Puits provençal - Définition

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Le puits provençal est un échangeur géothermique qui assure la fonction de rafraîchissement estival ou hivernal de l'air ventilé. Ce système est aussi parfois appelé puits canadien en référence à la fonction de préchauffage hivernal de l'air ventilé.

Le puits provençal est un mode de préchauffage/climatisation utilisé dans l'habitat passif.

Principe

Exemple d'utilisation d'un puits provençal dans une maison passive
Exemple d'utilisation d'un puits provençal dans une maison passive

Le puits provençal consiste à alimenter un bâtiment en air frais en le faisant circuler auparavant dans un conduit enterré qui selon les conditions climatiques le refroidit ou le préchauffe en utilisant l'inertie thermique du sol. L'air sert de fluide caloporteur tandis que le tube sert d'échangeur thermique tout en canalisant l'air jusqu'au bâtiment.

Principalement utilisé comme système de climatisation naturelle, le puits provençal est également utilisé l'hiver pour préchauffer l'air entrant ou pour maintenir hors gel une habitation.

Il est basé sur le simple constat que la température sous terre :

  • est différente de celle de l'air en surface.
  • sa variation peut se modéliser comme la somme de deux oscillations l'une annuelle (été/hiver) et l'autre journalière (jour/nuit).
  • sa variation subit une plus faible amplitude par rapport à sa moyenne annuelle d'autant plus que la profondeur augmente.
  • sa variation journalière, à faible profondeur, est déphasée dans le temps par rapport à celle de l'air en surface du fait de l'inertie thermique de la terre.

Ces constats sont à mettre en parallèle avec les données suivantes :

  • la profondeur du sol à partir de laquelle la température est considérée comme hors gel est d'environ 60 cm en plaine sous les latitudes françaises métropolitaines.
  • la température moyenne saisonnière du sous-sol à 2 mètres de profondeur se rapproche davantage de la température de confort (18-26°C) l'été que l'hiver (en plaine sous les latitudes françaises métropolitaines).
  • les variations des températures saisonnières été/hiver n'interviennent pratiquement plus à partir de 10/15 mètres de profondeur où la température reste quasi-constante tout au long de l'année.

En pratique, le tube sera enterré au moins à 1,5 mètres de profondeur et à ce titre :

  • le tube est à l'abri du gel.
  • la variation de température journalière à cette profondeur est déphasée par rapport à celle de la surface.
  • la température moyenne mensuelle à cette profondeur varie au cours des saisons.

Le procédé étant passif et basé sur la capacité thermique du sol, un puits provençal peut être contre-productif pour préchauffer/rafraîchir à certaines parties de la journée et/ou de l'année par rapport à l'air extérieur. Pour éviter cela, une entrée d'air en prise directe et une vanne (manuelle ou électrique) est recommandée pour court-circuiter le puits.

Utilisant le principe d'inertie thermique, le système est d'autant plus efficace que les amplitudes thermiques extérieures journalières sont fortes ou qu'il fait face à des évènements climatiques extrêmes de courte durée (ex : blizzard à condition que l'entrée d'air soit protégée de la neige).

Les éléments du puits

L'échangeur thermique : le tube

Le tube constitue un échangeur thermique entre un flux d'air et le sol (ou tout autre matériau ayant une capacité thermique massique importante).

  • Le circuit d'air peut être fermé en formant une boucle partant sous terre pour revenir au bâtiment. Avantageux sur le plan thermique, il reste efficace même par temps humide. Toutefois, il ne contribue pas au renouvellement de l'air intérieur et nécessite alors un second circuit d'air pour l'habitation.
  • Le circuit d'air peut être ouvert en provenant de l'extérieur. L'été, l'air humide venant de l'extérieur, précédant un orage par exemple, en fonction du taux d'hygrométrie et de la température peut se condenser sur les parois du tube. Le changement d'état (liquéfaction) de la vapeur d'eau en gouttelettes s'opérant à température constante en restituant de l'énergie[1] réduit les performances du puits limitant la baisse de température du flux d'air (par rapport à un flux sec). Lors de la construction une pente constante du tube sera nécessaire afin de l'évacuer et d'éviter d'avoir de l'eau stagnante. Il est a remarquer qu'un puits provençal est peu efficace pour les climats offrant des saisons chaudes et humides.

