Prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs est disponible ici.
Médaille prix Nobel

Le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel (en suédois : Sveriges Riksbanks pris i ekonomisk vetenskap till Alfred Nobels minne), dit " prix Nobel " d'économie, récompense chaque année des contributions exceptionnelles en économie. Il a été fondé en 1968 et doté par la Banque de Suède, à l'occasion de son 300e anniversaire. Il a été décerné pour la première fois en 1969.

C'est le seul prix géré par la Fondation Nobel qui n'a pas été fondé par le testament d'Alfred Nobel ; il suit les mêmes règles que les prix Nobel. Comme eux, il est remis le 10 décembre par le roi de Suède ; comme les prix de physique et chimie, il est décerné par l'Académie royale des sciences de Suède. En 2006, la partie monétaire du prix est de 10 millions de couronnes suédoises, soit environ un million d'euro.

Origine

L'idée d'un nouveau " prix Nobel " vient de Per Åsbrink, gouverneur de la Banque de Suède (Sveriges Riksbank), la plus ancienne banque centrale du monde. Dans le cadre le la préparation du tricentenaire de la Banque, il crée une fondation pour la recherche, la Fondation du jubilé de la Banque de Suède (Riksbankens Jubileumsfond), et propose à son conseiller économique, Assar Lindbeck, ainsi qu'aux économistes Erik Lundberg et Gunnar Myrdal, de réfléchir à l'élaboration d'un prix[1].

La Banque contacte ensuite la Fondation Nobel, et l'Académie royale des sciences de Suède, qui était déjà responsable de l'attribution des prix de physique et chimie. Certains membres de l'Académie émettent des réserves quant à l'aspect suffisamment scientifique de l'économie, mais Lundberg et surtout Myrdal (qui sont également membres) finissent par convaincre l'Académie entière. En mai 1968, la banque centrale, la Fondation Nobel et l'Académie tombent d'accord sur les règles d'attribution du prix, et le bureau de la Banque centrale décide alors de le fonder officiellement.

Ces règles sont codifiées par le gouvernement suédois en janvier 1969.

Le premier comité est composé de :

  • Bertil Ohlin (président du comité, Stockholm School of Economics),
  • Erik Lundberg (Stockholm School of Economics),
  • Ingvar Svennilson (université de Stockholm),
  • Herman Wold (université d'Uppsala, université de Göteborg), et
  • Assar Lindbeck (Université de Stockholm).

Choix des lauréats

Chaque année, l'Académie royale des sciences de Suède invite des personnalités qualifiées à envoyer leurs nominations. Ces personnes comprennent :

  • les membres de l'Académie des sciences ;
  • les membres du comité de sélection du prix ;
  • les lauréats passés ;
  • les professeurs titulaires dans les sujets concernés, en Suède, ainsi qu'au Danemark, en Finlande, en Islande, et en Norvège ;
  • les professeurs titulaires de chaires correspondantes dans au moins six universités choisies chaque année par l'Académie ;
  • d'autres chercheurs invités par l'Académie[2].

Deux à trois cents nominations sont envoyées, qui correspondent à une centaine de candidats distincts[3]. Les candidatures sont ensuite évaluées par un comité de cinq à huit membres (dont deux non-économistes), qui soumet son choix au département de sciences sociales de l'Académie pour approbation. L'Académie entière adopte la liste finale début octobre.

Comme pour les autres prix Nobel, un maximum de trois personnes peuvent partager le prix, et elles doivent être vivantes au moment de l'annonce[4].

Un prix parfois contesté

Alors que l'attribution du prix Nobel de la paix donne souvent lieu à des controverses quant au choix des lauréats, le prix de la Banque de Suède est pour sa part essentiellement contesté pour sa pertinence même, en premier lieu parce que la correspondance d'Alfred Nobel ne fait jamais mention de son intention de récompenser cette discipline - ce que souligne notamment depuis 2001 Peter Nobel, son arrière-petit-neveu, ancien médiateur suédois à l'immigration et ancien président de la Croix-Rouge suédoise. Pour certains économistes, ces critiques ont aussi pour but de nier toute scientificité au discours économique[5].

Friedrich Hayek, représentant de la libérale École autrichienne d’économie et lauréat en 1974, a déclaré[6] par ailleurs que si on lui avait demandé son avis sur le prix, il aurait " fermement déconseillé " sa création. Gunnar Myrdal, son co-lauréat, a lui déclaré que le prix devait être aboli parce qu'il avait été remis à des " réactionnaires " comme Hayek[7].

Le choix des lauréats est lui aussi critiqué, pour avoir souvent favorisé des économistes "orthodoxes" (dont ceux de l'école de Chicago) ou américains. Le prix Nobel de physiologie ou médecine, où la domination américaine est encore plus marquée[8], ne subit curieusement pas ces critiques.

