Pôle de compétence - Définition

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La notion de pôle de compétence ou, le terme étant relativement nouveau donc non stabilisé, de pôle de développement, de compétitivité ou d'excellence, fait partie de l'économie des territoires.

Un pôle de compétence est une région, généralement urbanisée, où s'accumulent des savoir-faire dans un domaine technique, qui peuvent procurer un avantage compétitif au niveau planétaire une fois atteinte une masse critique. La prospérité ainsi apportée tend à se propager aux autres activités locales, notamment de service et de sous-traitance.

Les apports théoriques

On peut trouver les germes des principes sous-tendant les pôles de compétence dans la théorie des avantages comparatifs de l'économiste classique David Ricardo : chaque pays (ou chaque région) gagne à se spécialiser dans la production où il possède un avantage relatif, c'est-à-dire là où il est relativement le meilleur ou le moins mauvais.

Michael Porter s'est inspiré de la théorie des avantages comparatifs pour proposer en 1990 la notion de pôles de compétence (competitive clusters) qui rassemblent, sur une même zone géographique et dans une branche d'activité spécifique, une masse critique de ressources et de compétences procurant à cette zone une position-clé dans la compétition économique mondiale.

Rôle de la formation, types de pôles

Dans tous les cas, la formation et le savoir-faire, à un niveau d'excellence mondiale, jouent un rôle dans l'existence de ces pôles. De ce point de vue on peut les classer en deux catégories :

Pôles reposant sur la recherche scientifique de haut niveau (technopoles)

Le pivot d'une telle zone d'excellence est souvent une université dotée d'un centre de recherche scientifique de renom et très motivée par la coopération avec les entités économiques et financières locales. C'est le cas de :

  • la Silicon Valley qui regroupe ces trois compétences : des universités (Stanford, Berkeley, Santa Clara), des entreprises technologiques (l'une des premières fut Hewlett-Packard) et des fonds de capital risque.
  • l'agglomération de Bangalore en Inde, devenue également un pivot de recherche et développement technologique à l'échelle mondiale : de très nombreuses entreprises technologiques internationales y sont maintenant implantées.
  • en Europe, les régions de Cambridge, Grenoble, Toulouse, Munich, Dublin, des districts italiens, etc.

Un cas très spécifique est le pôle transfrontalier Biovalley, leader européen des sciences de la vie, qui est centré sur les trois régions du Rhin supérieur en France, en Allemagne et en Suisse.

On parle par ailleurs de pôles d'enseignement et de recherche concernant les regroupements d'universités et de centres de recherches en ensembles ayant la taille critique en matière de réunion de compétences. Cela vise notamment à atteindre une renommée internationale et un bon classement dans les comparaisons mondiales, pour attirer les meilleurs enseignants, chercheurs et étudiants.

Pôles reposant sur des savoir-faire traditionnels

Certains pôles de compétence n'ont pas de rapport direct avec la recherche scientifique mais ont maintenu leur avance en savoir-faire au cours des âges : par exemple la Suisse pour l'horlogerie ou Paris pour la haute couture et plus largement pour l'industrie du luxe en général.

Importance dans l'économie moderne

Le développement de tels pôles basés sur la compétence, et non plus comme par le passé sur les ressources naturelles, prend toute son importance dans l'économie post-industrielle dont les matières premières sont l'éducation, l'information, le savoir faire, la créativité, et dans laquelle la compétition est mondiale.

De ce fait, l'existence d'un pôle de compétence, en particulier scientifique, dans un domaine d'avenir devient un facteur clé de l'économie du développement, y compris pour les pays émergents qui ont compris l'importance de se développer non seulement à partir de bas coûts de main d'œuvre dans des industries traditionnelles, mais également par la compétitivité technologique.

Les pôles de compétitivité en France

Localisation des pôles de compétitivité
Localisation des pôles de compétitivité "mondiaux"

Historique

En France, l'idée de pôles de compétitivité s'est ancrée dans les années 1970 sur la notion de technopoles, à l'instar du Japon, et dans une certaine mesure des États-Unis. Elle a donné lieu soit a des créations ex nihilo (exemples de Sophia-Antipolis ou du plateau de Saclay), soit à des développements de zones déjà denses (Grenoble, dans l'informatique ; Toulouse, dans l'aérospatiale).

