-ciel: des tours toujours plus hautes !

Publié par Adrien le 25/07/2004 à 23:32
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1 - Introduction

Le mot skyscraper, qui veut dire gratte-ciel en anglais, était à l'origine un surnom donné au grand mât d'un bateau. Aujourd'hui le mot est exclusivement employé pour se rapporter à un immeuble (donc habitable) bien plus haut que la moyenne, communément plus haut que 500 pieds (152 mètres).

La hauteur des gratte-ciel n'est pas quelque chose d'exactement quantifiable, plusieurs définitions existant. Dans la suite du dossier je me baserai sur la hauteur structurelle, généralement reprise comme hauteur officielle et définissant le point le plus haut de la structure du bâtiment. Cette hauteur est différente de la hauteur totale (atteinte avec la classique antenne, pouvant ajouter jusqu'à une centaine de mètres) et de la hauteur accessible (point le plus haut que l'ont peut atteindre par soi-même).

Voici un aperçu des gratte-ciel existant dépassant les 300 mètres (via www.skyscraperpage.com):


Jusqu'au 19ème siècle, les bâtiments de plus de six étages étaient rares. Il était inconcevable de monter quotidiennement autant d'étages en escalier. En outre, la pression de l'eau courante n'était pas suffisante pour s'élever à plus de 15m. Le développement de l'acier, du béton armé, des pompes à eau et l'apparition de l'ascenseur ont par la suite rendu possible la construction de bâtiments bien plus hauts, pouvant dépasser les 300 mètres.

Les gratte-ciel sont apparus pour la première fois dans les régions de New York et de Chicago vers la fin du 19ème siècle. Le grand incendie de Chicago, qui détruisit une grande partie du centre ville, a permis l'essor de cette nouvelle approche architecturale permettant de faire face au prix élevé du terrain. A ce moment les gratte-ciel étaient uniquement fonctionnels, l'aspect extérieur passant au second plan.

Le Home Insurance Building, le premier "gratte-ciel":


C'est à partir du 20ème siècle qu'une approche esthétique se développa, le gratte-ciel présentant avant tout une vision de prestige que recherchaient les investisseurs et architectes, avec la renommée de posséder le plus haut gratte-ciel du monde et allant même jusqu'à éclairer le bâtiment la nuit. Mais le gratte-ciel reste un bâtiment fonctionnel, accueillant des bureaux loués pour rentabiliser la construction.

La hauteur des gratte-ciel semble ne pas connaître de limite, chaque nouveau matériau inventé pouvant être mis à profit pour la construction d'un nouveau bâtiment susceptible de posséder le record. Les 40m de hauteur des premiers buildings paraissent bien dérisoires aujourd'hui, plusieurs gratte-ciel actuels dépassant les 400m, voire même 500m, mais l'innovation et la volonté humaine est encore en route, préparant des monstres approchant voire dépassant le kilomètre de hauteur.

La Tour Bionique, devant mesurer plus de 1200 mètres:


Les images présentes dans ce dossier proviennent pour chaque building concerné des bureaux d'architectes, des sociétés de construction, de tourisme ou de particuliers. Nous les remercions de nous avoir permis leurs publications.

2 - Les gratte-ciel dans le monde

Incontestable pionner dans la construction des gratte-ciel, les Etats-Unis possèdent aujourd'hui un bon nombre des plus hauts bâtiments de la planète. La ville de News York compte par exemple 5137 gratte-ciel (hauteur supérieure à 152m).

Vue de New-York:


Mais le prestige a changé de continent, l'Asie est devenu la région actuellement la plus active dans la construction de nouveaux buildings. Hong Kong en Chine est désormais la première ville au monde en nombre de gratte-ciel avec pas moins de 6943 bâtiments de plus de 152m, reléguant New York à la seconde place.

Vue de Hong-Kong:


La 3ème ville à posséder le plus grand nombre de gratte-ciel est encore asiatique: Singapour, avec 3443 bâtiments. Vient ensuite Istanbul en Turquie avec 2087 buildings puis Sao Paulo au Brésil avec un total de 1956 gratte-ciel.

Vue de Singapour:


L'Europe n'a pas la fièvre des gratte-ciel, possédant quelques hauts bâtiments mais en petit nombre et répartis dans les plus grandes villes. Aucun bâtiment d'Europe n'apparaît dans les 50 plus hauts buildings au monde. Le plus haut bâtiment européen se situe en Allemagne avec 259m, il s'agit de la Commerzbank Tower à Francfort et fut inauguré en 1997.

Le plus grand gratte-ciel de France est la Tour Montparnasse à Paris qui culmine à 210 mètres et dont la construction a été achevée en 1973. La plupart des tours de bureaux du pays sont concentrées dans le quartier des affaires de La Défense à Paris.