Si, dans les premières années de son existence, le prix a récompensé des théoriciens de premier plan, il a également été critiqué pour couvrir une discipline qui, une fois les grands économistes des années 1970 et 1980 recompensés, manquait peut-être de champ pour justifier la remise annuelle d'un prix supposé récompenser des avancées essentielles. Ainsi, selon un économiste anonyme du début des années 1980, " tous les grands sapins sont tombés, il ne reste que des arbustes.[9] "

L'académie royale des sciences a décidé en 1995 d'étendre le champ d'application du prix, d'une part en modifiant la composition du comité de sélection (deux non-économistes sur les cinq à huit membres), d'autre part en acceptant les candidatures relevant des sciences politiques, de la psychologie, ou de la sociologie, ayant un impact sur l'économie. Ainsi, parmi les lauréats récents, Daniel Kahneman, Robert J. Aumann et Thomas C. Schelling ne sont pas économistes.

Le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel reste toutefois un couronnement majeur pour la plupart des économistes, car la plus médiatisée des récompenses qui leur sont remises.

Statistiques

Répartition des prix en fonction de la nationalité des lauréats au moment de la récompense (2006)

  • États-Unis : 38 (65%)
  • Royaume-Uni : 7 (12%)
  • Norvège : 3 (5%)
  • Suède : 2 (4%)
  • Canada : 1 (2%)
  • Allemagne : 1 (2%)
  • Inde : 1 (2%)
  • France : 1 (2%)
  • URSS : 1 (2%)
  • Pays-Bas : 1 (2%)
  • Israël : 1 (2%)
  • Sainte-Lucie : 1 (2%)

Nombre de récompenses (2006)

  • Total des prix Nobel : 38
    • Récompense individuelle : 21
    • Récompense partagée à 2 : 14
    • Récompense partagée à 3 : 3
  • Total des économistes récompensés : 58

Université d'affiliation des chercheurs au moment de la récompense (2002)

  • Université de Chicago : 9
  • Université de Berkeley : 4
  • Université de Cambridge : 4
  • Université Harvard : 4
  • Université Columbia : 3
  • MIT : 3
  • Université de Stanford : 3
  • Université d'Oslo : 2
  • Université de Princeton : 2
  • Université Yale : 2
  • Université de Bonn : 1
  • Université Carnegie Mellon (Norvège) : 1
  • Université de New York : 1
  • École nationale supérieure des mines de Paris : 1
  • Université de Fribourg-en-Brisgau : 1
  • Université George Mason : 1
  • Institute for National Economic Management, Moscou : 1
  • Netherlands School of Economic : 1
  • Université d'Oxford : 1
  • Université de la Pennsylvanie : 1
  • Université de Stockholm : 1
  • Stockholm School of Economic : 1
  • Université Washington à Saint Louis : 1

Liste des lauréats

Années 1960 - Années 1970 - Années 1980 - Années 1990 - Années 2000

Années 1960

Année Nom Université Domaines et commentaires
1969 Ragnar Anton Kittil Frisch
 Norvège
Jan Tinbergen
 Pays-Bas
Université d'Oslo

Netherlands School of Economics
Macroéconométrie

Frisch a introduit des données globales au système
walrassien.
Tinbergen a travaillé sur les problèmes de planification.

Années 1970

Année Nom Université Domaines et commentaires
1970 Paul Samuelson
 États-Unis
MIT Équilibre général et partiel

Pour ses travaux sur la théorie keynésienne du cycle et la combinaison du multiplicateur et de l'accélérateur dans l'oscillateur.

1971 Simon Kuznets
 États-Unis
Harvard Croissance économique et histoire économique

Pour son élaboration de modèles économétriques et sa conceptualisation pour la comptabilité nationale.

1972 Sir John Hicks
 Royaume-Uni
Kenneth Arrow
 États-Unis
All Souls Oxford, Harvard Théorie de l'équilibre général

Pour leurs travaux sur l'économie du bien-être.

1973 Wassily Leontief
 États-Unis
Harvard Analyse input-output

Pour ses travaux concernant les tableaux de relations industrielles.

1974 Friedrich Von Hayek
 Royaume-Uni
Gunnar Myrdal
 Suède
Albert-Ludwigs (Fribourg-en-Brisgau)

New York
Macroéconomie et économie institutionnelle

Pour l'ensemble de leur œuvre. Friedrich Von Hayek a perpétué la seconde École de Vienne, en s'opposant à Keynes.
Gunnar Myrdal de l'École suédoise et proche du courant institutionnaliste américain a préfiguré Keynes.

1975 Leonid Kantorovich
URSS
Tjalling Koopmans
 États-Unis
Moscou


Yale
Théorie de l'allocation optimale des ressources

Pour leur contribution à la théorie de l'allocation maximale des ressources.

1976 Milton Friedman
 États-Unis
Chicago Macroéconomie

Pour l'ensemble de ses travaux sur la théorie monétaire. Il est le chef de file de l'École monétariste de Chicago.