La politique des pôles de compétivité est décidée lors du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT) du 13 décembre 2002. Le CIACT du 14 septembre 2004 en définit la méthode de mise en oœuvre : des appels à projets, sur la base d'un cahier des charges. Entre temps, plusieurs rapports officiels ont précisé les enjeux[1].

Le gouvernement lance le premier appel à projets le 2 décembre 2004 [2]. Cet appel, clos le 28 février 2005, a donné lieu à une forte mobilisation des territoires et des entreprises.

La volonté première de se concentrer sur un nombre restreint de dossiers a été infléchie : le gouvernement a annoncé le 12 juillet de la même année que 67 des 105 dossiers présentés étaient retenus, liste réduite par la suite à 66 dossiers après la fusion de deux projets. Toutefois, une forte priorité budgétaire est apportée à six d'entre eux, qui ont une portée " mondiale " et neuf autres qui ont " vocation " à l'acquérir. Le budget global qui leur est consacré est passé de 0,75 à 1,5 milliard d'euros sur trois ans. Le CIACT du 14 octobre 2005 a validé 55 de ces projets. Celui du 20 décembre 2005 a confirmé neuf projets supplémentaires, deux autres projets n'ayant pas validés. En mars 2006, la gouverne globale du dispositif et le financement de la part publique à été confiée, côté État, à la direction générale des Entreprises du ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, chaque pôle étant par ailleurs doté d'outils de gouverne ad hoc.

Le 3e appel à candidatures pour le financement des projets des pôles a été clos le 15 décembre 2006. Il a donné lieu à 224 projets déposés à la direction générale des Entreprises. Ce résultat amplifie la dynamique instaurée lors des deux premiers appels à projets du fonds interministériel, dont la mise en place a été décidée lors du CIACT du 6 mars 2006. Les résultats ont été annoncés en mars 2007 : 100 nouveaux projets de recherche-développement, issus de 47 pôles de compétitivité, recevront un financement du fonds unique interministériel[3].

En 2006, 339 projets ont été expertisés, dont 143 ont été retenus. Ils correspondent à environ un milliard d'euros d'investissements en R&D au total, dont un financement de 190 M€ de la part de l’Etat, qui a permis de susciter des soutiens des collectivités territoriales à hauteur de 103M€. Le fonds interministériel est opérationnel fin 2006 et plus de 80 % des soutiens décidés ont été concrétisés avant fin 2006 par la signature de conventions d'aide avec les partenaires des projets.

Un 4e appel à projets a été lancé en mars 2007[4].

Statut juridique

Les pôles de compétitivité sont souvent, en pratique, des associations de la loi de 1901. Ils peuvent aussi prendre la forme de groupements d'intérêt économique (GIE) ou de groupements d'intérêt scientifique (GIS). Ils ont la personnalité juridique.

Fonctionnement des pôles de compétitivité français

Le CIADT du 12 juillet 2005 a prévu d'attribuer un montant de 1,5 milliard d'euros au financement de l'ensemble des pôles de compétitivité. Les avantages financiers conférés aux programmes associés aux pôles de compétitivité sont :

  • des exonérations fiscales et allègements de charges (300 millions d'euros). Une entreprise participant à un projet de recherche et développement dans une zone définie à cet effet ne paie pas l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés sur les bénéfices qu'elle réalise pendant les trois premières années (loi de finances pour 2005, art. 24). Les zones de " zonage R&D " concernées correspondent à peu près au périmètre des pôles de compétitivité.
  • des crédits d'intervention pour soutenir les projets de recherche et développement (400 millions d'euros, dont 121 inscrits au budget pour 2006). Ces crédits proviennent en particulier :
    • du ministère délégué en charge de l'industrie.
    • de la DIACT (Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, primes d'aménagement du territoire).
  • des interventions préférentielles de la part d'organismes divers (800 millions d'euros) :
    • Agence nationale de la recherche créée le 7 février 2005.
    • Agence de l'innovation industrielle proposée par Jean-Louis Beffa (décret du 26 août 2005).
    • Groupe OSEO  : Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR), Banque de développement des PME (BDPME).
    • Caisse des dépôts et consignations.