3 - Mise en œuvre d'un gratte-ciel

La conception

Lors de la décision du lancement d'un gratte-ciel et après les premières définitions du cahier des charges, le client effectue un appel d'offre auprès d'architectes dans le monde entier. Le projet est en effet d'une telle ampleur que rares sont les architectes qualifiés. Le maître d'œuvre choisit ensuite parmi plusieurs propositions celle qui lui convient le mieux, l'Empire State Building a ainsi été choisi sur un panel de 17 projets différents.

L'Empire State Building:


Les principales prérogatives de l'architecte sont l'intégration de son projet dans l'environnement, la maximisation de l'espace intérieur, la circulation dans le building et le respect des règles de sécurité. Le bâtiment doit par exemple posséder une particularité esthétique, permettre une rentabilité maximale, être suffisamment confortable et résister aux forts vents, aux incendies et aux séismes.

Les fondations

Un gratte-ciel pèse plusieurs centaines de milliers de tonnes réparties sur une petite surface au sol. Les fondations du bâtiment doivent pouvoir le soutenir et lui permettre de résister au vent et aux tremblements de terre. Ainsi la nature du terrain joue un rôle essentiel, le building doit avoir un point d'ancrage solide. En fonction de la nature du terrain, il peut être nécessaire de chercher en profondeur des couches solides aptes à soutenir le bâtiment, les fondations pouvant alors atteindre les 100m de profondeur.

Manhattan est constitué d'un sol entièrement rocheux, idéal pour la construction et permettant le maintient de tous les buildings construits. Pour les tours du World Trade Center la roche permettant de supporter l'édifice était située à une vingtaine de mètres de profondeur.

Mais malheureusement la nature du terrain est parfois surestimée, et la forte croissance du nombre de buildings dans certaines villes engendre d'autant plus de problèmes. C'est ainsi que le sol de Shanghai en Chine s'affaisse sous la masse de ses bâtiments. Plus de 3000 immeubles de plus de 17 étages y sont construits engendrant un affaissement du terrain de 1.5cm par an en moyenne, allant jusqu'à 3cm par an dans le quartier financier. Les environs du gratte-ciel Jin Mao de 421m connaissent un affaissement annuel de 6.3cm. La structure du métro et de certains bâtiments est déjà affectée, ce qui ne devrait pas s'arranger avec la construction ou planification actuelle de 3000 autres immeubles et également du plus haut centre financier mondial, avec 492m de hauteur et 101 étages.

La ville de Shanghai, telle qu'elle apparaîtra avec le World Financial Center (au centre):


Le sous-sol de Shanghai est composé de terre molle sur une épaisseur de 300m, formée de sable et de limon accumulés par le fleuve Yangtsé depuis plus d'un millénaire. L'affaissement non homogène du terrain a déjà causé l'effondrement de plusieurs immeubles, et au rythme actuel Shanghai passera sous le niveau de la mer dans 50 ans. Des mesures limitant entre autre la construction des gratte-ciel sont en cours d'élaboration, visant à faire passer le rythme moyen d'affaissement annuel à 0.5cm.

La Structure

La structure des gratte-ciel diffère sensiblement de celle des bâtiments standards. Les bâtiments d'environ 4 étages ne sont soutenus que par leurs murs là où les gratte-ciel doivent adopter une armature squelettique, les murs étant alors fixés dessus. Les bâtiments de plus de 40 étages doivent en plus adopter une configuration leur permettant de résister au vent, qui peut exercer une force considérable.

Tous les gratte-ciel ne sont pas semblables, leur structure pouvant être très différente de l'un à l'autre. Les matériaux sont de plus choisis en fonction des disponibilités dans le pays de construction, et les méthodes de fabrication ont beaucoup évoluées avec le temps: la découverte de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques permettant de construire toujours plus haut.

Le Home Insurance Building, construit en 1884:


L'amélioration des liaisons entre les matériaux a permis le passage d'une quinzaine d'étages à la fin du 19ème siècle à une quarantaine dans les années 30. L'ossature en acier est utilisée jusqu'aux années 50, le béton armé faisant alors son apparition et permettant la conception de structures avec un noyau central.

Le noyau central est l'élément assurant la rigidité de l'édifice, il parcourt le bâtiment sur toute sa hauteur et contient généralement les ascenseurs. Les efforts exercés par le vent sont retransmis au noyau par l'intermédiaire d'éléments horizontaux positionnés dans le plancher des étages. Les gratte-ciel à noyau central peuvent atteindre une hauteur d'une cinquantaine d'étages tout en réduisant l'emprise au sol. Le doublement voire le triplement de la structure centrale a ensuite permis d'atteindre des hauteurs d'environ 70 étages.