Le tube doit répondre à différentes contraintes en fonction de son environnement :

  • Résister à la corrosion, le tube étant en contact en permanence avec de l'air et de l'eau.
  • Résister à l'écrasement du fait de son enfouissement, de son immersion ou d'un éventuel passage d'un engin en surface.
  • Résister à de légères déformations pour accompagner un mouvement de terrain sans rompre.
  • Ne pas être poreux, ni perméable afin d'éviter toute pollution provenant de l'intérieur ou de l'extérieur.
  • Résister à un traitement chimique ou thermique en cas de pollution accidentelle ou d'une éventuelle contamination du flux d'air par un agent présent dans le tube.
  • Avoir une paroi interne lisse afin de faciliter l'évacuation des condensats.
  • Être abordable financièrement pour rendre le projet de construction viable.

Si le tube n'est pas d'un seul tenant, les jointures entre les différentes sections doivent également répondre à ces caractéristiques.

La conductivité thermique du matériau composant le tube n'affecte que très peu le rendement thermique du système[2]. Les tubes métalliques déconseillés car sensible à la corrosion n'apportent guère plus que des tubes en PVC ou polyéthylène par exemple.

La circulation de l'air

Le fonctionnement du puits provençal repose sur la circulation d'air dans le tube qui peut s'opérer:

  • passivement soit par une surpression en entrée de tube en la positionnant par exemple du côté des vents dominants et/ou en créant une dépression en sortie de tube en utilisant une cheminée provençale[3] (cheminée solaire). Ces techniques ne consomment pas d'énergie mais le fonctionnement du puits dépend alors du vent et de l'ensoleillement. Le dimensionnement des prises d'air et du tube devra être adapté et la régulation de l'air se fera manuellement par obstruction (vanne, diaphragme etc..). Ce procédé peut servir à maintenir hors-gel un bâtiment dépourvu d'alimentation électrique par exemple.
  • ou mécaniquement grâce à une ventilation motorisée adaptée. Toutefois, l'obligation légale d'installer une ventilation mécanique contrôlée (VMC) dans les maisons d'habitation, dans bon nombre de pays européens[4], fait qu'une ventilation dédiée soit rarement installée puisqu'une VMC peut jouer ce rôle. Lors de son installation la puissance de la VMC doit tenir compte des pertes de charge supplémentaires générées par le puits. Le schéma de circulation d'air dans une maison correspondant à une entrée d'air et une sortie d'air uniques est celui de la VMC double flux.

La flux d'air a vocation à circuler dans le bâtiment :

  • Le bâtiment n'est constitué que d'une seule pièce, l'entrée du puits ira directement l'alimenter. S'il s'agit d'une habitation, une VMC simple flux suffit.
  • Le bâtiment est composé de plusieurs pièces et/ou d'étages, le flux d'air entrant devra être acheminé et réparti dans les pièces. Le puits provençal nécessitant de clore hermétiquement toutes les autres entrées d'air du bâtiment, une VMC double flux dans le cas d'une habitation sera utile pour garantir un renouvellement d'air constant et uniforme dans tout le bâtiment et notamment dans la cuisine - surtout si la plaque de cuisson fonctionne au gaz. Un tel système nécessite l'installation d'une bouche d'aspiration ou d'insufflation dans presque toutes les pièces. Dans ce cas, les caractéristiques de l'installation devront être alors étudiées pour ne pas propager les sons d'une pièce à l'autre ou le ronronnement de la ventilation.

Le flux d'air frais entrant faisant office de fluide caloporteur, les gaines distribuant l'air dans les pièces devraient être isolées afin que la chaleur/fraîcheur ne soit pas perdue dans les combles ou dans le sous-sol, par exemple, au cours de son cheminement.