Questions posées

On remarquera que le système français de pôles de compétitivité, qui devrait certes être source de dynamisme et de meilleure coopération entre les acteurs, amène à se poser les questions suivantes :

  • La principale question est le modèle de l'innovation. Dans l'économie du savoir, la rentabilité des projets d'ingénierie des connaissances est basée sur l'évaluation du capital immatériel des entreprises et des administrations publiques. En France, les systèmes d'information reposent souvent encore sur d'anciens modèles, et sont en évolution très rapide, et la gestion des connaissances peut être encore mieux développée. Cela a un impact sur la mise en œuvre effective en France de la stratégie de Lisbonne sur l'innovation. Quels sont les schémas de classification employés, sont-ils au même niveau que leurs homologues dans d'autres pays développés ?
  • L'évaluation de ce capital immatériel dans le cas d'associations entre entreprises, centres d'études et de recherche, et universités, sous l'égide de conseils régionaux et de chambres de commerce et d'industrie est très complexe, notamment sur le plan du capital relationnel et du capital organisationnel, spécialement pour ce qui concerne les structures purement territoriales. La question de l'évaluation se pose, étant entendu qu'une procédure nouvelle ne peut être évaluée sans un recul certain (c'est le cas pour le PCRDT européen), au minimum de 5 ans, et plus souvent excédant la décennie. Les méthodes d'évaluation font l'objet de travaux d'approfondissement en 2007.
  • Les règles de sécurité des systèmes d'information dans le cas de partage d'informations de cette nature sont très complexes. Les efforts français de normalisation sont en retard par rapport à ceux d'autres pays, États-Unis notamment. Il est nécessaire de mettre en œuvre des normes globales permettant de réaliser l'interopérabilité entre les systèmes d'information de partenaires différents, sous un angle juridique, fonctionnel, et technique. C'est l'objet des registres de métadonnées, mais il n'existe pas encore de traduction officielle de la norme internationale Dublin Core.
  • Les pôles sont principalement centrés sur l'industrie, mais celle-ci doit être entendue au sens large, d'industrie et de services à caractère industriel, étant entendu que l'économie actuelle ("post-industrielle") se développe plutôt par externalisation par l'industrie de services, ainsi que par des services autonomes (les services représentent 70% du PIB en France). Dans le cas de la finance, la stratégie pour construire une place de marché européenne connaît de nombreux soubresauts. Les rivalités entre places européennes (City de Londres, Deutsche Börse, Euronext) risquent d'avantager des concurrents extraeuropéens. Cela a conduit à l'annonce d'un pôle industrie financière autour d'Euronext. Cependant, l'échec du projet d'accord entre Euronext et Deutsche Börse, au profit du NYSE (New York), (malgré les recommandations du rapport de M. Henri Lachmann, président du conseil de surveillance de Schneider Electric, qui affime que cette fusion n'est pas équitable[5]) conduira ce projet à prendre en compte en 2007 une dimension transatlantique qui n'était pas ab initio envisagée.
  • Il n'y a pas d'universités autonomes, à quelques statuts dérogatoires près (Université de Paris Dauphine par exemple) les liens entre universités et entreprises demeurent souvent difficiles.
  • Un débat existe sur le degré approprié de centralisation du pilotage. Certains l'estiment trop concentré, dans la tradition de l'aménagement du territoire décrété de Paris dans un domaine qui devrait au contraire éviter au maximum la bureaucratie et concerner l'échelon local, l'Europe et le maillage international. D'autres font valoir que le dispositif des pôles de compétitivité a été catalytique là où un fonctionnement purement décentralisé des régions, qui avaient a priori le droit de prendre des initiatives, ne suffisait pas à créer l'impulsion nécessaire, et que d'autre part les projets ne prennent d'ampleur européenne que pour autant qu'ils aient été développés avec une intensité et un suivi suffisant au niveau national
  • Il y a un certain émiettage des projets. Toutefois, les moyens demeurent focalisés sur les principaux pôles.

Par ailleurs, si une bonne part des projets ont des chances de succès, on peut craindre que certains d'entre eux n'aient bénéficié d'un coup de pouce d'élus locaux bien introduits dans les cercles ministériels et qu'ils ne concrétisent pas tous les espoirs placés en eux. Certains sont en concurrence (pôles maritimes en Bretagne et PACA), d'autres auront du mal à se créer une notoriété internationale (des pays comme le Brésil ont une expérience autre que celle de la région Champagne-Ardenne en matière de biocarburants)...

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