Pour les gratte-ciel plus hauts plusieurs types de structures existent. Le World Trade Center fut par exemple construit sur la base d'un noyau central additionné d'une ossature extérieure métallique. L'ossature extérieure entoure la totalité de l'édifice et est reliée aux éléments horizontaux des planchers par des amortisseurs viscoélastiques, permettant d'absorber les effets du vent. Cette structure extérieure étaient préfabriquée puis solidarisée avec des boulons à haute résistance. Le bâtiment a ainsi été conçu pour résister à des vents exerçant une force sur les façades supérieure à 200 kilogrammes par mètre carré. Le déplacement du dernier étage n'est alors que de 28cm.

Le World Trade Center:


Un autre système permettant de dépasser les 100 étages est la structure à ossature extérieure triangulée, le John Hancock Center à Chicago est construit sur ce modèle. Des renforts triangulés sont ajoutés à la structure extérieure et permettent de renforcer la stabilité de l'ensemble.

Le John Hancock Center:


Une autre structure permettant de dépasser les 100 étages est l'assemblage d'un ensemble de minces tours, permettant une plus forte solidité, surtout au niveau de la base. La Sears Tower de Chicago est construite sur ce principe.

La Sears Tower:

Les façades

Les façades d'un building sont les reflets du style du bâtiment. Au début du 20ème siècle les architectes préféraient laisser bien visibles les poteaux ou autres structures fonctionnelles, montrant la maîtrise de la technique. Des poteaux puissants et espacés montraient par exemple le contrôle d'énormes efforts. La couleur était aussi employée pour mettre en valeur certaines parties du bâtiment au détriment d'autres.

A cette époque le métal et la pierre étaient les principaux matériaux utilisés pour le revêtement des façades, puit vinrent la céramique pour des teintes plus claires et des alliages de bronze (utilisés par exemple sur le Seagram construit en 1958 à New York) permettant des effets de miroitement. Par la suite les éléments structuraux ont été cachés et les façades furent recouvertes de revêtements lisses et uniformes, constitués de verre et d'aluminium, conçus par feuilletage pour être de bons isolants et allant jusqu'à créer des effets de lumière suivant la position du Soleil.

La tour Seagram:

La Construction

La construction d'un building sort de l'ordinaire. Les techniques de construction ne sont pas les même que celles employées pour des bâtiments plus modestes: le matériel est fixé sur le building et monte avec lui, on a donc un déplacement en hauteur du chantier. Ainsi les grues sont fixées soit sur le noyau central, soit à l'extérieur sur des échafaudages. De plus les matériaux de construction doivent être acheminés en haut du bâtiment au fur et à mesure.

Construction de l'Empire State Building:


Construction du World Trade Center:


Construction du Taipei 101:


Dans le cas d'un bâtiment à noyau en béton, un coffrage itinérant est installé, s'appuyant au fur et a mesure de l'avancement sur ce qui est déjà réalisé. Le béton est ensuite coulé à l'intérieur du coffrage. La vitesse d'avancement est d'au maximum un étage par jour.

4 - Les aspects sécuritaires et économiques

Les mesures anti-sismiques

Les gratte-ciel les plus hauts ne possèdent pas de noyau central en béton armé, la raison vient du manque de souplesse de ce type de matériau. Il est nécessaire d'avoir un minimum d'élasticité permettant aux buildings de cette dimension d'absorber les vibrations sans casser, ce qui est fourni entre autre par les matériaux métalliques. Des tests sismiques sont réalisés lors de la construction pour valider le choix de la structure. Un des tests principaux est la création d'une maquette pouvant atteindre 10m de hauteur et subissant toutes sortes de simulations sismiques.

Le plus surprenant système anti-sismique actuellement installé sur un gratte-ciel est certainement celui de la tour Taipei 101 à Taiwan (508 mètres pour 101 étages). Il s'agit d'une boule d'acier de 6m de diamètre et 800 tonnes suspendue entre le 88ème étage et le 92ème étage. Sa masse et son amplitude maximale de 1.5m permettront de contrebalancer les effets des oscillations dues aux vents violents des ouragans et aux séismes, l'amortissement prévu étant de 30 à 40%. Le dispositif est installé de manière à être visible par les visiteurs, il sera possible d'observer par une verrière vitrée les mouvements de la boule, mise en valeur par une couleur dorée.

Taipei 101 et sa boule anti-secousses:

Les protections anti-incendies

Comme pour tous les bâtiments, la protection contre les incendies est primordiale dans un gratte-ciel, mais prend ici une toute autre ampleur. Lors de la conception du bâtiment, les pompiers sont consultés et ont un avis capital sur l'élaboration du projet. Le bâtiment doit en outre se trouver à une distance inférieure à 3km d'une caserne de pompiers. Les étages du bas de l'immeuble doivent rester accessibles de l'extérieur, et pour les étages se trouvant à plus de 50m du sol un système de colonnes humides doit être mis en place.