L'investissement dans une VMC double flux présente un autre avantage au niveau des gains thermiques que d'être l'extension d'un puits provençal. Elle permet la mise en place d'un échangeur air/air qui utilise la chaleur/fraîcheur de l'air sortant pour chauffer/rafraîchir l'air entrant. Tout comme pour le puits l'échange n'est pas toujours utile et une canalisation et une vanne (by-pass) permettant de court-circuiter cet échangeur sont plus que conseillées.

Si les législations en vigueur imposent généralement un taux de renouvellement d'air minimum dans les maisons, en revanche il n'est pas interdit d'en augmenter la fréquence notamment l'été. La ventilation mécanique choisie devra idéalement être réglable et suffisamment dimensionnée pour que sa consommation électrique n'augmente pas de façon disproportionnée.

Les protections contre les pollutions

Le renouvellement de l'air intérieur d'une maison ou d'un local d'habitation permet de lutter contre les pollutions internes et le puits provençal en limitant les pertes thermiques y contribue. Les polluants évacués par le renouvellement ont diverses formes notamment gazeuse. Ils peuvent être d'origine humaine et liés à la respiration comme le dioxyde de carbone ou d'origine naturel comme le radon. Ce dernier n'est pas le seul gaz qui se dégage du sol mais il représente un danger sanitaire en étant plus lourd que l'air et surtout un contaminant radioactif. Naturellement présent sur tous les continents et dans toutes les régions, il l'est d'avantage dans les zones granitiques, volcaniques ou uranifères et les autorités sanitaires nationales en dressent régulièrement les cartes[5]. Du fait de ses caractéristiques il tend à s'accumuler dans les dépressions, les caves ou les endroits peu ventilés et est cancérigène pour les poumons avec un risque augmentant avec sa concentration dans l'air respiré. Une attention particulière dans la conception du puits provençal doit être donnée au niveau de l'imperméabilité à ce gaz du tube et de ses éventuelles jointures afin qu'ils n'en deviennent pas un diffuseur dans le bâtiment. Toutefois un puits en fonctionnement dilue ces éventuelles infiltrations gazeuses avec de l'air frais amenant les concentrations du radon à un seuil acceptable (avec une radioactivité en dessous de 150 Bq/m³[6]). Le problème se pose lors d'un arrêt prolongé ou d'une utilisation par intermittence du puits, ce gaz plus dense que l'air peut s'être infiltré lentement et accumulé dans le tube qu'il vaudrait mieux aérer grâce à un by-pass le rejetant directement à l'extérieur sans passer par le bâtiment, avant sa remise en marche. Une autre solution consistant à inverser les flux d'air conduit à contaminer les tubes d'alimentation avec les rejets d'air de la maison. Il est à remarquer que ceci peut se produire naturellement si la ventilation du puits est simplement arrêté sans que ce dernier ne soit obstrué.

L'éventuelle proximité d'une zone industrielle classée[7] prévoit normalement un plan de prévention en cas de catastrophe incluant des mesures de confinement dont l'arrêt des ventilations. Dans ce cas, qu'elle soit naturelle ou mécanique la ventilation doit pouvoir rapidement être arrêtée. Dans le premier cas, le puits provençal et éventuellement son by-pass doivent pouvoir être facilement obstrués. Dans le second cas, un interrupteur facilement accessible, un fusible ou un disjoncteur différentiel dédié sur le tableau électrique doit permettre un arrêt rapide du système. Après une catastrophe industrielle notamment chimique une attention particulière doit être prise avant la remise en marche du puits dont le tube peut avoir accumulé des gaz lourds toxiques (ex:dichlore).

