Le QWIP(Quantum Well Infrared Photodetector : photodétecteur infrarouge à puits quantiques) est, comme son nom l'indique, un détecteur de rayonnement infrarouge. La gamme de longueurs d'onde couverte actuellement (2005) s'étend de 3 µm à plus de 30 µm. Ce type de détecteur est sensible au rayonnement thermique émis par tout corps dont la température n'est pas nulle (loi de rayonnement du corps noir, introduite par Max Planck).
Le QWIP est un détecteur quantique : l'absorption du rayonnement incident se fait par l'intermédiaire d'une transition électronique. Cette transition a lieu entre le niveau fondamental du puits quantique et le premier niveau excité. Si un seul niveau confiné existe, la transition a lieu entre le niveau fondamental et le continuum d'états délocalisés.
Les règles de sélection régissant l'interaction entre rayonnement électromagnétique et électrons conduisent à deux caractéristiques très importantes de ce composant :
Le QWIP est un détecteur refroidi. En effet, les transitions électroniques mises en jeu peuvent aussi être excitées par les phonons, c’est-à-dire par les vibrations du réseau cristallin. Pour réduire ces vibrations il faut refroidir le détecteur. La température de fonctionnement dépend de la longueur d'onde. Par exemple, pour un QWIP détectant à 9 µm, la température de fonctionnement est proche de 77 K (-196 °C, température de l'azote liquide).
Les QWIPs sont particulièrement bien adaptés pour les applications d'imagerie rapide (plus de 50 images par seconde), longue distance (plusieurs kilomètres), nécessitant une grande résolution et une grande sensibilité. Voici une liste non exhaustive des applications envisageables :
En France, les QWIPs sont promus principalement par le laboratoire de recherche de la société THALES, ancienne Thomson. Des caméras infrarouge à base de QWIPs sont réalisées en France par Thales et Cedip. Sofradir est un autre acteur important dans le domaine infrarouge aussi bien en France qu'à l'étranger.
Au niveau mondial, les détecteurs à puits quantiques sont étudiés et réalisés aux États-Unis, Allemagne, Suède, Israel, Canada, Australie.
La réalisation d'un détecteur à puits quantiques nécessite quatre étapes principales :
La couche active du détecteur est une hétérostructure à base de semiconducteurs. Aujourd'hui les matériaux les plus utilisés sont les alliages AlGaAs (arseniure de gallium et aluminium) et InGaAs (arseniure de gallium et indium). La structure est obtenue en réalisant une succession périodique de couches de nature chimique différente. Par exemple, on peut réaliser une alternance AlGaAs - GaAs - AlGaAs - GaAs - ... Dans cette structure les couches AlGaAs ont une affinité moins grande pour les électrons. Ces derniers seront confinés dans les couches GaAs, qui vont ainsi constituer des puits. Les couches AlGaAs jouent le rôle de barrières de confinement. Les électrons sont introduits dans la structure en dopant certaines couches avec un élément donneur (le silicium).
Les puits quantiques sont pris en sandwich entre deux couches de semiconducteur dopé, jouant le rôle de contacts électriques. Ces contacts permettent d'appliquer une différence de potentiel au composant et récupérer un courant.
La conception de la structure consiste à choisir l'épaisseur, ainsi que la composition des différentes couches, le nombre de période, le dopage des puits, l'épaisseur et le dopage des contacts, etc.
Exemple : une structure dont le pic d'absorption est centré à 9 µm correspond à des puits GaAs larges de 5 nm environ (soit 18 couches atomiques). Les barrières AlGaAs contiennent 25 % d'aluminium et leur épaisseur est de 40 nm environ. Un détecteur comprend une quarantaine de puits quantiques.
La réalisation de la couche active est faite par une technique d'épitaxie, telle l'épitaxie par jets moléculaires (EJM). Cette technique emploie des substrats mono-cristallins, ayant la forme d'une galette (diamètre de 5 à 10 cm, épaisseur 0.5 mm), sur lesquels on dépose des atomes, couche atomique par couche atomique. C'est le substrat qui impose l'organisation spatiale des atomes déposés. La croissance cristalline a lieu sous vide (10^-10 atmosphères) et à haute température (600 °C).
Avantages de la technique :
Une fois la couche active obtenue, on procède à la réalisation des matrices de détecteurs. Le travail est effectué en salle blanche. La qualité des matrices (pourcentage de pixels utilisables) dépend directement de la qualité de l'atmosphère et des produits chimiques utilisés. À titre d'exemple, est considérée comme impureté critique tout ce qui dépasse une taille de 1 µm.
Plusieurs procédés technologiques sont nécessaires :
Pour la réalisation des matrices il faut maîtriser la gravure de motifs submicroniques (0.3-0.7 µm).
La réalisation de la matrice se fait en plusieurs étapes :
On obtient ainsi des matrices au format TV (640x512 pixels) ou TV/4 (384x288 pixels). Les pixels ont des dimensions allant de 15 à 25 µm.
La matrice de détecteurs est connectée à l'aide de billes d'indium à une matrice similaire, composée de petits circuits de lecture en silicium. Ces circuits permettent de polariser le détecteur et de recueillir le signal. L'opération d'assemblage est appelée hybridation.
L'hybride obtenu est monté dans un petit cryostat (rappel : le détecteur fonctionne à basse température), lequel est ensuite couplé à une petite machine à froid, fonctionnant sur le principe de la compression-détente. L'ensemble cryostat-machine à froid forme le bloc détecteur. Celui-ci est très compact : une douzaine de centimètres pour quelques centaines de grammes.
Le bloc détecteur est intégré dans une caméra, qui contient aussi l'optique permettant de former l'image et l'électronique de lecture et de traitement.
Lorsqu'on parle de performances, il faut distinguer entre performances du détecteur et performances de la caméra. Nous parlerons ici des performances du détecteur.
Les performances électro-optiques d'un détecteur infrarouge sont évaluées à l'aide des grandeurs physiques suivantes :
On rencontre aussi d'autres grandeurs physiques, comme par exemple la NETD (Noise Equivalent Temperature Difference : différence de température de scène correspondant à un signal équivalent au bruit). Faisant intervenir des paramètres externes au détecteur, elle ne peut pas être utilisée pour estimer les performances d'un détecteur.