Les fumées toxiques, qui représentent la majorité des décès dans un bâtiment un feu, doivent entrer le moins possible en contact avec les personnes. Des systèmes d'évacuation des fumées sont donc installés, surtout au niveau des cages d'escaliers. Des zones refuges sont de plus mises en place pour protéger localement les personnes ne pouvant pas être évacuées.

La présence de sprinklers, des arroseurs automatiques situés dans le plafond, permettent de contenir l'incendie. Les matériaux du bâtiment sont également choisis en fonction de leur résistance au feu et à la chaleur, la règle communément admise est une résistance de 2h à 400°C. De manière générale les éléments porteurs doivent être incombustibles et les éléments non porteurs doivent pouvoir résister à leur propre poids. Les matériaux utilisés pour les façades sont choisis de sorte a empêcher la montée des flammes aux étages supérieurs.

L'un des plus efficaces matériaux résistant au feu est l'acier: il ne brûle pas et garde ses propriétés porteuse jusqu'à une température de 600 à 800°C. De plus, une fois la température critique atteinte il ne se casse pas mais se déforme lentement, et les dégâts causés par le feu sur des structures métalliques ne sont pas trop difficiles à réparer.

Des protections supplémentaires contre le feu existent, comme par exemple la peinture intumescente qui constitue un film de protection de 0.5 à 3mm d'épaisseur et se dilate sous l'effet de la chaleur jusqu'à une épaisseur de 1cm, protégeant ainsi la surface qu'elle recouvre pendant 3 heures.

L'aspect économique

Rares sont les entreprises pouvant s'offrir un gratte-ciel de manière propre, c'est pourquoi elles préfèrent se regrouper pour le financer. Les seules entreprises à posséder leur propre gratte-ciel sont généralement les banques elles-mêmes. Un building moyen coûte plus de 350 millions de dollars, en guise d'exemples la tour Jin Mao de 421m construite en 2002 à Shanghai a coûté plus de 625 millions de dollars, et les tours Petronas de Kuala Lumpur ont coûté 1.6 milliards de dollars. Les gratte-ciel ne seraient pas construits sans retour sur investissement, ce qui prouve leur rentabilité. Ainsi le plutôt modeste Lever Building (94m pour 21 étages) construit en 1952 à New York avait un amortissement calculé sur 25 ans.

Le Lever Building:


Après la construction l'immeuble possède un coût de fonctionnement assez élevé lié à l'entretien et aux charges, qui sont plus importants que pour les autres édifices. La climatisation coûte par exemple plus cher à cause de différences climatiques plus fortes. Il est également nécessaire d'acheminer les déchets vers le bas et l'eau vers le haut, ce qui dans une ville standard est réalisé par les services publics.

De nos jours un gratte-ciel aux normes et régulièrement entretenu ne perd pas de sa valeur. Elle peut même au contraire augmenter si sa position géographique est stratégiquement déterminée, l'élévation de la valeur de l'environnement se répercutant sur le loyer des bureaux.

5 - La vie dans un gratte-ciel

Aménagement intérieur

La dimension du bâtiment implique des avantages et des inconvénients. Si on a la chance de se trouver dans un étage en hauteur, la vue est exceptionnelle. Mais la hauteur implique également une condamnation des fenêtres au delà d'un certain niveau, le vent et surtout la différence de pression atmosphérique imposant un total isolement.

Vue du World Trade Center:


Le dimensionnement des étages, très vastes surtout à la base du building (suivant les bâtiments), à pour conséquence un problème de luminosité. Avec une organisation standard de bureaux, seuls ceux proches des fenêtres auraient un éclairage naturel. Ainsi les bureaux ne sont pas distinctement tracés, les étages sont composés de vastes espaces pouvant recevoir plusieurs dizaines de personnes (voire plus).

Les gratte-ciel sont composés en grande partie de bureaux, viennent ensuite les commerces. Accueillant plusieurs milliers voire plusieurs dizaines de milliers de personnes chaque jour ils sont désormais conçu comme une véritable ville, ou plutôt centre ville, avec restaurants, cinémas, bibliothèques, etc... Mais le soir venu ils se vident et ne redeviennent vivant que le lendemain matin.

La quantité de personnes pouvant être accueillie dans les gratte-ciel impose une organisation hors norme. Par exemple les parkings sont composés d'un grand nombre de places, se trouvant sur plusieurs niveaux de sous-sols et par mesure de sécurité, non situé juste en dessous du bâtiment mais tout autour, éloigné des fondations.