S'il n'est pas protégé par une crépine, et des filtres le puits provençal devient la porte d'entrée des nuisibles pour l'homme (rongeurs, reptiles, insectes, arthropodes, pollens...) qui pour certains sont vecteurs de maladie sinon d'ennuis. Les protections sont installées de l'extérieur à l'intérieur avec des mailles de plus en plus fines. Les filtres les plus fins, contre les pollens par exemple si l'on souhaite s'en protéger, demandent plus d'entretien et doivent être changés plus souvent sous peine d'être colmaté et de boucher l'arrivée d'air. En fermant l'accès à ces bêtes, l'accumulation de matière organique et végétale est limitée en empêchant les excréments, le stockage d'aliments, l'amoncèlement de terre ou de matières végétales pour la construction de nids. Les filtres empêchent également le tube d'"aspirer" les feuilles et la poussière volant dans l'air. Sans cela, l'accumulation au cours du temps de tous ces éléments mélangés à de l'eau de condensation peut former un substrat pour des champignons, moisissures et/ou bactéries. Les mauvaises odeurs suite à la remise en marche d'un puits provençal après un arrêt prolongé trahissent la présence de matières en décomposition ou en fermentation.

L'entretien et la prévention demeure toutefois le meilleur moyen d'éviter toute pollution tout au long de la vie de l'installation. L'entretien courant consiste au remplacement et/ou au nettoyage des filtres sous peine de voir augmenter les pertes en charge en même temps que la consommation électrique de la centrale pour les installations mécanisées. La prévention passe par un examen du tube à une fréquence régulière, triennal par exemple, afin d'inspecter sa propreté et son intégrité surtout dans les zones de perte de charge, comme dans les coudés.

Mise en œuvre et ingénierie

Le rendement de l'échangeur

Le rendement de l'échange thermique entre le flux d'air et le sol dépend de :

  • La nature du sous-sol : la conductivité thermique des sols varie fortement en fonction de la présence d'eau et de sa constance. Dans les cas de sources ou de rivières souterraines le rendement est d'avantage fonction de la température et de la pérennité de ces flux, la capacité thermique massique de l'eau étant nettement supérieure à celle des composants du sol. De fortes précipitations en été peuvent nettement améliorer le rendement du puits après plusieurs semaines de sècheresse par exemple.
  • Le dimensionnement du tube et le débit d'air : le rendement souhaité fait l'objet d'un calcul impliquant la température du sol, la surface d'échange, le débit ainsi que la matière des tuyaux (l'air circule plus vite au centre du tuyau que sur les parois à cause des frottements) et donc, le résultat est la différence souhaitée entre les températures à l'entrée et à la sortie du tuyau : une trentaine de mètres semble être la limite raisonnable.
  • La profondeur de l'enfouissement du tube : plus on descend dans le sous-sol, plus la température est constante. Il faut trouver un compromis entre rendement et coût du terrassement, ce compromis est généralement trouvé entre 1 et 2 mètres de profondeur.
  • Le taux d'hygrométrie du flux d'air dans le tube.

La pose du tube

  • Prévoir l'évacuation des condensats grâce à une pente constante (2% par exemple) de préférence dans le sens du flux d'air.
  • Prendre garde au poinçonnage du tube lié à la présence de corps dur enfoui à son contact direct, en utilisant un remblai tamisé, une terre sans cailloux ou un lit de sable par exemple. Il est à remarquer qu'un lit de sable, couramment utilisé pour éviter le poinçonnage des tubes, draine l'eau environnante et ne conserve pas l'humidité, ce qui ne facilite pas les échanges thermiques entre la terre et le tube.
  • Supprimer les poches d'air sous les renflements du tube lors de son installation afin d'éviter une éventuelle concentration de radon à sa proximité.
  • En présence d'un terrain inondable afin de lutter contre la poussée d'archimède, arrimer le tube peut éviter sa rupture liée à une forte déformation.
  • le tube doit être suffisamment éloigné du bâtiment à préchauffer/climatiser ou d'un autre tube monté en parallèle. Servant d'échangeur thermique, le tube utilisera la masse voisine du bâtiment en produisant l'inverse de l'effet attendu. Pour les mêmes motifs, une installation exploitant plusieurs tubes en parallèle devra suffisamment les espacer les uns des autres (de 1 à 2 mètres) afin qu'ils ne rentrent pas en concurrence, augmentant de fait le coût d'une telle installation.
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