1977 Bertil Ohlin
 Suède
James Meade
 Royaume-Uni
Stockholm

Cambridge
Économie internationale

Pour leurs travaux sur la théorie des relations internationales.

1978 Herbert Simon
 États-Unis
Carnegie-Mellon
Pour son travail sur le processus de décision au sein de l'organisation économique.
1979 Theodore Schultz
 États-Unis
Arthur Lewis
 Sainte-Lucie‎
Chicago

Princeton
Économie du développement

Pour leurs travaux sur le développement économique.

Années 1980

Année Nom Université Domaine
1980 Lawrence Klein
 États-Unis
Pennsylvania-Philadelphie Macroéconomie

Pour la construction de modèles économétriques de conjoncture et leur application à l'analyse de la politique économique. C'est un keynésien.

1981 James Tobin
 États-Unis
Yale Macroéconomie

Pour son analyse des marchés financiers.

1982 George Stigler
 États-Unis
Chicago Organisation industrielle

Pour ses théories sur l'économie du marché.

1983 Gérard Debreu
 États-Unis
Berkeley
Théorie de l'équilibre général et partiel

Pour ses recherches qui ont permis d'introduire de nouvelles méthodes dans la théorie économique. Il a notamment reformulé l'équilibre économique général de Walras.

1984 Richard Stone
 Royaume-Uni
Cambridge Comptabilité nationale

Pour ses travaux sur les différents systèmes de comptabilité nationale.

1985 Franco Modigliani
 États-Unis
MIT Macroéconomie

Pour ses travaux sur l'épargne domestique et les marchés financiers. Il a développé l'"hypothèse du cycle de vie" et a démontré l'indépendance du passif sur la valeur d'une entreprise.

1986 James Buchanan Jr
 États-Unis
Center for study of Public Choice (Faifax) Finances publiques
1987 Robert Solow
 États-Unis
MIT Théorie de la croissance économique (modèle de Solow)
1988 Maurice Allais
(petit drapeau)  France
École nationale supérieure des mines de Paris Théorie de l'équilibre général et partiel
1989 Trygve Haavelmo
 Norvège
Oslo Économétrie

Années 1990

Année Nom Université Domaine
1990 Harry Markowitz
 États-Unis
Merton Miller
 États-Unis
William Sharpe
 États-Unis
City university New York

Chicago

Stanford
Théorie économique financière et financement des entreprises
1991 Ronald Coase
 Royaume-Uni
Chicago Théorie des institutions
1992 Gary Becker
 États-Unis
Chicago Microéconomie et
sociologie économique
1993 Robert Fogel
 États-Unis
Douglass North
 États-Unis
Chicago

Washington (Saint Louis)
Histoire économique
1994 Reinhard Selten
 Allemagne
John Forbes Nash
 États-Unis
John Harsanyi
 États-Unis
Berkeley

Princeton

Bonn
Théorie des jeux
1995 Robert Lucas Jr
 États-Unis
Chicago Macroéconomie
1996 James Mirrlees
 Écosse
William Vickrey
 États-Unis
Cambridge, Columbia (New York) Économie de l'information
1997 Robert Merton
 États-Unis
Myron Scholes
 États-Unis
Harvard

Stanford
Modèle Black-Scholes de valorisation des options, fondateur des mathématiques financières modernes
1998 Amartya Sen
 Inde
Trinity College Cambridge Économie du bien-être
1999 Robert Mundell
(petit drapeau)  Canada
Columbia (New York) Macroéconomie

Années 2000

Année Nom Université Domaine
2000 James Heckman
 États-Unis
Daniel McFadden
 États-Unis
Chicago

Berkeley
Économétrie
2001 George Akerlof
 États-Unis
Michael Spence
 États-Unis
Joseph E. Stiglitz
 États-Unis
Berkeley

Stanford

Columbia (New York)
Travaux sur les marchés avec asymétrie d'information
2002 Daniel Kahneman
 États-Unis
Vernon L. Smith
 États-Unis
Princeton

George Mason (Virginie)
Travaux précurseurs en matière d'économie psychologique et expérimentale
2003 Robert F. Engle
 États-Unis
Clive W. J. Granger
 Royaume-Uni
Université de New York

Université de Californie à San Diego
Travaux ayant permis d'améliorer la fiabilité des prévisions économiques
2004 Finn E. Kydland
 Norvège
Edward C. Prescott
 États-Unis
Carnegie Mellon

Université d'Arizona
Macroéconomie
2005 Robert J. Aumann
 Israël
Thomas C. Schelling
 États-Unis
Université de Jérusalem

Université du Maryland
Théorie des jeux
2006 Edmund S. Phelps
 États-Unis
Columbia University Échanges intertemporels en politique macroéconomique
Page générée en 0.157 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise