Familistère - Définition

Intérieur du familistère en 2005

Étymologiquement " lieu de réunion des familles ", construit sur le modèle du phalanstère de Charles Fourier, le Familistère de Guise est un haut lieu de l’histoire économique et sociale des XIXe et XXe siècles.

Dessin du site industiel avec les forges à droites et les batiments de vie à gauche

En 1846, l'industriel Jean-Baptiste André Godin décide de s'installer à Guise, dans l'Aisne. Ayant fait fortune dans la fabrication d'appareils de chauffage, les fameux poêles en fonte Godin, l'entrepreneur met à profit sa réussite économique en s'employant à améliorer les conditions de vie de ses ouvriers. En 1858, il conçoit la composition urbaine générale de ce qui sera le " Palais social ", dont les plans sont probablement dus à l’architecte fouriériste Victor Calland. Cette composition générale fixe le cadre des différentes campagnes de construction menées entre 1860 et 1880.

Statue de Jean-Baptiste André Godin dans le familistère

Disciple de Charles Fourier, Jean-Baptiste Godin est un hygiéniste convaincu, qui expose ses théories dans un ouvrage intitulé "Solutions Sociales", préfiguration de son familistère. Il loge dans ce dernier les familles d'ouvriers de son usine, dans des conditions d'hygiène et de confort inégalables pour l'époque (eau courante, toilettes...). Il leur offre aussi des équipements sociaux, comme une bibliothèque, un théâtre, une école ... Cette réalisation se concevait comme une application concrète des idées du socialisme utopique de Charles Fourier, esquissée dans sa théorie du phalanstère. Godin comprend également que ce socialisme est profitable à l'entreprise : les enfants étant pris en charge dès la petite enfance (une "nourricerie" était prévue pour les bambins jusqu'à deux ans, et le "pouponnat" accueillait les enfants de deux à quatre ans), les femmes pouvaient alors travailler pour l'entreprise...

Le site de Guise comprend donc deux volets indissociables : tout d’abord le lieu de production, l’usine Godin toujours en fonctionnement aujourd’hui et sur l’autre rive de l’Oise, et le " Palais social " où était organisée la vie des ouvriers et de leurs familles. Après un siècle de fonctionnement sous forme d’une coopérative de production, de consommation et d’habitation, le site de Guise revient en 1968 –ironie du sort– dans le giron capitaliste.

Reconstitution d'un appartement du familistère tel qu'il était au début du XXe siècle pour un salarié et sa famille

Intérieur familistère d'époque

L'architecture du familistère reflète la volonté de Godin, qui désirait une élévation morale et intellectuelle de ses ouvriers, ainsi qu'un progrès notable en matière de propreté. Ainsi, les cours intérieures des trois pavillons d'habitation favorisent le rapprochement entre les familles. Les coursives sont parcourues continuellement, les familles étant constamment exposées au regard de leurs congénères. Cela les obligeait à maintenir une bonne hygiène dans leur appartement. D'ailleurs, un système d'auto-police très fort visait à maintenir une certaine éthique au sein de la communauté. Les contrevenants aux règles de propreté sont ainsi dénoncés par leurs voisins et écopent d’une sanction publique, exposée sur un tableau aux yeux de tous, qui peut aller jusqu’à l’exclusion.A noter tout de même que ce genre d'action ne s'est jamais produite du vivant de jean-Baptiste André Godin, un tel acte allant à l'encontre de ses idées. Le Familistère avait également pour but la valorisation de l'ouvrier. Afficher le nom du contrevenant sur un tableau revenait à ôter toute dignité à ce même contrevenant.

Le Familistère de Guise a été classé en 1991 au titre des Monuments historiques, et il est toujours habité. La société Godin, pour sa part, existe toujours également (2005). Depuis 2000, la ville de Guise et le département de l'Aisne se sont associés pour former le syndicat mixte du Familistère, dédié à la gestion et à la valorisation du site. Le Familistère de Guise, laissé à l’abandon depuis 1968, fait aujourd’hui l’objet d’une réelle politique de réhabilitation : le programme Utopia. Celui-ci comporte plusieurs volets : la restauration des bâtiments, la mise en valeur (musée de France, animations) et s'inscrit dans une véritable politique d'aménagement du territoire.

Vue de l'aile gauche familistère	Familistère gauche et l'Oise	Familistère aile gauche	Vue de face de l'entée principale
Les batiments du théatre et de l'école du familistère

Notes et références de l'article