Le déplacement dans un gratte-ciel

Les déplacements à l'intérieur du building sont également pris en compte, les entrées le matin et sorties le soir devant être suffisamment étalées dans le temps pour permettre une bonne circulation et garantir la sécurité. Les ascenseurs d'un gratte-ciel sont des systèmes vitaux, personne ne pouvant monter ou descendre des dizaines d'étages par les escaliers. Comme on l'imagine, plus le bâtiment est haut et plus l'organisation des ascenseurs est compliquée: ils doivent pouvoir acheminer les personnes à n'importe quel étage en un temps réduit.

Une des solutions retenue est la création d'ascenseurs directs et d'ascenseurs omnibus. Les ascenseurs directs permettent d'atteindre rapidement des paliers déterminés, un gratte-ciel en comportant 2 ou 3. Les ascenseurs omnibus ne servent qu'à desservir des portions du gratte-ciel, entre deux paliers. Ainsi pour se rendre à un étage il faut dans un premier temps prendre l'ascenseur direct se rapprochant le plus, puis prendre l'ascenseur omnibus jusqu'au niveau souhaité. Les ascenseurs du World Trade Center furent conçus sur ce principe.

Les tours de Petronas, qui comprennent 76 ascenseurs dont 29 à grande vitesse:


Une des contraintes imposées pour les ascenseurs est un encombrement au sol réduit. Les cages d'ascenseurs parcourant toute la hauteur du building, un encombrement trop important se retrouve multiplié par autant d'étages, faisant perdre de précieux mètres carrés sur la surface totale. Dans cet objectif d'optimisation de la surface au sol, certains gratte-ciel utilisent des ascenseurs à deux niveaux constitués de deux cabines superposées et desservant deux étages en même temps.

Avec toutes ces mesures, en 5 minutes 25% de la population de l'immeuble peut être transportée, et le temps mis pour atteindre son étage ne dépasse pas les 100 secondes.

Entretien

Les dimensions extrêmes des gratte-ciel imposent des dispositifs hors norme pour le moindre système d'entretien. Ainsi le nettoyage des vitres est de plus en plus réalisé par des systèmes automatiques, bien que les nettoyeurs humains existent encore. L'évacuation des déchets s'effectue généralement par des ascenseurs dédiés.

6 - L'historique des records: de 1884 à 1930

1884 - Le père des gratte-ciel: le Home Insurance Building (Chicago)



L'architecte William Le baron Jenney a conçu à Chicago ce qui fut admis comme étant le premier gratte-ciel: le Home Insurance Building. La structure de dix étages et 42m de hauteur fut construite en 1884-1885 et détruite en 1931. Principalement constitué d'acier et de briques, c'était le premier bâtiment à posséder un squelette en métal lui permettant en plus de son exceptionnelle hauteur d'avoir une grande proportion de fenêtres.

Le building était trois fois moins lourd qu'il ne l'aurait été avec une conception standard en pierres, à tel point que sa construction fut temporairement stoppée par les services officiels pour permettre des analyses complémentaires de sûreté. Le Home Insurance Building est un précurseur architectural de ce qui sera appelé plus tard l'Ecole de Chicago.

1908 – Le Singer Building (New York)



Construit de 1906 à 1908, le Singer Building fut le plus haut gratte-ciel du monde jusqu'en 1909. Il est composé de 47 étages pour une hauteur de 187m. Il fut démoli en 1968 pour être remplacé par le One Liberty Plaza.

1909 - Metropolitan Life Insurance Building (New York)



Achevé en 1909, le Metropolitan Life Insurance Building resta le plus haut building du monde avec 50 étages et 241m jusqu'en 1913. Il fut démoli dans les années 50.

1913 - Woolworth Building (New York)



Le Woolworth Building fut construit en 1913 par l'architecte C.Gilbert dans un style néogothique inspiré par le parlement de Londres. Il a été autrefois le siège de Frank Woolworth, propiétaire d'une chaîne de magasins. Il fut le plus haut bâtiment du monde jusqu'en 1930, avec 241m et 60 étages.

1930 - Bank of Manhattan (New York)



Construit en 1929-1930 le Bank of america établira un nouveau record de hauteur avec 71 étages et 282m. Il ne tiendra pas longtemps son record car dépassé la même année par le Chrysler Building.

Le Bank of America s'appelle aujourd'hui le Trump Building après le rachat du bâtiment par la société The Trump Company en 1995.

1930 - Dépassement des 300m: le Chrysler Building (New York)



Le Chrysler Building, financé on n'en doute pas par la célèbre firme automobile Chrysler, fut construit de 1928 à 1930. Il arracha au Bank of Manhattan le titre de gratte-ciel le plus haut du monde culminant à 320m pour 77 étages. Il s'agit de la première construction habitable à dépasser les 300m et la hauteur de la tour Eiffel.

Ce building reste encore majestueux, et pour certains le plus beau de Manhattan. L'architecte William Van Alen a fait de nombreuses références à l'industrie automobile de l'époque. Le plus flagrant exemple est la flèche couverte d'écailles évoquant des calandres d'automobiles, mais cet ornement n'aurait pourtant jamais dû voir le jour.



A l'origine, le sommet du bâtiment devait se terminer par un dôme classique. Mais au moment de couvrir l'édifice Chrysler s'est aperçu que sa construction ne serait pas la plus haute de New York, et donc du monde, concurrencée par un autre building en construction. L'architecte trouva la solution avec cette fameuse flèche d'écailles si propre à Chrysler. Mais ce fut peine perdue, le Chrysler Building ne détiendra ce record qu'une seule année, détrôné par l'Empire State Building en 1931.

L'histoire de ce gratte-ciel a toujours été liée à celle de son seul alter ego, l'Empire State Building. Les deux buildings ont toujours été comparés, étant incontestablement les deux plus majestueux de New York, mais le Chrysler Building ayant pour lui une forme élancée perçant le ciel et brillant de mille feux la nuit tombée.

7 - L'historique des records: de 1931 à aujourd'hui

1931 - La longévité: l'Empire State Building (New York)



En 1931 la construction de l'Empire State Building fut achevée. Ce géant de 381m et dépassant les 100 étages avec ses 102 niveaux restera le plus haut bâtiment du monde pendant plus de 40 ans. Ce n'est qu'en 1972 que les tours jumelles du World Trade Center lui prennent le record, mais l'Empire State Building redeviendra la tour la plus haute de New York après la destruction de ces dernières dans les attentats du 11 septembre 2001. L'Empire State Building tient son nom en référence à The Empire State (l'État empire), le surnom de l'État de New York.



Le pylône-antenne qui le surmonte a été installé pour servir de point d'amarrage aux Zeppelins, moyen de transport transatlantique en vogue à l'époque. Avec cet ajout la hauteur du building atteint les 449m.

L'histoire du building fut assez mouvementée, la crise ayant ruinée le marché de l'immobilier, la moitié de ses 4000 bureaux restent inoccupés en 1933. Mais heureusement le film King Kong lui donnera rapidement une renommé mondiale, et dans les années 40 les bureaux seront tous loués. Le 28 juillet 1945 un bombardier B-25 Mitchell s'écrasa sur la face nord de l'immeuble au niveau du 79e étage. Le bâtiment résistât au choc malgré d'importants dommages, l'incendie fut éteint en 40 minutes mais 13 personnes périrent dans l'accident.



Au 102ème et dernier étage se trouve un observatoire permettant d'avoir une vue impressionnante sur New York. L'éclairage du sommet de l'édifice varie en fonction des fêtes et de l'actualité.

L'Empire State Building est selon l'American Society of Civil Engineers (l'association américaine des ingénieurs en génie civil) l'une des sept merveilles du monde moderne.

1972 – Le World Trade Center (New York)



Situé au sud de Manhattan, le World Trade Center était un complexe de sept immeubles d'affaires dont la construction a été réalisée entre 1969 et 1977 par l'architecte Minoru Yamasaki.

Les deux tours emblématiques du World Trade Center (WTC1 et WTC2) devinrent lors de leur achèvement en 1972 (WTC1) et 1973 (WTC2) les plus haut gratte-ciel du monde et resteront les plus hauts gratte-ciel de New York (417 et 415 mètres, 110 étages) jusqu'à la destruction de l'ensemble du site lors des attentats du 11 septembre 2001.



La structure des tours était assez originale, utilisant en plus du noyau central une armature métallique composée de 240 colonnes d'acier entourant chacun des deux bâtiments. Ceci, en plus de 10 000 amortisseurs inclus dans la structure, permettait une bonne résistance de l'édifice au vent.

En 1993 les tours du World Trade Center subirent une première attaque terroriste: le 26 février 1993 un camion chargé d'explosifs explosa dans le parking souterrain de la tour Nord, créant un cratère de 30m et détruisant 4 niveaux, tuant 6 personnes et blessant un millier d'autres. Cette attaque ayant créé de graves dommages, les deux tours restèrent fermées pendant plusieurs mois.

Les attaques du 11 septembre 2001 détruisirent l'ensemble du site. Les tours avaient été conçues pour résister à l'impact d'un avion de type Boeing 707, mais les appareils utilisés le 11 septembre 2001 étaient des Boeing 767, bien plus gros. Lors des chocs ils endommagèrent considérablement la structure interne des édifices et les incendies qui suivirent, alimentés par le kérosène des appareils, engendra une trop forte température au niveau des structures métalliques si bien que les bâtiments s'effondrèrent en seulement quelques dizaines de minutes.

Les tours du World Trade Center ne gardèrent pas le titre de plus haut gratte-ciel du monde bien longtemps, détrônées en 1973 par la Sears Tower de Chicago.

1973 – La Sears Tower (Chicago)



La Sears Tower fut construite entre 1970 et 1973, elle est une œuvre de l'architecte Bruce Graham.

Dépassant le World Trade Center, elle devint la plus haute tour du monde avec 442 mètres et 110 étages. Les deux mats de télévision qui la surmonte lui confèrent une taille totale de 520 mètres. Elle est à ce jour l'immeuble le plus haut des États-Unis.

1998 – Les tours Petronas (Kuala Lumpur)



Les tours jumelles Petronas de l'architecte Cesar Antonio Pelli sont deux gratte-ciel de Kuala Lumpur en Malaisie qui ont été inaugurés en 1998, après une construction de 6 ans. Du haut de leurs 452 mètres et 88 étages, ces tours sont devenues les plus hautes du monde. Une passerelle en acier relie les deux tours à 170 mètres du sol au niveau des 41ème et 42ème étages. Le coût du projet s'est élevé à 1.6 milliards de dollars.



La société Petroliam Nasional Berhad, plus connu sous le nom de Petronas, est devenue associée et co-développeur du projet. Pour le siège social de Petronas le bâtiment devait être identifiable comme typiquement Malaisien: le style architectural du bâtiment était alors défini.

Une polémique éclata sur la hauteur du bâtiment. L'élément supérieur de la structure étant considéré par certains comme un ajout au même titre qu'une antenne, alors que ses concepteurs y voient une flèche partie intégrante de la structure. Sans cet élément les tours Petronas ne seraient pas les plus hautes du monde, devenant moins grandes que la Sears Tower de Chicago. Il semblerait qu'au final cet élément soit considéré comme une flèche et donne ainsi raison à ses concepteurs.

2004 - Taipei 101 (Taiwan)



Taipei 101 est en cours d'achèvement dans la ville de Taipei à Taiwan, devenant le plus haut gratte-ciel du monde. L'édifice a été réalisé par le groupement d'architectes C.Y. Lee & Partners Architects. La tour est capable d'abriter 12 000 personnes, culmine à 508 mètres et compte 101 étages divisés en huit sections. Parmi ses 34 ascenseurs certains parviennent au 90e étage en 39 secondes.



Entre autres curiosités, une boule d'acier de 800 tonnes a été suspendue au 88e étage de la tour. Elle a une amplitude d'oscillation pouvant aller jusqu'à 1,5 mètre, permettant d'amortir jusqu'à 40% du mouvement de l'édifice lors de vents violents dus aux ouragans, d'un tremblement de terre ou d'une collision avec un aéronef léger. L'aménagement de cette boule et de sa chambre a été traité comme une œuvre de design.



Lors d'une forte secousse sismique survenue pendant le chantier en 2002, deux grues mal arrimées ont chuté du 56e étage, tuant cinq personnes. La construction ne fut cependant pas remise en cause.

8 - Les constructions en cours et à venir

2007 - Le World Financial Center (Shanghai)



Prévu pour être le plus haut gratte-ciel du monde, ce bâtiment situé à Shanghai ne le sera finalement pas. Cette tour aura 101 étages et sa hauteur de 492m sera inférieure à l'actuel Taipei 101, qui mesure 508m. Le chantier de 800 millions de dollars a commencé en 1997 mais la crise financière asiatique a suspendu les travaux. La fin de la construction est désormais fixée à 2007.

Le World Financial Center sera situé à proximité de l'actuel building Jin Mao, 421m. Le cercle creusé en haut du building n'a pas qu'un seul but esthétique, il permettra également une diminution des efforts causés sur la structure par le vent.

2008 – Le Burj Dubaï (Dubaï)



Cette tour, dont la construction a débutée en janvier 2005 à Dubaï aux Emirats arabes unis, devrait devenir sans conteste le Gratte-ciel le plus haut du monde en 2008 avec une hauteur de 705 mètres (certaines sources disent 800 mètres, la hauteur officielle n'a pas été communiquée) et détrônant alors la toute jeune Freedom Tower de New York.



Le Burj Dubaï abritera une superficie totale de 500.000 mètres carrés et possèdera le plus grand centre commercial du monde, des bureaux, hôtels et appartements de luxe. Les architectes se sont inspirés des influences culturelles de la région dans la réalisation de l'édifice, la géométrie de la base de la tour évoquant une fleur de désert locale avec ses pétales. Cette géométrie permet également de répartir au mieux les efforts causés par la masse de l'ouvrage sur la structure et le sol.

Le maître d'œuvre est la compagnie immobilière EMAAR Properties. La conception du building revient à l'agence Skidmore, Owings & Merrill architectural de Chicago. La construction, d'un coût de plus de 850 millions de dollars, est assurée par un consortium mené par le groupe sud-coréen Samsung Electronics.

2008 à 2010 - La Freedom Tower (New York)



La Freedom Tower ("Tour de la Liberté") est la plus haute tour du complexe devant remplacer les tours jumelles du World Trade Center, détruites lors des attentats du 11 septembre 2001. Une première version de la tour fut proposée par les architectes Daniel Libeskind et David Childs. L'architecture particulière de l'ouvrage était conçue pour rappeler la Statue de la Liberté levant son flambeau au ciel. L'architecture de la Freedom Tower a été modifiée en juin 2005 pour lui permettre de résister à d'éventuelles attaques terroristes.

La Freedom Tower a été redessinée afin de satisfaire les exigences sécuritaires induites par la prévention anti-terrorisme. Le risque majeur d'une attaque terroriste à New York réside, selon les experts, en l'explosion de voitures ou camions piégés. C'est ainsi que la tour s'est retrouvée éloignée d'une petite vingtaine de mètres de la route West Street, la distance la séparant de la chaussée passant de 8 mètres à 27. Elle se voit également pourvue d'un piédestal cubique d'une hauteur de 61 mètres, constitué en béton et métal, conçu pour encaisser les explosions.


L'ancien projet de la Freedom Tower

La forme globale de la tour a considérablement changé. Son profil est plus classique, fini donc l'allure générale en flèche, bien qu'un biseautage au niveau de ses arrêtes restera visible. La nouvelle architecture doit permettre d'accroître la sécurité de l'ensemble. La hauteur du dernier étage de la structure sera de 415 mètres, tout comme la hauteur des précédentes Twin Towers.

Au dessus de son socle de 61 mètres, ce sont 69 étages de bureaux qui seront construits. La surface habitable totale restera inchangée en comparaison de l'ancien projet, avec 240.000 mètres carrés.

Symbolisme oblige, le gratte-ciel sera rehaussé d'une imposante flèche, amenant la hauteur totale à 541 mètres. Cette tour est en effet le gratte-ciel des symboles. Sa hauteur de 541 mètres, soit 1776 pieds, fait référence à l'année de l'indépendance des Etats-Unis. La disposition des bâtiments permettra d'obtenir l'ensoleillement des emplacements des deux anciennes tours tous les 11 septembre, aux heures exactes des attentats et de l'effondrement des deux bâtiments. Ces emplacements sont laissés libres de toute construction. Enfin, la date de la pose de la première pierre est intervenue le 4 juillet 2004, date anniversaire de l'indépendance des Etats-Unis.

2009 – Le Menara Jakarta (Jakarta)



La construction de ce bâtiment a commencée le 15 avril 2004 à Jakarta en Indonésie. Il sera achevé en 2009 et mesurera alors 558m.

2015-2020 – La Bionic Tower (Shanghai)



Voici probablement le plus futuriste des projets actuels, devant voir le jour dans une quinzaine d'années. Il s'agit de la Bionic Tower (la Tour Bionique) et ne mesurera pas moins de 1228 mètres de hauteur pour 300 étages et 100 000 personnes. Il s'agit bien ici d'une ville verticale, les logements, commerces et bureaux se trouvant réunis dans la tour. Autant dire qu'à ce niveau le plus grand des buildings actuels paraîtra ridicule.



Son coût devrait être de 15 milliards de dollars et sa conception est l'œuvre des 2 architectes espagnols Maria Rosa Cervera et Javier Pioz. L'édifice se composera de deux parties: la tour en elle-même, et des bâtiments de tailles moyennes avec des lacs artificiels et des jardins répartis tout autour sur un diamètre d'un kilomètre.



Selon ses concepteurs, cette super structure sera conçue pour résister aux incendies et aux séismes. Sa solidité viendra de l'imitation des assemblages à la fois solides et souples de la nature, et de l'utilisation de nouveaux matériaux.

9 - Conclusion

Ce dossier touche maintenant à sa fin. Comme vous avez pu le constater, la montée des gratte-ciel n'a jamais cessé depuis la fin du 19éme siècle. Des nouvelles techniques de fabrication, associées à de nouveaux matériaux, ont toujours permis aux architectes d'imaginer des bâtiments à chaque fois plus ambitieux, et la volonté de l'homme donne les moyens de les réaliser.

Aujourd'hui les gratte-ciel les plus hauts atteignent les 500m, mais d'autres sont en préparation défiant toute imagination. Peut-être que dans 100 ans nos petits-enfants regarderont les gratte-ciel de la fin du 20ème siècle de la manière dont nous percevons actuellement les premiers hauts bâtiments de la fin du 19eme siècle...

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